Lors de notre séjour au Niki Club à Nasu-Shiobara, une petite exposition se tenait dans le hall du ryokan historique de 1986. En plus de profiter de la beauté de l’intérieur du bâtiment de Akira Watanabe, de la longue table et du design des meubles, de la découpe des pierres d’Otani, on pouvait profiter de quelques photos de Naoki Ishikawa disposées sur les murs. Je ne connaissais Naoki Ishikawa que pour ses photos du Mont Fuji sur lesquelles je n’avais pas eu une forte accroche. Les photos montrées ici, une série intitulée Archipelago, m’ont beaucoup plus intéressé. Bien que cette petite exposition m’ait plus, je n’ai pas acheté tout de suite le recueil de photos. D’une manière générale, je laisse toujours passer un peu de temps, pour laisser murir l’envie de revoir les photos vus en exposition. Je regrette cependant toujours un peu de ne pas m’être procurer le bouquin à l’exposition
C’est en revenant à Tokyo, que je me suis finalement procurer le livre Archipelago. C’est un assez gros livre de 240 pages avec presque autant de photographies, toutes couleurs. Comme le nom de l’ouvrage l’indique, on y parle d’archipels: des paysages, des gens, des scènes de folklore, des personnes qui posent, certainement des connaissances du photographe ou des scènes de rues, de chasse ou de pêche, des scènes proches du vécu. On sent une honnêteté dans le regard de Naoki Ishikawa, regard qui apprécie ce qu’il voit, les scènes de festivités notamment.
Ishikawa sous-titre son livre « Voir le monde comme une chaine d’îles ». A travers le sequencement des photographies, il entend dresser une nouvelle carte axée sur les îles. Dans son voyage au Sud et au Nord du Japon, il ignore les frontières: la partie Sud (Okinawa jusqu’à Taiwan, …) et la partie Nord (Hokkaido, Sakhaline…) forment des touts au délà des nations, liés par des cultures voisines et par, en quelque sorte, une identité insulaire. Il y a par exemple une forte influence chinoise dans la culture d’Okinawa, qui rapproche les îles de cet archipel de la voisine Taiwan. Autre exemple au Nord, les signalisations au nord d’Hokkaido, à Wakkanai par exemple, sont doublées en russe.
On voit beaucoup de curiosités dans les photos de Archipelago: comme les festivités sur les petites îles de Okinawa, ou encore les totems au delà de Hokkaido, sur les îles de la Reine-Charlotte, territoire canadien dont je n’avais jamais entendu parler. L’origine du peuple Haida habitant ces îles remonte à l’ethnie japonaise des Aïnous. Des cultures et pratiques ancestrales sont entretenus sur ces îles, loin de tout et des capitales des « continents ». Archipelago nous montre tout cela: des paysages luxuriants parfois, des traces de la guerre, des zones de tensions comme sur le groupe d’îles de Kinmen entre Taiwan et le continent chinois.
Les photos sont très belles, parfois axées reportage quand il nous montre une activité ou un rite en plusieurs photos. Certaines photos se rapportent également à la vie personnelle de Naoki Ishikawa, des rencontres expliquées dans un texte en japonais et anglais à la fin du livre. J’ai tellement apprécié ce receuil que je vois maintenant ses autres livres photograhiques sous un autre oeil. Je pense surtout revoir d’un peu plus près Polar, Vernacular, The Void …
Ces totems sculptés sur des troncs d’arbres pourrissants sont extraordinaires. Dommage que la culture Ainou s’ait pu se développer de manière plus « libre ». Hokkaido aurait été une île bien plus particulière au niveau artistique et culturel…
Oui, c’est vraiment intéressant. Je soupçonne quand même un sacré mélange, d’autres photos montrent des totems ou plaques de bois très colorés qu’on rattacherait bien aux indiens d’Amérique.