l’apogée du cerisier en fleur (2)

Nous n’allons en général jamais à Shinjuku Gyoen pendant la période des cerisiers en fleur, mais on a fait une exception cette année, histoire de se rappeler à quoi ressemble le parc pendant la période de Hanami. Essayer de rentrer dans le parc payant par l’entrée de Shinjuku (Shinjuku Gate) est une très mauvaise idée car il y a des centaines de personnes à attendre leur tour patiemment. On a failli abandonner mais je me suis souvenu d’une entrée temporaire un peu plus loin, à laquelle une petite vingtaine de personnes seulement attendaient pour entrer. Cela ressemble même à un passage secret vu la très faible proportion de personnes qui semblent connaître cette petite entrée temporaire. A l’intérieur du parc, il a également foule, assise sur des bâches bleues entre amis ou en famille ou à essayer de prendre en photo les cerisiers en évitant la foule tout autour. En ce qui me concerne, je me suis plutôt attaché à prendre en photo les gens qui prennent en photo les cerisiers.

l’apogée du cerisier en fleur (1)

Cette année est tout particulièrement bonne pour les cerisiers en fleur, je dirais même exceptionnelle car je n’ai pas le souvenir d’une météo aussi faste pendant la période des cerisiers. En général, une vague de froid et de pluie vient soudainement balayer les fleurs et grandement écourter la période déjà bien éphémère pendant laquelle on peut les apprécier. Les photographies de ce billet datent de samedi dernier au moment de la pleine floraison. Le long de la rue Nisseki, des rangées de cerisiers bordent l’hôpital et ensuite l’école pour filles Jogakkan. Un peu plus loin dans Hiroo, mon oeil bifurque des cerisiers vers l’architecture, celle d’une étrange maison individuelle avec imitation d’un pont aux faux airs californiens. Et sur la photographie ci-dessus, le restaurant japonais Waketokuyama fait de briques par Kengo Kuma se mélange avec un cerisier en hauteur qui surplombe l’édifice d’une très belle manière.

Nous sommes ici en plusieurs photographies devant le rivière Meguro aux alentours de Naka-Meguro. C’est un passage obligé en cette période et j’y prends en photo les cerisiers tous les ans. Mais de toute manière, j’y vais très souvent, même plusieurs fois par semaine. C’est un endroit que j’apprécie, et bien entendu, je ne suis pas le seul. La foule venue nombreuse est au rendez-vous. Il y a même beaucoup trop de monde car il est difficile de se déplacer dans les rues longeant la rivière en cette période des cerisiers. Les lieux sont beaucoup plus calme heureusement, en temps normal.

La rue Meiji, au niveau de Shibuyabashi à proximité de Ebisu, est vraiment magnifique cette année. J’ai même l’impression que les cerisiers ont plus de volume que l’année dernière, mais ce n’est peut être qu’une impression. Continuons encore un peu dans un prochain billet, avec d’autres photographies, celles du dimanche.

les prémices du cerisier en fleur

Les photographies de ce billet se passent dans trois endroits différents, les quatre premières dans le parc Inokashira près de Kichijoji, les trois suivantes au bord de la rivière Meguro à Naka-Meguro et la dernière à Shinjuku devant la sortie Sud près du Department Store Lumine. Elles datent d’il y a plus d’une semaine et les cerisiers commençaient tout juste a fleurir. La floraison n’avait en fait pas vraiment commencé à Inokashira et c’était bien dommage car nous aurions été extrêmement bien placé à l’étage du restaurent japonais appelé Sublime, avec vue sur l’étang et les cerisiers. On retiendra au moins une bonne adresse. A Naka-Meguro, il n’y avait pas encore la foule qui se pressera à petits pas la semaine d’après pour la pleine floraison mankai le long des deux rives. Au hasard des rues, je découvre ce lutteur sumo dessiné en bas d’un immeuble et une représentation par l’artiste de rue Invader du Mont Fuji rouge de Katsushika Hokusai, appelé en japonais Gaifū kaisei 凱風快晴, une des 36 vues du Mont Fuji. Je connais pourtant bien le quartier, mais je n’avais jamais remarqué cette mosaïque à cet endroit. Quelques photographies de la pleine floraison des cerisiers vont suivre dans les prochains billets.

yeah whatever

Cela devient une habitude de tous les week-ends ces derniers temps de faire un jogging d’environ 1h30 dans les rues de Tokyo en changeant à chaque fois de trajet. Cette fois-ci, je passe à travers Shirogane jusqu’à Shibuya, en découvrant encore et toujours de nouveaux objets d’architecture comme cette maison blanche sur la première photo avec un mur légèrement cabossé. Un vieil immeuble à Shibuya sur une des photos ci-dessus a été investi par les graffiti de UFO907. J’ai déjà aperçu maintes fois cet alien dessiné sur les murs de vieux immeubles à Tokyo, mais je découvre que maintenant le pseudonyme de son auteur aka Unlimited Freek out.

« So you run the streets with your camera and take pictures of buildings. Yeah, Whatever… »

un brin de rose sur le béton

Je ne pensais pas repasser à Azabu-Jūban aussi rapidement depuis mon passage en courant la semaine précédente, mais Zoa passant une audition dans le coin nous ramène dans ces rues. Cela me donne l’occasion de reprendre certains bâtiments et rues avec l’appareil photo reflex plutôt que l’iPhone. Nous y allons en marchant en traversant Hiroo, notamment en passant devant l’ambassade d’Allemagne. Le mur extérieur de béton de l’ambassade est partiellement recouvert d’une fresque commémorative du mur de Berlin. Ce mur construit pendant la guerre froide entre les deux Allemagnes était debout pendant 10316 jours soit 28 ans et cela fait justement 28 ans cette année qu’il est tombé. Un artiste allemand Justus Becker et un artiste japonais Imaone ont travaillé ensemble sur cette longue fresque. En parlant d’Imaone, je prends souvent en photo une de ses fresques tout à la verticale cachée derrière un building à Kichijoji. J’aime beaucoup la dynamique du trait et les couleurs employées sur ses fresques. En remontant un peu plus la rue en longeant le parc Arisugawa en direction de Sendaizaka, on passe également devant l’immense et très particulière propriété du groupe de chaines d’hôtels APA. On dit que c’est la résidence de sa présidente. Je me demande quel peut bien être l’architecte de cette résidence si particulière.

Au croisement de Shin-ichinohashi tout près de la station de Azabu-Jūban, l’étrange building de 14 étages Joule-A par l’architecte Edward Suzuki se dresse tout en courbe. D’extérieur, il se présente comme une structure squelettique recouverte d’une toile métallique partielle, qui ressemble à des nuages. A chaque fois que je passe devant cet étrange immeuble, une scène du film Tokyo Eyes de Jean-Pierre Limosin me revient en tête, celle où K (Shinji Takeda) et Hinano (Hinano Yoshikawa) décident de tenter leur chance pour entrer dans une boîte de nuit sélect de Azabu. A l’intérieur, on y passe un morceau électronique de Takkyu Ishino, une version re-mixée de I Thought 3, But Were 4 In Fact, sur l’album Dove Loves Dub dont je parlais dans le billet précédent. J’ai re-regardé ce film il y a quelques jours car je me souvenais qu’il se déroulait en grande partie près de Shimo-Kitazawa, et je voulais voir si je reconnaissais quelques lieux. Le film étant sorti en 1998 en France, je pense que je l’ai vu pour la première fois au cinéma en France avant de partir pour le Japon. Je le regarde assez régulièrement car j’aime son ambiance, celle des rues de Kitazawa que K parcourt en naviguant comme une brise avec sa mini caméra video.

Au détour d’une rue, je retrouve l’immeuble LAPIS des architectes Iida Archiship Studio, mais sous un autre angle, alors qu’un brin de rose traverse devant le béton brut. Un peu plus loin dans la rue, un autre building un peu plus récent est recouvert d’un mur végétal. On voit de plus en plus ce type de mur recouvert de végétation dans Tokyo, concept inventé par Patrick Blanc. Le cas de l’immeuble ci-dessus semble tout de même être une version très simplifiée du mur végétal.

En fin de journée, nous bifurquons vers Roppongi Hills, pour aller voir l’exposition de l’argentin Leandro Erlich au Mori Art Museum. On s’est dit qu’il devait y avoir un côté ludique à cette exposition qui plairait à Zoa, et c’était bien le cas. Nous avions manqué à Kanazawa la fameuse installation de la piscine car elle était en rénovation pendant notre passage l’année dernière, donc on se rattrape avec cette exposition. La piscine n’était pas montrée, mais il y avait un grand nombre d’installations jouant de manière similaire sur notre perception. Les jeux de miroirs viennent perturber notre réalité et nos repères. D’un point de vue conceptuel et même ludique, cette expression est très intéressante. Le problème est qu’il y avait foule le dimanche après midi, et attendre une demi-heure pour voir une installation à l’intérieur même de l’exposition, c’était vraiment trop. Une des créations majeures de cette exposition était celle du building, où avec un jeu de miroir, on se donne l’impression de se retenir pour ne pas tomber de la façade du building. Malheureusement, avec la foule agglutinée et remuante comme sur un terrain de jeu, l’effet était vraiment estompé. Il aurait fallu prendre un jour de congé et venir en semaine pour apprécier l’exposition au calme. Les installations montrées sont également la plupart du temps intéressantes du point de vue de la technique utilisée pour modifier la perception du réel, mais au final, ce que l’on voit dans l’oeuvre, c’est une réalité que l’on connait bien. De ce fait, ça m’a laissé un peu froid. Par exemple, on doit attendre une dizaine de minutes en file d’attente pour regarder une installation se présentant comme une porte, faisant l’épaisseur d’une porte normale, posée au milieu de la pièce. Lorsqu’on regarde à travers l’œillère de la porte, on aperçoit un couloir vide. On imagine un ingénieux jeu de caméra avec video installée à l’intérieur de la porte, pour nous donner l’impression que l’on voit ce couloir. La technique est impressionnante, mais au final, ce que l’on voit c’est un couloir vide, tout ce qui a de plus quelconque et banal. D’autres objets sont à mon avis plus poétiques, comme la représentation d’un pays par des superpositions de plaques de verre donnant une impression de nuages et de contours flous. L’effet fonctionne très bien pour des pays à la forme très distinctive comme le Japon et la France. En fait, je préfère les installations qui n’ont pas besoin de la présence du visiteur pour fonctionner comme oeuvre d’art.