渋谷ウォーク❶

Je pense que le traitement photographique des vues de Shibuya ci-dessus retransmet assez bien l’atmosphère chargée d’humidité que nous connaissons actuellement pendant la saison des pluies. Je profite d’une accalmie pour prendre quelques photographies de ce quartier, faute de pouvoir me déplacer dans d’autres lieux. Le besoin impulsif de prendre des photos est toujours très présent même si je passe dans des lieux que j’ai très souvent parcouru. C’est le cas du centre de Shibuya que je prends régulièrement en photo. Peut-être est-ce un besoin de garder des traces visuelles d’un quartier en plein changement autour de la gare? Peut-être qu’il s’agit plutôt d’une envie de prendre la foule en photo, chose que je ne fais qu’assez rarement? Peut-être qu’il s’agit d’un attrait pour le graphisme éphémère des rues qui donne à ce quartier une éternelle jeunesse? Ou peut-être suis-je tout simplement à la recherche de ma propre jeunesse passée dans ses rues? Il y a certainement un peu de tout cela mélangé dans ma tête lorsque je traverse le grand carrefour qui reste lui immuable. Les flashs mémoriels me traversent aussi vite que les derniers passants qui tentent leur chance avant le passage des feux au rouge. En remontant vers le grand magasin Seibu, je constate que les fleurs pop de Shun Sudo ont envahit les façades. Une amie de Mari et son mari exposaient également dans ce grand magasin mais dans la petite galerie d’art du dernier étage de la tour B. La galerie était malheureusement fermée d’un large filet de sécurité pour une raison qui doit être liée à la crise sanitaire. Je passe souvent dans cette galerie et je suis pourtant en général le seul à l’intérieur lorsque je la visite. J’apprendrais un peu plus tard qu’on pouvait tout de même y entrer.

Ado est une jeune artiste électronique de 18 ans, issue de la mouvance Vocaloid, qu’on ne présente plus en raison du succès énorme qu’elle a connue avec le morceau Usseewa (うっせぇわ) il y a plusieurs mois. Sa particularité est d’être restée ‘invisible’ malgré ce succès énorme. Elle n’a pas encore montré son visage et ne le fera peut-être même jamais. Elle préfère se faire représenter par un personnage dessiné (sur l’illustration sombre à droite, notez le mégaphone). On ne peut pas dire que j’ai vraiment accroché à son premier morceau que j’écoutais plutôt comme une curiosité et parce que le grand à la maison l’écoutait un peu avant son succès explosif auprès du grand public. J’aime par contre beaucoup son autre morceau plus récent intitulé Odo (踊) en collaboration avec les artistes électroniques TeddyLoid et Giga pour les arrangements musicaux. Enfin, j’aime beaucoup le côté chaotique du morceau, partant dans de multiples directions sans qu’on ait le temps de s’ennuyer. Ce morceau est un moment de bravoure musicale et il faut bien avouer que la voix d’Ado est toujours aussi incisive, à l’image du personnage cyberpunk de la couverture du single. Que ça soit par sa voix ou par les éléments musicaux, on a l’impression d’écouter un patchwork hétéroclite qui semble être d’un équilibre bancal aux premiers abords, mais qu’il s’avère en fait habilement construit. Cela donne à la fois un morceau accrocheur et musicalement intéressant voire même intriguant.

Capsule nous fait le plaisir de sortir un nouveau morceau intitulé Hikari no Disco (ひかりのディスコ). Le duo composé de Yasutaka Nakata (中田 ヤスタカ) et Toshiko Koshijima (こしじま としこ surnommée こしこ) n’avait pas sorti de nouveau morceau depuis six ans. Je suis très loin de suivre avec attention la carrière de Capsule, mais j’y ai jeté une oreille cette fois-ci car ce morceau est le thème musical principal du film animé Sidonia no Kishi: Ai Tsumugu Hoshi (シドニアの騎士:あいつむぐほし), basé sur le manga de Tsutomu Nihei. J’avais beaucoup aimé la série animée de Knights of Sidonia, dans un esprit proche de Neon Genesis Evangelion, et je suis bien tenté d’aller voir ce film. La vidéo et le son de Hikari no Disco prend une atmosphère rétro et la musique électro du morceau est beaucoup moins agressive que certains morceaux électro house que je connaissais de Capsule comme Jumper (que j’avais beaucoup aimé à l’époque, ceci étant dit). En fait, j’aime beaucoup la voix de Koshiko qui s’accorde bien avec cette musique électronique très répétitive, comme si elle venait l’apaiser. C’est peut être dû au fait que j’ai toujours vu sa personne comme un personnage irréel avec une image volontairement futuriste, voire même robotisée. Il en va de même pour Nakata, comme on peut le voir sur la photographie de droite. On pourrait les prendre pour Daft Punk sur leurs lunettes noires étaient intégrales. Si Capsule continue sur cette piste rétro-électro qui ne sur-joue pas les sons et laisse beaucoup de place à Koshiko, je suis prêt à les suivre encore un peu. Ça me plait en tout cas beaucoup plus que Perfume que j’ai toujours un peu de mal à supporter.

les hortensias du sanctuaire Hakusan

Je parlais dans un de mes billets récents en noir et blanc des photographies d’hortensias provenant du sanctuaire Hakusan (白山神社). C’est la première fois que nous venions dans ce sanctuaire, près de la station de métro du même nom sur la ligne Mita dans l’arrondissement de Bunkyo. La raison de notre passage dans ce sanctuaire était d’y récolter le sceau goshuin, activité que nous faisons malheureusement beaucoup moins ces derniers temps. Les occupations du week-end et la météo actuelle font que nous avons moins le temps et l’occasion de nous promener. Je ne suis pas parti marcher pendant plusieurs heures depuis quelques semaines. Les photographies prises au sanctuaire Hakusan datent déjà de plus d’un mois. Ce n’était pas encore la pleine floraison des hortensias mais les fleurs étaient déjà nombreuses et les photographes à l’affut. Certains restent longtemps au même emplacement devant quelques fleurs pour essayer de trouver le meilleur angle et le timing le plus adapté. J’aurais personnellement beaucoup de mal à rester concentré sur quelques fleurs pendant plus d’une dizaine de minutes comme l’homme de l’avant dernière photographie. Le sanctuaire Hakusan est situé sur une colline. L’endroit est très agréable bien que le sanctuaire soit compact et entouré par des habitations. La végétation abondante et fleurie contribue beaucoup à donner une atmosphère plaisante à cet endroit. Lorsque je visite ce genre d’endroits, je me dis toujours qu’une des plus grandes qualités de Tokyo est d’être une ville faite de collines et de rues en pente.

白黒になる東京 (4)

Depuis la gare de Shinjuku, je marche maintenant vers Kabukichō en direction de la station de Seibu Shinjuku. Cette zone de Shinjuku a pris ce nom de Kabukichō car elle était initialement destinée à accueillir un théâtre kabuki après la seconde guerre mondiale. Ce théâtre, qui était censé s’appeler Kiku-za, n’a jamais vu le jour en raison de problèmes de financement, mais le nom de Kabukichō est resté. Des centres de divertissement se sont tout de même développés un peu plus tard, notamment un cinéma appelé Tokyu Milano-za construit en 1956 ainsi que d’autres établissements: un centre culturel, un théâtre et une patinoire. Le cinéma Tokyu Milano-za a fermé ses portes le 31 Décembre 2014. Le bâtiment a été rasé et va laisser place à une tour de 225 mètres actuellement en cours de construction. Je ne suis pas venu à Kabukichō pour voir ce nouveau building en construction qui va continuer à transformer l’image du quartier, mais plutôt pour aller voir la palissade de métal blanc qui l’entoure. Dans le cadre d’un projet intitulé Shinjuku Art Wall (新宿アートウォール・プロジェクト), une sélection de photographies de Daido Moriyama y sont affichées en grand format sur les murs Sud et Ouest. Certaines photographies sont assez connues comme celle avec des bas résille formant des motifs courbes, celle montrant des lèvres féminines prises en gros plan ou encore la photographie de câblages électriques compliqués accrochés sur un poteau. Je ne connaissais pas la plupart des autres photographies, notamment celles montrant des personnages de la série Evangelion comme Ayanami Rei. C’est une bonne idée d’utiliser ces surfaces autour des constructions pour montrer des photographies, illustrations ou autres œuvres d’art. J’ai l’impression que cette méthode d’exposition devient plus fréquente ces derniers temps. Je me souviens des palissades blanches autour du PARCO de Shibuya sur lesquelles Katsuhiro Ōtomo et Kosuke Kawamura s’étaient associés pour montrer des illustrations du manga Akira. Ce n’est pas le seul exemple d’art de rue éphémère que j’ai pu voir à Shibuya.

J’écoute souvent l’album éponyme de Millenium Parade mais je me rends compte que je n’en avais jamais parlé dans un billet à part entière, car je l’avais en fait évoqué dans des commentaires d’un ancien billet lorsque je commençais à écouter l’album en Mars 2021 un mois après sa sortie. Je l’écoute de plus en plus maintenant car c’est un album qui se révèle petit à petit. Millenium Parade (abrévié en Mirepa ミレパ) est un projet musical mené par Daiki Tsuneta, fondateur de King Gnu avec Satoru Iguchi. Alors que King Gnu a une approche rock plutôt mélodique, Millenium Parade prend une approche plus éclectique mélangeant les styles entre rock, passages plus symphoniques, des moments électroniques ou jazz et d’autres de hip-hop. J’aime beaucoup King Gnu et c’est le groupe qui réconcilie tout le monde à la maison. Je m’étais procuré sur iTunes leurs deux derniers albums, à savoir celui intitulé Sympa sorti en Janvier 2019 et leur dernier intitulé Ceremony sorti en Janvier 2020. Ceremony comprend le single Hakujitsu (白日) qui a grandement contribué à la notoriété du groupe, notamment pour la voix rare de Satoru Iguchi. Iguchi et Tsuneta sont proches car ils viennent tous les deux de la même université des Beaux Arts de Tokyo, Département Musique. Iguchi ne fait cependant pas partie de Millenium Parade mais est tout de même invité sur deux morceaux à la fin de l’album dont le morceau Familia qui le conclut. Ce morceau reste très proche de l’esprit musical de King Gnu. Daiki Tsuneta est également membre fondateur de Perimetron qui est un collectif composé de vidéastes, d’illustrateurs graphistes et de musiciens. Perimetron ressemble à une troupe d’artistes très proches partageant une même vision créative. Ce groupe réalise les vidéos de King Gnu et de Millenium Parade. Dans son ensemble, King Gnu est à mon avis plus axé mainstream que Millenium Parade qui se présente plutôt comme un concept musical. Daiki Tsuneta y compose les musiques et invite différents artistes pour les interprétations vocales et instrumentales, comme les voix féminines de l’interprète Ermhoi sur quelques morceaux comme 2992 ou Lost and Found ou encore Friday Night Plans sur le morceau Trepanation. Leurs interprétations vocales sont superbes d’ailleurs. Tsuneta chante également sur plusieurs morceaux. Les paroles sont presque toutes en anglais bien que les membres du groupe et les invités soient tous des artistes japonais, mais parfois d’origines diverses. Millenium Parade est très intéressant musicalement dans un esprit rock se mélangeant avec une approche symphonique, parfois jazz, mais gardant quelque chose d’assez chaotique. C’est d’ailleurs une image que Tsuneta recherche, car il évoque lui-même le Tokyo Chaotic Sound comme tendance principale de leur art. Il y a d’ailleurs un morceau intitulé Tokyo Choatic!!! qui se trouve être une interlude musicale. Il y a beaucoup de courtes transitions musicales dans cet album, contribuant à son approche conceptuelle. Ces transitions façonnent d’ailleurs l’ambiance générale qui se dégage de l’album. Plusieurs d’entre elles évoquent le folklore japonais, comme le tout premier morceau intitulé Hyakki Yagyō (百鬼夜行) qui fait référence à la parade nocturne des 100 démons yōkai arpentant tous les ans les rues durant les nuits d’été et provoquant la mort à ceux qui ont le malheur de croiser leur procession. Hyakki Yagyō était également le thème de la tournée de Sheena Ringo en 2015 (椎名林檎と彼奴等がゆく 百鬼夜行2015), dont j’ai le Blu-ray sans l’avoir vu car je fais durer le plaisir. Ce trait d’union m’interpelle forcément un peu. Une autre interlude de Millenium Parade s’appelle Matsuri no ato et vient reprendre des fragments du morceau suivant 2992, constituant ainsi une sorte d’introduction. Ce genre de liaisons est très intéressante. Millenium Parade s’est surtout fait connaître par le morceau Fly with Me, qui est le thème d’ouverture de la série Ghost in The Shell: SAC_2045. La vidéo animée de style futuriste par Perimetron est superbe, sans forcément reprendre le style GITS. En fait le désordre urbain me rappelle plus le manga et l’anime Tekkonkinkreet. Il se trouve que Daiki Tsuneta est fan de GITS et s’en inspire apparemment dans son approche artistique. J’adore également GITS et les autres manga cultes de Masamune Shirow (Appleseed ou Orion par exemple). La vidéo de Veil par exemple, semble être complètement influencée par l’univers de GITS avec ces tubes reliant des corps cybernétiques. Veil est un des singles du groupe mais n’est bizarrement par présent sur l’album Millenium Parade. J’aime beaucoup l’approche artistique « complète » de cet album où le même collectif autour de Daiki Tsuneta compose les musiques des morceaux, les interprète, tourne les vidéos et illustre les pochettes de leurs albums. Ça donne une certaine consistance de style et quelque chose de très puissant qui m’intéresse beaucoup.

Vous allez peut-être vous inquiétez du fait que je n’ai pas encore évoqué Tokyo Jihen sur ce billet alors que c’était le cas sur presque tous les billets précédents (enfin j’évoque bien Sheena Ringo un peu plus haut). Dans un souci de continuer à tester l’endurance des lecteurs de Made in Tokyo, dont le nombre est en conséquence en baisse en ce moment, je vais quand même évoquer une nouvelle fois Tokyo Jihen ici. En fait, il m’est revenu en tête d’écrire au sujet de Millenium Parade et de Daiki Tsuneta car il était invité avec le batteur de King Gnu, Yū Seki, à l’émission KanJam Kanzen Nen-SHOW (関ジャム 完全燃SHOW) en deux parties les Dimanche soir 13 et 20 Juin 2021 sur TV Asahi. L’émission est présentée par le groupe d’idoles masculines KanJani8 (関ジャニ∞), originaire du Kansai comme leur nom le suggère. Vu qu’ils sont incapables de chanter correctement, je me suis toujours demandé pour quelle raison ils s’étaient retrouvés à animer une émission musicale qui peut être par moment assez pointue. On voit d’ailleurs régulièrement qu’ils sont un peu dépassés par les discussions qui ont lieu pendant l’émission, et c’est d’ailleurs également assez régulièrement mon cas pour être très honnête. Il s’avère tout de même qu’il s’agit d’une des émissions musicales les plus intéressantes de la télévision japonaise, avec celles de la NHK dans un style certes plus formel. Les émissions de KanJam du 13 et 20 Juin ont en fait été hijackées par Tokyo Jihen remplaçant KanJani8 dans le rôle d’animateurs et les reléguant au rôle de spectateurs. L’émission avait même changé de nom pour devenir HenJam Shinra Ban-Show (変ジャム 森羅万SHOW). La mise en scène était amusante car les membres de Tokyo Jihen prétendaient être d’autres personnes liées aux membres du groupe, des frères ou des cousins. Sheena Ringo, qui présentait l’émission avec Ichiyō Izawa, prétendait être Shiina Tekuno (椎名てく乃), cousine de Sheena Ringo qui se trouve être présentatrice de profession. Izawa Ichiyō se présentait en tant que Izawa Amaō (伊澤甘王), cousin au deuxième degré de Ichiyō et journaliste. Je pense qu’on lui a donné le nom de Amaō car on sait qu’il aime les choses sucrées depuis l’épisode de Hanakin Night qui lui était consacré. Kameda Seiji devenait Kameda Seizo, petit frère de Seiji et responsable dans une entreprise. Ukigumo se présentait sous le nom de Yamigumo (闇雲), son frère jumeau et ingénieur de profession. Finalement, Hata Toshiki devenait Hatahata Toshiki (鰰(はたはた)都市紀), chercheur en poisson d’eau de mer et parent de Hata Toshiki. Cette mise en scène très compliquée provoqua bien entendu la surprise des autres personnes sur le plateau. Ce qui était amusant, c’est que Sheena prenait un malin plaisir à ne pas répondre lorsque l’on lui demandait le sens de cette plaisanterie. On ressentait assez clairement que toute cette mise en scène avait été imaginée par Sheena Ringo, certainement pour alléger le stress de ce genre d’émissions, mais on voyait que les autres membres du groupe avaient du mal à se tenir à leurs rôles imposés. Je pense que le chaos qui est en résultait était volontaire et donnait quelque chose d’assez particulier à suivre. Dans cette mise en scène, les membres de Tokyo Jihen devaient parler d’eux-mêmes à la troisième personne, n’étant que les cousins ou petits frères des véritables membres du groupe. On pouvait remarquer que Kameda avait tout de suite du mal à se tenir à cette mise en scène et Sheena le reprenait sous les sourires de tous. C’est une drôle d’idée complètement décalée.

L’autre surprise de l’émission était donc de voir Daiki Tsuneta invité avec le batteur de King Gnu, Yū Seki, à cette émission. Je me souviens que lors d’une enquête du fan club Ringohan, Sheena Ringo demandait qu’on lui suggère des artistes avec lesquels elle pourrait collaborer musicalement et j’avais proposé King Gnu. Ça me fait donc plaisir de voir une partie du groupe invité même s’il ne s’agit pas d’une participation commune à l’élaboration d’un morceau de musique. Ce sera peut être pour une autre fois, mais l’émission avait au moins le mérite d’indiquer qu’il y a des points communs entre Sheena Ringo et King Gnu. C’est en fait Sheena qui a invité Daiki Tsuneta dans l’émission et il explique lui-même qu’il ne pouvait pas refuser. Il se trouve que Sheena a assisté à un de ses premiers concerts à Tokyo il y a quelques années et qu’il se sentait donc obligé d’accepter cette invitation pour cette émission. Le ton de l’émission était volontairement piquant donc on ne sait pas trop dans quelle mesure il s’agit d’humour ou de réalité. Mes souvenirs de Tsuneta dans des émissions de télévision étaient qu’il avait une attitude un peu hautaine (je ne me souviens en fait que d’une seule émission où King Gnu était interviewé, donc mon impression est peut être fausse) mais il avait ici l’air très humble, très souriant et même un peu gêné pendant cette émission qu’on lui fasse des compliments, comme s’il y avait une relation de Kohai à Senpai entre Tokyo Jihen et King Gnu. Daiki Tsuneta dit beaucoup de bonnes choses sur Tokyo Jihen. C’est amusant de voir Sheena l’écouter avec un sourire en coin en baissant la tête. On comprend tout de suite que les commentaires élogieux de Tsuneta sur le groupe lui plaisent beaucoup. Il insiste aussi beaucoup sur le jeu de basse de Kameda et les distorsions (歪み) qu’il y introduit. L’émission prend en exemple son solo de basse sur OSCA qui remplace très bien un solo de guitare. En même temps, Sheena nous dit que la basse de Kameda vient parfois empiéter sur sa plage vocale et qu’il est parfois difficile pour elle de chanter sur un morceau quand le son de la basse devient trop présent. Cette remarque un peu piquante là encore mais volontairement humoristique fait rire toute l’assemblée. Et Ukigumo de commenter qu’avec la basse de Kameda, on n’a même plus besoin de guitare. Le sujet des distorsions occupent un bon moment de la seconde partie de l’émission car Tsuneta apprécie beaucoup cet aspect du groupe et entend même des distorsions dans la batterie de Toshiki Hata.

Outre King Gnu, Chan Mari (ちゃんMARI) du groupe Gesu no Kiwami Otome (ゲスの極み乙女) et le producteur Akimitsu Honma, membre régulier de l’émission, intervenaient également. Chan Mari nous dit d’entrée de jeu être fan de Tokyo Jihen, avec une pointe d’émotion dans la voix. Elle est au clavier dans son groupe et insiste beaucoup dans l’émission sur les talents de composition de Izawa, en prenant comme exemple les solos sur le morceau Osorubeki Otonatachi (恐るべき大人達) en version live sur la tournée Discovery, sur le morceau Aka no Dōmei (赤の同盟) sur le dernier album Music ou sur Himitsu (秘密). Le producteur Akimitsu Honma note que la particularité de Tokyo Jihen est que chaque membre du groupe est capable de composer des morceaux en plus d’être musicien, ce qui est un fait rare. Il remarque certains rapprochements entre l’approche musicale de Tokyo Jihen et celle de King Gnu. Je suis assez d’accord avec cela dans le sens où ces deux groupes ne se sentent pas limité dans leurs approches musicales et sont en mesure de s’approprier différents styles en les adaptant à leurs propres atmosphères. Je ressens également une même sophistication et profondeur dans les sons qu’ils produisent, un certain perfectionnisme. Dans l’émission, en plus de cette capacité à composer, on évoque également le fait que la plupart des membres du groupe ont de multiples capacités en plus de jouer de leurs instruments d’origine, notamment celle de chanter pour Izawa et Ukigumo et de jouer de la guitare en plus des claviers pour Izawa.

L’émission aborde ensuite le fait que le groupe développe sans cesse des nouvelles versions de leurs morceaux, ce qui rend d’ailleurs les concerts intéressants car les morceaux varient souvent par rapport à ce qu’on connaît des albums. Sheena évoque une fois de plus son souci de plaire au public en proposant des interprétations nouvelles plutôt que de répéter des versions que le public connait déjà. A ce sujet, Ukigumo ne fait jamais deux fois les mêmes solos de guitare. On nous le démontre dans l’émission en prenant différents exemples en concert du morceau Killer Tune pour lequel le solo est à chaque fois diffèrent. Ukigumo nous dit que changer à chaque fois permet de ne jamais se tromper car il n’est pas nécessaire de reproduire exactement la même partition à chaque interprétation. Mais ça veut surtout dire qu’il a une excellente capacité d’improvisation ce qui désoriente d’ailleurs un peu les autres membres du groupe. En studio d’enregistrement, il improvise souvent une partition qui se trouve être meilleure que ce qui était écrit à l’origine. Le problème est qu’il ne se souvient parfois pas après coup ce qu’il a improvisé et il faut lui faire réécouter la bande de son propre passage de guitare pour qu’il puisse le reproduire à l’identique en se copiant lui-même. On lui pose la question si le changement perpétuel de version peut être dû au fait qu’il ne retient pas la partition originale et il nous confirme avec une moitié de sourire qu’il y a également un peu de cela. Sur Ukigumo, Tsuneta nous dit qu’il est un génie de la guitare car son approche musicale n’est jamais standard ou normale, et qu’il est respecté par les jeunes guitaristes.

Chan MARI évoque un peu plus tard la multiplicité des voix de Sheena, ce que j’aime aussi énormément et Akimitsu Honma parle aussi de génie pour le chant de Sheena. Il y a beaucoup de superlatifs dans cette émission, ce qui peut paraitre un peu trop. Mais ce qui est avant tout intéressant, c’est le déroulement chaotique de l’émission, comme une distorsion de la réalité, qui nous pousse à sourire. Par exemple, Yū Seki de King Gnu nous explique qu’il a été invité par Hata Toshiki dans cette émission mais lui-même n’a pas l’air très au courant. Sheena répond toujours à moitié aux questions et quand ça l’arrange. A une question de l’acteur, invité régulier de l’émission, Arata Furuta, elle nous dit qu’elle n’est pas Sheena Ringo (puisqu’elle est le personnage de Tekuno) et qu’elle n’est donc pas en mesure de répondre précisément. Elle change même rapidement de sujet en posant une question à Daiki Tsuneta. Cette mise en scène est en fait un moyen pratique pour ne pas répondre aux questions ennuyeuses. Arata Furuta lui demandait si la raison pour laquelle elle avait arrêté sa carrière solo était bien pour faire partie d’un groupe. C’est une question à laquelle elle a dû répondre tellement de fois qu’elle expédie la réponse en passant rapidement à autre chose. Un peu plus tard dans l’émission, Ukigumo nous révèle qu’on l’oblige à porter des vêtements bizarres, comme le costume d’indien qu’il a porté récemment pendant l’émission Music Station pour le morceau Ryokushu (緑酒), et que parfois c’est dur à vivre. L’éclat de rire de Tsuneta quand Ukigumo nous annonce cela fait plaisir à voir. Là encore, on ne sait pas trop si cette complainte est véritable, mais j’imagine bien Sheena obliger gentiment tout le monde à porter ces tenues de scènes, sans que personne ne soit en mesure de refuser tout en se disant que ça ne doit pas être une si mauvaise idée que cela. L’émission décortique également plusieurs morceaux mais je trouve les explications plus floues et moins convaincantes. En tout cas, j’ai appris pas mal de nouvelles choses sur le groupe, et des petites anecdotes. Le respect mutuel entre les membres du groupe, et entre Tokyo Jihen et King Gnu, transparaissait véritablement dans cette émission, et m’a d’autant plus donné envie de revenir vers les albums de Millenium Parade et de King Gnu, en alternance avec Music de Tokyo Jihen que j’écoute toujours beaucoup sans m’en lasser.

白黒になる東京 (3)

Je continue cette série montrant Tokyo en noir et blanc avec un nouvel épisode et sans savoir combien de billets au total composeront cette série. Peut-être deviendra t’elle une série au long cours qui réapparaîtra de temps en temps sur ce blog après quelques mois ou années écoulées. J’ai un peu perdu le fils des séries passées car la particularité de ce blog est d’être relativement désorganisé, ce qui est assez différent de ma vie réelle dont je parle volontairement assez peu. Enfin, les billets sont peut-être désorganisés les uns par rapport aux autres, mais les contenus de chaque billet suivent des logiques assez bien définies. Changer cette logique interne sur certains billets provoque parfois de longs débats au sein de la rédaction de Made in Tokyo. Certaines photographies du billet, notamment les premières, sont plutôt anciennes (de quelques mois) tandis que les trois dernières prises à Shinjuku sont plutôt récentes. La première photographie montre un long sous-sol du grand magasin Ginza6. Je ne soupçonnais pas l’existence de ce long couloir plutôt photogénique. J’ai pris une vingtaine de photos dans ce tunnel avec des effets de flou, des effets de mouvements en zoom et en rotation, avec l’intention de les utiliser plus tard comme matériaux pour des compositions avec d’autres photographies. Dans ma librairie de photographies sur l’iMac, j’ai beaucoup de photos prises uniquement pour servir de motifs éventuels, notamment des photos de ciel avec nuages, des photos rapprochées de murs de pierre ou de béton, comme sur la deuxième photographie. L’hortensia de ce billet, comme celle du premier billet de cette série, provient du sanctuaire Hakusan dont je parlerais très certainement dans un prochain billet. Je vais régulièrement à Shinjuku mais plus rarement à Kabukichō. Le quartier change petit à petit depuis l’implantation du grand building des cinémas Toho au printemps 2015. Je me dirige vers un nouvel immeuble en construction pour aller voir les palissades de protection qui l’entourent, mais j’en parlerais également dans un prochain billet. Les trois photographies de Shinjuku montrées sur ce billet sont en fait prises en marchant depuis la gare vers Kabukichō. Le building noir aux contours agressifs, le Yasuyo Building de l’architecte Nobumichi Akashi, est un bâtiment que j’ai déjà montré plusieurs fois sur ce blog. Je l’ai en fait montré plus que plusieurs fois car ce building était l’image d’entête de Made in Tokyo pendant 6 ans de 2010 à 2016, pour les versions 5 et 6 du blog. A cette époque, j’avais même enlevé le titre du blog pour ne laisser que cette image de building noir, positionnée à l’envers. Ce building est tellement symbolique qu’il me paraissait suffisant et il a encore maintenant pour moi une valeur particulière. Sur la dernière photographie ci-dessus, on devine une de raisons de mon passage à Shinjuku.

Le magasin de disques Tower Records de Shinjuku avait monté une petite exposition sur Tokyo Jihen à l’occasion de la sortie de l’album Music (音楽) et il fallait bien évidemment que je vienne voir à quoi tout cela ressemblait. L’exposition est toujours en cours et se terminera le 28 Juin. Je m’étais décidé, pour cet album, à suivre le chemin typique de l’OTK, ce qui est assez fatiguant tout en étant assez amusant. Je n’étais pas le seul à venir prendre en photo les tenues du groupe qui étaient présentées. Le Tower Records de Shinjuku occupe les 7ème et 8ème étages du Department Store Flags, et on pouvait trouvé quatre set de tenues d’émissions aux 4ème et 7ème étages. Au quatrième étage, on pouvait voir les tenues récentes très colorées utilisées pour le morceau Ryokushu (緑酒) interprété pendant l’émission Music Station sur la chaine Asahi TV, le Vendredi 14 Mai 2021. Au 7ème étage, dans un espace aménagé du Tower Records, on pouvait voir trois autres sets de tenues, celles portées pour Gunjō Biyori (群青日和) lors de l’émission FNS du 9 Décembre 2020 (certainement mes préférées), et d’autres plus traditionnelles: des yukata blancs portés pour l’émission Music Station du 14 Août 2020 et les kimono bleus marqués de l’année 2020 pour la 71ème édition de l’émission la NHK Kōhaku du 31 Décembre 2020. On pouvait également y voir devant une affiche géante du groupe sur le toit du New Sky Building de Shinjuku, des néons reprenant l’écriture du titre de l’album et deux tourne-disques pour vinyles marqués des signes des membres du groupe. Ce tourne-disques aux allures vintage n’est pas en ventre à ma connaissance, tout comme la broche en forme de plume de paon sur le yukata blanc. Cette broche était apparemment vendue ou donnée aux membres du fan club Ringohan il y a quelques années, et on ne peut pas l’acheter maintenant, à part d’occasion et pour un prix assez élevé sur Mercari. Dans ce magasin Tower Records de Shinjuku, j’ai pu constater que le poster des 20 ans de carrière de Sheena Ringo ainsi que la cartographie des liens musicaux, que je montrais dans un billet précédent, sont toujours présents.

Tokyo blues

Tokyo blues est le nom d’une bière, excellente d’ailleurs, produite dans la brasserie Ichikawa près de Fussa à l’ouest de Tokyo. Nous allons régulièrement à Fussa, environ une fois tous les trois mois pour raison familiale, mais c’était la première que nous allions à cet endroit pourtant fort agréable. Nous sommes ici toujours dans le grand Tokyo, mais loin des zones urbaines. Lorsque l’on entre à l’intérieur de l’enceinte de la brasserie, nous sommes tout de suite impressionné par la taille et la hauteur d’une paire d’arbres Keyaki aux pieds desquels est posé un petit autel. L’enseigne est très ancienne car elle date de 1863 et est surtout connue pour son sake appelé Tamajiman. On peut visiter la manufacture en temps normal mais elle était fermée aux visiteurs à notre passage pour cause de crise sanitaire. Au fond du domaine, on trouve un vieux chaudron à bière et un restaurant italien devant lequel est stationnée une petite Subaru rouge. J’aime beaucoup le contraste coloré apporté par cette petite voiture. Je marche un peu autour du domaine et constate qu’il y a de nombreuses Kura. Ce sont des petites dépendances servant d’entrepôts, de style japonais traditionnel faites de briques de pierre et donc résistantes au feu. Les Kura sont utilisés pour stocker du riz, du grain, ou toute sorte d’objets de valeur dont on doit finir par oublier l’existence même.