Je n’étais pas passé voir la Nakagin Capsule Tower (中銀カプセルタワービル) depuis très longtemps. Les premières photographies que j’ai pris du building datent de Mars 2007. Je me souviens à l’époque que le destin de cette structure emblématique du mouvement architectural métaboliste était déjà en sursis et qu’une démolition était imminente. Plus de quatorze ans après, Nakagin est toujours debout mais son état général s’est bien dégradé faute d’entretien. La tour conçue par Kisho Kurokawa date de 1972, elle a donc maintenant 49 ans. La structure n’a pas été modifiée pendant toutes ces années à part quelques capsules qui ont été enlevées. Une d’entre elles a par exemple été placée dans le musée d’art moderne de Saitama, également conçu par Kisho Kurokawa. Il faut savoir que Kurokawa prévoyait une durée de vie de 25 ans pour les capsules. Le problème vient de la structure qui n’est plus depuis longtemps aux normes anti-sismiques actuelles. Le manque de maintenance de la structure fait que le building n’est plus à même de survivre. Des plans de démolition refont surface depuis un changement récent de propriétaire et son intention de re-développer le terrain.
Le projet de préservation et de régénération du Nakagin Capsule Tower Building, supporté par le crowdfunding et par Kisho Kurokawa Architects, rénove déjà petit à petit des capsules depuis 2014, en dénaturant parfois le design d’origine qui ressemblait à un intérieur de station orbitale (mais avec un lecteur de K7 et une mini-télé cathodique). Il semble que le projet est maintenant de détacher les capsules une à une et de leur donner une autre vie ailleurs. En y réfléchissant bien, l’architecture métaboliste se voulait modulable et évolutive. Plutôt qu’une destruction de Nakagin, il s’agirait là simplement d’une nouvelle évolution de l’organisation de la tour pour lui donner une nouvelle vie, sauf que les capsules risquent d’être éparpillées un peu partout dans la nature. J’ai vu des propositions de réutilisation des capsules pour former par exemple des villages dans le Japon rural, notamment dans des zones affectées par le tsunami résultant du grand tremblement de terre du Tohoku de Mars 2011, dans les préfectures de Fukushima ou d’Iwate. Dans ces propositions, les capsules sont déménagées et placées à l’horizontal sur un terrain, parfois recouvertes de dômes. Ce positionnement à l’horizontal est similaire à la maison Capsule House K (カプセルハウスK) également conçue par Kisho Kurokawa en 1973 pour être sa résidence secondaire. Elle est située à Karuizawa dans la préfecture de Nagano, construite sur un terrain en pente et entourée d’arbres. Elle est composée de quatre capsules posées en porte-à-faux sur un bloc central. On y trouve notamment un salon de thé avec tatami et toujours la fameuse ouverture arrondie caractéristique des capsules de Kurokawa. Capsule House K a été récemment réhabilitée en Mai 2021 par l’organisation Mirai Kurokawa Design Studio présidée par Mikio Kurokawa, le fils aîné de Kisho Kurokawa, pour la transformer en une résidence de vacances. Une autre idée pour Nakagin est de recouvrir les capsules de végétation ce qui constituerait un jardin sur plusieurs étages accessibles par des escaliers. L’idée est intéressante mais ne prend pas en compte le fait que la structure du Nakagin n’est pas viable et aurait donc beaucoup de mal à supporter une charge supplémentaire. Le point intéressant tout de même est que ce building atypique et novateur encore maintenant fait réfléchir. Le concept de capsules utilisées comme chambre d’hotel existe d’ailleurs toujours au Japan, avec notamment la chaîne d’hôtels Nine Hours. Les idées novatrices de Kisho Kurokawa n’ont pas disparu et se matérialisent encore maintenant sous des formes modernisées.
En note pour moi-même, je réalise que la composition du nom Nakagin 中銀 provient des noms de l’arrondissement et du quartier où il se trouve. Naka correspond au premier kanji du nom de l’arrondissement Chūō 中央 et Gin correspondant au premier kanji du quartier de Ginza 銀座.
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