stairs and mesh buildings

L’objectif de mon passage à Ikebukuro était de voir l’hotel Siro conçu par Mount Fuji Architects Studio. Je l’ai déjà montré il y a quelques semaines sur mon compte Instagram et ça doit être la photo la plus aimée jusqu’à maintenant (on reste ceci étant dit dans des proportions tout à fait modestes). La particularité de cet étroit building tout en longueur encastré dans le centre d’Ikebukuro est bien entendu ses escaliers extérieurs prenant différentes formes. L’effet visuel est assez étonnant. Il s’agit d’un petit hôtel avec des intérieurs au design sobre et épuré, qui viennent contraster avec le fouillis visuel du quartier. Je ne viens pas assez souvent à Ikebukuro mais je me rattrape ces derniers temps, depuis que j’ai visité plusieurs fois le quartier limitrophe de Zoshigaya. Je me décide ensuite à marcher depuis Ikebukuro jusqu’au centre de Shinjuku en suivant l’avenue Meiji, mais je bifurque rapidement car je me laisse souvent distraire en route par d’autres rues. Au Sud de la gare, on peut difficilement manquer le building DaiyaGate Ikebukuro (ダイヤゲート池袋) couvert d’un réseau de barres métalliques obliques. Les énormes piliers de béton le soutenant sont également obliques. Il est posé sur une immense plateforme ouverte surplombant une partie du quartier. Une place que l’on peut traverser se forme sous le building. Depuis cette plateforme, on doit pouvoir apercevoir l’ancienne école Jiyū Gakuen, conçue en 1954 par Frank Lloyd Wright, qui se trouve également dans ce quartier, mais je ne l’avais pas encore réalisé au moment de ma visite. Un peu plus loin dans l’arrondissement de Toshima, on remarque aussi forcément l’élégant découpage des vitrages d’un immeuble au béton superbe. Il s’agit d’un bâtiment conçu par Tadao Ando. En parcourant les rues jusqu’à Shinjuku en ce tout début de printemps, je suis absorbé par la mélancolie de Morita Dōji 「春は幻」.

Les hasards des liens internet me font découvrir le blog de Stéphane du Mesnildot, écrivain et journaliste (entre autres) couvrant, depuis 7 ans sur son blog intitulé Jours étranges à Tokyo, le cinéma japonais principalement et la musique japonaise entre autres sujets. Son blog est toujours très actif et extrêmement bien documenté. Je pressens donc que je vais venir le consulter régulièrement pour y trouver un peu d’inspiration. C’est en quelque sorte rassurant de voir des blogs encore actifs car on les voit plutôt disparaître petit à petit ou bloqués sur un dernier billet datant d’il y a deux ou trois ans. Une fois qu’on a fait naître un blog, on ne devrait pas le laisser mourir. Parmi les billets de Jours étranges à Tokyo, je découvre celui sur la mystérieuse chanteuse Morita Dōji (森田童子), que l’on voit toujours le visage à moitié caché derrière une longue chevelure bouclée et des lunettes noires. Ce billet me pousse à écouter l’album A boy (ボーイ) composé de neuf morceaux à la mélancolie saisissante et à la beauté romantique sombre, parfois interrompue par la pluie. Cet album est régulièrement cité dans les listes très subjectives évoquant le meilleur de la musique japonaise, et j’avais déjà tenté d’entrer dans cet univers musical il y a quelques années. Mais ce n’était pas, à cette époque là, le bon moment. La voix fragile, presque nue, de Morita Dōji m’apporte maintenant un certain apaisement après des semaines difficiles. On peut écouter cet album sur YouTube mais on le trouve également sur iTunes (du moins le japonais). J’aimerais trouver cet album en CD mais, datant de 1977, je pense qu’il ne doit exister qu’en vinyl et je l’imagine bien introuvable. Le site web de Disk Union le liste en fait quand même bien en CD mais il n’y a aucun exemplaire en vente.

これからの時代来るのは活動写真

Parler brièvement de graph à Udagawachō dans le billet précédent m’amène au bout de la rue Cat Street jusqu’à la galerie Design Festa. Les dessins qui décorent ses murs changent régulièrement et, comme pour le quartier d’Udagawachō, j’aime y revenir de temps en temps pour constater ce qui a changé. Je ne reconnais pas les figures de manga qui sont dessinées, quoique le visage sur la première photo me rappelle un peu celui de Rei Ayanami. Sur la deuxième photographie, j’aime bien la peinture sélective de la tuyauterie qui s’avère assez ludique. Je suis souvent passé devant la Design Festa Gallery mais je suis plus rarement entré à l’intérieur. Je fais le curieux cette fois-ci, mais je n’y trouve pas beaucoup de choses intéressantes. La galerie se compose de plusieurs petites pièces à l’intérieur de deux bâtiments principaux, la partie Est et Ouest, séparés par un café-restaurant. Chaque pièce montre le travail d’un ou d’une jeune artiste, mais dans l’ensemble il n’y avait malheureusement rien pour moi de très original ou d’accrocheur. Je parcours rapidement les salles des deux galeries, les artistes sont souvent sur place assis sur une chaise ou à une table, ou donnant des explications aux quelques visiteurs qui semblent souvent être leurs connaissances. Je suis en fait beaucoup plus intéressé par les décorations de la galerie en elle-même, les tubes noirs enchevêtrés de la façade principale et les dessins recouvrant chaque partie des murs. L’intérieur du restaurant est également entièrement couvert de dessins. Cette galerie est un petit monde à part, et on apprécie qu’elle ne soit pas encore “normalisée”. Elle n’est pas difficile à trouver mais j’ai toujours du mal à tomber dessus du premier coup, comme si elle se cachait volontairement. C’est peut-être sa disposition qui la protège et lui permet de garder son apparence unique.

Je pense que je n’avais jamais pris en photo le Cranes 6142 Building (クレインズ6142ビル) de Kazuyo Sejima, situé sur Cat street (キャットストリート). Ce building à la surface de verre à moitié transparente est pourtant installé depuis l’année 2000. Je le montre sur la sixième photo du billet. Il y avait initialement un magasin de décoration intérieur appelé hhstyle.com. Un magasin de fringues vintage RAGTAG occupe maintenant ce building. Juste en face, le visage souriant de Utaha (詩羽) en poster sur la vitrine de l’enseigne Adidas me fait également sourire. Elle est apparemment un des visages de la marque pour la ligne Adidas Original. Sur une vidéo pseudo-publicitaire, on la voit d’ailleurs interpréter deux morceaux à l’intérieur du magasin de Shinjuku, Buckingham (バッキンガム) et plus récent Maneki Neko (招き猫) que j’écoute en ce moment.

Je suis toujours avec une attention certaine les nouvelles créations musicales de Wednesday Campanella (水曜日のカンパネラ). Comme la fois précédente, les nouveaux morceaux du groupe se présentent sous la forme d’un EP de deux singles, et ces morceaux sont tous les deux très bons. Je me suis maintenant habitué à la voix et à la manière de chanter de Utaha, en oubliant même un peu ce que KOM_I aurait pu chanter à sa place. J’ai le sentiment que Utaha a désormais trouvé sa place, et c’est un commentaire que je vois souvent au sujet de son interprétation dans les vidéos des deux derniers morceaux Maneki Neko (招き猫) et Edison (エジソン). Le style du premier morceau Maneki Neko est assez proche du premier morceau Alice du EP précédent, tandis que les moments rappés de Edison reprennent le style de l’époque KOM_I qu’on trouvait également sur le morceau Buckingham du premier EP. Musicalement, il n’y a pas d’énormes surprises car cette musique électronique est pleine des fantaisies snores typiques de Hidefumi Kenmochi.

un Fuji rouge au bord de la rivière

Ce billet avec cette sélection de photos est le dernier que j’avais gardé dans mes brouillons depuis plus d’un mois. J’ai pris beaucoup de photos ces deux derniers week-ends mais elles sont encore précieusement conservées sur la carte mémoire de l’appareil photo sans les avoir transférées vers l’ordinateur. J’en oublierais presque ce que j’ai pris et les endroits où je suis allé. Comme sur une pellicule de film argentique, on oublie ce qu’on a pris en photo lorsqu’on la fait développer des mois après, et la surprise est d’autant plus grande. Ceci me rappelle que j’ai justement une pellicule en cours depuis de nombreux mois, peut-être même plus d’un an, et je n’ai strictement aucun souvenir de son contenu. Une idée aurait été de prendre toutes ces photos et ne les développer au fur et à mesure que 20 ans après. L’impact visuel que l’on doit éprouver en découvrant ses propres photographies 20 ans après les avoir prises doit être surprenant, si on compare à l’impact de voir une photographie d’un lieu qu’on vient juste de traverser la journée même. Faire reposer des photographies dans un billet en brouillon pendant plus d’un mois a l’intérêt de se laisser le temps nécessaire pour se questionner sur la qualité des photos que l’on veut montrer. Je l’ai déjà mentionné auparavant mais l’interêt que je peux trouver dans certaines photos que je montre n’est certainement considéré que par moi-même, et tant mieux si d’autres y trouvent également un intérêt ou, au mieux, une certaine poésie.

Il y avait initialement quelques photographies supplémentaires sur ce billet, mais j’en ai retiré plusieurs pour ne conserver que celles ci-dessus prises principalement le long de la rivière Meguro, mais également à Udagawachō à Shibuya. La première photographie est prise près de la grande jonction Ikejiri-Ōhashi. On aperçoit les portions d’autoroutes en hauteur juste avant leur plongée dans l’énorme jonction. Ces portions d’autoroutes se superposant passent au dessus de la grande route 246 qui elle-même traverse la rivière Meguro. Cette accumulation de voies superposées rend cet endroit visuellement intéressant, mais j’aime en fait surtout l’insecte vert dessiné sous le pont au niveau de la rivière. On le devine à peine, car il n’est pas immédiatement visible depuis la rue. A quelques mètres de cet insecte, deux engins mécaniques sont installés dans la rivière. J’imagine qu’ils sont utilisés pour nettoyer la rivière, mais on peut se demander comment ils ont été déplacés à cet endroit là. On ne le voit pas sur la photographie, mais deux grues sont disposées juste à côté. Un peu plus loin, plus près de Naka Meguro, je retrouve la mosaïque du Mont Fuji rouge de Invader s’inspirant directement du Gaifū kaisei (凱風快晴) de Katsushika Hokusai. La dernière photographie nous fait revenir à Shibuya dans le quartier de Udagawachō. Quand je passe dans ce quartier, je jette systématiquement un œil au magasin de disques Manhattan Records, car un des murs du building est toujours décoré d’un graph élaboré, et celui-ci change régulièrement. Il y a trois ans, on pouvait y voir un avion de chasse à tête de requin. Cette fois-ci, il s’agit d’un grapheur venant lui-même dessiner sur ce mur.

Dans le billet précédent, je mentionnais le livre de photographies éponyme de Mika Ninagawa sorti en Octobre 2010. Au moment de l’écriture de ce billet, j’avais recherché si ce livre était disponible sur Mercari et avait trouvé une version à un très bon prix. Je l’ai reçu le lendemain. La rapidité de réception dépend de celle de l’envoyeur mais on atteint dans ce cas là une rapidité digne d’Amazon. J’avais même reçu le photobook avant d’avoir fini l’écriture de mon billet. Ce livre est un sacré pavé de 352 pages, avec en préface une interview de Mika Ninagawa avec Daido Moriyama. Ce livre n’était en fait pas publié au Japon et il est en anglais, mais je l’avais quand même vu en librairie comme je le mentionnais dans mon billet précédent. Il s’agit en quelque sorte d’une rétrospective du travail photographique de Ninagawa, mélangeant photographies de fleurs et portraits de personnalités, comme Chiaki Kuriyama ou Anna Tsuchiya (qui jouait le rôle principal dans Sakuran, le premier film de la photographe), entre beaucoup d’autres. L’impression papier met bien en valeur les couleurs extra vives des photographies de Mika Ninagawa. Parmi les personnalités photographiées, je mentionnais dans le billet précédent une photo de Sheena Ringo (椎名林檎), que je montre ci-dessus. Elle est accompagnée sur cette photo par les acteurs Shun Oguri (小栗旬), Lily Franky (リリーフランキー) et Kenichi Matsuyama (松山ケンイチ). Cette photo est tirée d’une série montrée dans le livre magazine (mook) sorti en Novembre 2006, Kaze to Rock to United Arrows (風とロックとユナイテッドアローズ). Il s’agissait apparemment d’une collaboration avec la marque de vêtements United Arrows. Je n’avais pas acheté de livres de photographies depuis longtemps et ça m’ouvre l’esprit de le voir posé sur la petite table du salon et de le feuilleter progressivement tous les soirs.

危なく無い街へ

J’ai en ce moment beaucoup de mal à me lancer dans l’écriture d’un nouveau billet. Les nouvelles récentes du monde font que tout le reste prend peu d’importance. Le fait d’être très occupé en ce moment professionnellement me donne également peu de temps le soir pour me mettre à écrire sur ce blog. L’allergie soudaine et inexpliquée qui m’a saisi depuis lundi n’arrange rien non plus. Mais ce blog a toujours été pour moi une porte d’évasion nécessaire et je me dis qu’elle est d’autant plus nécessaire en ce moment. Alors je me force un peu à écrire et le rythme revient. Tout est une histoire de rythme, il ne faut pas le perdre sinon on risque de tout arrêter. Les photographies ci-dessus datent déjà d’il y a plusieurs mois. Elles ont été prises de la gare de Shinagawa jusqu’à l’île artificielle de Tennōzu (天王洲アイル). J’avais en tête de passer voir plusieurs lieux pendant cette marche au trajet relativement bien défini à l’avance. Tout d’abord, passer sur les hauteurs de Gotenyama pour constater l’avancement d’une maison individuelle, celle que je montre sur les deux premières photographies. La dernière fois que je l’ai vu, le bâtiment en lui-même était déjà construit mais la fresque montrant des formes de vagues était en cours d’élaboration. En regardant de près, on remarque que cette surface est constituée d’une multitude de pierres taillées et on imagine très clairement qu’il fallait de longs mois pour la terminer. Cette façade maintenant terminée me rappelle les flots d’un océan au dessus desquels viennent voler des oiseaux. Ces oiseaux de couleurs bleues et vertes sont des objets posés à différents endroits de la parois. Cette surface est très belle, comme un tableau, mais je trouve que la porte d’entrée principale flanquée de deux tigres d’Okinawa ne s’accorde pas très bien avec l’ensemble. Dans le petit jardin derrière le muret de pierre, on remarque quelques statues posées dans les herbes folles. Cette maison se trouve à quelques mètres seulement de l’ancien musée d’art Hara, qui a malheureusement fermé ces portes. C’est bien dommage car en plus des expositions que l’on pouvait y voir, j’aimais beaucoup marcher à l’intérieur du vieux bâtiment et accéder au jardin intérieur. J’ai notamment des souvenirs d’y avoir vu une exposition de créatures bizarres de l’artiste australienne Patricia Piccinini en 2004. Je me souviens très bien avoir marché dans ce jardin intérieur en 2015 lorsque nous étions allés voir en famille l’exposition de photographies de Mika Minagawa intitulée Self-image. C’était un peu limite pour les enfants en y repensant maintenant et en revoyant les photographies de l’exposition publiées en photobook, mais le petit était encore petit. De Mika Ninagawa, je me souviens avoir beaucoup hésité à acheter son book éponyme sorti en 2010. Je l’ai souvent feuilleté en librairie à cette époque où j’achetais plus régulièrement que maintenant des livres de photographies, mais je ne l’ai malheureusement jamais acheté. En écrivant ces lignes, je le trouve par chance sur Mercari et je n’ai pas pu résister. On peut voir les photographies du book sur le site de la photographe, la mission étant de trouver celle avec Sheena Ringo, mais il y a également plusieurs photographies tirées de son film Sakuran. Des souvenirs du musée Hara, le plus marquant était un étrange concert mélangeant bruits d’insectes, des voix humaines et des expérimentations sonores, se déroulant pendant une soirée de l’été 2005. Nous étions assis dans l’herbe dans le noir à écouter cette musique très particulière.

En parlant de Sheena Ringo un peu plus haut, l’autre but de ma marche cette journée là était d’aller voir le bâtiment des anciens studios d’enregistrement Toshiba EMI appelés TERRA (東芝EMI 寺田スタジオ), qu’elle a utilisé. On les voit sur les cinquième et sixième photographies du billet. Ce bâtiment, comme de nombreux autres dans ce quartier, sont la propriété de la compagnie TERRADA (寺田倉庫). TERRADA était initialement spécialisée dans les entrepôts, mais a diversifié ses services ces dernières années. Certains des entrepôts sont maintenant utilisés comme galeries d’art. L’ultime objectif de ma marche était de visiter le TERRADA Art Complex contenant plusieurs galeries, dans l’ensemble intéressantes. L’installation mécanique formant les lettres du mot « Tokyo » était montrée dans une de ces galeries. Les galeries sont disposées à plusieurs étages du bâtiment, mais comme il s’agissait auparavant d’un entrepôt, les ascenseurs sont extrêmement vastes, lents et ne s’arrêtent qu’à un seul étage à la fois. Il faut donc une certaine motivation pour visiter chaque étage, mais chaque galerie valait quand même le détour. Pour revenir aux anciens studios TERRA de Toshiba EMI, on pouvait voir l’intérieur dans une séquence vidéo d’un des DVDs Seiteki Healing de Sheena Ringo. Un des morceaux de son album Heisei Fuzoku (平成風俗) est également sous-titré « TERRA ver. » en référence à ce studio.

Musicalement parlant, je continue bien entendu à découvrir la musique du groupe rock alternatif Tricot, dont je ne me lasse pas et qui accapare presque complètement ma playlist quotidienne en ce moment. Je continue à rechercher les CDs des albums et EPs chez les disquaires Disk Union de Tokyo. Le magasin Disk Union de Shimokitazawa est une bonne pioche car j’y trouve de nombreux CDs que je recherchais. Cette fois-ci, j’y trouve l’album Makkuro (真っ黒) qui, comme son nom l’indique, a une couverture entièrement noire. C’est le quatrième album du groupe sorti en 2020. Je trouve également KABUKU EP sorti quelques années auparavant en 2016. L’album Makkuro commence très fort côté guitares dès le premier morceau et se calme un peu vers la deuxième partie de l’album. Dès la première écoute, l’album s’envole avec le morceau Watch (みてて) car Ikkyu Nakajima y pousse très loin sa voix. Ce genre de morceaux m’attirent beaucoup. Des morceaux plus apaisés comme Abunakunakunai Machi he (危なくなく無い街へ) se révèlent par contre vraiment après plusieurs écoutes. Le morceau Himitsu (秘密) est un de mes préférés et me fait dire que Tricot est un des meilleurs groupes rock alternatifs japonais. On plonge au milieu de ce morceau dans un magma de guitares qui me rappelle ceux de Sonic Youth. Musicalement, c’est toujours impeccable et très inspiré, avec ces saccades de guitares et les rythmiques compliquées de Montifour Kida désormais typiques de l’ambiance sonore du groupe. Makkuro (真っ黒) part aussi vers des directions plus pop rock, et l’album est un peu plus varié que ceux que je connais jusqu’à maintenant notamment le plus agressif A N D. J’aime aussi les liens subtils qui se tissent entre les albums. Sur le sixième court morceau Teisokudōro (低速道路), les voix vers la fin du morceau reprennent quelques paroles du morceau Kobe Number de l’album A N D. Le deuxième morceau intitulé Right Brain Left Brain (右脳左脳) est un des singles immédiatement accrocheur de l’album. Sa vidéo a été tournée sur un vieux pont piéton au dessus des lignes de chemins de fer près d’Ebisu. Je connais très bien cet endroit et j’emprunte très souvent ce petit pont. Je l’ai pris en photo de nombreuses fois notamment dans ce billet de Juillet 2020 où il était envahi par la végétation (sur la cinquième photographie). Je suis plutôt content de voir les membres du groupe évoluer dans un décor qui m’est très familier. Ce genre de liens entre mon expérience urbaine et la musique que j’écoute est pour moi très important. Les morceaux Afureru (あふれる) et le morceau titre Makkuro (真っ黒) sont également des singles de l’album, tout comme le dernier morceau de l’album Potage qui est pourtant dans la partie bonus. Je me moquais un peu dans un précédent billet du titre de ce morceau, mais il s’avère qu’il est excellent. Difficile de trouver des points faibles dans cet album, qui est peut-être mon préféré, bien que j’adore ceux que j’ai déjà écouté. Je n’oublie pas non plus le EP KABUKU composé de 5 morceaux dont Setsuyakuka (節約家) qui sera également inclu dans l’album suivant 3 sorti l’année suivante. Il n’y a pas de différence majeure entre les EPs et les albums mais certains morceaux s’aventurent parfois vers des horizons un peu différentes, comme le premier morceau Nichijo_Seikatsu chanté à plusieurs voix simultanées. J’écoute tous ces EPs et albums de Tricot à la suite et j’ai même un peu de mal à définir les limites entre eux. Le prochain album à découvrir est leur troisième intitulé très naturellement 3, que j’ai déjà trouvé au Disk Union d’Ikebukuro. J’ai un peu peur d’aller trop vite dans mes découvertes, mais j’ai du mal à me retenir.

Avec cette découverte progressive des albums de Tricot, mon amour pour la musique du groupe s’intensifie de plus en plus. Il se trouvait justement que Tricot était en tournée nationale avec une dernière date à Tokyo pour le concert final, le dimanche 27 Février 2022. J’ai eu beaucoup de chance car il restait encore quelques places et j’ai pu m’en procurer une. J’ai quand même hésiter car la situation sanitaire actuelle n’encourage pas beaucoup à se regrouper en nombre dans des espaces fermés. Mais j’ai encore maintenant beaucoup de regrets de ne pas avoir été au concert de Tokyo Jihen en 2020 à cause de cette pandémie, et je n’avais pas vraiment envie de laisser passer cette occasion qui se présentait à un excellent timing. Tricot a commencé en 2021 cette tournée nationale de neuf dates appelée WALKING × WALKING TOUR 2021-2022. Elle se termine donc le 27 Février 2022 à Tokyo, dans la salle de Toyosu Pit (豊洲ピット). C’est la première fois que j’assiste à un concert dans cette salle située près de la station Shin-Toyosu de la ligne Yurikamome et au bord d’un large canal donnant sur la baie de Tokyo. Toyosu Pit peut apparemment accommoder 3,103 personnes debout ou 1,328 personnes assises. Lors de ce concert, il y avait des chaises disposées avec une place condamnée entre deux personnes, donc j’imagine qu’il devait y avoir à peu près 700 personnes dans la salle. Il fallait bien entendu porter le masque en permanence, ne pas crier et donc se contenter d’applaudir ou de lever les bras pour essayer d’attirer l’attention du groupe. J’étais plutôt placé vers le fond de la salle mais par chance juste après une marche qui donnait un peu de hauteur. La majorité du public semblait avoir une vingtaine ou trentaine d’années, mais il y avait également des personnes de mon âge. Les membres du groupe ont entre 32 et 33 ans (je ne suis pas sûr pour le batteur Yusuke Yoshida), soit une dizaine d’années de moins que moi. Le designer Masamichi Katayama était également présent en spectateur dans la salle car il montrait une photo sur son compte Instagram. Comme je le suis depuis longtemps sur Instagram et que je suis passé récemment devant les bureaux de Wonderwall pour prendre le bâtiment en photo, j’étais surpris de cette coïncidence. Je ne l’ai par contre pas vu ou reconnu dans la salle.

Je suis arrivé 30 minutes avant le début du concert, pour avoir assez de temps pour m’imprégner des lieux. Pareillement, quand je vais au cinéma, j’aime arriver en avance pour regarder les bandes-annonces. Arriver 30 minutes en avance m’a permis de boire tranquillement une bière dans le hall d’entrée en observant la foule, et de m’asseoir un peu après dans la salle encore à moitié vide en écoutant la bande sonore qui nous passait des morceaux de Wednesday Campanella (nouvelle version avec Utaha) et de Chai, entre autres. Les trois premières photos ci-dessus sont prises à l’iPhone, pendant cette période d’attente (les deux premières photos) et après la fin du concert en sortant vers 19h. Le concert était relativement long, durant deux heures en tout. Le groupe a joué 20 morceaux en tout, incluant 3 en rappel, et Ikkyu assurait le rôle de MC. Elle parle en fait beaucoup, peut-être parce qu’il s’agissait du concert final de la tournée. En fait, Ikkyu lançait à chaque fois la discussion et Kida intervenait régulièrement en réponse. Hiromi et Yoshida étaient par contre beaucoup plus discrets. Elles revenaient principalement sur la tournée qui s’achève en évoquant certains lieux et le fait que le groupe était satisfait d’avoir pu tourner malgré les contraintes sanitaires. La tournée précédente avait apparemment été annulée en raison de la pandémie. En fait, cette tournée WALKING × WALKING TOUR 2021-2022 était censée être mondiale avec plusieurs dates en Europe (plusieurs en Grande Bretagne, une date à Paris et d’autres ailleurs) immédiatement après celles au Japon, mais elles ont été repoussées à partir du mois de Septembre. Pour les parisiens intéressés, Tricot sera en concert le samedi 24 Septembre 2022 au Point Éphémère dans le 10ème arrondissement de Paris. Pour combler cette attente supplémentaire, Tricot annonça pendant ce concert que trois autres concerts seront joués dans des petites salles de Setagaya et retransmis en live aux heures européennes (donc très tôt au Japon, vers 4h du matin). Cette petite tournée principalement destinée à être online se déroulera les 2, 10 et 23 Avril 2022 et se nomme STOP x STEP tout for UK & EU in TOKYO.

Je n’ai pas assisté à un concert depuis un petit moment et entendre le son live des premières percussions de la batterie de Yusuke Yoshida a réveillé une petite flamme en moi. Le premier morceau démarre dès l’entrée du groupe sur scène. Je ne connais pas Tricot depuis longtemps mais j’ai regardé un grand nombre de music vidéos et autres émissions sur YouTube, ce qui me donne l’impression de déjà bien les connaître. Je reconnais bien l’emplacement des membres du groupe car Ikkyu Nakajima se place toujours sur la droite, à l’opposé de Motifour Kida à la toute gauche. Hiromi Hirohiro à la basse se trouve toujours entre Ikkyu et la batterie de Yusuke Yoshida. Je reconnais aussi tout de suite la guitare d’Ikkyu car la sangle est imprimée de motifs empruntés à la couverture de l’album Revolver des Beatles (on peut notamment la voir sur la vidéo de Potage). Sur les 20 morceaux qui seront joués, la moitié provenait du dernier album Jōdeki (上出来), que je n’ai pas encore écouté à part les trois singles déjà sortis, notamment Kayoko et Inai (いない) qui sont d’excellents morceaux que j’aime vraiment beaucoup. Le son live de Tricot est très présent et puissant, je dirais même englobant tant le son occupe tout l’espace. La batterie est percutante, la voix d’Ikkyu ne manque pas d’intensité et de nuances, comme sur les albums. Comme sur les albums, la technique impeccable des guitares et de la batterie se mélange parfaitement avec l’émotion palpable qui se dégage du chant des trois filles de Tricot.

Il y a beaucoup de morceaux que j’écoute pour la première fois mais ils m’accrochent tout de suite. Le grand classique Ochansensu-su (おちゃんせんすぅす) du premier album THE est également interprété avec beaucoup de malice de la part de Kida qui commande le reste du groupe avec ses arrêts et redémarrages de guitare. Quelques autres morceaux de l’album THE sont également interprétés, mais bizarrement aucun des deuxième et troisième albums A N D et 3. Entendre des morceaux que j’ai beaucoup écouté a forcément une saveur particulière et je jubile en écoutant les deux morceaux joués à la suite de l’album Makkuro, Right Brain Left Brain (右脳左脳) et surtout Himitsu (秘蜜), qui est comme je le disais ci-dessus le morceau que je préfère de cet album. L’entendre sur scène me donne des frissons. Les morceaux s’enchaînent sans temps morts à part les pauses que s’autorise le groupe pour parler au public. Le dernier single End roll (エンドロールに間に合うように) sorti peut avant ce concert est bien entendu interprété. Il s’agissait de la première interprétation sur scène du morceau pour le groupe et Ikkyu semble prendre un malin plaisir a taquiner Hiromi car elle a le tract lors des premières interprétations sur scène de morceau. Ça ne se ressentait par pour autant. Les membres du groupe ne se déplacent pas beaucoup sur scène mais sont loin d’être immobiles notamment Motifour Kida qui se laisse emporter par le son de sa guitare. Elle vient quand même à un moment embêter Ikkyu de l’autre côté de la scène. Ikkyu fait d’ailleurs de même à un autre moment. Il se dégage une énergie positive du groupe qui me plaît beaucoup et qui fait même beaucoup de bien. Les interprétations sur scène étant impeccables, je ne regrette pas de m’être plonger dans cette énergie rock étourdissante.

Comme je le disais plus haut, les trois photos prises à l’iPhone sont les miennes (Tricot a d’ailleurs laissé un ‘like’ sur mon tweet les remerciant). Les suivantes proviennent des comptes Twitter et Instagram de Tricot et d’Ikkyu Nakajima. Je me permets aussi de montrer les quatre petites photos suivantes provenant du site Realsound.jp qui fait une revue de ce concert. Pour référence ultérieure, je note aussi ci-dessous les titres des morceaux interprétés lors de ce concert.

WALKING × WALKING TOUR 2021-2022 – Toyosu Pit (豊洲ピット) – 27 Février 2022:

1. Talk (言い尽くすトークします間も無く), de l’album Jōdeki (上出来)
2. Super Summer (スーパーサマー), de l’album Jōdeki (上出来)
3. Summer Night Town (サマーナイトタウン), de l’album 10
4. Omotenashi (おもてなし), de l’album THE
5. Right Brain Left Brain (右脳左脳), de l’album Makkuro (真っ黒)
6. Himitsu (秘蜜), de l’album Makkuro (真っ黒)
7. Kayoko (カヨコ), de l’album Jōdeki (上出来)
8. Dogs and Ducks, de l’album Jōdeki (上出来)
9. Ochansensu-su (おちゃんせんすぅす), de l’album THE
10. WARP, de l’album 10
11. Walking (餌にもなれない), de l’album Jōdeki (上出来)
12. Inai (いない), de l’album Jōdeki (上出来)
13. Night Monster (夜の魔物), de l’album Jōdeki (上出来)
14. POOL, de l’album THE
15. Itsumo (いつも), de l’album Jōdeki (上出来)
16. Bakuro (暴露), de l’album Jōdeki (上出来)
17. Omae (おまえ), de l’album 10
18. End roll (エンドロールに間に合うように), nouveau single
19. Hitoyasumi (ひとやすみ), de l’album Jōdeki (上出来)
20. Oyasumi (おやすみ), de l’album THE