Le parc autour du château de Sekiyado (関宿城) est vaste et sans délimitations très précises. A part le château et son musée, il y a très peu d’habitations autour, ce qui donne le sentiment d’un lieu un peu perdu de tout. Quelques personnes étaient venues comme nous admirer les fleurs de cerisiers se mélangeant au jaune des fleurs de colza, mais l’endroit restait paisible. On apprécie beaucoup plus les cerisiers en fleurs dans leur environnement naturel, plantés dans les hautes herbes. On s’y aventure un peu et on aimerait y rester pendant plusieurs heures mais le soleil commence déjà à se coucher doucement. Ce billet termine cette petite série de deux fois deux épisodes entre Chiba et Ibaraki.
Mois : avril 2024
les sakura de Noda (1)
En regardant le château de la première photographie, on pourrait avoir l’impression d’être parti très loin de Tokyo, alors que nous ici à Chiba, de l’autre côté du grand fleuve Tonegawa par rapport à la petite ville de Sakai que je montrais dans les deux précédents billets. Le château de Sekiyado (関宿城) se trouve à Noda, à l’extrémité d’une étroite portion de terre située entre les fleuves Edogawa et Tonegawa. Cette bande de terre de Chiba est placée entre les préfectures d’Ibaraki lorsqu’on traverse le fleuve Tonegawa et de Saitama lorsqu’on traverse le fleuve Edogawa. On comprend tout à fait que cet endroit pouvait être autrefois stratégique, permettant le contrôle du traffic fluvial à la confluence de ces deux grands fleuves au Nord du Kantō, et qu’on y ait donc implanté un château. A la fin de la période Edo, le château de Sekiyado était le fief du clan Kuse, daimyo du domaine, mais il fut détruit et abandonné pendant la période de la restauration Meiji qui ordonna la destruction de toutes les fortifications de l’ancien Japon féodal. Le château actuel date de 1995 et est désormais l’annexe d’un musée. Nous n’avons pas visité le musée mais grandement profité du parc tout autour.
人類最後の少女元年
Je me promène autour du S de Shibuya dans lequel on ne peut pas encore entrer. Le complexe Shibuya Sakura Stage ne semble pas complètement ouvert mais il s’y déroule déjà quelques événements comme celui de la marque de cosmétique Essential de Kao Corporation présentant ses nouveaux produits et la publicité qui va avec. Le groupe NewJeans fait la promotion de cette marque et sort par la même occasion un nouveau single lié à sa publicité. Une file d’attente s’était formée dans le large couloir du building pour entrer à l’intérieur de l’espace d’exposition, mais les membres du groupe ne semblaient pas avoir fait le déplacement. J’imagine la cohue si elles avaient été là dans les couloirs du Sakura Stage. Les jeunes fans se prenaient plutôt en photo devant une grande affiche publicitaire prévue à cette effet. La dernière photographie du billet n’est pas prise au même endroit. Il s’agit d’une vue en contre-plongée du building Octagon Ebisu (オクタゴン恵比寿) par l’architecte Shin Takamatsu (高松伸). Elle a été construite en 1992 mais n’a pas pris une ride. Son maquillage coule par contre un peu autour de ses gros yeux noirs globuleux. Le tour se tient fièrement comme au premier jour au pied d’un croisement de cinq rues.
Le weekend dernier était la deuxième édition du festival Coachella 2024 qui m’a donné l’occasion de voir certains des artistes que j’avais manqué lors du premier week-end. J’ai donc pu voir la prestation du groupe électronique L’Impératrice dont je parlais dans un billet précédent et qui a confirmé tout le bien que je pense de la musique de cette formation. La jubilation de jouer sur la scène de Coachella se lisait très clairement sur leurs visages et ça faisait plaisir à voir. Je n’en avais pas parlé dans mon billet précédent mais j’avais vu lors du premier week-end une partie du live du groupe new-yorkais Vampire Weekend, dont je n’ai pas écouté la musique depuis plus de dix ans. Sans être un amateur inconditionnel du groupe, je trouve leur single Classical sur leur nouvel album Only God Was Above Us vraiment excellent. Il est même très étonnement numéro 1 du classement Tokio Hop 100 de la radio J-Wave pour le week-end dernier. Ce morceau me replonge une nouvelle fois dans cette musique alternative du tout début des années 2010 et de la toute fin 2000, que je trouvais particulièrement imaginative. Merriweather Post Pavillon d’Animal Collective et Veckatimest de Grizzly Bear sont deux monuments sortis en 2009 qui symbolisent pour moi cette période. De ces deux albums, les morceaux Ready, Able et No More Runnin’ sont d’une grande sensibilité et tout simplement beaux à en pleurer. J’ai pu voir lors du deuxième week-end une partie du set de Grimes qui n’a pas rencontré cette fois-ci de problèmes techniques majeurs mais qui n’en restait pas moins assez fade. Ce ne sont pas les grandes images synthétiques en fond d’écran qui ont rattrapé le coup. Une bonne partie de ces images de personnages animés étaient certainement générées par intelligence artificielle car elles avaient ce côté lisse et déjà vu, qui me mettent personnellement mal à l’aise. Les images générées par AI ont tendance à tendre vers une même imagerie standard qui essaie à mon avis de rétrécir les angles de la perception humaine. Côté musique électronique, le set des français de Justice était par contre tout à fait exceptionnel en ayant une approche scénique plus traditionnelle. Gaspard Augé et de Xavier de Rosnay étaient débout imperturbables en costumes blancs devant leurs claviers et consoles électroniques, et la puissance des faisceaux de lumières autour d’eux étaient impressionnantes. Accompagnant des morceaux instrumentaux au son puissant comme Generator, cela créait un espace conceptuel futuriste froid de toute beauté. Du coup, je me suis mis à écouter plusieurs morceaux de leur nouvel album Hyperdrama, comme Generator, Incognito, Saturnine et surtout One Night/All Night interprété en collaboration avec les australiens de Tame Impala. J’ai développé une sorte d’obsession pour ce morceau et ce refrain qui se répète (And I can be your woman ‘Cause if that’s the only answer Then we could be together) que j’ai écouté plusieurs dizaines de fois. J’ai toujours aimé la voix de Kevin Parker, mais elle s’accorde particulièrement bien avec le son électronique de Justice. De Tame Impala, il faut écouter le morceau Let it Happen de l’album Currents de 2015, qui atteint à mon avis un des sommets de la musique du groupe, notamment pour son décrochage conceptuel à mi-morceau tout simplement génial.
Dans les groupes japonais à Coachella, j’étais particulièrement curieux de voir la performance d’Atarashii Gakko! (新しい学校のリーダーズ) qui concluait le festival sur la scène Gobi. Leur set valait clairement le détour car elles sont de véritables furies inarrêtables sur scène. Je ne suis particulièrement amateur de leurs morceaux récents comme Otona Blue (大人ブルー) qui mettait beaucoup en avant leur chorégraphie facilement imitable sur TikTok, au profit de la qualité de leur musique. Mais ce morceau leur a donné une grande popularité et une assurance sur scène qui est assez impressionnante. Elles ont certes l’habitude de la scène américaine et étaient même populaires là bas avant de l’être au Japon, mais je trouve qu’elles se sont transformées et maîtrisent parfaitement les techniques pour faire bouillir un public qui ne demande que ça, beaucoup mieux que la politesse timide de Yoasobi. Suzuka est par exemple hyper active, s’activant au plus près du public, se faisant tenir en l’air par les personnes du public au pied de la scène. Elles étaient très clairement électrisées par le public et heureuses d’être sur scène. Le problème tout de même est qu’elles ont tendance à surjouer la carte du crazy Japanese, c’est à dire les japonais qui vont des choses folles qu’on arrive pas à comprendre mais qui font bien rire. Elles arrivent bien sûr à jouer de cela. Visuellement, leur set était impressionnant et extrêmement ludique mais musicalement, je reste quand même un peu sur ma faim. Si j’avais l’occasion de les voir en concert, j’irais tout de même très volontiers même si je n’aime pas beaucoup voir Suzuka tirer la langue sans arrêt, car ce n’est pas très poli.
En fait, j’aime beaucoup certains morceaux plus anciens d’Atarashii Gakko! comme Saishū Jinrui (最終人類) sorti en 2018 sur leur tout premier album Maenarawanai (マエナラワナイ). Elles ont en fait interprété ce morceau avec beaucoup d’énergie sur la scène de Coachella, ainsi qu’un autre intitulé NAINAINAI, dont j’avais déjà parlé sur ce blog, pour le final mouvementé et plein de rebondissements. Les musiques de Saishū Jinrui, et de tout leur premier album d’ailleurs, ont été composées par H ZETT M, aka Masayuki Hiizumi (ヒイズミマサユ機). Il joue d’ailleurs du piano sur ce morceau et rien que le fait de savoir que c’est lui qui joue me procure un sentiment de grande satisfaction. Je ne suis pas sûr d’en avoir déjà parlé sur ce blog, mais j’aime aussi réécouter de temps en temps le morceau ShōJo Gannen (少女元年) du groupe pop électronique Urbangarde (アーバンギャルド) sur lequel Atarashii Gakko! danse et chante dans les chœurs. Urbangarde est un groupe actif depuis 2002 avec actuellement trois membres permanents à savoir Yōko Hamasaki (浜崎容子) au chant, Temma Matsunaga (松永天馬) également au chant et Kei Ohkubo (おおくぼけい) aux claviers. La présence de Yōko Hamasaki est tout a fait remarquable avec un look mélangeant underground SM et kawaii pop, mais c’est la figure théâtrale du deuxième chanteur Temma Matsunaga qui m’intrigue beaucoup car on a d’abord un peu de mal à comprendre son rôle exact dans le groupe. Il accompagne bien Yōko au chant mais on ne remarque vraiment sa voix que si on écoute le morceau au casque. Son look étrange avec une coupe de cheveux au carré et des lunettes de professeur apporte un certain décalage à l’image générale du groupe. Le pianiste Kei Ohkubo est brillant et il a même collaboré il y a quelques années avec Jun Togawa pour un album collaboratif, que je n’ai pas écouté car Jun a malheureusement beaucoup perdue de sa voix tellement unique. Shōjo Gannen a une dynamique et une accroche assez immédiate et cette association avec Atarashii Gakko! est très bien vue. Du coup, j’ai une grande envie d’aller piocher dans la discographie très étoffée d’Urbangarde et dans le premier album d’Atarashii Gakko!.
les sakura de Sakai (2)
Continuons encore un peu en photographies avec les cerisiers de la petite ville de Sakai à Ibaraki. Avant de reprendre la voiture, nous marchons un peu plus vers la deuxième partie du parc tout en longueur. On fait un détour tout simplement parce que c’est joli. Les cerisiers y ont des branches basses qui donnent un effet d’encombrement visuel, de trop plein (sakura overload). Des petits groupes de personnes y marchent en évitant les branches, se font prendre en photo au milieu des fleurs ou se posent sur le sol pour faire Hanami avec la dose de boissons alcoolisées qui va avec mais qu’ils doivent très certainement consommer avec la modération d’usage.
les sakura de Sakai (1)
Dans notre quête insatiable des cerisiers en fleurs, nous nous éloignons du centre de Tokyo pour la préfecture voisine d’Ibaraki. Nous nous arrêtons d’abord dans la petite ville de Sakai, située à proximité de la préfecture de Chiba. On choisit souvent notre itinéraire en fonction des stations routières (道の駅) pour y déjeuner et j’avais particulièrement envie de voir celle de Sakai car une partie très facilement reconnaissable a été conçue par Kengo Kuma. Cette petite partie de la station comportant des restaurants et magasins se nomme SHED. Notre prochaine étape était d’aller admirer les cerisiers dans un grand parc de plus de mille arbres au bord de la rivière Nakagawa. Ce parc nommé Gongendo Tsutsumi (権現堂堤) a été montré récemment dans une émission télévisée et on a eu tout d’un coup peur de la foule. On a en fait préféré aller explorer le parc situé à côté de la station de Sakai, le long du grand fleuve Tone. Sous un ciel bleu, les fleurs jaunes du colza (菜の花) se mélangeaient avec la couleur rosée des fleurs de cerisiers et cette association était magnifique. Je ne sais pas, par contre, si c’est courant de voir les fleurs de colza fleurirent en même temps que celles des cerisiers.