La visite du château d’Inuyama était une idée du fiston, tout comme Hikone l’année dernière. Dans la série des châteaux classés trésors nationaux, nous aurions également voulu visiter le château d’Himeji mais ça faisait un peu loin en voiture. Je ne suis pas contre les longs trajets en voiture, surtout sur la Shin-Tomei où on peut rouler à 120km/h, mais pour Himeji, le trajet aurait été fatiguant pour tout le monde à faire en une seule journée. Pour ces longs trajets, je construis à chaque fois une playlist musicale qui me permet de rester concentrer (tout en fredonnant). Ce sont d’ailleurs souvent les mêmes morceaux qui se répètent de voyage en voyage. Ma playlist faisait en tout 4h14mins et nous avons stationné sur le parking du château d’Inuyama exactement à la fin du dernier morceau de ma playlist. J’en viens à me demander si je n’ai pas réglé ma vitesse sur la durée de ma playlist.
Après la visite du château d’Inuyama, nous passons à travers les deux sanctuaires situés à son entrée, celui d’Haritsuna et celui de Sarutahiko, dont le nom nous est familier car il y en a plusieurs au Japon, même à Tokyo. Le petit pont de Torii rouges du sanctuaire Sarutahiko attirent tout de suite mon regard, d’autant plus que deux jeunes filles en yukata ont la bonne idée d’être là au bon moment. En prenant cette photo, je me souviens avoir déjà vu ce passage et ces petites plaquettes de bois Ema (絵馬) en forme de cœur sur le blog de mahl. Avant de reprendre la route pour une plus courte durée cette fois-ci, nous faisons une courte pause dans un petit café nommé Cocotomo, qui semble récent malgré ce que laisse présager la grande porte à l’entrée. Nous bifurquons ensuite volontairement en voiture pour traverser l’ancienne rue Honmachi dirigée vers le château. Nous passerons la nuit dans la ville proche de Gifu au bord du fleuve Nagara, qui se déverse dans la baie d’Ise comme le fleuve Kiso.
Nos petites vacances d’été viennent de se terminer. Comme à notre habitude, elles étaient courtes mais denses, enfin peut-être un peu moins occupées que celles de l’année dernière dans la préfecture de Shiga. Nous sommes partis trois jours pour deux nuits à la recherche des châteaux japonais. Notre objectif était de retourner à Aichi pour aller d’abord visiter le château d’Inuyama que nous n’avions pas pu voir l’année dernière, faute de temps. Tout comme le château d’Hikone que nous avons visité l’année dernière et celui de Matsumoto que nous sommes allés voir en début d’année, le château d’Inuyama est un château historique classé comme trésor national. Il a heureusement été préservé des destructions de signes de guerre pendant la restauration Meiji, ce qui n’a pas été le cas de nombreux château japonais. Les premières constructions du château datent de 1440 mais le bâtiment actuel date de 1537, construit sous la supervision du seigneur Oda Nobuyasu, l’oncle du seigneur de guerre Oda Nobunaga, un des unificateurs du Japon pendant la période Sengoku (1477 – 1573). À partir de 1617, le château devient la propriété du clan Naruse, vassaux du clan Matsudaira dont fait partie Tokugawa Iieyasu. Il restera sous le giron des Naruse pendant presque 400 ans, jusqu’à 2004. Ça me surprend d’ailleurs qu’un château pareil reste une propriété privée pendant aussi longtemps. Le domaine d’Inuyama se trouve dans l’ancienne province d’Owari, au bord du fleuve Kiso qui sert de frontière entre les actuels préfectures d’Aichi et de Gifu.
Après quatre heures et demi d’un long trajet en voiture sur l’autoroute Shin-Tomei, nous ne sommes pas mécontents d’arriver enfin à notre destination. Alors qu’on approche de la ville d’Inuyama, nous recherchons du regard un château perché dans les montagnes, mais il nous faut vraiment approcher de notre destination pour finalement l’apercevoir, majestueux en haut d’une colline surplombant le fleuve. De premier abord, sa taille me fait penser à celle du château d’Hikone. Il n’est pas aussi grandiose et élégant que le château de Matsumoto mais son emplacement lui donne une beauté toute particulière. Il faisait environ 38 degrés dehors lors de notre visite et nous n’avons pas trouvé la fraîcheur à l’intérieur de la forteresse, malgré les gros ventilateurs placés à certains endroits. On grimpe les escaliers très inclinés du donjon (Tenshu) jusqu’au dernier étage. Le parquet grince sous nos pas, ce qui inquiète Zoa, ou le surprend plutôt. Ce qui m’inquiète personnellement est de faire le tour du dernier étage du donjon sur le balcon de bois dont la balustrade est particulièrement basse. Je succombe toujours au vertige et je n’ai donc pas pu en faire le tour. Les photographies de la vue magnifique sur le fleuve et sur la ville sont donc prises à une certaine distance du bord du balcon. Le bâtiment étant historique, il n’y a bien entendu aucune barrière de protection additionnelle. Ce petit contretemps ne m’empêche pas de profiter du reste du château, qui se visite assez rapidement tout de même, et de tenter différentes prises photographiques depuis l’approche du château à travers les branchages. Cet espace devant le château est particulièrement agréable et nous ferait presqu’oublier la chaleur ambiante.
Pour la dernière partie de notre voyage de trois jours, nous restons encore un peu dans la préfecture de Aichi en passant visiter le temple Toyokawa Inari. Son véritable nom est Enpukuzan Toyokawa-kaku Myōgon-ji (円福山 豊川閣 妙厳寺) mais on l’appelle plus simplement Toyokawa Inari. Comme je le mentionnais récemment, nous allons régulièrement à la branche tokyoïte de ce temple, à Akasaka devant la pâtisserie Toraya. Le temple fondé en 1441 a la particularité, comme je l’expliquais dans un autre billet, de mélanger bouddhisme et shintoïsme. Le temple en lui-même est principalement bouddhiste mais on y trouve des symboles shintō comme un Torii et de très nombreuses statues de la divinité renard Inari. Des centaines de statues sont d’ailleurs regroupées dans une partie appelée Reiko-Zuka à l’arrière du temple. Ce foisonnement de statuettes me rappelle le temple Gōtokuji dans la banlieue de Tokyo mais avec des statuettes de Maneki Neko plutôt que des Inari. Le hall principal du temple sur la première photographie a été reconstruit pendant la période Tenpō (天保) entre 1830 et 1844. Sa taille et sa couleur noire m’impressionne beaucoup. Je ne sais pour quelle raison mais je lui trouve un côté rétro-futuriste comme un casque de Dark Vador.
Le chemin du retour sur l’autoroute Tomei me fait toujours peur pour ses bouchons le dimanche soir à l’approche de Tokyo au niveau de Ebina. On préfère stratégiquement s’arrêter avant, à Mishima puis Numazu pour passer la soirée dans le parc Kakitagawa traversé par une rivière d’eau claire provenant du Mont Fuji. Alors que le soleil se couche déjà, nous gagnons le port de Numazu avant 8h du soir pour du poisson en chirashizushi. L’autoroute a dû se dégager pendant ce temps là car le traffic était d’une fluidité parfaite. Le voyage a été court mais nous a bien aéré l’esprit, ce qui était l’objectif premier. On aurait envie de reprendre la route immédiatement. J’ai en fait énormément apprécié le fait d’avoir la voiture sous la main à tout moment ce qui donne une grande liberté par rapport au Shinkansen, qui était plutôt notre transport par défaut lors des quelques fois où on s’est déplacé vers Kyoto. Et pour le titre de cette série qui se termine avec ce billet, il s’agit bien évidemment d’une variation du nom du concert de Sheena Ringo Chotto Shita Reko Hatsu (ちょっとしたレコ発).
Le Gamagori Classic Hotel sur la baie de Mikawa, à une soixantaine de kilomètres de la ville de Nagoya, était notre étape suivante. Nous avons passé une nuit dans cet ancien hôtel datant de 1912. L’intérieur ne semble pas avoir été beaucoup modifié depuis cette époque, donc il mérite bien son appellation d’hôtel classique. Il est situé sur une petite colline de 40m de hauteur donnant une belle vue sur la baie et sur la petite île de Takeshima juste en face. Le jardin japonais, avec un étang contenant quelques carpes koi, est très bien entretenu, tout comme l’intérieur de l’hôtel d’ailleurs. L’hôtel ne contient que 27 chambres mais il a une apparence grandiose. Il ressemble à un château car les toitures en reprennent le design. Pendant sa centaine d’années d’existence, un certain nombre de personnalités ont séjourné dans cet hôtel, comme l’Empereur Showa en 1957 et l’Empereur Akihito en 1965 alors qu’il n’était encore que prince. Quelques écrivains reconnus appréciaient également cet hôtel comme Yasunari Kawabata (川端康成), Shōtarō Ikenami (池波正太郎) ou encore Yukio Mishima (三島由紀夫), entre autres. Cet hôtel de Gamagori me rappelle un autre très bel hôtel classique, le Fujiya de Hakone que nous avions visité il y a plusieurs années. Yukio Mishima y avait d’ailleurs séjourné mais le visiteur le plus prestigieux sans doute était John Lennon.
Lorsqu’on ouvre les rideaux au petit matin, on a une vue directe sur l’île de Takeshima reliée à la côte par une passerelle piétonne. Cette passerelle de 387 mètres démarre et se termine par des Torii qu’elle traverse même à proximité de l’île. Nous décidons d’y aller tôt le matin avant le petit déjeuner car la pluie guette. Cette île ressemble à une boule dense de verdure. Elle semble d’abord impénétrable, mais lorsque l’on monte les quelques marches après la passerelle et qu’on entre à l’intérieur de la forêt, on y découvre une série de sanctuaires shintō. L’un d’entre eux, le sanctuaire Yaotomi est dédié à la déesse de la musique Benten. On dit même de cette île qu’elle un « power spot ». La légende nous dit aussi que le futur shogun Tokugawa Ieyasu s’y est arrêté pour se recueillir avant de partir pour la bataille de Sekigahara en 1600. Nous traversons la petite île et on arrive assez rapidement à son extrémité donnant une très belle vue sur l’océan pacifique à travers les branches de pin. Un chemin nous fait descendre sur les rochers au bord de l’océan. On remarque assez rapidement un autre chemin semblant faire le tour de l’île. Nous tentons notre chance mais on n’est pas sûr que ce petit chemin soit praticable jusqu’à l’entrée de l’île. Lorsque que nos pas approchent, des dizaines et des dizaines d’insectes maritimes s’écartent soudainement du chemin. On pense immédiatement aux petites boules noires de poussière qui quittent la maison familiale lorsqu’on ouvre les portes dans Totoro. Le monde de Ghibli nous a accompagné pendant ces vacances. Nous avons eu une bonne intuition car le chemin nous ramène en effet au Torii à l’entrée de l’île. Pendant notre traversée de l’île, la mer s’est un peu retirée. On y revient un peu plus tard après le petit déjeuner pour constater qu’on peut pratiquement gagner l’île à pieds sans emprunter la passerelle car l’océan s’est en grande partie retiré. Il nous faut quand même enlever nos chaussures pour traverser le petit chenal qui nous sépare de l’île. On marche les pieds dans l’eau en évitant les coquillages, et dès qu’on arrête nos mouvements, la vie reprend dans le sable. L’atmosphère de ce lieu me plaît beaucoup. J’aimerais passer plusieurs heures les pieds dans l’eau du pacifique, mais la route du retour nous attend déjà. On s’arrêtera une nouvelle fois en chemin pour retarder le plus tard possible notre retour à Tokyo.
Alors que j’écris mon billet sur Kashihara Jingu, il y a quelques semaines de cela, me revient en tête notre visite à Ise Jingu en Novembre 2013 et je me rends compte que je n’avais publié aucune photo de ce court voyage il y a 5 ans. La raison de cette absence de billet sur le sujet m’échappe complètement. Devant le nombre de photographies à sélectionner pendant ce genre de voyages, le courage ou le temps nécessaire pour sélectionner et écrire un billet m’a peut être manqué à cette époque. Je rattrape donc le coup des années plus tard avec ce billet.
En fait, je repense également à ce voyage à Nagoya car la configuration de nos visites étaient assez similaires à celle de notre récent voyage à Osaka. Nous logions dans la ville qui servait de point d’accroche vers d’autres lieux autour. Depuis Nagoya, nous nous sommes déplacés vers Okazaki et le sanctuaire de Ise Jingu. Depuis Osaka, c’était vers Nara et le sanctuaire Kashihara Jingu. Sur les deux voyages, nous avons également visité le château, celui de Nagoya et celui de Osaka. J’ai par contre assez peu de souvenir du centre de Nagoya, car nous étions restés principalement aux alentours de la gare.
Une des raisons de ce passage à Nagoya était la visite organisée de l’usine de fabrication automobile Mitsubishi à Okazaki. Nous sommes partis en bus avec un groupe depuis la station de train de Nagoya. Sur le chemin, nous passons voir une fabrique de miso appelée Hatcho Miso no Sato, puis le petit château de Okazaki. Sur la chaine de montage automobile Mitsubishi, les photographies n’étaient bien sûr pas autorisées, donc je me suis contenté de quelques anciens modèles automobiles exposées dans une salle annexe.
La deuxième raison, la principale, était la visite du sanctuaire Ise Jingu. Comme on peut le voir sur les photographies, il semble neuf, ce qui est le cas car le rite veut qu’il soit reconstruit tous les 20 ans. Il venait juste d’être reconstruit un peu plus tôt dans l’année, juste à côté de l’ancien sanctuaire construit 20 ans auparavant. Nous avions volontairement choisi notre visite pendant cette période car l’ancien sanctuaire n’avait pas encore été détruit. Il y a une courte période de temps pendant laquelle les deux sanctuaires cohabitent. L’ancien sanctuaire a été ensuite détruit pour laisser place à un espace vide qui sera utilisé dans 20 ans pour construire un nouveau sanctuaire, et ainsi de suite, dans un renouvellement éternel et ininterrompu. De cette manière, les techniques ancestrales de construction de ces sanctuaires en bois se perpétuent de génération en génération et se trouvent donc préservées. Parmi les photographies ci-dessus, je montre les nouvelles et anciennes structures avec leurs toitures caractéristiques, ainsi que les palissades de bois de l’ancien et du nouveau sanctuaire cohabitant à moins d’un mètre l’un de l’autre. Cette dernière photographie ne peut donc être prise que tous les 20 ans.
Ise Jingu est le sanctuaire Shinto le plus sacré du Japon, composé de deux sanctuaires principaux: le Naiku ou sanctuaire intérieur et le Geku ou sanctuaire extérieur. Il y aussi une multitude de petits sanctuaires à différents endroits du site. Le sanctuaire intérieur Naiku est dédié à la Déesse du Soleil Amaterasu, descendante du couple originel mythologique Izanagi et Izanami et ancêtre de la famille impériale japonaise. Ise Jingu est un lieu de pèlerinage et le site avec son immense forêt est sacré. L’architecture des sanctuaires est très intéressante mais, on n’en voit qu’assez peu car on ne peut pas entrer à l’intérieur. En fait, ce qu’il y a de plus beau à Ise Jingu, c’est l’ambiance de cette forêt aux arbres immenses parcourue par la rivière Isuzugawa délimitant l’espace sacré et dont l’entrée est un pont en bois appelé Ujibashi.
Nous passerons le jour suivant à Nagoya, voir les trains dont le fameux Rinia Motorcar au SCMaglev and Railway Park. Je ne manque pas d’aller faire un tour rapide vers la tour en spirale Nagoya Mode Gakuen. Je me souviens de la visite du château en fin de journée alors que les lumières du jour commencent à faiblir. A mon souvenir, il n’y avait que très peu de personnes autour du château. Lorsque je le prends en photo, il ressemble étrangement à une miniature.