and if you dare to get hurt I will be there my friend

Je ne sais pas si c’est Chanmina (ちゃんみな), avec la vidéo de son single Biscuit, qui a provoqué le retour des groupes ou chanteurs et chanteuses improvisés près du grand carrefour et de la gare de Shibuya, mais j’ai le sentiment qu’ils sont plus présents depuis quelques temps, ce qui est plutôt une bonne nouvelle. Ce soir là à Shibuya, j’ai pu apercevoir un rocker guitariste avec une apparence qui m’a beaucoup rappelé Kurt Cobain, avec une même chevelure blonde et portant ce qui ressemble beaucoup à une copie de l’iconique sweater en mohair rouge et noir que Kurt portait dans la vidéo du morceau Sliver et lors de concerts, notamment à la Roseland Ballroom de New York en Juillet 1993 et à l’Aragon Ballroom de Chicago en Octobre 1993. L’histoire raconte que Courtney Love aurait acheté ce sweater pour 35 livres à un fan, nommé Chris Black, après un concert de Nirvana à Belfast en Irlande du Nord en 1992. Une coïncidence intéressante était d’écouter quelques jours plus tard l’émission spéciale de Very Good Trip de Michka Assayas consacrée à l’album MTV Unplugged in New York sous le format d’une Masterclass. Ce concert pratiquement acoustique a été enregistré en Novembre 1993, quelques mois avant la mort de Kurt Cobain le 5 Avril 1994. A quelques mètres de l’apprenti Kurt, un rappeur japonais attirait une petite foule autour de lui, mais j’ai peiné à y trouver une accroche qui m’aurait fait rester plus de deux minutes. Plus près de la gare, une autre chanteuse à guitare acoustique appelée Rin (りん) était installée devant un bloc de béton. Je l’ai écouté quelques minutes, un peu distraitement. Il y avait seulement quelques personnes devant elle, mais une de ces personnes la filmait avec une petite caméra installée sur un tripod. Il n’est pas rare que ces chanteurs et chanteuses de rue aient leurs fans de la toute première heure. Peut-être s’agit il d’un membre de sa famille, mais j’avais plutôt le sentiment qu’il s’agissait d’un amateur espérant peut-être saisir en images les premiers moments d’une potentielle reconnaissance future. A quelques mètres de son emplacement, je vois encore circuler les karts touristiques qui se font de plus en plus nombreux dans les rues de Tokyo. Les agences qui proposent ce genre d’attractions se sont beaucoup développées ces deux dernières années depuis le retour des touristes étrangers. Ce qui m’étonne toujours un peu, c’est de ne jamais voir de japonais conduire ces karts, comme s’ils étaient strictement réservés aux étrangers. Ils n’attirent en tout cas plus la curiosité des passants, ce qui était pourtant le cas au tout début où les passants et les conducteurs de kart se faisaient des bonjours de manière réciproque. Le sur-tourisme actuel ne me dérange personnellement pas beaucoup, car il se limite à certains quartiers, mais je vois sur les réseaux sociaux de plus en plus de résidents étrangers pointer ce problème. J’imagine que ces mêmes résidents ont également été touristes au Japon avant de venir y vivre. En fait, peut être pas car en y réfléchissant bien, je ne suis jamais venu en touriste au Japon. Mais comme on dit toujours, il y a le bon touriste et le mauvais touriste.

Le billet précédent montrant une collection d’affiches de films de Shinya Tsukamoto (塚本晋也) dans un petit cinéma indépendant de Meguro m’a ramené vers sa filmographie. J’ai regardé trois de ses films quasiment à la suite en commençant par Hiruko the Goblin (妖怪ハンター ヒルコ) sorti en 1991, puis Bullet Ballet (バレット・バレエ) sorti en 1998 et A Snake of June (六月の蛇) sorti en 2002. Hiruko the Goblin est son deuxième film après Tetsuo: The Iron Man (鉄男) sorti en 1989, et est un peu à part dans sa filmographie car il s’agit d’un film d’horreur faisant intervenir des monstres Yōkai. On suit l’archéologue un peu excentrique Reijiro Hieda, interprété par Kenji Sawada (沢田研二), sur les traces d’un ancien ami ayant eu la mauvaise idée de libérer le monstre ancestral Hiruko d’une tombe enfouie sous une école perdue en pleine campagne. Il s’agit d’un film d’horreur qui n’est pas dénié d’un certain humour, mais l’épouvante monte en intensité et le final est particulièrement étrange. De Tsukamoto, on retrouve les plans rapides qui nous font perdre l’équilibre et une imagination débordante, parfois à la limite de l’acceptable, mais qui m’accroche à chaque fois à ses films. Il y a une ambiance un peu absurde et exagérée dans ce film qui participe à son charme. Bien sûr, il ne faut pas être repoussé par les têtes coupées et les monstres constitués de ces mêmes têtes posées sur des pattes d’araignée. Je pense que cette dernière phrase donne une bonne idée de l’ambiance du film. J’ai revu ensuite Bullet Ballet. Je l’avais vu une première fois il y a vingt ans, après Tokyo Fist. On revient ici vers un style urbain qui est plus fidèle à ce que je connais du réalisateur. Bullet Ballet se vit comme une expérience cinématographique et je comprends tout à fait le statut de cinéaste culte auquel est porté Shinya Tsukamoto. Ce n’est pas un film pour tous les yeux, car la violence y est omniprésente, mais le film n’est pas dénié d’une poésie urbaine cachée derrière ses images fortes. L’histoire est tournée autour de Goda, un publicitaire joué par Shinya Tsukamoto, dont la compagne vient de se suicider avec un revolver. Il devient fasciné par cette arme car il ne comprend pas comment elle a pu l’obtenir et se décide à en construire une pièce par pièce. Il rencontre rapidement dans les quartiers sombres de Tokyo, la jeune Chisato, jouée par Kirina Mano (真野きりな) et son gang aux prises avec un autre gang rival. Une relation particulière se crée entre eux, platonique peut-être. Goda et Chisato n’ont en tout cas pas peur de la mort et n’ont rien à perdre. Je ne sais pas s’il y a une influence, mais je revois en Chisato, aux cheveux très courts et à la personnalité mystérieuse, le personnage de Faye dans Chungking Express dont je parlais très récemment. Je ne suis apparemment pas le seul à y penser (ce blog a décidément une logique impeccable dans l’agencement de ses billets). Esthétiquement, le film entièrement en noir et blanc est très beau, tout comme les membres du gang exagérément stylisés. J’aime aussi beaucoup ce film pour sa musique composée par le fidèle Chu Ishikawa (石川忠) dans un style entre rock industriel et passages électroniques plus apaisés. Ces compositions musicales s’accordent parfaitement aux images souvent iconiques du film. J’écoute beaucoup cette bande originale aussi variée qu’excellente de bout en bout. De nombreux plans nous montrent Nishi-Shinjuku au loin, donc j’imagine que cette histoire se déroule dans les bas-fonds de la banlieue de Shinjuku, ayant disparus depuis longtemps. Comme dans Tokyo Fist, on y retrouve le thème de la ville qui écrase les individus et celui du besoin de libération par la violence et la douleur. Ce dernier point est une composante essentielle de la filmographie de Shinya Tsukamoto et on retrouve ce thème dans le film A snake of June, que je regarde ensuite. Je le dis encore, mais les films de Tsukamoto ne sont pas pour tous. Ils sont en tout cas très marquants et c’est le cas également de ce film là. On remarque tout de suite l’image, d’un monochrome bleuté superbe, et la malaisante générale qui nous suit pendant tout le film. L’histoire tourne autour du personnage de Rinko Tatsumi, interprétée Asuka Kurosawa (黒沢あすか), aide sociale sauvant des vies au téléphone en essayant de convaincre ceux qui l’appellent de tenir bon à la vie. C’est le cas du suicidaire Iguchi, également interprété par Shinya Tsukamoto, qui se voit sauver par les paroles de Rinko et qui se sent ensuite redevable. La personnalité décalée et extrême d’Iguchi amènera Rinko dans une spirale malsaine qui la fera sortir malgré elle et au prix d’une grande souffrance de sa vie monotone. De nombreuses scènes montrent sa vie de couple avec Shigehiko, interprété par Yuji Kohtari (神足裕司), dans une demeure en béton brut que l’on imaginerait très bien avoir été conçue par Tadao Ando. Mais Shigehiko fuit le foyer pour sa vie de bureau, en plus d’être un maniaque obsessionnel de l’hygiène. Les interventions d’Iguchi dans cette vie de couple dysfonctionnelle se teintent de voyeurisme sexuel et de manipulations. Il s’agit là encore d’un film décalé qui nous amène vers les parts sombres des individus pour accéder finalement à une forme de libération qui passe par la douleur. Ces deux films Bullet Ballet et A snake of June ne sont pourtant pas complètement noirs et désespérés car une redemption pointe à l’horizon, provoquée en partie par les personnages interprétés par Tsukamoto lui-même. Les films de Tsukamoto montre souvent un cheminement souvent destructeur, mais de cette destruction nait une nouvelle réalité. Ces films ne sont pas disponibles sur les plateformes de streaming mais on peut assez facilement les trouver sur Internet du côté d’archive.org, qui nous donne malgré tout accès à des films qui seraient malheureusement assez difficiles à trouver autrement.

Pour continuer encore un peu dans les ambiances underground, j’écoute l’excellent nouveau single de Yeule intitulé Evangelic Girl is a Gun, qui sera inclus dans son futur album prenant le même nom. L’ambiance y est sombre mélangeant un rock bruitiste à tendance industriel avec des glitches électroniques caractéristiques de sa musique. Je n’ai jamais été déçu jusqu’à maintenant par la musique de Yeule, et je trouve même que ce morceau passe une nouvelle étape qui laisse présager le meilleur pour son nouvel album. L’accroche y est immédiate et la densité nous fait y revenir. J’espère qu’elle prévoira dans le futur une tournée passant par le Japon et Tokyo, car je serais très curieux de voir l’atmosphère de ses concerts, tout en me demandant quel public pourrait bien y assister. Je suis sûr que son public japonais est nombreux dans les milieux underground.

Le titre du billet « and if you dare to get hurt I will be there my friend » est extrait des paroles du morceau Yzobel composé par l’artiste français Gyeongsu et chanté par Croché. J’avais découvert ce morceau il y a plusieurs mois dans un episode de Liquid Mirror de NTS Radio, celui de Février 2023 que je réécoute maintenant. Cet extrait des paroles me semblait tout d’un coup correspondre à l’ambiance qui se dégage de manière diffuse dans ce billet. Pour revenir ensuite à l’épisode d’Avril 2025 de Liquid Mirror que je mentionnais récemment, je retiens particulièrement l’excellent morceau instrumental intitulé Weaver par K-MPS & Finn Kraft qui me transporte à chaque écoute. Je réalise assez vite que ce morceau est basé assez amplement sur un sample du morceau Crazy for You de Slowdive sur leur troisième album studio Pygmalion sorti en 1995 (le moins Shoegaze de leurs albums). Pour être plus précis, Weaver est en fait basé sur une version démo alternative de Crazy for You disponible sur le deuxième CD de la réédition de Pygmalion en 2010. K-MPS & Finn Kraft en maintiennent le rythme initial mais rajoute de nombreuses nappes électroniques donnant une dimension plus aérienne par rapport aux morceaux originaux de Slowdive.

des cerisiers mais également autres choses (4)

Lorsque j’approche de la station de Meguro, j’aime passer devant le Meguro Cinema (目黒シネマ). C’est un petit cinéma opéré par Okura Eiga Co. (大蔵映画株式会社) proposant des films indépendants et des classiques plus anciens du cinéma japonais et étranger. Ce cinéma de 100 places a été fondé en 1955 et a pris son nom actuel en 1976. J’aime entrer dans son hall composé d’un grand escalier pour y voir les affiches. L’affiche du film Tetsuo de Shinya Tsukamoto (塚本晋也) avait en fait attiré mon attention. A l’intérieur, une collection de posters des films de Shinya Tsukamoto est affichée. J’en ai déjà vu quatre: Tokyo Fist, Bullet Ballet, Tetsuo, Kotoko, et j’en avais parlé pour certains sur les pages de ce blog. Ce ne sont pas des films que l’on regarde à la légère pour se divertir. Tetsuo (The Bullet Man) est certainement son film le plus réputé et a un statut de film culte. On ne ressort jamais complètement indemne d’un film de Tsukamoto. J’avais montré une photo de cette collection d’affiches sur X Twitter et j’ai été surpris de recevoir autant de « likes » (plus de 80). En fait, le réalisateur lui-même a été le premier a re-poster ma photo sur X Twitter, ce qui lui a forcément donné une visibilité certaine. Ce type de films sans concession attire admiration et haine, et X Twitter est très fort pour exacerber ces sentiments. Parmi les affiches du Meguro Cinema, j’aperçois également Paprika de Satoshi Kon et Ghost in the Shell de Mamoru Oshii, deux classiques incontournables du cinéma d’animation. Je reviendrais bientôt sur le monde de Ghost in the Shell et de son auteur Masamune Shirow dans un prochain billet.

Les derniers Sakura de cette petite série se trouvent au parc Tako (タコ公園) d’Ebisu. Nous avons vu très peu de cerisiers cette année. Nous aurons peut-être encore le temps d’en apercevoir si nous voyageons un peu plus au Nord, mais rien n’est prévu pour l’instant. En écrivant ces quatre courts billets, j’écoute à nouveau l’émission Liquid Mirror d’Olive Kimoto sur la radio web NTS. L’épisode du 1er Avril 2025 propose comme toujours un mélange de Trip-hop, d’Ambiant et de Dream Pop, et le mix est à chaque très inspiré.

dans le calme de Kuhonbutsu

Je retenais du temple Kuhonbutsu Jōshinji (九品仏浄真寺) une image de verdure abondante qui rendait l’endroit presque sauvage, mais en y revenant en hiver, je me suis bien évidemment rendu compte que l’abondance du vert était en pause saisonnière. J’aurais dû m’en douter, mais ça ne m’a pas empêché d’apprécier ces lieux. Malgré les saisons, on trouve des personnes assises sur les bancs à l’intérieur de l’enceinte du temple. L’abondance de personnes assises par deux comme dans un café pour discuter m’avait surpris la première fois. Il y avait cette fois-ci un groupe de photographes d’un certain âge. Je les suis avec un hall de retard. Un autre photographe avec appareil photo en bandoulière, indépendant au groupe, me suit également avec un hall de retard. Il y a plusieurs halls alignés contenant chacun des grandes statues bouddhistes avec d’étranges couleurs bleues vives. Ils me saluent de la main droite, je m’incline doucement en retour et je continue mon chemin vers le grand hall qui leur fait face. Je me procure le sceau goshuin du temple puis repars me perdre dans les rues des quartiers résidentiels vers la colline des libertés (Jiyugaoka), que je connais assez peu. Depuis la station de Jiyugaoka, je longe la voie ferrée qui m’amène jusqu’à Gakugei Daigaku. En chemin, on peut traverser le petit parc Himonya en très grande partie composé d’un étang avec une petite île sur laquelle a été déposé le sanctuaire Itsukushima. Je ne traverse pas le pont qui y mène mais j’aurais peut-être dû. J’ai eu un peu peur que traverser ce pont m’amène encore vers des histoires imaginaires.

En revenant ensuite vers Ebisu, les toilettes en béton conçues par le designer Masamichi Katayama (片山正通) et sa société Wonderwall me rappelle le film Perfect Days de Wim Wenders que j’ai vu pendant les premiers jours de cette année. Le film franco-allemand suit la vie routinière d’Hirayama, un nettoyeur de toilettes publiques, magnifiquement interprété par Kōji Yakusho (橋本広司), dans les quartiers de Shibuya-ku (où se trouvent toutes les toilettes d’architectes et designers reconnus). Aoi Yamada (アオイヤマダ) y joue également un petit rôle. Je n’étais pas surpris car je savais qu’elle y jouait. Un certain nombre de scènes du film se passent dans et près des toilettes conçues par Toyo Ito (伊東豊雄) à Yoyogi Hachiman. Après leur nettoyage, on imagine qu’Hirayama prend ses pauses déjeuner dans le parc du sanctuaire Yoyogi Hachimangu situé juste à côté. Hirayama a choisi une vie simple, ce qui fait réfléchir. Il prend tous les jours des photos argentiques de ce qui l’entoure et les classe dans une boîte en ne les regardant que très rapidement. Il a choisi une vie simple, mais est-ce que ça lui suffit pleinement?

Nous sommes ici dans d’autres lieux et un autre jour. Cette petite colline se trouve près d’Hachiōji. Il s’agit d’une ferme qui a eu l’idée de se diversifier et de créer un café en faut de ses terres. On peut voir les vaches et les chèvres puis boire un chocolat chaud dans la café. Ce café attire la jeunesse car de nombreuses choses y sont instagrammables. Ça me rappelle d’ailleurs que je n’ai pas publié de nouvelles photos sur Instagram depuis début Décembre 2024, même si j’avais matière pour le faire. Je n’ai pas publié de tweets sur X Twitter depuis Septembre 2024. Je me suis en quelques sortes un peu lassé des réseaux sociaux même si je continue à les parcourir régulièrement. Viendra peut-être un jour où je me lasserais de Made in Tokyo. Ce blog va bientôt atteindre les 2500 billets publiés, et je n’ose pas me demander combien de photos j’y ai montré et combien de mots j’y ai écrits. Je réfléchis en ce moment à changer le thème du blog car celui actuellement en place n’a pas changé depuis 2017, à part le titrage qui est plus récent. Je me dis à chaque fois que celui existant est plus simple et immédiat que tous les autres thèmes que j’ai pu essayer ces derniers mois.

dans la tranquillité de Yoshimi Kannon

Nous sommes déjà passés par la petite ville de Yoshimi dans la préfecture de Saitama pour aller voir les tombes creusées à flanc de collines de Yoshimi Hyakuana (吉見百穴), mais notre passage cette fois-ci était principalement pour acheter des fraises de Saitama appelées Amarin (あまりん). Nous les trouvons dans une station routière (道の駅) qui est bien nommée Ichigo no Sato (いちごの里吉見). Nous en profitons pour regarder autour à la recherche de lieux intéressants à visiter et nous découvrons le temple Anrakuji (安楽寺), également nommé Yoshimi Kannon (吉見観音). Le temple est paisible avec seulement quelques visiteurs en fin d’après-midi. Nous arrivons un peu avant 16h et le moine du temple referme déjà les portes du hall principal au moment de notre départ. Une des particularités de ce temple fondé à l’ère de Nara est d’avoir une pagode à trois étages (三重塔). Anrakuji évoque pour moi un autre temple portant le même nom dans la petite station thermale de Bessho Onsen (別所温泉) dans la préfecture de Nagano. Cet autre temple que nous avions visité en 2022 possède une étrange pagode en bois de forme octogonale, qui possède une sorte de magnétisme qui m’avait inspiré le septième chapitre de l’histoire de Kei, Du songe à la lumière. C’est un lieu qui reste pour moi tout à fait spécial, notamment parce que la petite station thermale était quasiment déserte, juste à la fin de la crise sanitaire.

Je viens de terminer les dix épisodes de la série Shōgun disponible sur la chaine Disney+. On s’est en fait abonné à Disney+ pour regarder cette série américaine qui a été acclamée à juste titre par la critique. La série a été créée par Rachel Kondo et Justin Marks et est basée sur le roman du même nom de James Clavell publié en 1975. Je n’avais que de très vagues souvenirs de la première adaptation télévisée qui en avait été faite dans les années 80 avec Richard Chamberlain et Toshirō Mifune (三船 敏郎), car je devais être trop jeune. Cette nouvelle série est grandiose par sa mise en scène mais ne montre pourtant pas de grandes batailles car l’essentiel de l’histoire se joue dans le petit village d’Ajiro à Izu et dans les palais d’Osaka et d’Edo. On apprécie le fait que la série n’a pas été américanisée ni adaptée pour satisfaire les goûts du plus grand nombre. La grande majorité des dialogues sont en japonais sous-titré et l’ensemble de ces dialogues, les états d’être complexes des personnages et les situations ont gardé une authenticité vraiment surprenante. Je ne suis pas spécialiste de ces époques anciennes mais c’est du moins l’impression très nette que donne cette adaptation. À part le pilote maritime protestant anglais John Blackthorne, interprété par Cosmo Jarvis, débarqué par bateau sur les terres japonaises près d’Izu, la grande majorité des acteurs et actrices sont japonais. Anna Sawai (アンナ・サワイ) joue un des personnages clés de l’histoire autour du seigneur Toranaga interprété brillamment par Hiroyuki Sanada (真田広之). L’histoire se construit principalement autour de la relation entre le seigneur Toranaga, qui pourrait devenir le futur shōgun réunifiant le Japon, et l’étranger anglais, le Anjin, mais certains personnages secondaires sont particulièrement intéressants, en particulier Kashigi Yabushige, seigneur d’Izu au service de Toranaga. Il est interprété par Tadanobu Asano (佐藤忠信). J’aime aussi beaucoup certains rôles féminins comme la Dame Fuji, interprétée par Moeka Hoshi (穂志もえか), contrainte d’être la consort de l’anglais Anjin. J’aime ces deux personnages en particulier car ils laissent parfois transparaître leur soi profond derrière les codes rigides du système féodal et societal de cette époque.

tunnel vision

L’année se termine bientôt et je ne l’ai pas vu passer. J’ai pourtant l’impression qu’il s’est passé beaucoup de choses cette année, mais rien de vraiment nouveau sur ce blog. Je me suis certainement posé moins de questions sur le fait de continuer ou pas à écrire, même si celles-ci reviennent inlassablement lorsque l’année se termine. Il me reste un certain nombre de photographies à montrer mais une toute petite volonté d’écrire, comme si toute la fatigue de l’année s’était emmagasinée et m’avait enlevé toute capacité à me concentrer pour écrire quelques lignes. C’est bizarre comme la fin d’une année se ressent comme une fin de cycle qui me fait à chaque fois réfléchir si je devrais de nouveau démarrer un nouveau cycle. Il m’est souvent arrivé d’annoncer les derniers jours de ce blog dans les brouillons d’un billet que j’étais en train d’écrire, pour ensuite me corriger. Même si la question de complètement arrêter Made in Tokyo ne se pose pas vraiment, l’écriture est parfois tellement laborieuse que je me demande si elle est vraiment nécessaire. Elle n’est parfois pas vraiment nécessaire, ni pour moi ni pour les autres.

Voir apparaître soudainement le drama Beautiful Life dans les nouvelles recommandations sur NetFlix m’a replongé au tout début des années 2000. Je ne me souviens pas avoir regardé beaucoup de drama à l’époque mais celui-ci avait accompagné quelques mois de mes premières années à Tokyo. Le drama Beautiful Life (ビューティフルライフ 〜ふたりでいた日々〜) a été diffusé sur la chaîne TBS du 16 Janvier au 26 Mars 2000. Je ne suis pas certain d’avoir regardé tous les épisodes à l’époque mais je me souviens très bien avoir suivi cette histoire jusqu’à son dénouement. J’ai eu envie de me replonger dans les onze épisodes de la série en les regardant une nouvelle fois sur NetFlix. L’actrice Takako Tokiwa (常盤貴子) y joue le rôle de Kyōko Machida (町田杏子), une bibliothécaire en fauteuil roulant, et Takuya Kimura (木村拓哉), celui de Shūji Okishima (沖島柊二), styliste d’un salon de coiffure réputé sur la grande avenue d’Omotesando. Une histoire d’amour pleine de rebondissements se noue entre Kyōko et Shūji, avec toutes les complications que peuvent apporter la situation physique et la maladie de Kyōko. Il y a de nombreux moments émouvants dans cette série, notamment dans les réactions de Kyōko qui semblent très justes, même si on ne peut que difficilement se mettre à sa place. Un autre intérêt de cette série est de revoir Aoyama en l’an 2000. De nombreux bâtiments ont été remplacés, notamment celui où se trouve le salon de coiffure. On y trouve maintenant le bâtiment du magasin Louis Vuitton. J’y aperçois également l’ancien bâtiment de verre Hanae Mori conçu par Kenzo Tange que j’avais pris en photo en 2006, ainsi que les vieilles résidences Dojunkai remplacées par Omotesando Hills. Et je repense à une série de photographies par Yūki Kanehira de ces Aoyama Dojunkai Apartments (青山同潤会アパート).

Et côté musiques rock et pop japonaises, j’écoute tant de choses que j’aurais un peu de mal à écrire avec détails sur tous les morceaux et albums de ma playlist actuelle. On y trouve le dernier single en date d’Utada Hikaru, Electricity. Ce morceau est présent sur la compilation Science Fiction sorti en Avril 2024, mais je n’y avais pas prêté attention jusqu’à la sortie récente de la vidéo. Je reviens également vers le jeune trio rock Brandy Senki (ブランデー戦記), dont j’ai parlé récemment pour le superbe single Coming-of-age Story (青春の物語), avec deux très bons morceaux: Nightmarish du même EP A Nightmare Week, et le tout dernier single du groupe, 27:00, sorti le 19 Novembre 2024 (la photo ci-dessus est tirée de ce morceau). J’ai aussi beaucoup écouté l’album Antenna (アンテナ) de Quruli (くるり) sorti en 2004, un album apaisé que j’ai beaucoup apprécié où chaque morceau oscille entre le rock et le folk. Ça ne m’a pas empêché de l’intercaler avec l’album DOOR (ドアー) de Ging Nang Boyz (銀杏BOYZ), qui est sorti en 2005 en même temps que leur premier album album You & I’s WW III Love Revolution (君と僕の第三次世界大戦的恋愛革命). Le style punk criard et volontairement immature de l’album DOOR y est similaire, mais il ne s’agit pas de mon album préféré du groupe. AiNA The End a sorti son troisième album Ruby Pop sorti le 27 Novembre 2024 contenant certains singles dont j’ai déjà parlé ici comme Love Sick ou Red:birthmark, entre autres. L’album est assez long avec 17 morceaux et malgré trois d’entre eux que je trouve moyens et que je passe à chaque écoute de l’album, la plupart des morceaux sont très bons. Je retiens surtout Kaze to Kuchizuke to (風とくちづけと), Entropy, Heart ni Heart (ハットにハット) et le sublime Ho (帆). Ce morceau est d’ailleurs celui par lequel elle a démarré son concert ENDROLL au Nippon Budokan (日本武道館) le 11 Septembre 2024. Je mentionne ce concert car il est disponible en intégralité sur Amazon Prime. J’avais pensé essayer d’acheter une place pour ce concert lorsqu’elle l’avait annoncé, mais je ne sais pour quelle raison j’avais hésité, peut-être parce qu’il y a toujours quelques uns de ses morceaux qui me plaisent moins comme sur cet album. En regardant ce concert sur Amazon Prime, je regrette un peu de ne pas y être allé, surtout dans une salle mythique comme le Budokan. Je n’ai pour l’instant aucun concert de prévu pour l’année prochaine et ça me manque un peu de ne rien avoir en vue à l’horizon. Et je termine cette retrospective par un duo inattendu d’Utaha (詩羽) et de Cent (セントチヒロ・チッチ ex-BiSH) sur un single extrêmement sympathique intitulé Bonsai. Utaha s’échappe de temps en temps de Wednesday Campanella (水曜日のカンパネラ) pour écrire ses propres morceaux, et ce n’est pas une mauvaise idée. Pour celui-ci, elle écrit en fait les paroles avec Cent et Soshi Maeshima compose la musique.