tunnel vision

L’année se termine bientôt et je ne l’ai pas vu passer. J’ai pourtant l’impression qu’il s’est passé beaucoup de choses cette année, mais rien de vraiment nouveau sur ce blog. Je me suis certainement posé moins de questions sur le fait de continuer ou pas à écrire, même si celles-ci reviennent inlassablement lorsque l’année se termine. Il me reste un certain nombre de photographies à montrer mais une toute petite volonté d’écrire, comme si toute la fatigue de l’année s’était emmagasinée et m’avait enlevé toute capacité à me concentrer pour écrire quelques lignes. C’est bizarre comme la fin d’une année se ressent comme une fin de cycle qui me fait à chaque fois réfléchir si je devrais de nouveau démarrer un nouveau cycle. Il m’est souvent arrivé d’annoncer les derniers jours de ce blog dans les brouillons d’un billet que j’étais en train d’écrire, pour ensuite me corriger. Même si la question de complètement arrêter Made in Tokyo ne se pose pas vraiment, l’écriture est parfois tellement laborieuse que je me demande si elle est vraiment nécessaire. Elle n’est parfois pas vraiment nécessaire, ni pour moi ni pour les autres.

Voir apparaître soudainement le drama Beautiful Life dans les nouvelles recommandations sur NetFlix m’a replongé au tout début des années 2000. Je ne me souviens pas avoir regardé beaucoup de drama à l’époque mais celui-ci avait accompagné quelques mois de mes premières années à Tokyo. Le drama Beautiful Life (ビューティフルライフ 〜ふたりでいた日々〜) a été diffusé sur la chaîne TBS du 16 Janvier au 26 Mars 2000. Je ne suis pas certain d’avoir regardé tous les épisodes à l’époque mais je me souviens très bien avoir suivi cette histoire jusqu’à son dénouement. J’ai eu envie de me replonger dans les onze épisodes de la série en les regardant une nouvelle fois sur NetFlix. L’actrice Takako Tokiwa (常盤貴子) y joue le rôle de Kyōko Machida (町田杏子), une bibliothécaire en fauteuil roulant, et Takuya Kimura (木村拓哉), celui de Shūji Okishima (沖島柊二), styliste d’un salon de coiffure réputé sur la grande avenue d’Omotesando. Une histoire d’amour pleine de rebondissements se noue entre Kyōko et Shūji, avec toutes les complications que peuvent apporter la situation physique et la maladie de Kyōko. Il y a de nombreux moments émouvants dans cette série, notamment dans les réactions de Kyōko qui semblent très justes, même si on ne peut que difficilement se mettre à sa place. Un autre intérêt de cette série est de revoir Aoyama en l’an 2000. De nombreux bâtiments ont été remplacés, notamment celui où se trouve le salon de coiffure. On y trouve maintenant le bâtiment du magasin Louis Vuitton. J’y aperçois également l’ancien bâtiment de verre Hanae Mori conçu par Kenzo Tange que j’avais pris en photo en 2006, ainsi que les vieilles résidences Dojunkai remplacées par Omotesando Hills. Et je repense à une série de photographies par Yūki Kanehira de ces Aoyama Dojunkai Apartments (青山同潤会アパート).

Et côté musiques rock et pop japonaises, j’écoute tant de choses que j’aurais un peu de mal à écrire avec détails sur tous les morceaux et albums de ma playlist actuelle. On y trouve le dernier single en date d’Utada Hikaru, Electricity. Ce morceau est présent sur la compilation Science Fiction sorti en Avril 2024, mais je n’y avais pas prêté attention jusqu’à la sortie récente de la vidéo. Je reviens également vers le jeune trio rock Brandy Senki (ブランデー戦記), dont j’ai parlé récemment pour le superbe single Coming-of-age Story (青春の物語), avec deux très bons morceaux: Nightmarish du même EP A Nightmare Week, et le tout dernier single du groupe, 27:00, sorti le 19 Novembre 2024 (la photo ci-dessus est tirée de ce morceau). J’ai aussi beaucoup écouté l’album Antenna (アンテナ) de Quruli (くるり) sorti en 2004, un album apaisé que j’ai beaucoup apprécié où chaque morceau oscille entre le rock et le folk. Ça ne m’a pas empêché de l’intercaler avec l’album DOOR (ドアー) de Ging Nang Boyz (銀杏BOYZ), qui est sorti en 2005 en même temps que leur premier album album You & I’s WW III Love Revolution (君と僕の第三次世界大戦的恋愛革命). Le style punk criard et volontairement immature de l’album DOOR y est similaire, mais il ne s’agit pas de mon album préféré du groupe. AiNA The End a sorti son troisième album Ruby Pop sorti le 27 Novembre 2024 contenant certains singles dont j’ai déjà parlé ici comme Love Sick ou Red:birthmark, entre autres. L’album est assez long avec 17 morceaux et malgré trois d’entre eux que je trouve moyens et que je passe à chaque écoute de l’album, la plupart des morceaux sont très bons. Je retiens surtout Kaze to Kuchizuke to (風とくちづけと), Entropy, Heart ni Heart (ハットにハット) et le sublime Ho (帆). Ce morceau est d’ailleurs celui par lequel elle a démarré son concert ENDROLL au Nippon Budokan (日本武道館) le 11 Septembre 2024. Je mentionne ce concert car il est disponible en intégralité sur Amazon Prime. J’avais pensé essayer d’acheter une place pour ce concert lorsqu’elle l’avait annoncé, mais je ne sais pour quelle raison j’avais hésité, peut-être parce qu’il y a toujours quelques uns de ses morceaux qui me plaisent moins comme sur cet album. En regardant ce concert sur Amazon Prime, je regrette un peu de ne pas y être allé, surtout dans une salle mythique comme le Budokan. Je n’ai pour l’instant aucun concert de prévu pour l’année prochaine et ça me manque un peu de ne rien avoir en vue à l’horizon. Et je termine cette retrospective par un duo inattendu d’Utaha (詩羽) et de Cent (セントチヒロ・チッチ ex-BiSH) sur un single extrêmement sympathique intitulé Bonsai. Utaha s’échappe de temps en temps de Wednesday Campanella (水曜日のカンパネラ) pour écrire ses propres morceaux, et ce n’est pas une mauvaise idée. Pour celui-ci, elle écrit en fait les paroles avec Cent et Soshi Maeshima compose la musique.

along those lines

Cette série de photographies a été prise au milieu de l’été à proximité de la baie de Tokyo. Je me déplace souvent avec mon vélo fixie en ce moment, et cette fois-ci était jusqu’à la station d’Hamamatsuchō. Depuis la station, on peut parcourir à pieds une longue passerelle surélevée qui nous m’amène jusqu’au port de Takeshiba. De ce point là, on peut prendre le bateau jusqu’au îles d’Izu, entre autres. Je n’irais pas jusque là même si ça serait tentant de retourner vers l’île Shikinejima que j’avais découvert il y a 25 ans avec un groupe d’amis. Shikinejima est une petite île dont on a vite fait le tour. Il me semble que la traversée en bateau prenait environ huit heures. Depuis la passerelle tout près de la station d’Hamamatsuchō, on aperçoit le jardin de Kyū Shiba Rikyū (旧芝離宮恩賜庭園) que je n’ai pas encore visité. En 1678, le site où se trouve le parc était utilisé pour la résidence de samouraï de Ōkubo Tadamoto, fonctionnaire du shogunat Tokugawa à la période Edo. La résidence et son jardin ont changé plusieurs fois de mains pour ensuite devenir propriété impériale. Le site fut grandement détruit par le grand tremblement de terre de 1923, puis les jardins furent remis en état et ouvert plus tard au public. Sur le chemin du retour, j’aperçois un petit festival dans la rue commerciale de Shirogane, ce qui me donne l’occasion de m’arrêter quelques instants.

Je suis tout juste de retour de Hong Kong pour un séjour non touristique qui ne m’a pas laissé beaucoup de temps pour divaguer dans les rues de Hong Kong. Notre unique séjour touristique à Hong Kong date de 2005, mais j’y suis allé de nombreuses fois depuis. Je pensais trouver un peu de temps dans l’avion ou dans mon hôtel pour écrire tous les textes en retard de mes billets de blog, mais je n’ai finalement pas écrit un seul mot. J’ai préféré regarder des films, notamment les fabuleux Furiosa de George Miller, de la série Mad Max, avec Anya Taylor-Joy dans le rôle titre, puis la deuxième partie de Dune de Dénis Villeneuve avec Timothée Chalamet et Zendaya, entre autres. Ces deux films matérialisent à l’écran des univers et esthétiques tout à fait spécifiques. Je vois là deux monuments cinématographiques qui resteront dans ma mémoire. Je trouve qu’ils se ressemblent même un peu en certains points.

Musicalement, je suis subjugué par la beauté du nouveau single de FKA twigs intitulé Eusexua, qui sera présent sur son prochain album du même nom. Je pensais avoir perdu le fil des créations musicales de FKA Twigs depuis son deuxième album Magdalene sorti en 2019, mais en fait pas vraiment, car elle n’a pas sorti de nouvel album studio depuis celui-ci. Eusexua sera donc son troisième album. Le premier single Eusexua laisse en tout cas présager le meilleur. C’est un morceau en suspension comme elle arrive tellement bien à le faire, plein d’une délicate émotion palpable comme si elle était à fleur de peau. Tiens j’utilisais cette même expression sur mon billet au sujet du concert d’Haru Nemuri et elle poste justement un extrait d’Eusexua sur son compte Instagram, comme quoi Haru doit apprécier la musique de FKA Twigs. Bien que leurs styles soient très différents, j’ai le même sentiment que ces deux artistes ne trichent pas avec le profond intérieur qu’elles semblent exprimer sans filtres.

덧붙여 대는 세공

Je fais beaucoup de nouvelles découvertes musicales en ce moment et j’ai un peu de mal à trouver le temps nécessaire pour écrire des billets spécifiques pour chacune d’entre elles. Je regroupe donc dans ce billet un certain nombre de ses nouvelles musiques qui sont pour moi à chaque fois passionnantes. On commence tout d’abord par le morceau Summer Anthem (サマーアンセム) de Mononoke. Comme son titre le suggère, ce morceau a été emblématique de mon été car il a accompagné avec beaucoup d’autres notre voyage en voiture vers la péninsule de Kii. Ce morceau a un petit quelque chose d’estival qui me convient très bien pour cette deuxième partie et toute fin d’été. La musique pop rock de ce jeune compositeur et interprète de 19 ans originaire de la ville d’Akashi dans la préfecture de Hyogo n’a bien entendu pas de lien particulier avec la princesse de l’univers Ghibli. Mononoke assure par lui-même la composition, l’écriture, les arrangements et la production de ses morceaux et les chante avec une voix à la fois forte et très mélodieuse. C’est quand même assez impressionnant à ce jeune âge et très prometteur. J’ai découvert ce morceau grâce à la playlist RADAR: Early Noise de Spotify, que je découvre un peu par hasard en consultant les playlists de l’application de streaming que je n’utilise pourtant pas d’ordinaire. Cette même playlist contient un autre excellent morceau de style rock indé intitulé Kid Blue par le groupe Enfants, sur leur 3ème EP D. sorti le 31 Juillet 2024. Ce nom de groupe en français est apparemment un diminutif du nom « Les enfants dans la lune », mais je n’ai pas réussi à obtenir plus d’information, car des recherches internet sur ce nom ne m’amènent bien sûr pas vers les pages du groupe.

J’ai également dans ma playlist le dernier single de Hitsuji Bungaku (羊文学) intitulé Burning. Il sert de thème pour l’anime Oshinoko (推しの子) et on peut d’ailleurs reconnaître le personnage d’Ai Hoshino (星野アイ) sur une de mes photographies en montage ci-dessus. Le morceau est très fort en guitares puissantes et bruyantes dès les premières notes. J’aime bien quand Moeka Shiotsuka joue dans ce registre car ça contraste idéalement avec sa voix et son chant beaucoup plus aérien. Je retrouve ensuite avec beaucoup de plaisir Emaru (エマル) et Asahi (朝日) de macaroom sur leur nouvel album intitulé Burning Chrome sorti le 7 Juillet 2024. La délicatesse vaporeuse du chant d’Emaru sur le sublime morceau Geinin (芸人) m’attire forcément. On a l’impression que sa voix effleure les choses, s’en approche très près sans les toucher, comme une pluie fine qui s’évapore avant de toucher le sol. C’est très beau et touchant. J’aime aussi beaucoup le morceau Burning Chrome reprenant le titre de l’album, dans un registre plus dynamique et moins retenu.

Depuis son single Tamashii (たましい) qui m’a beaucoup plu, je suis resté très curieux d’écouter les nouveaux morceaux d’ELAIZA (池田エライザ) et je découvre maintenant le single FREAK, qui me fait un peu penser à l’ambiance musical de Génie High. Le morceau a pourtant été écrit par Shizuku (雫) du groupe Polkadot Stingray (ポルカドットスティングレイ). Je pense que je vais continuer à la suivre pour son chant et la manière par laquelle elle s’approprie différents styles. A ce propos, Elaiza Ikeda, qui est également actrice, jouait le rôle de la policière d’investigation Kuramochi aux cotés de Lily Franky (リリー・フランキー) dans l’excellente série Les Escrocs de Tokyo (地面師たち ou Tokyo Swindlers) réalisée par Hitoshi One (大根仁) disponible sur NetFlix. Cette série prenant pour thèmes des histoires de fraude foncière à Tokyo est tout simplement passionnante et prenante au point où on a beaucoup de mal à en décrocher. Les acteurs et actrices sont excellents, Go Ayano (綾野剛) et Etsushi Toyokawa (豊川悦司), mais également Eiko Koike (小池栄子) et un certain Pierre Taki (ピエール瀧), la moitié du groupe Denki Groove (電気グルーヴ) avec Takkyu Ishino (石野卓球) qui compose d’ailleurs les musiques de la série. Pour revenir vers le rock indépendant japonais, le morceau on the beach (渚で会いましょう) de Laura day romance est une très belle découverte. Je connaissais le nom de ce groupe depuis un petit moment car il m’intriguait et je ne regrette pas de m’être plongé dans cette ambiance indie folk assez apaisé où on entend par moment le mouvement des vagues de la dite plage du titre. Laura day romance est un jeune groupe tokyoïte formé en 2017 par trois musiciens membres du même club de musique de l’Université de Waseda, Kazuki Inoue (井上花月) au chant, Jin Suzuki (鈴木 迅) à la guitare et Yūta Isomoto (礒本 雄太). Il s’agit là encore d’une affaire à suivre de près.

Dans un style pop rock plus tendu, j’écoute également le très bon morceau NOISE du mystérieux compositeur et interprète WurtS. Ce morceau est le thème du film Blue Period (ブルー・ペリオド) réalisé par Kentarō Hagiwara (萩原健太郎) et tiré d’un manga du même nom par la mangaka Tsubasa Yamaguchi (山口つばさ). On suit l’histoire de Yatora Yaguchi (矢口八虎), interprété par l’acteur Gordon Maeda (眞栄田郷敦), fils de Sonny Chiba, lycéen doué, mais qui s’ennuie, dans son aspiration à devenir artiste en passant le concours d’entrée de l’école des Beaux Arts de Tokyo. Mari m’avait conseillé d’aller voir ce film car elle a elle-même traversé les mêmes étapes pour entrer dans cette école. Regarder le film m’a donné envie de reprendre mes crayons pour revenir vers mes formes futuro-organiques. J’ai d’ailleurs à tout moment un dessin en cours que je reprends quand l’envie me vient.

Et pourquoi le titre coréen du billet? Tout simplement parce qu’il fait écho à un billet similaire dans son approche esthétique et parce que je continue à écouter les nouveaux singles de NewJeans, Supernatural et How Sweet. NewJeans est le seul groupe K-Pop actuel que j’apprécie, peut-être en raison de son approche musicale 90-00s qui me rappelle à une époque où j’étais beaucoup plus jeune.

laisser le béton

« Dis moi, tu connais Blockbusters? »
« Non, c’est quoi au juste? »
« C’est une émission de radio sur France Inter. Regardes, je te montre sur mon iPhone, il y a une appli qui permet d’y accéder facilement. Ça parle de culture pop des années 80 et 90. »
« Ah ouais, génial mais c’est en français, j’y comprends rien, laisses béton ».

J’écoute en ce moment assidûment le podcast Blockbusters de France Inter animé par Frédéric Sigrist, consacré à la culture pop de divers horizons. Cette émission me parle beaucoup car l’animateur a le même âge que moi et les thèmes qu’il sélectionne sont par conséquent très proches de ma propre culture pop. J’ai commencé à enchaîner les épisodes quand je me suis rendu compte en fouillant dans les archives qu’on y parlait du film Les Goonies (1985) réalisé par Richard Donner d’après une histoire écrite par Steven Spielberg. En écoutant cette émission, je me suis remémoré la première fois où j’ai vu le film, et ce souvenir reste encore très clair dans a mémoire. C’était une diffusion un vendredi soir sur Canal+ alors qu’un ami de la famille nous avait prêté son décodeur pendant ses vacances. Ma sœur et moi avions tellement aimé le film qu’on l’avait regardé dès le jour suivant pour une rediffusion. Une autre émission du podcast couvre la série Twin Peaks (1990-91). Je l’ai découvert bien après sa sortie alors que je vivais déjà à Tokyo. J’étais déjà amateur du cinéma de David Lynch après avoir été choqué par Lost Highway (1997) au cinéma, mais je n’ai acheté les DVDs des deux saisons de Twin Peaks que bien plus tard. Je me souviens avoir dévoré cette série avec Mari. On était tous les deux accrochés à l’ambiance si particulière de cette petite ville fictive de l’Etat de Washington. La troisième saison sortie beaucoup plus tard en 2017 était un autre choc. Cette émission Blockbusters m’a ensuite donné envie de revoir Lost Highway que j’ai en DVD à la maison. Une autre émission parle de la série culte Seinfeld (1989-1998), que l’on a découvert en France sur la chaîne Canal Jimmy disponible à l’époque par abonnement satellite. Canal Jimmy nous avait fait découvrir un grand nombre de séries américaines, car Friends (1994-2004) y passait également. Je me souviens également de la série Spin City (1997-2003) avec l’acteur Michael J.Fox en chef de cabinet du maire de New York. Mais Seinfeld avait vraiment un humour particulier où un épisode pouvait se construire sur un rien, comme par exemple un homme portant une cape en pleine rue. Blockbusters parle bien évidemment de manga et de films d’animation avec l’incontournable Neon Genesis Evangelion dont j’avais vu les épisodes lors de leur première diffusion en France sur Canal+ en 1998. Les manga et anime n’avaient pas encore la popularité actuelle. Dans Blockbusters, on nous parle également du manga sombre Gunnm de Yukito Kishiro que j’avais suivi dès le premier tome sorti chez Glenat en 1995. Je garde cette série de manga précieusement. C’est amusant de voir abordé dans ce podcast une bonne partie des films et séries qui ont marqué pour moi la deuxième partie des années 1980 et les années 1990. On y parle par exemple d’Arnold Schwarzenegger. J’ai eu ma période de films d’action basiques pendant mon adolescence que j’avais démarré avec Commando (1985), puis Predator (1987) bien avant Terminator 2 (1991), Total Recall (1990) et True Lies (1994). L’Arme Fatale (1987), bien entendu couvert dans ce podcast, avait également été marquant. J’avais commencé la série par le deuxième épisode (1989) vu sur Canal+, en adorant tout de suite l’ambiance mélangeant une noirceur certaine avec l’humour du buddy movie, le tout accompagné par un saxophone particulièrement marquant. On y parle beaucoup d’anime avec le monde de Rumiko Takahashi (Ranma 1/2, Ramu, entre autres) et bien sûr celui d’Hayao Miyazaki pour lequel une émission de 5h est consacrée ainsi qu’une autre sur les deux chefs d’oeuvres que sont Princesse Mononoke et Le voyage de Chihiro. Bon, il y a bien des sujets d’émissions plus récents qui ne me parlent pas du tout comme Taylor Swift, Aya Nakamura ou Orelsan, mais dans l’ensemble j’y trouve une correspondance assez bluffante avec ma propre culture pop. Le podcast évoque aussi souvent les jeux vidéos, mais c’est un domaine que je connais moins à part quand il s’agit de franchises historiques comme celles des jeux de combat Street Fighter ou Tekken, ou le fabuleux Prince of Persia qui avait été pour moi une révélation sur sa version Super Famicom (j’y jouais en version import japonais). Les musiques de ce jeu me restent encore maintenant gravées en tête tant j’y pu y jouer en répétant des dizaines et des dizaines de fois les mêmes mouvements. Le jeu était difficile mais extrêmement immersif. Je ne joue plus beaucoup aux jeux vidéos à part ceux emblématiques sur la Nintendo Switch (les derniers Zelda, Super Mario et Mario Kart), mais j’ai toujours regretté d’avoir loupé le coche de Nier Automata. Ce podcast me permet également de remplir quelques lacunes culturelles. Mais ce que j’apprécie particulièrement sur ce podcast est le ton de Frédéric Sigrist et de ses invités qui ne se veulent pas savants et démontrent une véritable passion pour leurs sujets. On n’essaie pas non plus de nous faire croire que la culture pop était mieux avant. La qualité de séries actuelles comme The Gentlemen de Guy Ritchie que je regarde en ce moment sur Netflix me fait dire que des nouvelles oeuvres cultes sont en train d’être diffusées en ce moment.

Outre le podcast ci-dessus, Nicolas me conseille également l’écoute du dernier single Bite you du jeune groupe muque, dont j’avais déjà parlé du single 456 sorti en Octobre 2023. Je n’avais pas vraiment poursuivi la découverte de la musique du groupe mais ce dernier morceau sorti le 26 Mars 2024 sur le label A.S.A.B. m’y ramène gentiment. Dès les premières cordes, on se laisse accrocher par le rythme du morceau, oscillant toujours entre l’approche rock et un beat pop très prononcé. Le groupe a cette capacité à créer des morceaux à la qualité pop immédiate, qui devraient les amener sur les ondes du mainstream un jour ou l’autre. D’autant plus que la voix d’Asakura est très affirmée et versatile, notamment dans un petit passage parlé au milieu du morceau qui fonctionne très bien.

Je ne sais plus par quel détour j’ai découvert l’excellent morceau Luv Myself de Kvi Baba avec AKLO & KEIJU, oscillant brillamment entre le hip-hop et la pop. En fait, depuis que j’ai écouté le morceau run away qu’AAAMYYY a chanté avec KEIJU lors de son concert Option C du 7 Mars 2024, j’ai l’envie de découvrir d’autres musiques sur lesquelles KEIJU intervient car j’aime beaucoup sa voix. Je ne connaissais pas le jeune rappeur et compositeur Kvi Baba originaire d’Osaka, qui mène ce morceau avec les deux autres rappeurs AKLO et KEIJU. Je ne connaissais AKLO qu’à travers le morceau RGTO, sur son album The Arrival de 2014, sur lequel il fait intervenir d’autres rappeurs: SALU, H.TEFLON et K DUB SHINE. La vidéo de ce morceau mentionne dans les remerciements T-Pablow et BAD HOP, et là s’ouvre une nouvelle porte vers un hip-hop japonais beaucoup plus badass (si vous me permettez l’expression).

BAD HOP est un collectif originaire du quartier d’Ikegami à Kawasaki et se compose de huit rappeurs: T-Pablow, YZERR, Tiji Jojo, Benjazzy, Yellow Pato, Bark, G-K.I.D et Vingo. J’écoute leur dernier album éponyme sorti en Février 2024 que je trouve excellent, notamment les deux morceaux Ikegami Boyz et Final Round. Je suis très loin d’être spécialiste du monde du hip-hop, mais je trouve que l’ambiance est proche du gangsta américain dans son approche musicale et dans les thèmes abordés. Le flot vocal et l’alternance des voix des rappeurs sont remarquables, par exemple, la manière mécanique par laquelle YZERR prononce les paroles « Knock out, Knock out, Knock out, Knock out床にKnock out » qui sonnent comme une série de coups de poing qui mettent à terre. Tous les morceaux ne sont pourtant pas tous sombres, comme Last Party Never EndSupercar2 mettant en avant la voix plus haut perchée de Toji Jojo qui apporte une alternative intéressante aux voix de tonalité plus grave de la plupart des autres membres du collectif. Du quartier industriel d’Ikegami à Kawasaki, la crew BAD HOP a gravi les échelons jusqu’au Tokyo Dome pour un concert le 19 Février 2024, qui est représenté par le premier morceau de l’album Tokyo Dome Cypher. BAD HOP a déjà sorti au moins cinq albums depuis 2014 et ce ne sont donc pas des nouveaux arrivants. Leur ascension jusqu’au Tokyo Dome démontre une popularité certaine auprès des amateurs de Hip-hop. A parmi les nombreuses collaborations de BAD HOP, j’y retrouve le nom de KEIJU sur certains morceaux. Une porte ouvre, je vais y entrer tranquillement sans faire de bruit.

just fly so far away to another place

Nous ne sommes pas sorti de Tokyo depuis plus d’un mois. Malgré les apparences, nous sommes toujours à Tokyo sur ces photographies, mais dans la partie Ouest au delà d’Hachiōji. Nous allons régulièrement dans cette région de Tokyo pour une raison familiale, et nous en profitons pour parcourir un peu les environs lorsqu’on le peut. En direction du village de Hinohara, nous nous arrêtons à Tokura situé à Akiruno. Un petit restaurant de soba avait attiré notre attention lors de recherches sur Internet et nous le trouvons sans trop de difficulté sur une petite route qui bifurque de la voie principale. Ce restaurant s’appelle Koharu Biyori (小春日和). Il doit avoir une bonne réputation car nous ne sommes pas les seuls à venir y manger. L’ambiance y est paisible et il faut prendre son temps car il y a seulement deux personnes tenant le restaurant, à la cuisine et au service. Je profite du temps d’attente un peu long pour faire un tour rapide des environs. Il n’y a personne en vue, même pas un chat. Seules quelques voitures passent de temps en temps mais le trafic est relativement limité. Le temps semble s’être arrêté ici. On se demande si la station service fonctionne toujours. De l’autre côté de la route, une grande distillerie de sake à ses portes fermées. Elle semble cependant encore active mais probablement fermée en cette journée de dimanche. Je ne suis pas un fanatique du calme absolu, mais sortir du centre de Tokyo pour être confronté au silence fait beaucoup de bien.

Mais revenons tout de même beaucoup plus près du centre ville, pendant une autre journée cette fois-ci pluvieuse. A Ikejiri dans l’arrondissement de Setagaya, se déroule actuellement une exposition que je ne voulais pas manquer sur le monde cinématographique du réalisateur Shunji Iwai (岩井俊二) dans la petite galerie nommée OFS Gallery. Cette exposition s’appelle Yentown Market (円都市場) et propose également un espace de vente avec quelques articles liés aux films de Shunji Iwai, comme des CDs, livres, t-shirts, posters. L’exposition et les objets de la boutique se concentraient principalement sur quelques films, à savoir Kyrie no Uta (キリエのうた), All about Lily Chou-Chou (リリイ シュシュのすべて), Love Letter (ラヴレター ) ou encore A Bride for Rip Van Winkle (リップヴァンウィンクルの花嫁). Le nom de cette exposition, Yentown Market, reprend en fait le nom du groupe Yentown Band créé par Takeshi Kobayashi (小林武史) et Shunji Iwai à l’occasion du film Swallowtail Butterfly (スワロウテイル) avec Chara au chant. Devant une série de posters grand format, on pouvait voir des tenues et accessoires utilisés dans le film Kyrie no Uta par Kyrie, jouée par AiNA The End (アイナ・ジ・エンド), et par Ikko, jouée par Suzu Hirose (広瀬すず). L’exposition montre également différents objets utilisés pour le film All about Lily Chou-Chou sorti en salles en 2001, dont le CD de l’album Erotic (エロティック) de la chanteuse Lily Chou-chou, sorti après un premier EP intitulé Jewel (ジュエル). Le CD de l’album Erotic, exposé à côté d’un CD Walkman Sony jaune, apparaît dans le film mais il est en fait fictionnel tout comme sa chanteuse. Il faut savoir que Shunji Iwai a développé tout un monde fictif autour de son film, et ce même avant la sortie du film. Une grande partie du film est ponctué par des messages tirés d’un forum internet de type BBS appelé Lilyholic consacré à la chanteuse Lily Chou-Chou. Ce forum administré dans le film par Yūichi Hasumi, interprété par Hayato Ichihara (市原隼人) existait en fait avant le film. Il a été créé par Shunji Iwai et continue même à exister maintenant, car des visiteurs continuent à y poster des messages. Ce forum brouille les pistes entre la fiction et le réel et il en est de même pour la musique. Dans le film, le second album de Lily Chou-Chou s’intitule Kokyū (呼吸). Cet album est bien sorti dans la réalité à la suite du film avec ce même titre mais les titres sont pour certains différents. Il y a donc deux albums intitulés Kokyū, un fictif sorti dans le film par la chanteuse Lily Chou-Chou et un autre bien réel sorti par le groupe Lily Chou-Chou. La musique de ce groupe qu’on peut écouter en partie dans le film est composée par Takeshi Kobayashi avec certains textes de Shunji Iwai. Salyu, de son vrai nom Ayako Mori (森綾子), qui n’avait pas encore fait ses débuts à la sortie du film, est la chanteuse du groupe. Outre l’album Kokyū, le groupe a sorti les singles Glide (グライド) et Kyōmei (Kūkyo na Ishi) (共鳴(空虚な石)) qu’on retrouve dans l’album, puis, presque dix années plus tard, en 2010, un nouveau single intitulé Ether (エーテル). A cette époque là, le guitariste Yukio Nagoshi a rejoint le groupe Lily Chou-Chou pour accompagner Takeshi Kobayashi et Salyu. Un concert a même lieu au Nakano Sun Plaza le 15 Décembre 2010. On peut voir ce concert en intégralité sur YouTube, mais sur une page non-officielle (je me demande s’il est sorti en DVD). Dans l’exposition, on peut voir des billets de concert, mais il ne s’agit pas du concert réel à Nakano Sun Plaza, mais celui fictif dans le film au Gymnase Olympique de Yoyogi. Sur une étagère de l’exposition, derrière le téléphone portable de type garakei de la collégienne Shiori Tsuda jouée par Yū Aoi (蒼井優) dont c’est le premier rôle, on peut voir par contre la couverture du single réel Kyōmei (Kūkyo na Ishi) du groupe.

La construction du nom de scène Lily Chou-Chou est très intéressante. Son véritable nom dans le film est Keiko Suzuki (鈴木圭子) et elle est née le 8 Décembre 1980, qui se trouve être le jour de l’assassinat de John Lennon. Cette information sur sa date de naissance est mentionné dans le film sur le forum BBS, mais je ne suis pas sûr que son véritable nom soit donné. Le 8 Décembre est également la date du concert anniversaire à Yoyogi que je mentionnais ci-dessus. On dit que les parents de Keiko Suzuki étaient amateurs de Claude Debussy et que c’est également son cas. Elle estime qu’il était la première personne à transformer l’Ether en musique (エーテルをはじめて音楽にした人). Ce concept d’Ether qui intervient beaucoup dans le film est assez mystique. Il représente une force musicale intrinsèque, invisible et omniprésente, qui relie ceux qui la saisissent. J’arrive à comprendre cette force inexplicable que la musique peut provoquer parfois en nous au point d’accaparer tous nos sens. Le nom Lily Chou-Chou est tiré de deux surnoms liés à Claude Debussy. Sa première épouse s’appelait Marie-Rosalie Texier et était surnommée Lilly. La fille de Debussy avec sa deuxième femme, Emma Bardac, s’appelait Claude-Emma Debussy, et était surnommée Chouchou. Debussy est d’ailleurs omniprésent dans le film à travers sa première Arabesque, composée en 1890, souvent jouée au piano par la collégienne Yōko Kuno interprétée par Ayumi Ito (伊藤歩). All about Lily Chou-Chou est un de ses films possédant leur propre monde qu’il est passionnant de découvrir, mais c’est surtout un film de sensations. Le morceau Arabesque (アラベスク) joué dès les premières images du film dans un champs d’herbes hautes dans la campagne d’Ashikaga est riche en émotions, nous ramenant à des moments passés de notre propre adolescence, ceux remplis de doutes et parfois de malaises. Ce morceau dont le titre seulement est inspiré par Debussy me bouleverse à chaque écoute mais je n’ai de cesse d’y revenir, comme s’il me permettait d’explorer une partie enfouie de moi-même. Cette musique mélancolique magnifiquement interprétée par Salyu dans un dialecte d’Okinawa pousse clairement à une forme d’introspection, comme peuvent l’être d’ailleurs certains morceaux d’Ichiko Aoba (青葉市子). Je pense en particulier à des morceaux comme Porcelain et Dawn in the Adan sur son album Adan no Kaze (アダンの風). Est ce qu’Ichiko Aoba possède l’Ether? Oui, sans aucun doute, même si cette question n’a peut-être pas beaucoup de sens. Shunji Iwai l’aura très certainement reconnu comme telle car ils se sont produits ensemble sur la scène de la salle de concert WWW à Shibuya pour les besoins d’une émission télévisée sur la chaîne musicale câblée Space Shower TV. Cette émission proposait un dialogue entre mémoire et création entre Ichiko Aoba et Shunji Iwai (青葉市子と岩井俊二、記憶と創作のダイアローグ). Shunji Iwai jouait du piano et Ichiko Aoba chantait et jouait de la guitare sur trois morceaux: Uwoaini (ウヲアイニ) composé par Shunji Iwai pour son film Hana and Alice (花とアリス), Adan no Shima no Tanjō-sai (アダンの島の誕生祭) composé par Ichiko Aoba sur son septième album Adan no Kaze (アダンの風) et Arabesque (アラベスク) écrit par Shunji Iwai et composé par Takeshi Kobayashi pour All about Lily Chou-chou. L’interprétation d’Arabesque est vraiment très belle, pas aussi prenante que la version originale chantée par Salyu, mais on en est tout proche. La sensibilité que dégage Ichiko Aoba dans son chant est tout à fait remarquable. L’émission comprend également une longue interview dans lequel Ichiko Aoba évoque sa découverte du film All about Lily Chou-chou à l’âge de 14 ans et l’influence qu’il a eu sur elle. L’album Adan no Kaze est également longuement évoqué, notamment l’influence des îles d’Okinawa. S’il devait y avoir un film intitulé Adan no Kaze, il aurait certainement été réalisé par Shunji Iwai. Pour revenir au concept de l’Ether, le film restait assez flou sur le cas de Sheena Ringo comme je le montrais sur des captures d’écran dans un billet évoquant le film. La question a été éludée récemment par un tweet de Shunji Iwai confirmant en anglais que « Ringo has the beautiful ether! » alors qu’on l’avait interpellé sur le sujet. Je me suis alors demandé quel album ou quel titre pouvait le mieux correspondre à ce concept d’Ether. J’ai d’abord pensé à des morceaux de l’album KSK, mais la réponse se trouve plutôt sur l’album précédent Shōso Strip (勝訴ストリップ) car on y trouve le morceau Benkai Debussy (弁解ドビュッシー, Excuse Debussy). Elle raconte dans le numéro 14 de son magazine RAT que ce titre lui est venu sur un coup de tête, alors qu’on lui demandait quel était son artiste préféré. Le fait de mentionner Claude Debussy comme artiste préféré a suscité des interrogations des gens autour d’elle. En conséquence de quoi elle s’est elle-même demandée s’il fallait une explication ou une excuse pour aimer Debussy. Le titre est dérivé de ce questionnement. Peut-être aime t’elle le morceau Arabesque de Claude Debussy? Ce point en commun avec la chanteuse Lily Chou-chou est en tout cas étonnant.

Dans la petite boutique de la galerie OFS, j’achète en souvenir le livret du film Kyrie no Uta, contenant des interviews et de nombreuses photographies du film. En rentrant le soir, je me rends compte qu’AiNA a également dû y aller la même journée que moi car elle montrait des photos de la galerie sur sa storyline Instagram. L’exposition montre également quelques objets tirés du premier film de Shunji Iwai, Love Letter. Le film a eu beaucoup de succès à sa sortie en 1995 et ce succès s’est ensuite étendu en Asie. C’est un film que j’avais en tête de voir depuis un petit moment, mais je ne l’ai finalement vu que très récemment après mon passage à l’exposition. Il a été en grande partie tourné à Hokkaidō, dans la ville d’Otaru, et les images hivernales de terres enneigées y sont très belles tout comme l’histoire qui contient déjà certains thèmes récurrents du réalisateur comme la dualité de l’actrice principale. L’actrice Miho Nakayama y joue en effet deux rôles, celui de Hiroko Watanabe qui a perdu son fiancé dans un accident de montagne deux années auparavant et celui d’Itsuki Fujii qui a étrangement exactement le même nom et prénom que son fiancé disparu. L’histoire se construit sur une correspondance par lettres, comme sur un de ses films plus récents Last letter. Hiroko Watanabe envoie une première lettre à l’adresse d’enfance de son ancien fiancé en pensant qu’elle arriverait peut-être jusqu’au paradis, mais c’est la femme Itsuki Fujii qui la reçoit car elle habite dans la même ville et lui répond. Un lien d’amitié rempli d’interrogations se noue entre les deux femmes (qui, je le répète, sont toutes les deux interprétées par Miho Nakayama). On comprend assez rapidement que la femme Itsuki Fujii et l’ancien fiancé Itsuki Fujii étaient en fait dans la même classe de collège, et Hiroko essaie donc d’en savoir plus sur l’enfance de son ancien fiancé en posant de nombreuses questions à Itsuki Fujii dans ses lettres. Cette correspondance vient petit à petit creuser dans la mémoire d’Itsuki Fujii, et la frontière entre les histoires des deux femmes se rapprochent, accentuée par leur ressemblance physique troublante (car je le répète, elles sont jouées par la même actrice). L’histoire peut paraître assez embrouillante mais elle est racontée de manière simple et particulièrement émouvante. J’aime par dessus tout les moments de plénitude qui se dégagent de ce film, et des films de Shunji Iwai en général.

Écrire ce billet m’a poussé à réécouter plusieurs fois l’album Kokyū (呼吸) de Lily Chou-Chou. Sur la couverture de l’album, je me demande si c’est bien Salyu que l’on voit photographiée de dos dans les hautes herbes. Cette photographie de Kazuaki Kiriya (紀里谷和明) est superbe. J’aime aussi beaucoup la photographie de couverture de l’album-compilation Merkmal de Salyu. Cette photographie signée du photographe Kazunali Tajima (田島一成) me rappelle mes propres photographies jouant avec les nuages, notamment celle en page 69 de mon photobook In Shadows ou celle du billet intitulé Structure and Clouds. Les photographies du livret de Merkmal datant de 2008 sont antérieures aux miennes. Je ne connaissais pas cet album à l’époque où j’ai créé mes propres compositions photographiques, quelques années plus tard en 2011. J’ai en fait découvert cet album grâce à un billet récent de mahl sur son blog. De cet album, je connaissais déjà quelques morceaux car deux sont extraits de l’album Kokyū: Hōwa (飽和) et Glide (グライド). Elle reprend également en solo le morceau to U qui l’a fait connaître du grand public. C’est peut-être dû au fait qu’il s’agit d’une compilation, mais je trouve cet album inégal. Certains morceaux comme landmark et Yoru no Umi Tōi Deai ni (夜の海 遠い出会いに) sont absolument fabuleux, tout comme Dramatic Irony et I BELIEVE. Ces morceaux qui se suivent sur l’album forment un passage particulièrement poignant. Salyu y a une voix particulièrement expressive et la partie finale de I BELIEVE est particulièrement puissante. L’album est accompagné d’un DVD avec un concert plutôt intimiste au Motion Blue Yokohama (datant du 17 Septembre 2008) pendant lequel elle interprète les morceaux landmark et Yoru no Umi Tōi Deai ni avec une orchestration légèrement différente. On ne peut que rester immobile en écoutant cette voix monter progressivement en intensité. Une bonne moitié de l’album paraît plus fade par rapport à ces quelques morceaux dont l’intensité émotionnelle ne peut pas laisser indifférent. Le morceau to U en solo est par exemple beaucoup moins intéressant en solo sans la voix de Kazutoshi Sakurai. J’aime aussi beaucoup le morceau VALON-1, car elle semble chanter avec un ton de décalage sur la totalité du morceau. Takeshi Kobayashi compose les musiques de cet album, tout comme celles des précédents. C’est d’ailleurs Takeshi Kobayashi qui l’a découverte et qui lui a donné son nom de scène, qui serait apparemment une allusion au mot français « Salut ». Takeshi Kobayashi et Shunji Iwai commençaient à ce moment là l’écriture des morceaux de Lily Chou-chou. Pendant le concert de Lily Chou-chou le 15 Décembre 2010 à Nakano Sun Plaza, certains morceaux solo de Salyu étaient interprétés. Elle chante pendant ce concert là et sur le DVD de Merkmal une version différente, en anglais, du morceau Arabesque. Le concert du Nakano Sun Plaza termine avec le morceau Glide comme sur l’album Kokyū et la compilation Merkmal, sauf qu’elle ne chante que le début. Les paroles inscrites sur grand écran prennent ensuite le relais: just fly so far away to another place.