Nous prenons quelques dernières photos des cerisiers du château Tsurugajō d’Aizu Wakamatsu et reprenons ensuite la route pour une dernière étape avant notre retour vers Tokyo. Il est déjà 16h30 et la lumière du soleil commence tranquillement à baisser. Nous descendons les petites routes de montagne de Minami Aizu jusqu’à Shimogō. On y trouve le village Ōuchi-juku (大内宿), préservé de l’époque Edo. On ne peut y accéder qu’en voiture ou en bus, car l’endroit est vraiment perdu dans les montagnes. En longeant la petite rivière qui accompagne la route sinueuse que nous empruntons, on s’est même demandé si un village, à priori touristique, se trouvait bien à cet endroit. Nous y sommes finalement arrivés vers 17h ce qui est déjà un peu tard car les activités de la rue principale du village étaient déjà pratiquement toutes terminées. Il n’y avait presque personne. En voyant ces maisons aux toits de chaume bordées méthodiquement la grande rue principale de terre, j’ai d’abord eu le sentiment qu’elles avaient été reconstituées mais ces maisons sont en fait authentiques. Ōuchi-juku était à l’époque Edo une station de poste de la route Aizu Nishi Kaidō (会津西街道), qui reliait sur 130 km la ville d’Imaichi dans l’actuel préfecture de Tochigi au château d’Aizu Wakamatsu. Ce petit village devait être très actif et prospère à cette époque. Ses habitants ont eu la bonne idée de préserver cette rue au fur et à mesure des années. Depuis le petit temple au fond du village, on a une belle vue d’ensemble. Il n’y a pas un bruit, tout est calme. Je garderais cette image sereine en tête pour notre long retour en voiture. Il ne faudra finalement que 3 heures et demi pour rentrer à Tokyo. Aucun embouteillage ne viendra perturber ce petit voyage dans le Tōhoku. Zoa voulait aller dans le Nord Est de Tokyo car nous allons souvent dans le Sud Ouest. Nous ne connaissons qu’assez peu les préfectures au delà de Saitama et Ibaraki, donc cette idée était bienvenue. Les montagnes du Tōhoku sont différentes du Sud Ouest du pays. Ce ne sont pas les montagnes qui manquent au Japon, mais nous avons vraiment été entourés à tout moment de notre voyage. Je ne pense pas avoir mentionné autant de fois des noms de montagnes et parcouru autant de routes sinueuses que pendant ce court séjour. On se sent petit parmi ces paysages. Après tout, toutes ces montagnes sont des dieux vivants.
Catégorie : Fukushima
そうだ、東北へ行こう!❼
La pagode Sazaedō est en fait assez proche du château Tsurugajō (鶴ヶ城), dans le centre d’Aizu Wakamatsu, que nous visitons ensuite. Je le connaissais en fait déjà pour l’avoir visité en Août 2002, alors que l’on retournait à moto d’un long périple à Hokkaido, mais mes souvenirs en étaient très lointains. Je me souvenais d’un endroit paisible que nous découvrions sous les dernières chaleurs de l’été. L’origine du château remonte à l’an 1384. Il fut construit par Naomori Ashina et s’appelait alors Kurokawajō. C’était le centre militaire et administratif de la région d’Aizu. Il changea de mains pour devenir la propriété de Masamune Date en 1589 suite à la défaite du clan Ashina. En 1592, il prendra le nom actuel de Tsurugajō mais on l’appelle également Aizuwakamatsu-jō, le château d’Aizu Wakamatsu. Le château fut assiégé et détruit en 1874 suite à la guerre de Boshin. Le donjon (tenshu) du château actuel est donc une reconstruction en béton, datant de 1965. On trouve normalement à l’intérieur un musée, mais la majeure partie était en rénovation et on n’en a pas beaucoup profité. Un des intérêts de l’endroit, outre la majestueuse grandeur du château, était de le voir entouré de cerisiers en fleurs. On ne s’entendait pas à en voir autant et c’était donc une bien agréable surprise. On trouve des cerisiers plantés un peu partout dans l’enceinte du château, depuis la petite route traversant les douves jusqu’au parc placé au pied du château. La vue sur ces cerisiers depuis les hauteurs du donjon est vraiment magnifique. La foule était présente, notamment dans le petit parc pour faire Hanami. Nous avons eu la bonne idée d’acheter un bento sur la route et avons donc pique niqué en regardant le château se mélanger aux cerisiers en fleur. Nous avions complètement manqué le Hanami à Tokyo cette année, et on se rattrape donc d’une belle manière à Aizu.
そうだ、東北へ行こう!❻
Lorsqu’on s’intéresse à l’architecture japonaise, on ne peut pas ne pas remarquer une étrange pagode appelée Sazaedō située dans périphérie de la ville d’Aizu Wakamatsu car elle est si unique et particulière qu’on la voit souvent en photo dans les livres d’architecture. Je pense l’avoir aperçu pour la première fois en photo en 2010 car j’en parlais dans un billet à cette époque là et j’ai eu depuis une grande envie d’aller la voir. L’occasion ne s’était pas présentée jusqu’à maintenant, car je ne souhaitais pas non plus faire déplacer toute la famille jusqu’à Fukushima pour l’unique raison d’aller voir cette structure aux airs difformes. Elle se trouve sur le Mont Iimori mais est très facilement accessible, au bout d’un long escalier de pierre. Elle n’est par contre pas très bien indiquée depuis la route et nous avons fait quelques allés et retours avant de la trouver. Voir cet objet architectural devant moi pour la première fois a provoqué une émotion forte et j’en avais presque les larmes aux yeux. Mais ce sentiment s’est vite transformé en une excitation certaine de découvrir l’intérieur de la pagode.
Aizu Sazaedō (会津さざえ堂), de son vrai nom Entsū Sansōdō (円通三匝堂), a été construite en 1796 par le moine Ikudo. L’architecture de l’édifice est très particulière car elle se compose d’une double hélix dans une structure hexagonale mesurant 16.5 mètres de haut, faite entièrement de bois. Un peu comme l’escalier à double révolution du château de Chambord, les pèlerins qui monte l’escalier interne du Sazaedō ne rencontrent pas ceux qui descendent. L’intérieur de la pagode-temple n’est en fait qu’un long escalier qui monte jusqu’au sommet et redescend ensuite jusqu’à la sortie à l’arrière du bâtiment. Il n’y a aucun salle à l’intérieur, à part peut-être le dernier des trois étages placé juste au dessous du toit. Le terme Entsū Sansōdō utilisé pour nommer cette pagode signifie en fait de faire trois tours entiers. Marcher à l’intérieur de cette spirale qui monte et descend est une expérience en elle-même car on ressent l’âge du bâtiment, le bois craquant sous nos pas. On avance doucement en ayant un peu peur que tout s’effondre. Il y a heureusement assez peu de visiteurs. Je me dis qu’une structure pareille doit être impossible à restaurer.
La structure du Sazaedō formant un chemin hélicoïdal qui monte jusqu’au sommet et redescend ensuite jusqu’à la sortie sans que les pèlerins se croisent a une fonction bien précise. Il s’agit en fait d’une retranscription dans un unique bâtiment du pèlerinage de Chūgoku Kannon composé de 33 temples bouddhistes des préfectures d’Okayama, Hiroshima, Yamaguchi, Shimane et Tottori. On retrouve 33 statues de la déesse Kannon le long du chemin à l’intérieur du bâtiment. Le Sazaedō est donc conçu comme une version miniature de ce pèlerinage. Les statues originales ont par contre été enlevées au moment de la restauration Meiji. Nous prenons notre temps pour faire ce pèlerinage à notre façon, et je ne me lasse pas de prendre des photos de l’intérieur et de l’extérieur. L’entrée du Sazaedō est particulièrement étrange et détaillée avec une figure de dragon venant se faufiler dans le fronton de bois sculpté. Un petit temple se trouve à proximité de la pagode et on peut bien sûr y récupérer un sceau goshuin que je suis bien content d’ajouter dans ma collection. Les cerisiers nous font le plaisir d’être en fleurs à notre passage, et je tente bien entendu quelques photographies superposant Sakura et Sazaedō. D’autres sont visibles sur mon compte Instagram. Mais les cerisiers seront beaucoup plus nombreux lors de notre prochaine étape au château Tsurugajō d’Aizu Wakamatsu.
そうだ、東北へ行こう!❺
La deuxième partie de notre voyage des vacances de printemps nous fait descendre de la préfecture de Yamagata vers celle de Fukushima. Depuis la ville de Yonezawa, nous redescendons par la route de montagne Otoge Road jusqu’à Kitakata pour ensuite bifurquer et remonter vers les hauteurs d’Urabandai, au pied du Mont Bandai et à proximité du grand lac Hibara. Nous logeons dans un hôtel au style de lodge house avec onsen donnant une belle vue sur le Mont Bandai et sur un marais appelé Yaroku Numa. Dans cette région montagneuse, on y trouve également un groupe de plusieurs marais appelés Goshikinuma (五色沼) formés en 1887 après l’éruption du Mont Bandai. Cette éruption a perturbé et bloqué le cours d’une rivière et créé par conséquent des lacs et des zones de marais et d’étangs dont les eaux se sont imprégnées d’éléments volcaniques et minéraux. Les eaux se sont ainsi teintées de couleurs (au moins cinq) qui paraissent parfois surnaturelles. Nous allons voir le plus connu, le Bishamon Numa aux eaux de couleur vert émeraude, que je montre sur quelques photographies ci-dessus. On peut en faire le tour et certains passages sont aménagés avec des petits pont de bois rendant la promenade agréable. Nous n’avons malheureusement pas le temps de faire un tour complet, et on est de toute façon un peu refroidi par un écriteau indiquant de faire attention aux ours et de se munir d’une petite clochette ou d’une radio bruyante pour les faire fuir.
L’endroit semble touristique mais il n’y a pas grand monde autour de l’étang. Des barques sont en attente de visiteurs. Je remarque que certaines sont marquées d’un cœur rouge ce qui me semble tout d’abord étonnant. Je me dis qu’elles sont peut-être destinées aux amoureux qui voudraient déclarer leur flamme sur les eaux verdâtres de l’étang. Il y a en fait une autre explication qu’on découvre un peu par hasard, ça ce n’est pas clairement indiqué. Une des carpes koi vivant dans l’étang est blanche avec une tache rouge prenant la forme d’un cœur. Cette carpe était difficile à apercevoir car elle prenait un malin plaisir à ne jamais clairement montrer sa marque rouge comme si elle savait qu’elle était précieuse. Mari a tout de même réussi à prendre une photo à force de persévérance. On aurait aimé voir d’autres étangs, notamment le Aonuma, car cet endroit est vraiment superbe, mais il nous faut maintenant descendre des montagnes du Mont Bandai en direction d’Aizu Wakamatsu. Au passage, nous longeons l’immense lac Inawashiro dont la taille me rappelle celui du lac Biwa dans la préfecture de Shiga, que nous avions vu il y a quelques années, mais sa taille reste tout de même bien plus petite. Nous sommes ici au pied du Mont Bandai que je montre encore sur la dernière photographie. Notre prochaine étape est un chef d’oeuvre architectural que je voulais voir depuis très longtemps.