(もうすぐ雨) La pluie peut tomber à tout moment mais elle a la bonne idée de se retenir jusqu’à ce que je rentre à la maison. Ces photographies sont prises à la suite de celles de la traversée du Rainbow Bridge. Nous entrons tout doucement dans la saison des pluies. Cette période de l’année peut certes être contraignante pour sortir prendre des photos mais j’aime les contrastes forts qu’elle procure en général sur les photographies qu’on peut prendre. Les photos ci-dessus sont prises du quartier de Mita jusqu’à Hiroo au niveau de la rue Meiji. Je trouve qu’elles sont assez typiques de Made in Tokyo. Elles font partie d’un tout continuel, mais ne se démarquent pas vraiment par leur identité individuelle. Je ressens la nécessité de montrer ce type de photographies de rues sans particularités apparentes et immédiates parmi d’autres photographies montrant de l’architecture à l’identité forte et immédiatement reconnaissable. D’une certaine manière, j’essaie de cette façon de montrer la continuité de la ville qui ne se limite pas à une somme de landmarks remarquables. Mais est ce que je donne de cette manière une représentation de cette ville qui serait plus fidèle à la réalité ? Je ne pense pas et ce n’est pas réellement mon intention. Même si elles n’ont pas d’identités fortes en apparence, je vois tout de même des particularités distinctives dans les morceaux de ville pris en photo et montrés ci-dessus. En l’observant depuis un passage surélevé, j’ai été attiré par le graphisme des larges passages pour piétons à Mita ressemblant à une partition musicale sur laquelle des petites notes mouvantes viennent se placer. Sur la troisième photographie, le bâtiment de béton d’un restaurant d’anguilles a attiré mon regard pour la forme courbe placée à l’entrée qui vient adoucir l’aspect pourtant massif de l’ensemble. La large cheminée a également attiré mon attention car elle s’achemine jusqu’au toit sans prendre en considération l’esthétique de l’ensemble. A moins que l’on pense comme moi que ce genre de tuyauteries apparentes fait toute l’esthétique du bâtiment. L’interêt que je trouve dans les quatrième et cinquième photographies est l’association que l’on peut faire entre la forme des vitrages d’un garage vintage et ceux d’une maison individuelle récente se trouvant dans la même rue. La photographie suivante montrant une résidence appelée Imperial Hiroo m’accrochait l’oeil pour sa texture abîmée qui venait tout d’un coup entrer en résonance avec le portique rouillé de sortie d’autoroute placé à sa perpendiculaire. Et j’aime beaucoup saupoudrer ce genre de billets de matière végétale, celle de l’avenue Meiji sur la dernière photographie, celle derrière laquelle se cache un temple appelé Daisho-ji dans un quartier de Mita, où celle qui envahit les trottoirs quand l’humidité ambiante devient trop forte.
(Tell me the truth, do you crash?) L’idée m’est soudainement venue d’écouter la musique de Bonnie Pink (ボニー・ピンク). Elle s’apprête à sortir un nouvel album après 10 ans d’absence et c’est très certainement ce qui m’a donné envie d’écouter un de ses anciens albums. Le morceau le plus connu de Bonnie Pink s’intitule A Perfect Sky et il est sorti en 2006. Ce morceau pop est mémorable et accrocheur mais ne correspond pas vraiment au style musical que je cherche à découvrir en ce moment. J’ai en fait un très vague souvenir d’avoir voulu découvrir cette artiste au début des années 2000, sans pourtant avoir concrétisé cette envie. A cette époque là, je cherchais à écouter d’autres groupes et artistes qui auraient un style plus ou moins similaire à celui de Sheena Ringo et j’ai eu cette envie de me diriger vers Bonnie Pink. Le morceau A perfect sky m’avait peut-être un peu rebuté mais je me rends compte maintenant que j’avais eu tord de ne pas explorer ses albums. Bonnie Pink, de son vrai nom Kaori Asada (浅田香織), est compositrice et interprète de tous ces morceaux. Elle a démarré sa carrière musicale avec un premier album intitulé Blue Jam en 1995. Je démarre ma découverte tardive de Bonnie Pink avec son deuxième album intitulé Heaven’s Kitchen sorti en 1997. L’esprit rock presque indé mais se mélangeant avec des sonorités jazz me plaît tout de suite vraiment beaucoup. Je me dis maintenant en écoutant tous les titres de cet album, aussi bons les uns que les autres, que j’aurais certainement accroché si j’avais écouté l’album à l’époque (bien que je sois arrivé au Japon que deux années plus tard). Le morceau titre Heaven’s Kitchen attire tout de suite l’attention mais il y a de nombreux morceaux très accrocheurs comme par exemple Do You Crash? Elle a don certain pour la composition musicale et une voix remarquable. L’album a 25 ans mais il aurait pu sortir hier, sachant que certains morceaux comme celui intitulé Melody devait déjà avoir un côté rétro à l’époque. Elle joue de beaucoup de nuances dans sa voix, sur le morceau Silence, par exemple. Elle a une aisance certaine dans son chant, mélangeant la langue anglaise qu’elle maîtrise très bien et le japonais, qui ne se force pas et s’impose de lui-même. On y ressent souvent une sorte de mélancolie qui semble savamment dosée. Par moment, son chant me rappelle celui de Sheena Ringo sauf que Bonnie Pink reste raisonnable tandis que Sheena part volontiers dans les excentricités sonores.
Certains ont d’ailleurs vu des ressemblances entre les deux compositrices, interprètes et musiciennes. Elles savent par exemple toutes les deux jouer du piano et de la guitare, composent et écrivent leurs morceaux mélangeant japonais et anglais et se sont construites des univers musicaux personnels qui ne semblent influencés que par elles-mêmes. Bonnie est de 5 ans l’ainée de Sheena. Elle a démarré sa carrière musicale en 1995 tandis que celle de Sheena démarra quatre ans plus tard en 1998, mais elles ont dans l’ensemble connu leurs débuts de carrière à la même époque dans la deuxième partie des années 1990. Je lis même qu’il y avait une rumeur disant que Bonnie Pink et Sheena Ringo étaient sœurs, peut-être parce qu’elles ont toutes les deux un point de beauté sur le visage à peu près au même endroit et parce qu’elles ont une certaine ressemblance physique comme sur les deux photos ci-dessus. Il faut noter tout de même que la photo de Bonnie Pink à gauche utilisée en couverture de son album Even So date de 2004, tandis que la photo de droite de Sheena Ringo vue dans le magazine musical ROCKIN’ON JAPAN date de Mars 1999. Bonnie avait 30 ou 31 ans sur cette photo tandis que Sheena avait 20 ans sur la photo de droite. Elles ne sont pas originaire de la même ville non plus car Bonnie est de Kyoto tandis que Sheena est de Fukuoka. Bref, cette rumeur est bien sûr incorrecte mais je suis surpris de voir plusieurs pages Internet la mentionner.
En fait les deux artistes évoluaient à leurs débuts dans des milieux artistiques plutôt similaires. Bonnie Pink avec ses cheveux courts rouges avait une apparence unique qui se démarquait des autres interprètes féminines de l’époque. Elle avait ce côté rock un peu rebelle que l’on trouvait également chez Sheena Ringo. A ses débuts, Sheena aurait apparemment dit à propos de Bonnie Pink qu’elle avait fait en premier ce qu’elle voulait faire elle-même (私のやりたいことを先にやられてしまった), ce qui lui aurait fait perdre confiance en elle après l’écoute de son premier album Blue Jam. Ce sentiment s’est ensuite effacé quelques années plus tard car, dans son émission radio Etsuraku Patrol de Décembre 1998, Sheena Ringo diffuse le morceau Scarecrow de cet album Blue Jam de Bonnie Pink. En annonçant le morceau dans son émission, Sheena mentionne le fait qu’on disait au début que leurs styles musicaux se chevauchaient, mais qu’on s’était quand même rendu compte qu’ils étaient différents. Elle précise également qu’elle apprécie ce morceau (被ってると最初言われたんですけれども、いま、じゃ、そんなこともないよね。ちゃんと別なものとして知識してるだけです。ガッコイです!). Les styles musicaux de Bonnie Pink et de Sheena Ringo sont en effet différents, et il est clair que l’impact que peut donner la musique de Sheena sur un auditoire est beaucoup plus fort et immédiat.
Il y a d’autres détails intéressants au sujet de ces deux artistes. Toujours dans son émission Etsuraku Patrol, Sheena évoque cette ressemblance physique avec Bonnie. Elle mentionne que quand elle était en Angleterre, Bonnie a sorti un single avec une vidéo qui passait à la télévision sur laquelle elle avait ses cheveux rouges. La mère de Sheena Ringo aurait apparemment vu cette vidéo en pensant qu’il s’agissait de sa fille. Elle l’aurait ensuite appelé pour lui demander quand elle était rentrée en Japon et si elle avait teint ses cheveux en rouge (あなたいつ日本に帰って来て髪を赤にしたのよ). On peut trouver un autre point intéressant sur le deuxième album de Sheena Ringo, Shōso Strip (勝訴ストリップ) sorti le 31 Mars 2000. Certains voient le choix du titre du neuvième morceau de l’album, Tsuki ni Make Inu (月に負け犬), comme une référence à un morceau de Bonnie Pink intitulé Inu to Tsuki (犬と月) sorti quelques années avant, le 21 Octobre 1998. Ce morceau, que Sheena a écrit lorsqu’elle avait 18 ans, ne contient pas de référence à la lune (月) dans les paroles et on peut donc penser que ce mot a été ajouté plus tard comme une référence au titre du morceau de Bonnie Pink. D’une manière un peu similaire, Shōso Strip contient un morceau intitulé Sakana (サカナ), ou poisson en français, et le quatrième album de Bonnie Pink (Let Go sorti à peu près au même moment que Shōso Strip) contient un morceau intitulé Fish. Ces correspondances se sont peut-être que des coïncidences, mais il est certain que les deux artistes avaient conscience l’une de l’autre bien qu’elles ont évolué dans des styles différents. Ce genre de détails me passionne en tout cas, et me pousse à écouter d’autres albums de Bonnie Pink. Je trouve chez le disquaire Disk Union de Shin Ochanomizu les albums Blue Jam (le premier sorti en 1995) et Let Go (le quatrième sorti en 2000). J’aime beaucoup ce que j’écoute, qui correspond assez bien à ce que j’ai envie d’écouter en ce moment.