every cloud is grey with dreams of yesterday

Ce building Joule A par l’architecte Edward Suzuki à Azabu Jūban ressemble à un nuage gris métallique. Il apporte un peu de poésie à l’environnement urbain hostile composé de jonctions d’autoroutes surélevées. Il faut certes exercer son imagination pour trouver du réconfort dans ce paysage métallique. La surface sur la photographie suivante provient d’un hôtel sans fenêtres à Higashi Azabu. Les pièces de ce building atypique sont éclairées par une ouverture partielle du plafond dans l’espace laissé entre les blocs posés les uns sur les autres avec un décalage. L’ambiance doit quand même y être sombre, mais j’espère quand même qu’on peut voir les nuages, même s’ils sont gris, à travers cette ouverture au plafond. La structure faite de formes simples est très intéressante et sans concession. La dernière photographie montre le motif répétitif d’une résidence près d’Azabu Jūban. Les formes sont triangulaires et me rappellent un peu un autre building plus futuriste, le Sumitomo Fudōsan Azabu Jūban Building, placé à quelques rues de là. Les photographies de ce billet mélange les formes mais restent dans des tons neutres au point où j’aurais pu les montrer en noir et blanc. J’aurais pu également les rendre plus floues ou enfumées pour leur donner une impression de rêve. Mais je n’ai pas beaucoup de temps pour rêver. Je suis venu dans ce quartier d’Azabu à vélo en roulant à toute vitesse et en m’arrêtant brutalement lorsque j’apercevais un building intéressant. Rouler à vélo me permet d’apprécier en accéléré et en distorsion les sons de la rue. J’aimerais retransmettre cette sensation en photographies.

Cette année encore, Ringohan conduit une enquête auprès des membres du fan club. L’enquête a un nom, elle s’appelle OTK no Honkai (OTKノ本懐), ce qu’on pourrait traduire par l’aspiration des Otaku. Dans le langage de Sheena Ringo et ce depuis ses débuts, OTK veut dire Otaku et fait référence aux fans. C’est une manière un peu directe d’appeler les fans, mais ça correspond bien à sa manière directe de parler à ses débuts (elle employait déjà ce terme dans une émission Etsuraku Patrol de 1999). Je pense que cette appellation est due au fait que les fans ont tendance à tout collectionner et à tout savoir sur tout d’un ou d’une artiste. Elle s’était d’ailleurs étonnée plusieurs fois, d’une manière un peu naïve d’ailleurs, de la manière par laquelle les OTK arrivaient à deviner les directions qu’elle allait prendre (le redémarrage de Tokyo Jihen par exemple). Ces enquêtes pour obtenir les avis des OTK ne sont pas conduites tous les ans mais il y avait eu une pour l’année 2020 avec des questions relativement similaires. Cette version 2021 contient par contre plus de questions que celle de l’année dernière, à mon souvenir du moins, et certaines de ces nouvelles questions demandent beaucoup plus d’imagination. Les membres de Ringohan peuvent voir les résultats de l’enquête en temps réel mais ces résultats ne sont pas définitifs et toujours en mouvement jusqu’à la fin de la période de réponse, le 2 Décembre 2021. J’ai moi-même répondu à l’enquête il y a quelques jours.

D’après les résultats que l’on peut voir actuellement, Gunjō Biyori (群青日和) est toujours en première place des morceaux préférés des membres du fan club pour Tokyo Jihen. Il faut dire que bien que ça soit un des premiers morceaux du groupe, ils le jouent très régulièrement, notamment cette année, dans les émissions télévisées auxquelles ils ont participé (et même avec la formation elopers). L’arrivée de Ryokushu (緑酒) en deuxième position n’est pas non plus une surprise. Ce morceau arrive en première place avec une très large avance pour ce qui est des vidéos préférées de Tokyo Jihen. C’était également mon choix car cette vidéo montrant une réunion du groupe a quelque chose de très attachant. Cette vidéo est en quelque sorte représentative de la réunion de Tokyo Jihen après 8 ans d’absence. L’album préféré de Tokyo Jihen reste Sports (スポーツ) suivi du nouveau entrant Music (音楽), et le concert préféré des fans est Bon Voyage. J’ai personnellement listé Ultra C en première position mais le choix est difficile car il y a beaucoup de très bons concerts.

Pour Sheena Ringo en solo, le concert préféré est Hyakkiyakō 2015 en compétition étroite avec Ringo Expo 18. Le morceau préféré est Marunouchi Sadistic (丸ノ内サディスティック) sans aucune surprise. Je suis toujours très embêté pour choisir un seul morceau donc j’ai à chaque fois sélectionné le morceau TOKYO de Sandokushi, qui se trouve d’ailleurs bien placé dans le classement actuel en cinquième position. L’album préféré est Hi Izuru Tokoro (日出処) suivi de Muzai Moratorium (無罪モラトリアム). La vidéo préférée est Nagaku Mijikai Matsuri (長く短い祭 ) mais le score est serré avec d’autres morceaux et peut donc évoluer jusqu’à la fin de l’enquête. Il nous est également demandé d’indiquer le morceau qui a déclenché notre amour pour la musique de Sheena Ringo ou de Tokyo Jihen. Les trois premiers morceaux listés sont tous tirés de Muzai Moratorium, à savoir dans l’ordre Koko de Kiss Shite. (ここでキスして。), Honnō (本能) et Kabukichō no Joō (歌舞伎町の女王). En ce qui me concerne, j’ai d’abord découvert Koko de Kiss Shite. quand le morceau passait en extrait au générique de fin de l’émission de Downtown du Jeudi soir (je pense) mais c’est surtout Kabukichō no Joō qui a déclenché mon amour pour la musique de Sheena Ringo.

La population qui a répondu à l’enquête est aux 2/3 féminine et donc 1/3 masculine (ce qui ne change pas beaucoup depuis l’année dernière). J’ai l’impression qu’il y a quand même une légère augmentation de la proportion masculine. Pour ce qui est des tranches d’âge, les répondants sont, dans l’ordre d’importance, des personnes dans leur vingtaine, puis des trentenaires puis des personnes dans leur quarantaine. C’est intéressant de voir que le groupe et Sheena qui sont tous dans leur quarantaine (à part Kameda Seiji qui est un peu plus âgé) attirent une majorité de personnes d’une vingtaine d’années et que les morceaux les plus reconnus sont ceux que Sheena a sorti lorsqu’elle avait 20 ans. Je pense qu’elle doit être très satisfaite de voir que sa musique et celle du groupe soient toujours pertinentes pour les plus jeunes. Qui ne le serait pas d’ailleurs? Cette longévité doit faire des jaloux. Certainement que sa manière d’être plutôt décalée à l’époque de ses vingt ans est vue maintenant comme un modèle de liberté pour la jeunesse. Le mot Jiyū (自由, liberté) est d’ailleurs souvent utilisé dans les paroles de ses morceaux.

Viennent ensuite les questions sur les collaborations éventuelles. J’avais cité King Gnu et AiNA The End l’année dernière, et je cite toujours Daiki Tsuneta cette fois-ci. Daiki Tsuneta est un musicien avec plein d’idées de projets musicaux en tête (King Gnu d’abord, puis Millenium Parade et Perimetron) et je pense qu’il pourrait y avoir des idées intéressantes dans une collaboration entre Tsuneta et Sheena. Je cite également RöE comme jeune compositrice et interprète pour laquelle Sheena pourrait composer un morceau. Pour une interview croisée, j’avais mentionné le nom d’Ichiro Yamaguchi (de Sakanaction) la dernière fois mais en y réfléchissant bien, ça parait peu probable car je ne connais pas de liens, même lointains, entre les deux. Utada Hikaru avait été largement mentionné l’année dernière, ce qui parait complètement logique si on considère les quelques morceaux qu’elles ont interprété en duo dans le passé. J’ai cette fois-ci pensé à UA comme partenaire d’interview, parce qu’il y a un lien en la personne de Kenichi Asai, membre entre autres du groupe Ajico dont fait partie UA et qui a repris du service cette année. Comme elles sont de la même génération (UA est un peu plus âgée) et ont des connaissances en commun, les possibilités d’une interview croisée me paraissent plus probables.

On nous demande également quels produits dérivés on voudrait voir sur la boutique en ligne. Comme les lecteurs de vinyles et de cassettes sont déjà sortis ou sur le point de sortir, je pense qu’il serait temps de penser à un lecteur de CDs portable aux couleurs de Tokyo Jihen (pour rester vintage tout en étant utile). Vu le nombre de CDs qu’on a à la maison, j’aimerais ré-utiliser ce genre de lecteur portable, sans la compression des MP3. Il y a ensuite des questions plus étranges demandant un peu plus d’imagination, par exemple, quelle boutique serait au goût d’Ukigumo, quel onsen pourrait on recommander à Kameda, quel plat voudrions-nous cuisiner avec Hata, quel événement olympique conviendrait à Izawa et que dirait-on à Sheena Ringo si on travaillait dans un café et qu’elle arrivait soudainement. Une autre question qui m’intéressait était de donner le nom d’un artiste ou créatif qu’on recommanderait. J’avais mentionné l’illustrateur Shohei Otomo l’année dernière et je mentionne cette année Yasuto Sasada, un autre illustrateur et peintre, ayant notamment collaboré avec Yohji Yamamoto. Dans le portfolio de cet artiste que je suis depuis plusieurs années, il y a une illustration de paon (孔雀) et le mentionner est donc devenu une soudaine évidence. Tokyo Jihen reprend quelques épisodes de sa série Hanakin Night sur YouTube, suite aux épisodes sortis en Juin 2021, avec un premier épisode le Vendredi 26 Novembre 2021 (avec Hata). Une question nous demande ce qu’on voudrait voir dans ces vidéos YouTube. J’aimerais personnellement voir une vidéo du groupe pendant des répétitions ou en pleine exploration musicale pour composer un nouveau morceau. Ce genre de scènes qu’on pouvait voir accompagnant certains DVD/Blu-ray me manquent. Certaines de mes prédictions de l’année dernière étaient devenues réalité, mais je suis quand même un peu moins confiant pour l’enquête de cette année. Seul l’avenir nous le confirmera.

Je parlais dans un billet précédent du nouveau morceau de Tokyo Jihen, Hotoke dake Toho (仏だけ徒歩) qui est sorti le lundi 22 Novembre et dont la vidéo est diffusée sur YouTube depuis le 23 Novembre à 22h. J’ai bien sûr regardé la vidéo lors de la première, tout comme plusieurs milliers de personnes. Je ne l’avais pas remarqué au premier abord, mais le titre du morceau est un palindrome (回文). C’est à ma connaissance le seul titre de morceau composé d’un palindrome. Dans son émission radio sur Cross FM Etsuraku Patrol, Sheena Ringo incluait une rubrique intitulée Le sentier du palindrome (回文の小道) dans laquelle elle lisait des palindromes proposés par des auditeurs inspirés. C’est amusant d’en trouver un soudainement dans un titre de morceau. Un autre point à noter est la durée du morceau faisant 3:33 minutes, ce qui est forcément voulu et est soit un palindrome numérique ou une symétrie. Si on regarde bien, la durée de chacun des morceaux de l’album Kyōiku (教育) était également symétrique (ou faite d’un palindrome). Le premier single de Tokyo Jihen, Gunjō Biyori, fait d’ailleurs également 3:33 minutes. Ce nouveau morceau Hotoke dake Toho m’a d’abord déconcerté à la première écoute, notamment par la manière dissonante par moment de chanter de Sheena et Ukigumo. J’aime en général les dissonances volontaires, mais j’ai mis un peu de temps à m’y faire. D’abord déconcerté, je suis maintenant enthousiasmé par ce morceau dont les paroles et la musique sont écrites par Sheena. Il s’agit donc d’un duo avec Ukigumo et la mélodie, tout d’abord non-évidente, fait petit à petit son chemin dans notre cerveau pour finalement devenir particulièrement efficace au point d’avoir l’envie pressante d’y revenir. Le petit air oriental et l’abondance des guitares jouent également en faveur de cette lente addiction. Vient ensuite la vidéo que je trouve excellente. Le titre en anglais du morceau est To Nirvana. Est ce que ça signifie atteindre un état d’être proche du nirvâna bouddhiste ou est ce plutôt un hommage direct au groupe Nirvana ? Il doit y avoir un peu des deux. Les cinq membres du groupe portent les iconiques lunettes colorées au large bord que portait Kurt Cobain. Hata avec ses faux longs cheveux blonds ressemble d’ailleurs beaucoup à Kurt Cobain dans la vidéo. Ils sont tous les cinq dans un pavillon de banlieue américaine, à jouer le morceau dans des conditions plutôt dépravées et enfumées qui pourraient être grunge. Sheena fume et on la voit assise sur le sol de la cuisine entourée de bouteilles vides avec une bière Corona à la main (à noter qu’elle ne boit plus d’alcool, quoique la dernière vidéo Hanakin prouve le contraire). L’ambiance visuelle change complètement vers la fin du morceau lorsque Sheena traverse le mur de hauts parleurs qu’on voit sur la pochette du futur best album. Elle est allongée sur le sol comme pourrait être le Bouddha couché du temple Nanzoin à Fukuoka ou celui doré plus connu en Thaïlande. Une fleur de lotus complète ce tableau et nous fait à nouveau hésiter sur la signification du titre du morceau. Un autre point intéressant porte sur les guitares de Sheena sur cette vidéo. Elle porte d’abord la fameuse Duesenberg Starplayer II Surf Green que l’on pouvait voir sur la pochette de son premier single Kōfukuron. Dans la deuxième et dernière partie de la vidéo, on la voit jouer avec la guitare Rickenbacker 620 qu’elle avait déjà sur le morceau Gibs. Cette version a un autocollant Hi-lite qui est (ou était) sa marque de cigarettes depuis toujours (et dont le design du packaging est signé Makoto Wada). En continuant à chercher un peu plus sur internet, je vois que la vidéo du morceau a été tournée dans un studio appelé Palms 22 dans la ville de Futtsu à Chiba. Une maison californienne des années 1950 de style Butterfly Roof y est reconstituée avec des meubles et fournitures de l’époque, ceux qu’on voit dans la vidéo. Ce qui m’intrigue le plus dans cette vidéo, c’est Izawa plongé en apnée dans sa baignoire et le fait qu’il écrive « The End » sur sa machine à écrire. J’espère qu’il ne s’agit pas d’un mauvais présage sur l’avenir du groupe. Certains ont d’ailleurs cette crainte depuis l’annonce de la sortie du All Time Best Album. Je n’en suis pas convaincu car ils viennent juste de redémarrer et ils n’ont pas encore tourné pour l’album Music.

Je n’avais pas écrit de billets sur les concerts en vidéo de Sheena Ringo (椎名林檎) et Tokyo Jihen depuis plusieurs mois. Le dernier billet sur la compilation Chin Play Kō Play (珍プレー好プレー) de Tokyo Jihen date de Mai 2021, tandis que le dernier billet couvrant un concert de Sheena Ringo date du mois de Février 2021. C’était pour le concert Ringo Expo 18 (林檎博’18). Je pense m’être moi-même un peu traumatisé par la longueur des billets que je finissais par écrire et notamment par la quantité de détails que j’y apportais demandant forcément beaucoup de recherches sur internet. Je vais donc essayer de faire plus concis sans passer en revue chaque morceau pour les quelques concerts officiels qu’il me reste à couvrir. Le prochain sur la liste est Hyakkiyakō 2015 dont j’ai le Blu-ray depuis plusieurs mois déjà. Cette tournée de concerts, dont le nom complet est Sheena Ringo to Kyatsura ga yuku Hyakkiyakō 2015 (椎名林檎と彼奴等がゆく 百鬼夜行2015), s’est déroulée en 18 dates dans tout le Japon du 14 Octobre au 20 Décembre 2015. Le DVD/Blu-ray est par contre sorti beaucoup plus tard, le 31 Mai 2017, en raison des préparatifs de la cérémonie de passage de drapeaux aux Jeux Olympiques de Rio en 2016 sur laquelle Sheena était impliquée. La tournée Hyakkiyakō 2015 démarrait par Tokyo, passait par Osaka, Nagoya, Miyagi, Fukuoka, Hokkaido, Hiroshima, entre autres. La captation vidéo est celle du concert du 9 Décembre 2015 à Yokohama au Kanagawa Kenritsu Kenmin Hall (神奈川県立県民ホール) dans la grande salle contenant 2493 places. Ce concert n’étant pas de la série Expo, ce sont des salles de concert plus petites qui sont utilisées. Ça peut se comprendre car cette tournée ne correspond pas à la sortie d’un album. Elle faisait également suite à l’important concert Ringo Expo 14 se déroulant à Saitama Super Arena, une année auparavant, et couvrant la sorti de l’album Hi Izuru Tokoro (日出処). Le DVD/Blu-ray de Hyakkiyakō 2015 contient en fait deux disques, le premier étant le concert en lui-même composé de 29 morceaux et le deuxième disque est un enregistrement d’une session live de 10 morceaux dans le même hall de Yokohama mais sans public.

Je savais déjà ou plutôt j’avais l’impression que Hyakkiyakō 2015 était un grand cru car il est régulièrement cité dans les meilleurs concerts dans les enquêtes sur Ringohan comme je le mentionnais ci-dessus. Je ne suis pas déçu, ne serait ce que pour l’esthétique générale, notamment les costumes de scène que porte Sheena pendant la représentation. L’ambiance du concert est inspirée par le morceau Kamisama, Hotokesama (神様、仏様) qui est inédit en concert à l’époque car il n’est pas encore sorti sur un album (il sortira plus tard sur Sandokushi). Hyakkiyakō fait référence à la parade des monstres dans le folklore japonais, qui est représentée de manière imaginée dans la vidéo de Kamisama, Hotokesama. Le design du packaging du DVD/Blu-ray reprend également cette imagerie.

Le morceau Bonsai Hada (凡才肌) de l’album Sanmon Gossip démarre le set. Autant j’aimais moyennement le morceau sur Sanmon Gossip, certainement à cause de l’accordéon que j’ai toujours un peu de mal à apprécier, autant la version ici est exceptionnelle et démarre avec beaucoup d’intensité le concert. Le morceau demande cette intensité émotionnelle que Sheena retransmet comme une plainte sur scène. On la devine sur scène en kimono recouverte d’un écran sombre montrant un champ de pierres cosmiques tournant autour d’elle. Le rideau tombe ensuite pour laisser place à la lumière alors que démarre le morceau Yasashii Tetsugaku (やさしい哲学) sorti sur de l’album Ukina (collaboration avec Tomita Lab). La lumière nous permet d’apprécier beaucoup mieux le kimono que porte Sheena. Elle est très belle habillée de ce kimono, marqué subtilement du logo Kuronekodō, aux couleurs rouges et aux manches longues dessinées d’oiseaux japonais. Elle a une coupe de cheveux au carré et un maquillage forçant le trait au niveau des yeux comme des ailes d’oiseau. Le large chapeau de papier blanc qu’elle porte est très particulier et contribue à donner une apparence unique et iconique. Je ne sais pas par contre de quelle tradition provient cette forme de chapeau de papier, mais il semble très fragile et délicat. Les lumières soudaines nous font également découvrir les visages du groupe, nommé Mangarama (マンガラマ) pour l’occasion, accompagnant Sheena sur cette tournée. Ce sont des visages connus, une fine équipe d’habitués dirais-je. Au piano, quel plaisir de retrouver une nouvelle fois Hiizumi Masayuki (ヒイズミマサユ機 ou H Zett M). Ukigumo (浮雲) est également présent à la guitare et au chant (en commençant sur ce morceau). On a l’impression de retrouver une partie de Tokyo Jihen sur scène mais il ne s’agit pas de Kameda à la basse, car Torigoe Keisuke (鳥越 啓介) prend ce rôle. Il est très souvent présent aux côtés de Sheena Ringo pour des sessions d’enregistrement ou des concerts. Il y a un deuxième guitariste sur le set, Nagoshi Yukio (名越 由貴夫). C’est aussi un habitué des sessions d’enregistrement et des concerts. Avec ses cheveux longs lui couvrant le visage et même une partie du buste, il donne l’image d’un musicien stoïque, inébranlable par ce qui se passe sur scène. Les autres membres de Mangarama sont également familiers: Tamada Tomu (玉田 豊夢) à la batterie, Murata Yoichi (村田陽一) au trombone, Nishimura Kōji (西村浩二) à la trompette et Yamamoto Takuo (山本 拓夫) au saxophone, à la flûte traversière et à la clarinette.

Le set continue ensuite avec Irohanihoheto (いろはにほへと) qui aura une interprétation sans failles, comme l’ensemble du set d’ailleurs, ce qui n’est pas vraiment étonnant vue la qualité des musiciens sur scène. Le contraste sur scène entre l’ambiance sombre et les jeux de lumières est très beau, notamment quand la caméra vient filmer en gros plan des morceaux de visages recouverts par les manches du kimono, ou des mains de Nagoshi effectuant une des nombreuses parties solo de guitares. Il n’y a pas d’invités sur cette tournée contrairement aux concerts de la série Expo, mais des interventions sur les quatre écrans verticaux derrière le groupe. Le rapper Mummy-D intervient sur la dernière partie du morceau qui suit Togatta Teguchi (尖った手口), comme il le faisait sur l’album Sanmon Gossip. Sheena laisse tomber la coiffe de papier blanc sur le morceau suivant Rōdōsha (労働者) laissant des cheveux un peu ébouriffés. H Zett M est le seul à porter un chapeau et on voit assez peu son visage car il a souvent la tête plongé dans ses claviers. Ce morceau le montre un peu plus dans toute sa dextérité. Comme souvent sur les concerts de Sheena Ringo, le morceau est re-orchestré avec l’intervention de Ukigumo dans les chœurs. Il est très présent dans ce concert au point où on pourrait croire que ce concert est un duo de Sheena Ringo avec Ukigumo. Mais c’est une bonne chose. En regardant Sheena sur scène, je me dis maintenant qu’il doit s’agir de sa plus belle tenue. Ce genre de kimono très coloré lui va beaucoup mieux que les kimonos très formels qu’elle porte de temps en temps, notamment parce qu’elle se situe à une limite subtile entre un esprit rock et un autre beaucoup plus traditionnel japonais. On remarque également sur ce morceau qu’elle porte des geta sur scène, lorsqu’elle se met à taper des pieds.

Hashire wa Number (走れゎナンバー) fait place à la flûte traversière de Yamamoto Takuo. Il s’agit d’un morceau de Hi Izuru Tokoro. Le set est assez partagé entre les différents albums avec quand même une majorité provenant des derniers albums sortis à l’époque, à savoir Hi Izuru Tokoro et Ukina, mais également beaucoup de morceaux un peu plus anciens de Sanmon Gossip. Le septième morceau du set Kamisama, Hotokesama (神様、仏様) fait suite et comme je le disais plus haut donne une cohérence à l’imagerie utilisée sur scène et dans le titrage du concert que l’on voit affiché sur les écrans à la fin du morceau. Sheena a des mouvements très expressifs et marqués pendant ce concert. J’aime beaucoup la manière dont elle pointe du doigt H Zett M sans le regarder pendant son solo de clavier ou quand elle vient l’embêter alors qu’il donne toute son énergie à jouer. « Je veux jouer » (遊びたいのよ) dit les paroles du morceau à ce moment là alors que Sheena tend la main vers H Zett M comme un chat tendrait la pâte pour jouer, mais il reste imperturbable. J’aime aussi beaucoup la chorégraphie, accompagnée par les quatre danseuses d’ELEVENPLAY sur les quatre écrans verticaux, notamment les mouvements de mains en l’air imitant des petits monstres ou des mouvements brusques de tête comme si elle était perturbée par un esprit à l’intérieur d’elle. A noter que MIKIKO signe les chorégraphies du concert. Le morceau se termine par des images du clip vidéo de Kamisama, Hotokesama et sert de présentation des membres de Mangarama, sous les cris du public (c’était permis à l’époque). Nagoshi en kimono sous ses longs cheveux noirs avec un katana entre les mains est je trouve très convaincant. C’est seulement dommage que Mukai Shutoku qui interprète le morceau avec Sheena en version studio ne soit pas présent sur scène. Seules ses paroles apparaissent sur les écrans géants. Il n’était d’ailleurs pas présent non plus sur Ringo Expo 18.

Genjitsu ni Oite (現実に於て) sert d’interlude car il est interprété seul par H Zett M dans le noir pendant que Sheena se change. Ce morceau écrit par H Zett M pour le premier album de Tokyo Jihen me donne à chaque fois la chair de poule. Une flûte traversière qui n’était pas présente sur la version studio du morceau intervient pour faire la transition vers Genjitsu o Warau (現実を嗤う). Sheena apparaît à ce moment là portant maintenant un manteau vert foncé qu’elle ne gardera pas très longtemps. Après le morceau SG ~Superficial Gossip~ plus calme dans la pénombre, on passe au morceau Netsuai Hakkakuchū (熱愛発覚中) de l’album Ukina. Sheena enlève son manteau vert et on la voit maintenant sur scène en costume d’infirmière nous rappelant forcément le morceau Honnō. La danse qu’elle effectue sur scène avec les quatre danseuses sur grands écrans prend des airs parodiques, mais elle garde tout son sérieux. Elle fait des gestes très rapides en pointant les doigts comme des piqûres. Ces mouvements vont bien avec le rythme rapide du morceau. C’est un passage particulier et iconique du concert. Le final tout en guitares est très diffèrent et bien meilleur que la version purement électronique de Yasutaka Nakata que l’on connaissait jusqu’à maintenant. A la fin du morceau, elle enlève cette tenue d’infirmière pour ne garder qu’une tenue très légère rouge assortie à ses chaussures à talons. Elle prend pour la première fois du concert une guitare sèche pour le morceau Torikoshi Kurō (とりこし苦労) de l’album KSK. Encore une fois, l’orchestration est très différente de l’originale sans qu’on ait pour autant l’impression d’écouter un nouveau morceau. Shijō no Jinsei (至上の人生) est par contre relativement fidèle à l’original, peut être parce que c’était à l’époque un des derniers singles sortis. Peut-être aussi parce que Tamada Tomu à la batterie et Nagoshi Yukio à la guitare jouaient déjà lors de l’enregistrement studio. En tous cas, les guitares détonnent tout de suite sur scène. J’aime beaucoup ce morceau et Sheena l’interprète superbement. Les couleurs sur scène sont très belles vers la fin du morceau lorsque des écritures anciennes en kanji viennent s’inscrire en superposition sur son visage et le reste du corps. Il y a quelque de très cinématographique et d’extrêmement sexy dans cette mise en scène.

Plusieurs morceaux de Tokyo Jihen sont joués pendant ce concert et le suivant est Blackout (ブラックアウト) écrit par Sheena Ringo. J’aime bien la manière par laquelle le morceau monte en intensité au fur et à mesure. C’est un morceau très dense musicalement et Sheena y met toute sa force vocale au final jusqu’à la cassure. A ces moments là pendant les parties instrumentales, on la voit sur scène immobile l’air dans le vide ou en tournant le dos au public. Je me dis toujours qu’elle doit s’imprégner de chaque note pour en absorber l’énergie nécessaire pour poursuivre, recharger ses batteries en quelque sorte. Le début en solo à la contrebasse de Torigoe sur Meisai (迷彩) est très différent de l’original et semble même improvisé. Même quand les cuivres démarrent, on a du mal à reconnaître le morceau, et il faut attendre que Sheena apparaisse soudainement sur scène et chante les premiers mots pour finalement le reconnaitre. Sheena chante Meisai à un rythme beaucoup plus rapide que sur l’album, ce qui pousse le groupe à suivre. Le coup d’accélérateur continue jusqu’au solo de trombone de Murata Yoichi. C’est un autre des grands morceaux de ce concert, tout comme Tsumi to Batsu (罪と罰) qui suit. Sheena n’a pas perdu de sa voix et l’intensité qu’elle met dans ce morceau est bluffante. On la voit sur scène marcher péniblement, jusqu’à tomber aux pieds de Nagoshi au moment du solo de guitare. La caméra est aussi tremblante sur ce morceau ce qui rajoute à l’effet de fébrilité émotionnelle. C’est un morceau très prenant émotionnellement et une coupure devient nécessaire. Nous sommes exactement à la moitié du concert et la grande surprise pour moi est d’entendre Ukigumo chanter seul le morceau Yume no Tochū (夢の途中) chanté à l’origine par Hiroko Yakushimaru pour le film Sailor fuku to Kikanjū (セーラー服と機関銃). J’ai parlé plusieurs fois de ce film et de cette chanson sur ce blog, et c’est étonnant comme il me poursuit jusque dans les concerts de Sheena Ringo. Je me pose souvent la question des coïncidences et des liens entre les choses, et ce genre de surprise me le rappelle. Le morceau est brillamment chanté par Ukigumo, ce qui n’est pas, par contre, une surprise car il a e toute façon une belle voix.

Le rythme très apaisé du morceau chanté par Ukigumo change complètement avec l’arrivée de Sheena sur scène pour le morceau Σ. Elle s’empare pour la première fois du mégaphone pour une version très différente de l’original, tout en restant résolument rock. Cette atmosphère continue pour le morceau suivant Keikoku (警告) sur lequel Sheena joue de la guitare électrique dans une ambiance rougeâtre pleine d’urgence. J’ai toujours aimé ce morceau de Muzai Moratorium. Elle l’interprète avec beaucoup de puissance même si on ne retrouve pas tout à fait la hargne de ses débuts. Mayakashi Yasaotoko (マヤカシ優男) ensuite est assez génial pour la partition en solo de H Zett M au piano. Il joue une nouvelle fois les prodiges ce qui fait sourire Sheena jusqu’à la fin du morceau. J’aime beaucoup ce genre de moments dans ces concerts. Un autre petit détail étonnant est de voir Ukigumo à la trompette au tout début du morceau. Le morceau est très rapide et enlevé, très dense mais sans superflu. Naute no Dorobōneko (名うての泥棒猫) qui suit est par contre plus calme et effacé mais le morceau Mayonaka ha Junketsu (真夜中は純潔) reprend un rythme plus soutenu. Toutes les versions live que je connais de ce morceau sont meilleures que l’original. Celle-ci est très bonne notamment pour le solo de cuivre et la force vocale de Sheena, mais n’atteint pas tout à fait l’intensité de la version live sur Electric Mole. Kira Kira Bushi (きらきら武士) suit ensuite. C’est un morceau que Sheena chante normalement avec Rekishi qui a écrit le morceau, mais c’est Ukigumo qui prend le relais sur cette version sous l’appréciation du public. Cela donne le sourire à tout le monde sur scène, sauf H Zett M qui est continuellement concentré sur ses claviers.

Depuis son retour sur scène, Sheena était habillée d’un haut blanc avec des motifs identiques à ce que porte le reste du groupe, et une robe ample. Elle enlèvera vite le haut pour ne garder qu’un vêtement près du corps bleu. La transformation continue au début du morceau Omatsuri Sawagi (御祭騒ぎ) quand Sheena enlève d’un mouvement rapide comme par magie cette longue robe pour quelque chose de beaucoup plus court. Ce genre de changement sur scène est très classique et fait partie des moments attendus (sans que ça soit vraiment nécessaire à mon avis). La particularité des morceaux dans cette partie du concert est de contenir des parties instrumentales solo. Ici, c’est la batterie puis le piano qui sont mis en valeur. Ukigumo est toujours au chant dans les chœurs dans une ambiance de matsuri représentée par une procession de monstres animées sur les écrans au fond, celle du thème de ce concert. On approche ensuite doucement vers la fin du concert avec Nagaku Mijikai Matsuri (長く短い祭), toujours en duo avec Ukigumo, qui comme je le disais avant est vraiment très présent sur scène. L’interprétation est fidèle à la version originale si ce n’est ce petit supplément piano où H Zett M joue en même temps sur deux claviers de dos. Sheena est très mobile sur scène et son interprétation est impeccable tout comme l’ensemble des morceaux du concert. Il n’y a pas grand à redire non plus sur la sélection des morceaux. Le grand classique de Tokyo Jihen Gunjō Biyori (群青日和) chanté au mégaphone suit ensuite et s’enchaîne sans arrêt avec le morceau NIPPON. Sheena a repris la guitare électrique en cours de morceau et prend un air particulièrement sérieux en jouant. Les remerciements lancés au public nous font comprendre que le concert touche bientôt à sa fin et qu’on est dans les prolongations (langage sportif obligé pour le morceau NIPPON). Beaucoup n’apprécie pas ce morceau mais ce n’est pas mon cas, car je le trouve efficace et le solo de guitare est excellent. Il faut voir Sheena Ringo sur scène penchée en arrière en jouant de la guitare tout en tirant la langue un bref instant.

NIPPON est le dernier morceau du set mais il y a des rappels: Sakasa ni Kazoete (逆さに数えて) qui est une face B de NIPPON puis Kyogenshō (虚言症) de l’album Shōso Strip. Sheena Ringo n’a pas beaucoup parlé au public pendant ce concert mais ce n’était étonnamment pas gênant. Elle se montre presque timide pour adresser les quelques mots de remerciements avant de passer aux deux derniers morceaux. Je me rends compte que je ne connaissais pas le morceau Sakasa ni Kazoete, qui est très bon d’ailleurs, car le single de NIPPON doit être le dernier CD qui me manquait et je ne l’ai acheté que récemment après avoir vu ce concert. Écouter Kyogenshō à la toute fin du concert me redonne envie de regarder le concert de 2000, Gekokujō Xstasy (下剋上エクスタシー). J’adore ce morceau mais je trouve que sa voix est un peu tremblotante sur cette fin de concert. Il n’empêche que ce morceau conclut un des meilleurs concerts que j’ai vu de Sheena Ringo. A noter qu’il est dirigé par Yuichi Kodama et qu’il dure environ deux heures. Et comme si ce n’était pas suffisant, le boîtier DVD/Blu-ray contient un deuxième disque appelé Sheena Ringo to Aitsura ni yoru Ineiraisan 2016 (椎名林檎と彼奴等による 陰翳礼讃2016).

Ce deuxième disque de 40 minutes contient des enregistrements en salle de concert, mais sans public, de 10 autres morceaux. Cette session Live est enregistrée dans la même salle, au Yokohama au Kanagawa Kenritsu Kenmin Hall mais un peu plus tard le 26 Février 2016. La formation reste identique dans une ambiance générale plus sobre. Ce disque seul vaut le détour, ne serait ce que pour l’interprétation de Kabukichō no Joō (歌舞伎町の女王) en version un peu plus lente mais avec une guitare plus lourde que d’habitude. J’aime aussi énormément l’atmosphère de Mittei Monogatari (密偵物語) et Koroshiya Kiki Ippatsu (殺し屋危機一髪), morceau que j’ai beaucoup écouté ces derniers mois. Comme dans une scène de film, elle démarre ce morceau en tirant sur la caméra avec un faux pistolet. Les morceaux s’enchainent rapidement avec une seule pause au milieu pour un changement de tenue. La deuxième partie de cette session Live ne me plaît pas autant car elle contient des morceaux que j’aime beaucoup moins comme Oishii Kisetsu (おいしい季節) ou Onna no Ko ha Daredemo (女の子は誰でも). Shun (旬) est par contre excellent. Le piano de Hiizumi donne des frissons. On ne se lasse pas de voir ses doigts danser sur le clavier. Ce deuxième disque se conclut finalement sur Ariamaru Tomi (ありあまる富) que Sheena chante avec un air grave. Le final nous emporte dans une dernière vague de guitares. Je m’étais dit en commençant l’écriture de ce billet que je n’allais pas évoqué tous les morceaux et que j’allais resté concis, mais force est de constater que je n’ais pas pu m’en empêcher. Il ne me reste maintenant que deux concerts à voir Air Pocket et Ringo Expo 14. Je les ai déjà en Blu-ray dans mes tiroirs mais je vais prendre mon temps.

Pour référence ultérieure, je note ici la playlist du concert Hyakkiyakō 2015:
Sheena Ringo to Kyatsura ga yuku Hyakkiyakō 2015 (椎名林檎と彼奴等がゆく 百鬼夜行2015)

1. Bonsai Hada (凡才肌) de l’album Sanmon Gossip (三文ゴシップ)
2. Yasashii Tetsugaku (やさしい哲学) de l’album Ukina (浮き名)
3. Irohanihoheto (いろはにほへと), de l’album Hi Izuru Tokoro (日出処)
4. Togatta Teguchi (尖った手口) de l’album Sanmon Gossip (三文ゴシップ)
5. Rōdōsha (労働者) de l’album Sanmon Gossip (三文ゴシップ)
6. Hashire wa Number (走れゎナンバー) de l’album Hi Izuru Tokoro (日出処)
7. Kamisama, Hotokesama (神様、仏様), single qui apparaîtra sur l’album Sandokushi (三毒史)
8. Genjitsu ni Oite (現実に於て) du 1er album Kyōiku (教育) de Tokyo Jihen
9. Genjitsu o Warau (現実を嗤う) du 1er album Kyōiku (教育) de Tokyo Jihen
10. SG ~Superficial Gossip~, morceau en B-side du single Ariamaru Tomi (ありあまる富)
11. Netsuai Hakkakuchū (熱愛発覚中) de l’album Ukina (浮き名)
12. Torikoshi Kurō (とりこし苦労), du 3ème album Kalk Samen Kuri no Hana (加爾基 精液 栗ノ花)
13. Shijō no Jinsei (至上の人生), single qui apparaîtra sur l’album Sandokushi (三毒史)
14. Blackout (ブラックアウト) du 2ème album Adult (大人) de Tokyo Jihen
15. Meisai (迷彩), du 3ème album Kalk Samen Kuri no Hana (加爾基 精液 栗ノ花)
16. Tsumi to Batsu (罪と罰), du 2ème album Shōso Strip (勝訴ストリップ)
17. Yume no Tochū (夢の途中), écrit par Etsuko Kisugi, composé par Takao Kisugi et chanté par Hiroko Yakushimaru pour le film Sailor fuku to Kikanjū (セーラー服と機関銃)
18. Σ, présent en B-side sur le single Gips (ギブス)
19. Keikoku (警告), de l’album Muzai Moratorium (無罪モラトリアム)
20. Mayakashi Yasaotoko (マヤカシ優男) de l’album Sanmon Gossip (三文ゴシップ)
21. Naute no Dorobōneko (名うての泥棒猫) de l’album Gyakuyunyuu ~Koukuukyoku~ (逆輸入 ~航空局~)
22. Mayonaka ha Junketsu (真夜中は純潔), 6ème single présent sur aucun album
23. Kira Kira Bushi (きらきら武士), morceau écrit par Rekishi (レキシ) et présent sur l’album Ukina (浮き名)
24. Omatsuri Sawagi (御祭騒ぎ) du 1er album Kyōiku (教育) de Tokyo Jihen
25. Nagaku Mijikai Matsuri (長く短い祭), single qui apparaîtra sur l’album Sandokushi (三毒史)
26. Gunjō Biyori (群青日和) du 1er album Kyōiku (教育) de Tokyo Jihen
27. NIPPON de l’album Hi Izuru Tokoro (日出処)
28. Sakasa ni Kazoete (逆さに数えて), morceau en B-side du single NIPPON
29. Kyogenshō (虚言症), de l’album Shōso Strip (勝訴ストリップ)

Sheena Ringo to Aitsura ni yoru Ineiraisan 2016 (椎名林檎と彼奴等による 陰翳礼讃2016)

1. Seishun no Mabataki (青春の瞬き), reprise du morceau composé par Sheena Ringo pour Chiaki Kuriyama et inclus dans Gyakuyunyū: Kōwankyoku (逆輸入 ~港湾局~)
2. Kabukichō no Joō (歌舞伎町の女王), de l’album Muzai Moratorium (無罪モラトリアム)
3. Chichinpuipui (ちちんぷいぷい), de l’album Hi Izuru Tokoro (日出処)
4. Mittei Monogatari (密偵物語) de l’album Sanmon Gossip (三文ゴシップ)
5. Koroshiya Kiki Ippatsu (殺し屋危機一髪) de l’album Ukina (浮き名)
6. Karisome Otome (カリソメ乙女) de l’album Sanmon Gossip (三文ゴシップ)
7. Shun (旬), de l’album Sanmon Gossip (三文ゴシップ)
8. Oishii Kisetsu (おいしい季節), reprise du morceau composé pour Chiaki Kuriyama et qui sortira en single en 2017
9. Onna no Ko ha Daredemo (女の子は誰でも) du 5ème album Daihakken (大発見) de Tokyo Jihen
10. Ariamaru Tomi (ありあまる富), de l’album Hi Izuru Tokoro (日出処)

青く冷えてゆく東京

Je pense avoir déjà montré au moins une fois ces bâtiments sur Made in Tokyo, à part la maison noire aux lignes obliques sur la quatrième photographie et la résidence de béton sur la dernière photographie. La petite maison noire avait arrêté notre élan alors que je me promenais à vélo avec Zoa jusqu’au parc olympique de Komazawa en traversant le quartier de Shimouma. Dans ces cas là, Zoa m’autorise à chaque fois à m’arrêter quelques minutes au bord de la route pour prendre des photos. Je retiens parfois mon besoin compulsif de prendre des photos, mais la tentation est trop forte dans certains cas, surtout lorsqu’il y a de l’oblique ou d’une manière générale des formes non conventionnelles. Le bâtiment long et massif sur la dernière photographie se trouve à proximité de la tour Prime Square à Ebisu. Le béton est massif, sans fenêtres sur la rue, et sa texture est superbe. L’architecture que j’aime voir ne correspond pas toujours à l’architecture dans laquelle j’aimerais vivre. J’imagine que les fenêtres se trouvent de l’autre côté car il semble y avoir une cour intérieure. La rue est certes étroite mais n’est pas excessivement empruntée et il n’y pas de très fort vis-à-vis. Je me pose donc la question de la suppression quasi-totale des ouvertures. L’espace creusé dans le béton au rez-de-chaussée est une place de parking et donne accès à une porte qui n’est pas à priori la porte d’entrée principale de chaque habitation à l’intérieur de cette résidence. Elle s’appelle Kōyōsō (向陽荘) mais je n’ai pas trouvé d’autres informations à son sujet. Les autres photographies ont été prises principalement à Yoyogi Uehara et un peu plus loin vers Shōtō. Je marche assez souvent vers Yoyogi Uehara en ce moment, quartier que j’ai beaucoup exploré il y a plusieurs années. Sur l’avant dernière photographie, la lumière du soir vient se refléter doucement sur les parois de l’hôtel Prince Smart Inn à Ebisu. En prenant cette photo, je me rends compte que je pense un peu trop mes photographies en terme d’objet plutôt qu’en terme de lumière. Il faudrait que je garde cela un peu plus en tête, quitte à me diriger vers un peu plus d’abstraction visuelle.

Image montrée sur le compte Twitter de Music Station: AiNA The End (アイナ・ジ・エンド) à gauche et Sheena Ringo (椎名林檎) à droite, toutes les deux vêtues d’une robe Prada, superbe il faut bien le dire, avant l’interprétation de Gunjō Biyori (群青日和).

Je mentionnais dans un billet récent que j’attendais avec une certaine impatience de voir à la télévision la prestation de la formation spéciale Elopers réunie par Sheena Ringo. C’était le Vendredi 15 Octobre 2021, à l’occasion des 35 années de l’émission musicale Music Station animée sans discontinuer par Tamori. Tamori est d’ailleurs désormais inscrit au livre Guinness des records pour cette longévité inégalée pour une émission se déroulant en direct. Autant j’aime sa présence et sa vivacité d’esprit dans une émission comme Bura Tamori (ブラタモリ) sur NHK, autant il semble un peu ailleurs sur Music Station. Il faut dire qu’il a plus de 70 ans. Je ne critique pas du tout le personnage ceci étant dit, car je pense qu’il aime authentiquement les artistes qui participent à son émission tant qu’ils ou elles lui retournent bien les marques de respect. Tous les artistes ne sont malheureusement pas invités dans cette émission et il est extrêmement rare d’y voir des artistes indépendants s’y produire. Même dans le mainstream, j’ai l’impression qu’il faut avoir la bonne carte pour y participer et ce sont souvent les mêmes têtes que l’on voit. Sheena Ringo est mainstream et possède la carte, et ce depuis ses débuts, donc on la voit assez régulièrement, au moins quand elle ou Tokyo Jihen sortent un nouveau single ou un nouvel album. C’est très loin de me déplaire bien entendu. Elle a tellement la carte qu’elle peut même se permettre de jouer un ancien morceau comme Gunjō Biyori (群青日和) de Tokyo Jihen, sorti il y a plus de 15 ans. Cette émission spéciale de 4 heures fêtant les 35 ans de Music Station comportait de toute façon de nombreuses séquences rétrospectives, donc jouer un morceau classique de Tokyo Jihen était loin d’être hors sujet.

Image montrée sur le compte Twitter de Music Station: La formation Elopers au complet avec de gauche à droite: Sheena Ringo (椎名林檎), Hona Ikoka (ほな・いこか), Yuu (ユウ), AiNA The End (アイナ・ジ・エンド) et Shiori Sekine (関根史織). Les chemises de style grunge sont, contrairement à ce qu’on pourrait d’abord penser, de la marque Gucci, Celine ou encore Loewe.

Sheena s’était entourée de Yuu (ユウ, Yumi Nakashima) du groupe Chirinuruwowaka (チリヌルヲワカ) mais auparavant de GO!GO!7188, Shiori Sekine (関根史織) du groupe Base Ball Bear, Hona Ikoka (ほな・いこか) du groupe Gesu no Kiwami Otome (ゲスの極み乙女。) et AiNA The End (アイナ・ジ・エンド) de BiSH. Hona Ikoka était à la batterie, Shiori Sekine à la guitare basse, Yuu et Sheena à la guitare électrique et AiNA seule au chant. La surprise, mais je m’y attendais un peu, était que Sheena ne chantait pas et jouait seulement de la guitare. Elle s’était même placée un peu en retrait dans le coin gauche de la scène, comme pour laisser la place aux autres et notamment à AiNA au chant. J’imagine la pression pour AiNA si Sheena était juste à côté et ce retrait est certainement volontaire. Dans l’interview avec Tamori avant l’interprétation sur scène, AiNA nous explique qu’elle avait demandé cinq fois à Sheena si elle voulait vraiment qu’elle fasse partie du groupe au chant. AiNA est clairement la plus jeune et deux autres membres sont également chanteuses dans leurs groupes respectifs (Yuu et Sheena). Je trouve qu’on remarquait cette pression sur ses épaules notamment au début du morceau, mais AiNA a fini par libérer son chant dans la deuxième partie du morceau. A ce moment là, elle chantait un peu plus à sa manière et c’est ce qu’on attendait. C’est d’ailleurs amusant de voir Sheena sourire légèrement de satisfaction vers la fin du morceau. La voix d’AiNA est loin d’égaler celle de Sheena mais elle est différente, plus torturée peut-être, et elle ne sera pas excellente sur tous les morceaux qui se présentent à elle. Le final de Gunjō Biyori était particulièrement savoureux. La force des trois guitares s’y conjuguaient dans un bruit électrique qui faisait sourire AiNA de soulagement. Ce dernier solo était moins bien exécuté que quand Tokyo Jihen le joue à quatre guitares (Ukigumo, Izawa, Kameda et Sheena) mais il s’en dégageait beaucoup de puissance. J’aimerais bien que ce groupe continue en parallèle de Tokyo Jihen, même de manière très épisodique, et pourquoi ne pas composer des nouveaux morceaux chantés à trois voix (Sheena, Yuu et AiNA)? Il y a là, à mon avis, un potentiel à développer. Sheena nous disait dans l’interview initial de Tamori qu’elle avait découvert AiNA dans cette émission Music Station et avait été impressionné par sa voix. On sait aussi que Kameda avait arrangé les musiques et produit le premier album d’AiNA. Il y a donc fort à parier que ça ne sera pas la dernière collaboration entre ces deux artistes. Ceci étant dit je ne pense pas avoir déjà entendu un morceau en duo entre Sheena et une autre chanteuse. Elle a fait de nombreux duo mais toujours avec des voix masculines fortes et typées (Miyamoto Hiroji par exemple, qui était également présent dans l’émission ce soir là).

Image montrée sur le compte Twitter de Daiki Tsuneta: Le groupe King Gnu au complet avec de gauche à droite: Yū Seki (Batterie), Kazuki Arai (Basse), Daiki Tsuneta (guitare) et Satoru Iguchi (Voix et clavier), ainsi que leurs versions enfants que l’on peut voir dans la vidéo du morceau BOY et sur la scène de Music Station. A noter que satoru Iguchi a le même t-shirt que dans la vidéo de Teenage Forever, ce qui semble créer des liens entre les morceaux.

L’autre groupe que je voulais absolument voir lors de cette émission était King Gnu. Ils passaient juste après Elopers et interprétaient un nouveau morceau intitulé BOY que je n’avais jamais entendu car il sortait le jour même. Dans la vidéo réalisée par Osrin de Perimetron, les membres de King Gnu sont joués par des enfants et la surprise était que ces mêmes enfants étaient présents sur scène à la place de King Gnu pendant l’émission Music Station. Ils étaient d’abord présents près de Tamori pour une courte interview, et le petit garçon jouant le rôle de Satoru Iguchi ne s’est pas démonté en répondant aux questions. Mais comme on lui posait une question enfantine (qu’est ce que tu aimes comme plat), il a eu la bonne répartie de poser exactement la même question avec un air un peu moqueur à un des invités assis à côté de Tamori, sous l’étonnement général. Je n’ai malheureusement pas pu me concentrer sur l’écoute du morceau pendant la prestation, car voir des enfants faire semblant tant bien que mal de jouer sur scène comme King Gnu m’a quand même un peu perturbé. Le groupe intervenait quand même en deuxième partie de morceau, ce qui m’a tout de suite rassuré. J’ai eu peur qu’ils n’apparaissent pas du tout sur scène pendant l’émission. Ils en auraient été capable. Le morceau en lui même est dans la ligne directe des autres morceaux de King Gnu. On n’y trouvera pas une grande originalité mais il est accrocheur dans l’ensemble. Sur la scène, j’ai particulièrement aimé le jeu de guitare de Daiko Tsuneta, tout en distorsions ce qui m’a rappelé l’émission KanJam avec Tokyo Jihen où le sujet des distorsions (歪み) était longuement évoqué (à propos des distorsions à la guitare basse dont Seji Kameda est spécialiste). Après plusieurs écoutes du morceau BOY sur YouTube, je l’aime finalement beaucoup.

L’autre curiosité était un morceau d’une dizaine de minutes de Perfume et Daichi Miura, accompagnés des danseuses et danseurs de ELEVENPLAY et SP Dancers. Je ne suis pas particulièrement amateurs de Daichi Miura (三浦大知) ou de Perfume, mais j’étais très curieux de voir les chorégraphies imaginées par MIKIKO et les effets spéciaux sur scène de Rhizomatiks. Ce n’est pas la première fois que MIKIKO et Rhizomatiks interviennent sur les chorégraphies et l’animation sur scène de Perfume. Le groupe est d’ailleurs connu pour sa qualité scénique. ELEVENPLAY faisait les raccords entre les prestations de Perfume et Daichi Miura, ce qui donnait un ensemble très fluide et beau visuellement. J’en arrive même à apprécier le morceau que Perfume interprétait, leur dernier single Polygon Wave, ce qui est une première pour moi. Mais je suis en ce moment dans une phase où j’aime à peu près toutes les compositions musicales de Yasutaka Nakata, j’y reviendrais certainement un peu plus tard.

Le titre du billet est tiré des paroles de Gunjō Biyori (群青日和) et vient signifier que Tokyo se refroidit, ce qui est tout à fait de saison aujourd’hui.

懐こくされるのは致命傷

Pour une journée en semaine, que j’ai pris en congé, je m’attendais à voir un peu plus de salary men (les employés de bureau) dans le parc de Hibiya, comme on peut en voir dans les photographies de Bruno Quinquet du fameux Bureau d’Etudes Japonaises sur sa série Salaryman Project. Il y en avait peu aujourd’hui, peut être en raison du télétravail. Je ne sais plus pour quelle raison j’ai été amené à marcher avec Zoa dans ce parc à la toute fin de l’été, mais je l’ai découvert différemment. J’ai souvent traversé le parc le soir, mais plus rarement en pleine journée, surtout en semaine. On a pris notre temps car on avait environ une heure pour nous. Je sais que le parc est parfois utilisé pour des concerts, notamment le Hibiya Music Festival se déroulant en général sur deux jours. Seiji Kameda parle régulièrement de ce festival, dont il est le producteur, sur son compte Twitter, mais je n’y suis jamais allé. Il faudrait que je fasse le curieux l’année prochaine. J’imagine que certains des concerts se déroulent sur la grande pelouse verte que l’on peut voir sur la troisième photographie du billet, devant le vieux hall de briques. En marchant dans le parc, on fait un détour pour passer devant le fleuriste Hibiya Kadan, car je voulais revoir les blocs d’architecture aux hauts plafonds créés par Kumiko Inui pour cette boutique. En marchant aujourd’hui dans ce parc, je perds un peu de vue la raison pour laquelle je ne l’aime pas. C’était peut-être parce que, malgré sa grande taille, on ne peut que difficilement s’y perdre, ou peut-être parce qu’il est entouré de buildings de bureaux, ce qui ne constitue pas à priori une atmosphère reposante. Mon avis change un peu aujourd’hui en imaginant la musique qu’on y joue plutôt que la présence des employés de bureau en uniforme endormis sur un banc. En fait, j’ai compris la raison pour laquelle je n’aime pas beaucoup ce parc. J’ai l’image persistante en tête d’employés venant ici seuls pour évacuer leur stress, et les voir assis silencieux sur leur banc me fait imaginer leur situation. En traversant ce parc aujourd’hui, une image beaucoup plus légère flottait autour de nous.

Je n’allais bien sûr pas manquer les reprises faites par Sheena Ringo et Tokyo Jihen de morceaux du groupe Original Love (オリジナル・ラブ) sur la compilation hommage What a Wonderful World with Original Love?, sortie pour ses trente années de carrière musicale. Pour être tout à fait honnête, je n’avais jamais entendu parlé de ce groupe japonais pop au nom étrange, fondé en 1986 mais ayant sorti leur premier album majeur en 1991. A l’origine, le groupe se composait de quatre membres, mais il ne reste maintenant que Takao Tajima. Je n’allais pas manquer ces reprises car je sais que Sheena Ringo arrive toujours à transcender les morceaux qu’elle reprend. Je n’ai pas été déçu par les reprises récentes comme celle du morceau de Yōsui Inoue (Wine Red no Kokoro) et celle de Buck-Tick (Kakeochisha) pour des albums Tribute. Cette reprise du morceau Let’s Go! de Original Love, initialement sorti en Juin 1993 sur l’album Eyes, est tout simplement superbe. Sheena s’entoure d’une formation jazz qui inclut des habitués à savoir Midorin (みどりん) aux percussions, Keisuke Torigoe (鳥越啓介) à la basse et Masaki Hayashi (林 正樹) au piano. Ils étaient par exemple déjà présents sur les concerts de Tōtaikai (党大会) en 2013. J’aime beaucoup cette ambiance jazz et cette formation resserrée avec Sheena au chant excelle, au point où je souhaiterais vraiment que le prochain album solo de Sheena Ringo, s’il sort un jour, soit purement jazz dans cet esprit là. La capacité de cette formation à partir vers l’improvisation vers la fin du morceau est particulièrement savoureuse. Midorin est également membre à plein temps du sextuor SOIL& »PIMP »SESSIONS, dont j’écoutais d’ailleurs beaucoup le EP avec Sheena au chant intitulé Koroshiya Kiki Ippatsu (殺し屋危機一髪). Les performances jazz de SOIL& »PIMP »SESSIONS sont beaucoup plus énergétiques voire même explosives (au point où on appelle leur style Death Jazz) que ce qu’on peut entendre sur le morceau de cette compilation, qui joue beaucoup plus dans la retenue. J’aime ce style un peu plus posé qui je pense convient bien à la voix de Sheena (comme sur Tōtaikai), mais je me dis aussi qu’il faudrait que je parte un peu plus à la découverte de la musique de SOIL& »PIMP »SESSIONS. En écoutant ce morceau de Original Love, je me dis également que Sheena pourrait sortir le volume 2 de Utaite Myōri (唄ひ手冥利), la suite du volume 1 composé uniquement de reprises sorti il y a très longtemps en Mai 2002.

Le morceau interprété par Tokyo Jihen sur ce même album hommage à Original Love est en comparaison moins intéressant. Primal (プライマル), initialement sorti en Juillet 1996 sur l’album Desire, est joli mais un peu trop doux à mon avis, un peu trop éloigné de l’esprit du groupe. Il est interprété à deux voix en alternance par Sheena et Ukigumo. Je m’attendais à la première écoute à ce qu’il se produise un décrochage inattendu comme sait le faire Tokyo Jihen, mais ce n’est pas le cas et le morceau se termine dans la douceur comme il a commencé. Ça n’empêche pas qu’il soit beau et qu’il reste en tête après écoute, mais il souffre de la comparaison avec le morceau solo de Sheena. La compilation contient également un morceau interprété par Ukigumo en solo, sous son vrai nom, Ryosuke Nagaoka (長岡 亮介). Ce morceau intitulé Dear Baby (ディア・ベイビー) est dans un style country que j’ai énormément de mal à apprécier et qui m’a même donné une crainte que Tokyo Jihen parte un jour vers cette direction. J’espère que non même pour un seul morceau. Rien ne le présage pour l’instant en tout cas. Et au sujet du titre de ce billet 懐こくされるのは致命傷, que l’on peut traduire en « La nostalgie est une blessure mortelle », il s’agit d’un extrait des paroles du morceau Koroshiya Kiki Ippatsu mentionné un peu plus haut et que j’écris ici pour mémoire.

銀座ウォーク❽

Je continue cette série estivale « walk » (ウォーク) qui se promène dans plusieurs quartiers de Tokyo. Les photographies datent un peu car elles sont prises en même temps que ma visite du parc Hama-Rikyu et mon passage devant la tour Nakagin. Je profite de ce passage rapide dans Ginza pour aller devant au grand carrefour au pied de la tour Ginza Place dessinée par Klein Dyhtham. Un groupe de deux saltimbanques en tenues de couleurs unies fluorescentes se produisait à ce carrefour. Ils s’appelaient Just-In. Je ne les connais pas et je ne pense pas qu’ils soient connus mais j’ai quand même retenu leur nom pour la ressemblance avec le prénom d’un chanteur américain connu. Je pense que c’est volontaire et ça marche apparemment plutôt bien car je me souviens moi-même de leur nom même après plusieurs semaines, sans pour autant avoir vu leur représentation de rue car ils terminaient juste à mon arrivée. Mon détour dans les rues de Ginza m’amène par hasard devant l’hôtel Aloft. Les plus attentifs d’entre nous saurons certainement que c’est dans le lounge de cet hôtel de Ginza que s’est déroulée l’emission spéciale de Tokyo Jihen sur YouTube, Hanakin Night Ajito Nau (東京事変の花金ナイト 「アジトなう。」) , qui faisait office de présentation du nouvel album Music (音楽). En regardant à travers les grandes baies vitrées, je reconnais l’intérieur avec le billard au fond et le fauteuil haut sur lequel Ukigumo était assis. Dommage que cette émission ne soit plus disponible officiellement sur YouTube car elle était particulièrement intéressante, enfin on peut bien la trouver ailleurs si on cherche bien.

En parlant de Sheena Ringo, je reviens sur les interrogations que j’avais à propos d’une photo d’archive de la fin des années 90, vue sur un mur d’Harajuku. Je me posais la question dans un autre billet de qui accompagnait Sheena Ringo lors de son voyage en Décembre 1998 à Londres et à Paris pour un magazine de mode. Le bouquin Ringo Allergie (林檎アレルギー) que je viens de recevoir me confirme que le magazine en question se nomme Zipper et que le séjour à Paris et Londres avait lieu du 11 au 18 Décembre 1998. Il s’avère que le modèle masculin qui accompagnait Sheena pendant ce séjour s’appelle Gaku (学). Ce n’est donc pas la personne de l’affiche sur la palissade d’Harajuku, malgré une certaine ressemblance. La personne sur l’affiche d’Harajuku se nomme apparemment Hide et est étudiant en université. Mon intuition n’était donc pas la bonne. Cette recherche poussée a quand même eu l’intérêt de me faire découvrir ce livre Ringo Allergie et de me rappeler à récupérer en format mp3 les épisodes de l’émission radio de Cross FM Fukuoka Etsuraku Patrol pour pouvoir les écouter facilement une nouvelle fois sur mon iPod. La première émission disponible, celle du 21 Décembre 1998, parle d’ailleurs de ce séjour à Londres et Paris. J’ai toujours dans l’idée de faire un résumé des 16 émissions disponibles mais il me faudrait beaucoup de courage et d’obstination. Il y a en fait des retranscriptions de certaines émissions dans le fanzine gratuit RAT dont toutes les éditions de 1999 à 2003 sont regroupées dans la boîte verte fluorescente SheenaRingoBoX sorti en 2008 pour ses dix années de carrière. Le contenu de cette boîte est un petit trésor qui me prendra du temps à explorer. Les photographies prises pendant le séjour à Paris et Londres ont été montrées dans plusieurs numéros du magazine Zipper, notamment ceux de Mars, Avril et Juin 1999 (entre autres). Les quelques photos ci-dessus prises à Paris proviennent du numéro d’Avril 1999 de Zipper avec Chara en couverture.

J’ai déjà parlé plusieurs fois sur ce blog de la musique de Samayuzame mais je ne peux m’empêcher d’en parler encore car elle vient de sortir son deuxième album intitulé Plantoid le 28 Juillet. L’album contient les trois morceaux dont j’ai déjà parlé auparavant, à savoir Boku no Wakusei (僕の惑星), Rui Rui (累累) et Lotus Farm. Le morceau que je préfère sur les sept de l’album, est le sixième intitulé Naraku no Mokushiroku (奈落の黙示録), qui est d’une beauté sombre et inquiétante. Les trois images ci-dessus sont tirées de la vidéo visible sur YouTube. On retrouve cette ambiance sur la majorité des morceaux de l’album mais la voix délicate de Samayuzame apporte une lumière qui contrebalance bien l’ensemble. L’univers musical de Samayuzame évoque un monde sombre et onirique. Les sonorités principalement électroniques nous enveloppent et on se laisse emporter par cette atmosphère rêveuse remplie de mystère. La qualité de composition est magnifique, particulièrement riche, foisonnante de toute sorte de sonorités parfois volontairement dissonantes. Certaines sonorités me font d’ailleurs penser à l’ambiance de KSK de Sheena Ringo. En fait, il y a un son final au violon sur le morceau Lotus Farm qui m’a fait penser dès la première écoute au violon de Neko Saito. J’étais d’ailleurs très surpris de voir après coup que Neko Saito donnait un commentaire sur l’album. Son commentaire est très élogieux et indique d’ailleurs que Samayuzame et Neko se connaissent depuis trois ans et qu’il l’a vu évoluer pendant ces quelques années. Ce commentaire est présenté dans un tweet avec une photo de Neko Saito en blouse blanche qui, si je ne trompe pas, est tirée du concert Ringo Expo 18 de Sheena Ringo. A ce propos, le morceau titre de l’album, Plantoid, m’interpelle à chaque fois que je l’écoute. La manière de chanter de Samayuzame sur les premières paroles de ce morceau me rappelle à chaque fois le morceau Hatsukoi Shōjo (ハツコイ娼女) sur l’album Heisei Fūzoku (平成風俗). Les morceaux ne se ressemblent pourtant pas mais j’y entends une manière similaire de faire flotter les fin de phrases. Il y a beaucoup de talent et d’inspiration dans cet album et ce foisonnement de sonorités s’accordent entre elles dans la plus grande limpidité. L’album est juste un peu court en version digitale (celle sur j’ai acheté sur iTunes) mais la version sur CD contient deux morceaux supplémentaires qui sont des reprises de deux morceaux plus anciens. J’ai déjà écouté cet album de nombreuses fois mais je ne m’en lasse pas, certainement car j’y trouve quelque chose d’apaisant. J’aime aussi beaucoup son logo en forme de papillon qui reprend son nom. On l’aperçoit à la fin de la vidéo de Naraku no Mokushiroku.

渋谷ウォーク❺

Lorsque le mois d’août démarre, je me demande à chaque fois comment je vais l’aborder sur ce blog. Les chaleurs estivales actuelles font qu’il est très difficile de marcher dans les rues pendant la journée même en se levant très tôt. Je plains parfois les sportifs olympiques qui doivent faire des exploits sous une chaleur pareille. Nous avons beaucoup aimé regarder les épreuves de skateboard street et de BMX free style. Ce sont des nouvelles disciplines olympiques qui valent le coup d’oeil. On souffre à leur place quand ils ou elles tombent brusquement au sol après une acrobatie ou quand on les voit sous la chaleur d’Ariake sans aucune ombre pour les protéger. Mais à l’écran, ils ne semblent pas montrer de désagréments envers ces conditions météorologiques. Ils sont certainement trop concentrés sur l’acte à accomplir. 1 minute de compétition est pour certains et certaines la concrétisation d’années d’entrainement intensif. Hier soir, nous sommes retournés dans la nuit faire le tour en vélo du stade olympique. On ne peut que difficilement approcher le stade en voiture à cause des barrages de police, donc le vélo est une bonne option. Je connais maintenant assez bien le trajet qui nous permet de longer au plus près le stade, mais il est gardé comme une zone militaire. On voit d’ailleurs des forces d’auto défense à l’intérieur de l’enceinte. L’année dernière au mois d’août, nous avions passé une nuit dans le nouvel hôtel proche du grand stade, ce qui m’avait permis de prendre quelques photos. Il y a maintenant une grande grille qui sépare l’hôtel du stade. On ne peut entendre que les sons des compétitions d’athlétisme qui se déroulent ce soir là. Le bruit du pistolet nous indique le démarrage d’une course et nous incite à reprendre le chemin du retour. Devant le musée olympique, une longue file d’attente s’est formée devant les anneaux olympiques. Ils sont pourtant installés là depuis longtemps, mais la foule ne s’y presse que maintenant pour les prendre en photo, même tard le soir. Je ressens moi-même cette attirance soudaine car je suis venu voir ces anneaux olympiques à vélo au moins trois fois depuis le début des compétitions. Je pense qu’on essaie du mieux qu’on peut de s’imprégner de l’ambiance olympique, mais l’événement donne tout de même le sentiment d’être un peu lointain, comme s’il se passait dans un Tokyo parallèle. Je pense qu’il y aurait là matière pour une histoire à la Murakami Haruki. Sans prétention aucune, ceci me rappelle que je devrais utiliser ce mois d’août pour essayer d’écrire des textes de fiction en continuant avec un nouvel épisode de l’histoire de Kei ou en imaginant un autre Tokyo parallèle comme je l’avais fait il y a quelques mois. L’inspiration ne se commande malheureusement pas. L’année dernière au mois d’août, j’avais fait une série photographique en dix épisodes intitulée Manatsu (真夏), le plein été. Il y avait autant de photos que de katakana dans l’alphabet japonais et chaque billet était accompagné d’une note musicale. Peut-être devrais-je reprendre un modèle similaire cet été. Ou peut-être devrais-je simplement continuer cette série appelée Walk (ウォーク) dont j’ai déjà écrit quelques épisodes.

Sur les photographies de ce billet, nous sommes dans le centre de Shibuya. Les trois premières photographies sont prises dans le quartier Udagawachō, qui a gardé un désordre ambiant qui se fait de plus en plus rare dans Shibuya. Les choses vont changer très certainement et je viens ici régulièrement pour voir à quelle rythme le décor urbain se modifie. Les priorités de changement sont pour l’instant axées sur la gare, mais on note déjà des tentatives de normalisation à Udagawachō depuis l’installation de la grande tour Abema. Le grand mur de graffiti à l’arrière que je prends souvent en photo a par exemple été entièrement repeint en blanc. Comme il est un peu à l’écart de la rue principale, je pressens qu’il serra de nouveau pris d’assaut par les graffeurs à moins qu’il ne soit maintenant surveillé par des caméras vidéo. Dans le quartier, je remarque des petits tableaux posés à la sauvette. Ils montrent des visages et des corps en noir et blanc mais marqués de quelques couleurs. J’imagine qu’il s’agit d’une exposition de rue en mode guérilla comme on peut le voir régulièrement à Shibuya. L’agence d’idoles alternatives Wack s’était d’ailleurs fait une spécialité d’envahir les rues de photographies des membres de l’agence à l’occasion de la sortie d’un nouvel album ou à l’occasion d’événements particuliers. BiSH, le groupe le plus populaire de l’agence, sort d’ailleurs un nouvel album dans quelques jours le 4 août. Ce sera peut être l’occasion de nouveaux affichages, il faut que je surveille les rues de Shibuya.

Le nouvel album de BiSH s’appelle GOiNG TO DESTRUCTION et se composera de quatorze morceaux dont plusieurs sont déjà sortis. Je ne suis pas sûr d’acheter l’album en entier mais je reste assez curieux d’écouter ce que va donner l’ensemble. Je me suis en fait déjà procurer sur iTunes trois morceaux de ce nouvel album: STAR qui est déjà sorti il y a plusieurs mois mais dont je n’avais pas encore parlé ici, STACKiNG et in case… qui sont sortis plus récemment. Ce sont loin d’être les meilleurs morceaux du groupe mais ils n’en restent pas moins très efficaces. Ils n’ont en fait pas énormément d’originalité et sont très fidèles au style de composition musicale de Kenta Matsukuma (松隈ケンタ) au point où on se demande si on ne connaît pas déjà ces morceaux. Comme pour AiNA avec son album solo qui faisait intervenir Kameda Seiji aux arrangements, le groupe aurait intérêt à inclure un peu de sang neuf dans le processus créatif. Après plusieurs écoutes de ces morceaux, je suis surpris moi-même d’y revenir. Il reste au groupe cette ferveur vocale immuable qui finit par être communicative et par me convaincre. Le chant est comme toujours principalement mené par AiNA, Chichi et Ayuni qui ont les voix les plus fortes et remarquables. Ayuni a comme toujours la voix la plus disruptive mais j’aime beaucoup sa manière agressive de chanter qui vient à chaque fois bousculer la dynamique des morceaux. Le groupe est beaucoup plus convaincant sur leurs albums que lors de leurs interventions télévisées où j’ai l’impression qu’elles hésitent à pousser leur excentricité vocale. C’est pourtant ce qui fait tout l’interêt de leur musique. Les quatre captures d’écran ci-dessus proviennent d’une petite vidéo introductive de ce nouvel album. J’aime beaucoup le fait que cette vidéo est clairement inspirée de la vidéo du morceau Honnō (本能) de Sheena Ringo. Bien que les six membres de BiSH ne soient pas habillées en infirmières comme dans Honnō, elles sont tout de même habillées de blanc et on les voit casser des vitres à mains nues comme Sheena pouvait le faire sur Honnō. Il n’y a absolument aucune ressemblance entre les premiers morceaux que je connais de leur nouvel album et la musique de Sheena Ringo, mais on sait que AiNA est influencée par Sheena et qu’elle a d’ailleurs déjà repris quelques morceaux d’elle. Comme AiNA est souvent en charge des chorégraphies du groupe, elle est peut-être également à l’origine de cette vidéo inspirée de Honnō. C’est seulement une supposition de ma part. Comme je le dis souvent, ce type de liens d’influence m’intéressent beaucoup.

Pour revenir aux photographies de ce billet et sans pour autant toutes les décrire une à une, je veux quand même mentionner que la quatrième correspond à des toilettes publiques dont le design est conçu par Kengo Kuma. Elles font partie du projet Tokyo Toilet remplaçant une à une les vielles toilettes publiques de l’arrondissement de Shibuya par des nouvelles toutes conçues par des architectes ou designers différents. J’avais déjà montré celles transparentes par Shigeru Ban ou celles dans les jardins publics près de la gare d’Ebisu par Fumihiko Maki ou Masamichi Katayama. Celles conçues par Kengo Kuma se nomment A Walk in the Woods et on peut les trouver dans le parc Nabeshima dans le quartier résidentiel huppé de Shoto. L’utilisation du bois est très distinctif du style actuel de Kengo Kuma. On reconnaît son style au premier coup d’oeil. La photographie suivante dans ce billet montrant une façade bleutée est également prise dans ce même quartier de Shoto. Cette photographie m’amuse car on y voit à la fois un élégant et discret petit dessin de papillon avec une signature et une mention en anglais seulement « We call Police ». Il n’est pas rare de voir ce genre d’avertissement dans un anglais pas forcément incorrect grammaticalement mais plutôt flou ou approximatif. J’imagine que le message signifie qu’il est interdit de faire des graffiti sur le mur, comme en général un premier graffiti en appelle d’autres.