inside the doughnuts hole

J’aime beaucoup la densité urbaine qui se dégage de la première photo prise à une des extrémités d’Harajuku. La topographie et l’urbanisme non-homogène de Tokyo permettent ce type de vues. Je suis ici debout sur la passerelle piétonne traversant l’avenue Meiji avant qu’elle ne remonte en direction de Shinjuku. J’emprunte souvent cette avenue à pieds ou à vélo. Avant d’arriver à ce point là, je passe très souvent par une route longeant les anciens appartements de Kita Aoyama en attente de destruction. Les bornes jaunes usées bloquant la route aux voitures proviennent de cet endroit avant que cette route ne vienne s’enfoncer dans la suractivité piétonne d’Omotesando, et d’Harajuku ensuite. Un des stickers collé sur une des bornes me rappelle le personnage Homer Simpson, grand amateur de donuts, mais en version défigurée.

Je viens de terminer le visionnage des dix épisodes de 54 mins du drama télévisé de la chaîne TBS Quartet (カルテット). Il ne s’agit pas d’une série récente car elle a été diffusée en 2017, mais elle est apparue soudainement dans ma liste de recommandations sur Netflix et je me suis laissé tenter. J’avais tout de même un intérêt préalable car Sheena Ringo en a écrit et composé le thème musical final intitulé Otona no Okite (おとなの掟), interprété au chant dans le drama par un quartet appelé Doughnuts Hole. Pour l’interpretation musicale, on retrouve sur ce morceau des habitués comme Masayuki Hiizumi (ヒイズミマサユ機 aka HZM) au piano, et Neko Saito (斎藤ネコ) au violon et aux commandes du véritable quartet. Sheena Ringo reprendra plus tard ce morceau sur la compilation Reimport 2 avec le titre The Adult Code. J’ai compris après avoir fini la série la raison de cette mise en avant sur Netflix. Le scénario a été écrit par Yūji Sakamoto (坂元裕二) qui a été récompensé récemment au festival de Cannes pour le meilleur scénario pour le film Monster (怪物) d’Hirokazu Kore-eda (是枝 裕和). On a donc beaucoup entendu parler du film et de ce scénariste au mois de Mai 2023. Je n’ai pas encore vu le film Monster, mais j’aime beaucoup Kore-eda pour avoir voir plusieurs de ses films (Nobody Knows avait été un choc pour moi) et j’ai donc très envie de le voir. Un des grands intérêts du drama Quartet vient des actrices et acteurs qui le composent. Takako Matsu (松たか子) joue le rôle central avec Hikari Mitsushima (満島ひかり), Ryuhei Matsuda (松田龍平) et Issei Takahashi (高橋一生). A eux quatre, ils forment le quartet de musiciens, annoncé dans le titre, réunis d’une manière plus ou moins fortuite dans une maison secondaire à Karuizawa. S’éloignant d’une vie normale, ils se réunissent et vivent dans cette villa pour se consacrer ensemble à la musique, mais leurs vies passées finissent par les rattraper. Il y a beaucoup de rebondissements et d’humour discret dans cette série, mais ce que j’apprécie particulièrement, c’est la subtile lenteur que confère ces lieux dans les montagnes, parfois enneigées, de Karuizawa. Ça donnerait envie d’y vivre, surtout dans une villa comme celle où le quatuor s’est installé. Chaque personnage a ses petites manies et particularités un peu décalées. Le personnage de Suzume joué par Hikari Mitsushima a par exemple une fâcheuse tendance à s’endormir dans des endroits improbables. Iemori joué par Issei Takahashi a pour défaut, ou qualité, de reprendre les gens lorsqu’ils ne font pas les choses correctement ou qu’ils ne suivent pas les bonnes manières, ce qui lance souvent des conversations particulièrement amusantes, poussant même parfois à une réflexion personnelle. Le scénario est bien monté quand on voit ce genre de scènes et anecdotes se reboucher plus tard dans la suite de l’histoire.

J’aime aussi beaucoup le personnage secondaire Alice joué par Riho Yoshioka (吉岡里帆), car elle très manipulatrice malgré son visage d’ange et finit toujours par arriver à ses fins. Une surprise est de voir le chanteur de Hip-hop Mummy-D du groupe Rhymester (ライムスター) joué un petit rôle dans la série. Mummy-D a participé à certains morceaux de Sheena Ringo notamment à la période de Sanmon Gossip. On sait également que Riho Yoshioka est fan de Sheena Ringo, ce qui m’a également interpellé. Mais ce n’est pas tout car le détail suivant est un peu plus ’maniaque’. Dans le dernier épisode du drama, le personnage de Maki joué par Takako Matsu se voit séparée du quatuor de Karuizawa suite à un des nombreux rebondissements de l’histoire. On la voit habiter seule dans une zone d’appartements de type HLM. Je reconnais tout de suite cet endroit car j’y suis allé récemment, le jour du concert de Sheena Ringo. Les scènes du drama ont été tournées dans le complexe d’appartements Hamune (はむね団地) situé entre la station Kokuryō (国領), près de Chōfu (la page Wikipedia du drama n’a même pas cette information). Ces mêmes lieux étaient utilisés dans la version alternative de la vidéo de Koko de kiss shite (ここでキスして。) qui est présente sur le DVD Seiteki Healing Sono Ichi (性的ヒーリング~其ノ壱~). Je ne sais pas s’il s’agit d’une pure coïncidence ou si c’est volontaire, mais je serais vraiment curieux de le savoir. Il faudrait que je note toutes ces questions au cas où je croiserais par hasard Sheena Ringo au détour d’une rue de Tokyo (ce qui est certes très improbable). Ce genre de lien m’intéresse en tout cas beaucoup.

Dans la série, l’acteur jouant le mari de Maki (le personnage de Takako Matsu) m’était familier sans que j’arrive à lui donner un nom. Il s’agit de Kankurō Kudō (宮藤官九郎) qui, en plus d’être acteur, est scénariste et réalisateur. On lui doit notamment le film Shōnen Merikensakku (少年メリケンサック) avec Aoi Miyazaki, sur la réformation d’un groupe punk rock. J’avais vu ce film il y a quelques années en Janvier 2018. Je me rends compte maintenant que Mukai Shūtoku (向井秀徳) de Number Girl était en charge de la musique de ce film, Kankurō Kudō étant un de ses grands fans. Kankurō Kudō a écrit le scénario du film Ping Pong (ピンポン) qui est pour moi plus anecdotique mais qui avait le mérite de contenir quelques morceaux de Supercar dans sa bande originale, notamment l’excellent Strobolights. Il est également le scénariste de la série du matin (Asadora) de la NHK, Amachan (あまちゃん) qui a eu un très grand succès lors de sa diffusion en 2013. Une autre surprise de cette série Quartet est de voir la compositrice et interprète Seiko Ōmori (大森靖子) jouer un petit rôle secondaire dans le sixième épisode, devant notamment le petit cinéma Image Forum (シアター・イメージフォーラム) à Shibuya. Je me dis que c’est une bonne chose d’écrire sur ce blog à propos des films et séries que j’ai vu, car j’aurais du mal à me souvenir de tous ces détails parfois anecdotiques, mais qui sont pourtant pour moi très importants. Je me rends compte que je n’ai jamais parlé du film Drive My Car (ドライブ・マイ・カー) du réalisateur Ryūsuke Hamaguchi (濱口竜介), que j’ai vu il y a plusieurs mois déjà et que j’ai trouvé superbe. C’est peut-être parce que le film a déjà été encensé par la critique que j’éprouve moins d’intérêt d’en parler. Le film prend son temps et touche à des sentiments profonds. On ne peut que remercier un réalisateur de créer des films tels que celui-ci.

Les deux photographies ci-dessus ont été prises dans les environs de la station de Shinagawa. Le passage à niveaux sur la première photo attire les photographes car les trains le traversent lentement après une grande courbe. Un peu plus loin, des bateaux de yakatabune sont stationnés dans un canal en attendant le soir. Ils partiront avec des convives une fois la nuit tombée vers la baie de Tokyo pour remonter la rivière Sumida. Ce jour là, j’étais parti voir une exposition dans les galeries d’art présentes dans les anciens entrepôts Terrada. Le texte partiellement fictif « conteneurs » que j’ai écrit dans le billet précédent m’avait rappelé qu’une exposition intéressante était en cours en ce moment. J’en parlerais certainement avec des photos dans un prochain billet.

Miyuna (みゆな) donnait un mini-concert acoustique gratuit le Vendredi 7 Juillet 2023 à partir de 19h dans le parc Kitaya de Shibuya récemment réaménagé. Cet espace du parc est apparemment spécialement adapté pour ce genre de spectacles car le terrain est en pente et comprend des petits murets et des marches permettant aux spectateurs de s’asseoir. Le public s’assoyait en fait un peu où il voulait et j’étais personnellement resté debout appuyé à la rampe des marches. Je suis arrivé sur place alors qu’elle avait déjà commencé à chanter, mais je n’ai dû manquer que quelques minutes. C’était un moment très agréable à écouter Miyuna en plein air dans un espace entouré de verdure. Elle n’a joué que quelques morceaux demandés par le public, et seulement ceux se prêtant à l’acoustique. Elle a beaucoup parlé au public entre deux morceaux, pour notamment rappeler son prochain concert le 21 Juillet dans la salle WWWX de Shibuya. Je ne pourrais malheureusement pas la voir cette fois-ci dans cette salle, mais je le rattraperait très certainement lors de la tournée de son prochain album quand il sortira. On sent qu’elle aime et a envie de s’adresser au public et j’aime beaucoup l’écouter car elle reste très naturelle et pleine d’humour. On pouvait prendre des photos et des vidéos. J’en montre une sur mon compte Threads, mais je ne souhaitais pas passer mon temps à regarder mon smartphone. J’ai préféré apprécier le moment.

街の空虚も愛せない

Je découvre par hasard un nouvel immeuble de l’architecte japonais Von Jour Caux alors que je marchais de Zoshigaya (雑司ヶ谷) jusqu’à la station d’Ikebukuro (池袋). Ce building appelé Le bois Hiraki Minamiikebukuro Building est en fait situé près de la station. On reconnaît tout de suite et de loin le style Von Jour Caux, proche de l’architecture d’Antoni Gaudi. Je l’avais de toute façon déjà vu de nombreuses fois sur internet. Sa construction en 1979 est antérieure à son bâtiment le plus connu, Rythms of Vision, Waseda El Dorado que j’ai déjà montré plusieurs fois sur les pages de Made in Tokyo. J’aurais dû essayer de voir l’intérieur qui est encore plus mystérieux que l’extérieur. Il y a quelques autres bâtiments de Von Jour Caux à Tokyo qu’il faudrait que j’explore un jour ou l’autre. En passant à Zoshigaya, je suis retourné au temple Kishimojindō (鬼子母神堂) pour récupérer cette fois-ci le sceau goshuin que je n’avais pas collecté la première fois. J’en profite pour refaire un petit tour parmi les Torii rouges où on été tournées certaines scènes de Kabukichō no Joō (歌舞伎町の女王).

La musique rock à l’esprit indé d’Hitsuji Bungaku (羊文学) est toujours un bonheur, ici avec un nouveau single intitulé FOOL sorti le 25 Avril 2023. Le style musical est dans la lignée de ce qu’on connaît déjà du groupe et l’accroche est immédiate. La formule rock dans lequel s’inscrit la musique du groupe fonctionne vraiment très bien. J’aimerais vraiment les voir en concert un jour, mais le groupe est en fait maintenant assez populaire. Il est donc plus difficile d’acheter des billets et j’avais manqué mon coup lors de leur dernière tournée. Je parle également régulièrement de la compositrice et interprète Samayuzame qui vient de sortir un nouveau morceau intitulé City of Romantica. Il s’agit en fait d’une reprise retravaillée d’un de ses morceaux plus anciens. L’ambiance électronique y est comme toujours très fouillée, délicate et apaisante. La photographie qui sert de couverture au single a été prise par Mana Hiraki (平木希奈) dont je parle souvent en ce moment. a子 vient également de sortir un excellent nouveau single intitulé All to Myself (あたしの全部を愛せない) le 20 Juin 2023. Elle fait pour moi un sans faute depuis le début de sa carrière. Elle a trouvé une voie très intéressante entre le côté indé (sa voix et sa manière de chanter y contribuent) et le côté pop qu’elle a développé au fur et à mesure des morceaux. Dès la première phrase des paroles (あたしの空虚も愛せない), j’aime beaucoup la vidéo où on la voit jouer avec son groupe, les cheveux plus rouges que jamais et le visage taché de château Margaux. J’ai hâte d’aller la voir la semaine prochaine, si tout va bien, à Shibuya. J’imagine que le groupe de la vidéo sera le même en concert. Je reconnais certaines têtes comme le guitariste à la coupe rasta Masumi Saito et le bassiste à la coupe punk Gaku Usui. Le nouveau groupe de DAOKO appelé QUBIT (キュービット) sort son premier morceau intitulé G.A.D. en ce même jour du 20 Juin 2023. J’avais déjà un peu parlé de QUBIT en indiquant que DAOKO était accompagnée de Seiichi Nagai (永井聖一) à la guitare, Makoto Suzuki (鈴木正人) à la basse, Shōhei Amimori (網守将平) aux claviers et Kazuya Ōi (大井一彌) à la batterie. Je me demandais vraiment vers quel style allait tendre la musique du groupe sachant que le guitariste Seiichi Nagai officie également au sein du groupe Sōtaisei Riron (相対性理論) d’Etsuko Yakushimaru. Le style est en fait assez proche de la musique de Daoko. Ce premier single était pour moi un peu déroutant à la première écoute dans sa première partie mais m’a complètement convaincu dans sa deuxième partie. Le phrasé hip hop accentué de DAOKO est toujours excellent car sa voix change sans cesse de tonalité. Au final, le morceau est très original et changeant, et ne semble pas vouloir plonger dans le mainstream que DAOKO connaissait pourtant bien à une certaine période de sa carrière. Tout ceci me plaît vraiment beaucoup.

続きのない夢の中

Je ne voulais pas manquer la rétrospective que le Tokyo Photographic Art Museum (東京都写真美術館) consacrait au photographe Masahisa Fukase (深瀬昌久). Ce musée est situé à Yebisu Garden Place et l’exposition montrant 114 photographies se déroulait du 3 Mars au 4 Juin 2023. Fukase est originaire d’Hokkaido et a quitté ce monde en 2012. La rétrospective nous montre plusieurs séries tirées de ses trente années d’activités photographiques de 1961 à 1991. La plus connue et celle que je voulais absolument voir est celle intitulée Karasu [Ravens] montrant des corbeaux dans des paysages d’Hokkaido, en 1976 alors qu’il revenait vers les lieux de son enfance pour fuir un mariage qui se passait mal. La force de ses images nous attire et nous rend en même temps mal à l’aise, car on y ressent la souffrance qu’il devait éprouver à ce moment là de sa vie. Masahisa Fukase est un photographe connu pour montrer des photographies de sa vie personnelle. Il se met parfois en scène sur ses photographies, mais c’est surtout sa femme Yōko Wanibe qu’il a beaucoup photographié. Les photographies, que la galerie met en avant en présentation de l’exposition, montre Yōko dans une série du même nom prise en 1973. Il la prenait en photo tous les jours alors qu’elle partait pour travailler. Il prend aussi régulièrement sa famille en photo pendant vingt ans dans une série intitulée Kazoku [Family], notamment son père qui tenait un petit studio photo à Bifuka, Hokkaido. Après sa séparation de Yōko, il se concentre sur les photographies de son chat Sasuke qu’il reçoit d’un ami photographe en 1977. Même si ces photos de chats peuvent parfois être amusantes, on ressent une solitude et une certaine tristesse en les regardant.

Je me suis mis dans l’idée d’acheter systématiquement une ou plusieurs cartes postales des expositions que je vais voir, lorsque c’est possible. J’ai commencé depuis l’exposition de Wataboku car il m’avait signé une de ses cartes postales. De l’exposition de Fukase, j’en tire quatre dont l’une très connue de la série Karasu [Karasu] prise en 1976. J’en avais déjà parlé dans un ancien billet, j’ai souvent eu envie d’acheter le photobook intitulé Ravens (鴉) mais j’ai toujours hésité en voyant le prix (plus de 10,000 yens). De cette série, j’en garderais au moins une carte postale. Le chat Sasuke est également sur une des cartes postales que j’ai choisi. C’est amusant de le voir s’infiltrer discrètement dans un jeu de go. Les deux autres photos montrent Yōko, une datant de 1973 de la série Yōko que Fukase prenait depuis la fenêtre de leur appartement, et autre intitulée Congratulation, datant de 1963, de la série Yūgi [Homo Ludence]. Cette dernière montre Yōko fumant pendant un moment de pause lors de leur cérémonie de mariage. Je devrais peut-être commencer une collection de photographies de femmes fumant en robe de mariée.

L’envie m’est revenue d’écouter Quruli (くるり) en trouvant l’album Fandelier (ファンデリア) au Disk Union de Shimokitazawa. Il s’agit du deuxième album du groupe sorti le 15 Mai 1998, dans leur période indies, avant leur premier album majeur Sayonara Stranger (さよならストレンジャー) qui sortira en 1999. J’en avais déjà parlé sur ces pages. J’ai une affection particulière pour ces deux années 1998 et 1999 car elles correspondent aux deux années de mes débuts de vie au Japon: en 1998 pendant un mois à Nagasaki, puis à partir de Février à Tokyo en 1999. Écouter la musique de cette époque me donne une certaine nostalgie de ces moments de ma jeunesse, alors même que je n’écoutais pas du tout Quruli à cette époque là. Dans le premier morceau Interlude à la guitare acoustique, on ressent pourtant une certaine nostalgie d’une période de jeunesse passée. Cet interlude est en fait un aperçu du morceau Sakamachi (坂道) qu’on entend plus tard vers la fin de l’album. C’est très certainement le plus beau morceau de l’album. Fandelier est relativement court, composé de 8 morceaux pour 33 minutes. Il mélange les ambiances musicales d’un groupe qui se cherche et essaie plusieurs voies. Le deuxième morceau Mononoke Hime (モノノケ姫) est par exemple particulièrement brut de facture avec une guitare sonnant comme du live dans une petite salle de concert. Le troisième morceau Old-fashioned est un des plus inspirés de cet album et me fait dire qu’il faut toujours s’intéresser aux premiers albums d’un groupe même s’ils ne sont pas encore perfectionnés. L’esprit rock indé transpire de tous les morceaux de l’album et j’aime beaucoup cela. Le morceau qui suit Tsuzuki no nai Yume no naka (続きのない夢の中) ou le suivant Ame (雨) en sont d’autres excellents exemples. J’aime beaucoup le naturel du chant de Shigeru Kishida (岸田繁), notamment sur Ame où on retrouve une manière de chanter qui lui est assez typique. Cet album n’est pas le meilleur ni le plus abouti du groupe mais il n’en reste pas moins un petit moment de bonheur musical, notamment quand il part vers des pistes plus expérimentales comme sur le dernier morceau Yes mom I’m so lonely, très différent du reste de l’album.

En parlant d’exposition de photographies, j’avais dans l’idée d’aller voir une exposition de la jeune photographe Mana Hiraki (平木希奈) qui se déroulait pendant deux jours seulement, les 27 et 28 Mai 2023, dans la petite galerie d’art THE PLUG à Jingūmae. Je suis cette photographe depuis quelques temps sur Twitter puis sur Instagram, car elle a pris en photo certaines artistes que j’aime beaucoup. On lui doit notamment la photographie de couverture de l’album Plantoid de SAMAYUZAME, ainsi que d’autres photographies et vidéos de cette compositrice et interprète dont je parle régulièrement sur ce blog au fur et à mesure qu’elle sort des nouveaux morceaux. Je trouve que le style photographique de Mana Hiraki correspond bien à l’univers onirique de la musique de Samayuzame. Plus récemment, elle a pris en photo Miyuna (みゆな) pour une série en kimono, dont les deux photographies ci-dessus sont extraites. Cette série en particulier m’a tout de suite beaucoup plu. Là encore, j’aime beaucoup les couleurs et l’univers vaporeux proche du rêve qu’elle crée. C’est une constante de son style photographique. Il y a souvent un certain flou qui me donne l’impression qu’un voile léger vient se superposer sur l’artiste photographié. Je me suis posé la question de quelle pouvait être l’inspiration poussant Miyuna et la photographe à utiliser un kimono pour ces photographies. Cette série a été prise peu de temps après le concert groupé J-Wave Tokyo Guitar Jamboree (J-WAVE トーキョーギタージャンボリー) où Miyuna chantait et jouait de la guitare acoustique au Ryōgoku Kokugikan (両国国技館). L’association du kimono et de la guitare sur une scène ouverte sur 360 degrés m’avait forcément rappelé Sheena Ringo sur la scène du Budokan lors de la tournée Electric Mole.

La série de photographies de Miyuna en kimono prise par Mana Hiraki m’a renvoyé vers certaines photographies de Sheena Ringo prises en 2003 à l’occasion de KSK. Je ne fais pas cette allusion complètement par hasard car elle semble être amatrice de la musique de Sheena Ringo, vu qu’elle a acheté récemment le vinyl de KSK comme elle le mentionnait sur Twitter. Peut-être avait elle l’esthétique de l’époque de KSK en tête en prenant ces photographies de Miyuna en kimono, tout en y apportant son esthétique vaporeuse toute particulière. J’aurais très envie de lui poser la question. J’avais donc une forte intention d’aller voir cette exposition à Jingumae, mais quelle n’était pas ma surprise de voir une longue file d’attente devant la galerie. Je m’attendais à pouvoir y entrer rapidement et je n’ai malheureusement pas eu assez de temps pour attendre dans une file qui prenait son temps. En regardant d’un peu plus près le flyer digital de cette exposition intitulée Wave?, je me suis rendu compte qu’il s’agissait d’une collaboration avec une certaine Rina. Je n’avais pas eu la présence d’esprit de comprendre que cette fameuse Rina prise en photo par Mana Hiraki était en fait membre du groupe rock Scandal (スキャンダル). Il devait y avoir de nombreux fans du groupe présents dans la file d’attente. Je n’ai malheureusement pas pu voir cette exposition mais ce sera partie remise. J’espère qu’elle pourra exposer un jour quelques photographies de Miyuna. Et pour continuer un peu plus avec les liens qui unissent les artistes que j’aime, je remarque sur Instagram que la compositrice et interprète a子, que j’irais normalement voir en concert un peu plus tard ce mois-ci, est également venue voir cette même exposition en cette même journée. Il y a décidément presque toujours un lien, parfois infime, entre les artistes que j’aime. Tout ceci me fascine beaucoup! La photographie ci-dessus montre les couvertures des numéros de Mars et Avril 2003 du magazine Gb que j’ai acheté il y a plusieurs mois. Ce sont deux de mes petits trésors et il faudrait vraiment que j’y revienne un peu plus dans un prochain billet.

ニュウ、エスケープ

Ce creux au milieu de la façade du building à lamelles de bois de la première photographie du billet m’intrigue à chaque fois que je passe devant. A sa construction il y a environ deux ans, il était indiqué que cet espace serait utilisé par YouTube, mais je ne vois aucun signe extérieur l’indiquant. Il n’y a pas non plus de signe d’activité visible depuis l’extérieur et je me demande même si ce bâtiment si particulier est vraiment utilisé. Son design a été conçu par Kōichi Takada (高田浩一). J’aime beaucoup cette déflagration en hauteur. Un peu plus loin dans la même rue longeant la rivière bétonnée de Shibuya, on trouve plusieurs affiches collées à différents endroits, formant une sorte de guérilla publicitaire. Ces visages sont ceux du groupe d’idoles de l’agence Stardust, Momoiro Clover Z. A vrai dire, je pensais que le groupe, après avoir perdu une de ces membres, avait cessé ses activités. Il semble qu’elles fêtent plutôt l’anniversaire de leurs quinze ans de carrière. Il est vrai qu’on les voit encore régulièrement dans des publicités télévisées. Le temps de ces derniers week-ends est couvert et même pluvieux, ce qui me fait prendre moins de photos. J’ai de toute façon un stock d’une petite dizaine de billets en brouillon que je peine à écrire rapidement. Les journées sont longues et épuisantes. Elles me laissent peu de temps pour écrire, mais écrire est toujours pour moi une échappée nécessaire et même indispensable.

L’amateur de la musique de Sheena Ringo ne s’ennuie pas en ce moment. Le 17 Mai 2023, sortait le CD de deux titres W●RK et 2045, tous les deux excellents d’ailleurs, de la collaboration avec Millenium Parade de Daiki Tsuneta. Je ne l’avais pas réservé mais je suis passé l’acheter au Tower Records de Shibuya le soir du 16 Mai. Le magasin met en général dans les rayons les nouveautés le soir avant le jour de sortie. Il faut le savoir et ça permet de faire le malin ensuite sur les réseaux sociaux en disant qu’on a pu acheter et écouter le CD avant sa sortie officielle. C’est le Fying Get ou Furage (フラゲ) en japonais. Un nouveau single de Sheena Ringo est ensuite sorti cette semaine le 24 Mai. Il s’agit cette fois-ci d’un single solo intitulé Watashi ha Neko no Me (私は猫の目), sous-titré en français “Je suis libre”. Le CD que j’avais commandé sur Amazon, une fois n’est pas coutume, venait avec une carte postale montrant Sheena assise sur une moto devant la tour de Tokyo. Cette moto apparaissait également en logo pixelisé lors du récent concert. Comme je l’indiquais auparavant, il s’agit d’une Yamaha SR (reprenant donc ses initiales). Ce qui m’a presque choqué, c’est de me rendre compte que ce modèle de moto a été mis en production en 1978, soit l’année de sa naissance. Ce genre de détails me fascine toujours. J’aime vraiment beaucoup ce nouveau morceau Watashi ha Neko no Me, qu’elle avait également joué lors du concert, et je trouve qu’il gagne en saveur après plusieurs écoutes car sa construction musicale est, comme souvent chez Sheena Ringo, relativement atypique et terriblement sophistiquée. Dans la vidéo comme toujours réalisée par Yuichi Kodama, on la voit concrétiser son amour pour les chats en empruntant elle-même des yeux de chats. Elle n’est pas accompagnée par ses musiciens habituels, mais ce ne sont pas vraiment des visages inconnus non plus. À la guitare, on retrouve Hisako Tabuchi (田渕ひさ子) du groupe NUMBER GIRL. Elles se connaissent depuis leurs débuts, étant toutes les deux originaires de Fukuoka. Elles ont déjà joué ensemble, en concert ou en session d’enregistrement. Rino Tokitsu (時津梨乃) à la batterie est une ancienne membre d’un des premiers groupes que Ringo avait formé à Hakata (Fukuoka), avant ses débuts. Ce sont donc également des amies de longue date. Rino Tokitsu a fait aussi partie d’un groupe appelé Roletta Secohan (ロレッタセコハン). Je suis par contre moins familier du nom de BIGYUKI aux claviers. Il est apparemment présent sur la scène hip-hop/jazz new-yorkaise. J’aime beaucoup ce court passage solo au clavier accompagnant le solo de guitare lourd et déstructuré d’Hisako. Il y a une certaine texture brute dans ce morceau, notamment dans la voix de Sheena Ringo. J’adore particulièrement quand elle crie son « Nya » en imitant le cri du chat, avec un côté un peu comique que je pense volontairement. Sa voix devient plus agressive au fur et à mesure du morceau, comme un chat qui sortirait ses griffes. Elle roule même un peu des ‘r’ et finit le morceau sur un ton sonnant comme du Enka, comme Yuu peut également le faire sur des morceaux de GO!GO!7188. En comparaison, la face B du single s’intitulant Saraba Junjō (さらば純情), sous-titré “Adieu innocente”, a un son beaucoup plus doux. On entend une partie de ce morceau à la toute fin de la vidéo qui prend une forme animée montrant Ringo conduisant cette fameuse Yamaha SR. Elle est revenue vers les sous-titrages des titres des morceaux en français. Le single prenant le sous-titre “Je suis libre” reprend ce thème de la liberté (自由) très présent dans sa discographie et ses paroles. Mais le single va plus loin en découpant la vidéo en dix scènettes prenant pour titres des proverbes français souvent en lien avec le monde des chats. Où irait le monde sans les chats? Les voici ci-dessous.

1. Un malheur ne vient jamais seul.
2. Être comme chien et chat
3. Un peu de honte est bientôt bue.
4. Qui m’aime au même mon chat.
5. Qui naquit chat court après les souris.
6. Chat échaudé craint l’eau froide.
7. À bon chat, bon rat.
8. Il ne faut pas réveiller le chat qui dort
9. Tel qui rit vendredi, dimanche pleurera.
10. Ce qui est fait est fait.

Le vidéo du morceau Watashi ha Neko no Me (私は猫の目) mentionne également la citation « La femme, comme le chat, a neuf vies. » de l’écrivain anglais John Heywood (1497-1580), connu pour ses pièces, poèmes, et ses recueils de proverbes. J’ai le sentiment que ce morceau ouvre de nouvelles pistes dans sa discographie et ça me satisfait beaucoup de voir qu’elle ne manque pas d’inspiration. C’est une promesse de nouvelles échappées belles.

A ce propos, Sheena Ringo fête ce samedi 27 Mai 2023, ses 25 années de carrière après la sortie de son premier single Kōfukuron (幸福論) le 27 Mai 1998. Je me demande d’ailleurs pourquoi elle n’a pas sorti le nouveau single le 27 Mai, plutôt que le 24. A l’occasion de ce nouveau single et de cet anniversaire, elle sera présente dans les médias télévisés ces prochains jours, notamment à l’émission KanJam avec Daiki Tsuneta (pour une deuxième fois) le dimanche 28 Mai et pour une émission spéciale de la NHK le 1 Juin 2023. J’aurais certainement l’occasion d’en reparler ici. Cet anniversaire m’a donné l’occasion de porter mon t-shirt de la tournée (celui avec la moto pixelisée) et d’aller au magasin Tower Records de Shinjuku car une petite exposition spéciale y avait lieu. Dans une partie du magasin, on y montrait la moto Yamaha SR, les tenues utilisées pour la vidéo de Watashi ha Neko no Me, une photo géante, entre autres. Un bandeau est accroché pour ses 25 années de carrière. On retrouve sa signature encadrée datant du 14 Novembre 2019, avec les messages Koko ha Shinjuku Desu (ここは新宿です) et Merci, mais le verre du cadre est étrangement cassé à plusieurs endroits. Est ce un accident de manipulation ou est ce volontaire car il est montré tel quel dans le magasin. C’est peut-être un peu des deux, mais ce cadre avait en tout cas été enlevé (il me semble) après le réaménagement du magasin. On y vendait aussi des goods de la société de production Vivision de Yuichi Kodama, qui réalise la quasi totalité des vidéos et concerts de Sheena Ringo et Tokyo Jihen. Les t-shirts étaient pratiquement tous en rupture de stock, et je crois comprendre d’après mon fil Twitter qu’ils ont une certaine popularité. Un petit panneau demande aux visiteurs de poser une pastille pour leur album préféré. Je ne suis pas surpris de voir arriver Muzai Moratorium en tête. Un morceau comme Marunouchi Sadistic sorti sur cet album fait pratiquement partie de l’histoire musicale japonaise. Mon fils l’a même chanté récemment au karaoke avec ses copains et copines de classe de lycée. Je n’étais pas le seul habillé aux couleurs de l’artiste en cette journée de samedi. Dans un tout autre endroit à Shibuya Hikarie, une femme et son mari me regardaient en souriant. Je me suis d’abord demandé la raison, pour comprendre ensuite qu’elle portait elle-même un sac à l’effigie de Tokyo Jihen. Peut-être est ce dû à cette date anniversaire.

諸行無常~其ノ四~

Au moment où j’ai écrit mon long rapport en trois parties sur le concert du 9 Mai 2023 au Tokyo International Forum de la tournée nationale Sheena Ringo to Aitsura to Shiru Shogyōmujō (椎名林檎と彼奴等と知る諸行無常), des photos officielles n’avaient pas encore été publiées. Les sites spécialisés Natalie et Barks ont récemment publié leurs rapports de concert avec un grand nombre de photographies. Je me sens donc obligé d’en faire une sélection et de les montrer ici, car ces photos viennent évidemment complémenter mon texte et parce que je veux garder une trace de ces images fascinantes. On sait que ce concert sera retransmis sur la chaîne câblée WowWow en Septembre 2023 et on peut donc espérer qu’un DVD/Blu-ray sera ensuite disponible peu de temps après cela. Je ne vais pas répéter ici tout ce que j’ai déjà écrit dans le billet précédent mais certaines photographies méritent des commentaires, comme celle ci-dessus qui ouvrait le concert, une image de croix qui rappelle beaucoup l’église Church of Light conçue par Tadao Ando.

Sheena Ringo change bien entendu plusieurs fois de tenues de scène mais la voir avec des dreadlocks doit être une première. En fond de scène, le symbole rouge rond avec des rayons me rappelle celui utilisé pour la tournée Tōtaikai (党大会) en 2013 dans l’unique salle Orchard Hall du Bunkamura à Shibuya. Il disparaît puis réapparaît plusieurs fois pendant le concert comme un fil rouge. Ce lien avec la tournée Tōtaikai me fait maintenant comprendre pourquoi cette présente tournée Shogyōmujō passe par la salle Orchard Hall. Un autre point intéressant est que WowWow diffusera deux autres concerts de Sheena Ringo avant Shogyōmujō, le concert de la tournée Tōtaikai de 2013 et de la tournée Hyakkiyakō (百鬼夜行) de 2015. Ces trois concerts semblent donc liés. J’avais également vu un lien entre Hyakkiyakō et Shogyōmujō à travers le morceau Kamisama, Hotokesama (神様、仏様).

La photographie ci-dessus a été prise pendant le morceau Hashire wa Number (走れゎナンバー). On reconnaît les voitures qui passent en fond d’écran.

Une des surprises de ce concert était la présence en vidéo grand format de DAOKO pour le morceau Ishiki (意識 ~Conciously~) dans sa version remixée par MONDO GROSSO, le projet de Shinichi Osawa. Il était lui-même dans la salle comme spectateur pour la finale, le 10 Mai 2023.

Sheena Ringo est seule sur scène au piano pour le morceau Onaji Yoru (同じ夜) tiré de l’album Muzai Moratorium (無罪モラトリアム). C’était un des très beaux moments du concert pour une version de ce morceau complètement remaniée.

Keisuke Torigoe (鳥越啓介) à la basse (toutes sortes de basse) est un grand habitué des concerts de Sheena Ringo et des sessions d’enregistrement.

Le soleil rouge refait son apparition. Sheena à des gants dans les mains, ce qui nous rappelle la prestation du morceau Blue ID (青のID) de Tokyo Jihen à l’émission Music Station du 25 Décembre 2020. Si je ne me trompe pas, les photos ci-dessus sont prises au moment du morceau Jinsei ha Yume Darake (人生は夢だらけ).

Yoshiaki Sato (佐藤芳明) à l’accordéon et Shun Ishiwaka (石若駿) aux percussions. Shun Ishiwaka fait partie du groupe Millenium Parade de Daiki Tsuneta. La collaboration récente de Millenium Parade et Sheena Ringo sur le single WORK nous fait comprendre les raisons de sa présence sur cette tournée, pour le meilleur.

Yukio Nagoshi (名越由貴夫) à la guitare électrique. C’est également un des musiciens habitués des tournées de Sheena Ringo.

Masaki Hayashi (林正樹) aux claviers devant des extraits vidéo de Niwatori to Hebi to Buta (鶏と蛇と豚) et Sheena Ringo dans un pyjama bleu qu’elle gardera pour quelques morceaux dont la reprise de Eternal Flame des Bangles.

Cette coiffure-chapeau en a intrigué beaucoup. On y voit un chat Maneki Neko au milieu d’autres objets traditionnels. Voir maintenant de près cette étrange et remarquable coiffure me rappelle vraiment beaucoup certaines décorations de sanctuaire comme celle du sanctuaire Ōtori que je mentionnais dans mon précédent billet, vues dans le quartier de Yoshiwara. Sheena saisit la guitare, une Gibson RD, sur le morceau NIPPON à la toute fin du concert avant les rappels.

Après le passage de MC, Sheena Ringo et son groupe interprètent les deux derniers morceaux pendant les rappels. Les danseuses SIS apparaissent ensuite à l’écran devant une console Nintendo Famicom. La cassette insérée, après avoir soufflé sur le circuit imprimé pour enlever la poussière, révélera la séquence finale en animation et en sons 8bits.