Ce vieil arbre à Takanawa, tout près de la librairie du quartier, est un véritable monument végétal et il est traité comme tel. Une petite pancarte explicative posée à côté de l’arbre nous indique qu’il était autrefois beaucoup plus grand et majestueux. On l’a malheureusement coupé à la hauteur de 10 mètres qu’il fait actuellement. La circonférence du tronc d’un peu plus de 8 mètres est vraiment impressionnante. En fait, j’avais un peu de mal à croire qu’on atteigne 8 mètres de circonférence, mais en considérant les nombreuses courbes et plis de la surface du tronc, cela semble bien possible. Le petit écriteau nous annonce aussi que cet arbre est un castanopsis sieboldii et qu’il est condamné à ne plus beaucoup évoluer en taille du fait de l’espace restreint qu’il lui est accordé en pleine urbanité. Cet arbre se trouve sur les terres de la famille féodale des Hosokawa, appartenant au clan Kumamoto. En ce lieu, on dit que 17 samouraïs se sont fait hara-kiri en 1703 après avoir vengé leur ancien maître Asano Naganori, dans l’histoire de Chūshingura.
Dans ce billet, je mets volontairement en association d’images la photographie de cet arbre de forme compliquée, avec une autre complexité, celle de la structure de béton du Arimaston Building par Keisuke Oka. On avait découvert par hasard cette maison particulière en éternelle construction il y a un peu moins d’un an. Alors que je me promenais dans le quartier de Takanawa, je n’ai pas résisté à l’envie d’aller voir si sa construction avait progressé. J’ai bien peur qu’elle n’ait pas bougé d’un centimètre. C’est dommage, je serais très curieux de voir le résultat final, tout en ayant beaucoup de mal à imaginer cet espace comme pouvant devenir habitable, surtout en imaginant ses ouvertures de formes complètement fantaisistes qu’il faudra bien remplir d’une vitre ou d’un autre matériau.
La raison de mon passage à Takanawa était d’aller acheter des wagashi dans une ancienne pâtisserie traditionnelle appelée Matsushimaya. La devanture d’une autre époque, pas spécialement agréable d’apparence, ne laisse pas penser que cet endroit est très réputé et que la famille impériale venait autrefois y acheter des wagashi. Il faut même se dépêcher pour faire ses achats car la pâtisserie termine son service dès 3h de l’après-midi, après avoir vendu la totalité de ce qui est présenté en vitrine. J’arrive par chance 10 minutes avant cette fermeture et réussi cette mission confiée par Mari d’aller acheter des sakura mochi 桜餅, des mame daifuku 大福 et des kibi daifuku pour le Hina matsuri. Une fois à la maison, nous nous dépêchons forcément de déguster le sakura mochi, une pâte de haricots rouges entourée d’une crêpe mochi, elle-même couverte d’une feuille de cerisier légèrement salée. La photographie ne rend pas forcément justice à la qualité des wagashi de Matsushimaya.
Revenons à cette promenade dans Takanawa. Comme d’habitude, je marche au hasard des rues tout en gardant de vue le but de ma promenade (les wagashi dont je viens de parler). A chaque nouveau croisement de rues, je regarde au loin pour détecter des couleurs ou des formes inhabituelles. Le Takanawa Children’s Center possède ces deux aspects: des touches de couleurs variées au niveau des ouvertures, une façade particulière faite de nombreuses petites vagues et un étrange aménagement de l’espace avec ces blocs blancs semblant se dégager de la façade. Cet ensemble contenant également une librairie a été conçu par Denefes et EDH Endoh Design House. En face de ce large bâtiment de couleur blanche, un lion bondissant avec la gueule rouge grande ouverte nous surprend. Il s’agit d’une école datant possiblement de 1977 si on en croit l’inscription sur le mur près du lion sauteur.
L’association entre ces deux dernières photographies est, je l’avoue, beaucoup plus improbable, si ce n’est par l’intervention de végétation dans l’urbain. La maison individuelle semble abandonnée et carrément prise d’assaut par une nature bien décidée à reprendre ses droits. Dans quelques années, on ne la distinguera peut être plus et cet espace deviendra peut être une jungle impénétrable. La végétation sur la photographie du dessus est positionnée volontairement sur les terrasses ouvertes en hauteur. Il s’agit de l’ambassade du Koweït par Kenzo Tange, une architecture remarquable que j’avais déjà pris en photo l’année dernière. La complexité des espaces est difficile à prendre en photo depuis la rue étroite. J’aimerais voir d’un peu plus près cette terrasse à l’étage, mais je me contenterais d’imaginer ces espaces et l’équilibre habillement réfléchi de ces blocs.