Katsuhiro Otomo l’avait prédit il y a 30 ans, les Jeux Olympiques de 2020 auront lieu à Tokyo. Espérons seulement que la ville de Tokyo sera en meilleur état que le Neo-Tokyo de Akira. Le stade olympique également aura une toute autre allure.
Le nouveau stade olympique pour les jeux de 2020 à Tokyo sera signé Zaha Hadid. Je n’ai pas connaissance d’autres oeuvres architecturales de Hadid à Tokyo (à part le Chanel Mobile Art, il y a de cela quelques années). Ce nouveau stade remplace l’existant National Olympic Stadium, construit à Kasumigaoka pour les Jeux Olympiques d’été de Tokyo en 1964. L’ancien stadium sera détruit en 2015 et le nouveau complexe de Zaha Hadid est prévu de voir le jour en mars 2019, pour la coupe de monde de Rugby la même année. Les cérémonies d’ouverture et de fermeture des jeux de 2020 se dérouleront dans ce nouveau stade ainsi que les épreuves d’athlétisme, et certains matchs de football, rugby.
Les formes de cette nouvelle oeuvre de Zaha Hadid sont assez typiques de l’architecte. On aurait l’impression que l’immeuble n’est pas construit mais posé sur le sol, comme une forme extraterrestre venue pendant la nuit. C’est un ensemble élégant, spectaculaire et symbolique. Ce projet de Zaha Hadid fut sélectionné à l’issue d’un concours international (New National Stadium International Design Competition) organisé en octobre 2012 par le Japan Sport Council et dont le jury était présidé par Tadao Ando. Les membres du jury étaient en grande partie japonais, mais on pouvait compter également deux illustres architectes étrangers: Norman Foster et Richard Rogers.
Ce stade devra contenir environ 80,000 spectateurs, dans un espace assez réduit entre le Meiji Jingu Stadium et le Tokyo Metropolitan Gymnasium de Fumihiko Maki. Ce dernier a également des formes très futuristes, mais paraît démesurément petit par rapport au futur nouveau complexe de Hadid (le stade de Maki est en bas à gauche sur l’image ci-dessous). Une des contraintes de ce stade est d’avoir un toit rétractable pour permettre d’abriter différents types d’événements tels que des concerts, spectacles ou autres événements culturels. Selon le jury, la proposition de Zaha Hadid présentait tous ces pré-requis dans un ensemble d’une fluidité et dynamisme adaptés aux compétitions sportives. La quasi-totalité des compétitions sportives des Jeux Olympiques se dérouleront dans Tokyo et seront réparties en deux zones: la zone héritage qui comprendra ce nouveau stade olympique ainsi que le stade de Yoyogi de Kenzo Tange, symbole des Jeux Olympiques de 1964 qui a récemment été en rénovation. Une grande partie des évènements se dérouleront dans la zone de la baie de Tokyo autour de Odaiba, Ariake et Shinkiba. Le village olympique sera apparemment vers Kachidoki et Harumi. Toute cette partie se situe sur des zones gagnées sur la baie de Tokyo et n’est pas encore pleinement développée. Certains promoteurs immobiliers se sont déjà lancés dans des projets de constructions de résidences. Pour exemple, Mitsubishi Jisho construira deux grandes tours de résidence à Harumi, pas très loin de l’action des Jeux. On peut imaginer que les Jeux Olympiques vont redonner un coup de boost à cette zone qui avait perdu un peu d’engouement niveau immobilier suite aux événements de mars 2011.
Tadao Ando était également membre du comité olympique pour la candidature de Tokyo en 2016 et ses réflexions sur le design du Tokyo Olympique de 2020 restent très similaires à celles de 2016, à part l’emplacement du grand stade olympique qui était prévu d’être construit à Harumi dans le cas des Jeux à Tokyo de 2016. La politique d’utiliser au maximum les installations existantes reste similaire mais on constate qu’un certain nombre de constructions supplémentaires seront nécessaires sur la zone de la baie de Tokyo. Comme je le notais dans mon billet d’avril 2008, un point intéressant du plan olympique est l’utilisation d’une forêt sur la mer (umi no mori) pour les épreuves équestres et de mountain bike. Depuis mon billet de 2008, je n’avais pas trop suivi la concrétisation et l’avancement de ce projet lancé par Tadao Ando, mais cette forêt sur la mer (enfin plutôt une forêt sur des terres gagnées sur la mer) de 88 hectares est en cours de développement depuis 2007 et sera pleinement terminée en 2016. L’idée de Tadao Ando derrière la mise en place de cette espace vert est de créer une grande « allée verte » qui sera un passage pour les vents depuis la baie de Tokyo vers l’intérieur de la ville, et pour ainsi éviter les phénomènes de heat island en été dans certaines zones très urbaines où les tours cassent le passage du vent et où la chaleur a du mal à s’évacuer.
Pour revenir au nouveau stade olympique, j’essaie de montrer sur la carte google ci-dessus l’emplacement du nouveau stade de Zaha Hadid à Kasumigaoka. Le concours de sélection du design de ce stade comprenait également d’autres projets d’architectes tout aussi renommés que Zaha Hadid, listés parmi les finalistes, comme Toyo Ito ou SANAA. J’aime beaucoup la proposition de Zaha Hadid, mais également quelques interprétations très différentes basées sur le végétal comme celles de Dorell.Ghotmeh.Tane et de GMP International Gmbh. Je trouve ces deux projets bien ancrés dans l’esprit du passage vert proposé par Tadao Ando. J’aime tout spécialement le stade des français de Dorell.Ghotmeh.Tane, comme une montagne en pleine ville couverte d’arbres. On devinerait à peine qu’un stade ce cache sous cette montagne. On perd par contre l’effet spectaculaire si on le compare au stade de Zaha Hadid ou à celui de Tange en 1964. Ces deux stades « végétaux » agissent certainement moins comme un symbole que la mémoire collective retiendra. Pour le spectaculaire, le stade de Hadid viendra « concurrencer » un autre grand stade olympique en Asie, le Nid d’oiseau de Herzog et de Meuron pour les Jeux Olympiques de Pékin.
Ci-desssus les propositions de Dorell.Ghotmeh.Tane / Architects & A+Architecture (Tsuyoshi Tane, France) et de GMP International Gmbh (Hubert Nienhoff, Allemagne).
Parmi les trois finalistes, on compte en troisième position SANAA et Nikken Sekkei pour un ensemble d’une grande délicatesse (comme toujours avec SANAA d’ailleurs), comme une forme de fleur blanche. Il semble que le jury fut sceptique sur la mise en place de certains des pré-requis comme le toit rétractable, ce qui fait que la proposition de SANAA n’a pas été retenue. On a du mal à bien entrevoir les structures ondulées sur la seule image ci-dessus, mais le dernier numéro de JA (JA 91 – Models are real) nous donne quelques autres vues du modèle présenté. On y devine un peu mieux la beauté de l’ensemble.