Je montre beaucoup de photographies de sanctuaires en ce moment, car nous continuons notre petite tournée pour récupérer à différents endroits le sceau goshuin pour compléter notre collection. Nous ne procédons pas de manière très méthodique mais nous avons acheté un petit livre-magazine nous donnant des idées sur les endroits à visiter. Nous connaissons déjà le grand sanctuaire de Hie, que je montre sur les deux premières photographies. Il est positionné sur une colline entre Akasaka et Nagatachō. Ses couleurs vives sont frappantes. Il s’en dégage une certaine richesse. Nous sommes malheureusement arrivés un peu tard, car le comptoir où l’on peut demander le sceau du sanctuaire fermait plus tôt que d’habitude vers 3h de l’après midi. Nous avions d’abord l’intention de visiter le sanctuaire de Akasaka Hikawa, mais l’impossibilité de trouver une place de parking à un prix raisonnable (le prix des places de parking à la demi-heure dans Tokyo est très variable) nous a amené jusqu’au parking du sanctuaire de Hie. Se garer un peu loin nous a permis de marcher dans le quartier de Akasaka, devant les studios de télévision TBS et la tour Akasaka Sacas. A mon arrivée à Tokyo en 1999, j’ai vécu presque neuf mois dans ce quartier dans une résidence au mois qui a été détruite depuis, remplacée par une résidence plus récente. Le quartier a beaucoup changé, mais des souvenirs me reviennent en marchant dans ces rues. Le petit restaurant français en sous-sol appelé Astérix est toujours là mais il a changé de nom. Il ne s’agit peut être pas des mêmes propriétaires mais le petit drapeau français à l’entrée est toujours là, en mauvais état comme il y a vingt ans. Dans les rues qui nous amènent vers le sanctuaire de Akasaka Hikawa, les nouvelles résidences côtoient les anciennes baraques. On trouve parfois un restaurant traditionnel japonais planté au milieu de ce décor urbain en plein chamboulement. Il a l’air immuable comme une petite zone protégée. J’imagine que faire glisser les portes coulissantes nous entraîne dans un tout autre univers. On ressent également un sentiment d’intemporalité lorsqu’on approche du sanctuaire Hikawa. Le torii est caché par la verdure et la lumière couchante du soir nous éblouit. La photographie qui en résulte est intéressante. J’ai toujours l’impression de ne jamais pouvoir prendre une photographie claire et nette d’un sanctuaire, comme si les esprits des lieux venaient voiler l’image. Les deux dernières photographies sont prises dans un tout autre endroit. Il s’agit également d’un sanctuaire, à Kita Shinagawa. Il était malheureusement recouvert de bâches pour rénovation. En attendant qu’on nous imprime le goshuin, j’observe les poissons rouges qui m’observent à leur tour. A un certain moment, je ne sais plus vraiment qui observe qui. Un peu plus loin vers l’entrée du sanctuaire, une Alpha Roméo rouge m’intrigue. L’espace où elle pouvait se garer était assez vaste, mais elle a volontairement choisi de se garer dans la courbure de l’arbre. Je finis par me demander si la voiture n’était pas présente en ce lieu avant l’arbre. L’arbre a peut être poussé après en contournant soigneusement la carrosserie de la voiture. Ces quelques images prises dans les sanctuaires n’ont pas grand chose à voir avec la description du concert de Tokyo Jihen qui va suivre, sauf peut être l’aspect sacré de la chose.
Le concert de la tournée Live Tour 2O2O News Flash (ニュースフラッシュ) de Tokyo Jihen, diffusé en streaming du Samedi 5 Septembre jusqu’au lendemain soir, était vraiment excellent bien qu’un peu court. Il a duré presqu’une heure et demi pour une playlist annoncée à l’avance de vingt morceaux. Je l’ai regardé sur le site Live Streaming de Pia, avec un mirroring sur la télévision du salon depuis l’iMac. La qualité de la retransmission était bonne malgré deux ou trois petits décrochages d’images en court de route, qui n’étaient pas dérangeant car le son n’était pas impacté et qui étaient certainement dû à mon Wifi. Les vingt morceaux du set se sont enchaînés sans interruptions, ou alors avec de très courtes pauses. J’aurais aimé que Sheena Ringo ou les autres membres du groupe disent quelques mots, mais ils ont seulement interprété les morceaux. Seule une voix synthétique accueillait les spectateurs au début du concert. Le fait de parler à une salle vide, celle du NHK Hall où a été enregistré ce concert, n’a certainement rien de très motivant. Il me semble avoir lu que le groupe avait aussi été avare de commentaires lors des deux premiers concerts du 29 Février et 01 Mars 2020, alors que le coronavirus commençait à frapper le Japon. Les deux premières représentations étaient aussi relativement courtes, d’une même durée que le Live en streaming d’aujourd’hui. Ces deux concerts au Tokyo International Forum près de la gare de Yurakuchō avaient enclenché une petite polémique sur les réseaux sociaux, car la plupart des autres artistes et groupes annulaient leurs concerts à cette période par crainte d’une contamination. Les deux premiers concerts à Tokyo de la tournée nationale avaient quand même eu lieu avec des mesures de protection sanitaire, mais j’avais préféré annuler mon billet. En y repensant après coup, comme il n’y a eu aucun cas confirmé suite à ces deux concerts, je regrette de ne pas y avoir été. C’était de toute manière difficile de prendre une décision raisonnée à ce moment de la crise sanitaire. Les concerts suivants dans d’autres villes japonaises avaient cependant été annulées sans proposer de report ultérieur, mais avec remboursement des billets bien sûr. Ce concert sans public et en live streaming diffusé le Samedi 5 Septembre à partir de 6:30 du soir, est en quelque sorte une compensation pour ceux qui ont manqué la version ‘classique’ en salle. J’étais très heureux de pouvoir assister à cette séance de rattrapage à la maison. Il fallait s’acquitter de la somme de 2,222 Yens (le prix est bien entendu fixé en fonction de la symétrie des chiffres) pour pouvoir regarder le concert dès sa diffusion et pour pouvoir le revoir à son rythme jusqu’au Dimanche 6 Septembre jusqu’à minuit. C’est un peu dommage d’ailleurs qu’on ne puisse pas garder un lien d’accès vers la vidéo du concert après cette date.
Le concert commence par le disque dur qui redémarre doucement dans le noir avec le système d’exploitation Incidents 2020. Pendant que le système boot, les noms des membres de Tokyo Jihen s’affichent les uns après les autres jusqu’au démarrage brusque du premier morceau Atarashii bunmeikaika. On n’est pas tout à fait surpris par les costumes du groupe sur scène car ils sont repris de la vidéo du deuxième single du mini-album News, Eien no Fuzai Shōmei. Ce ne sont pas les costumes entièrement blancs des premières images qu’on a pu voir de la résurrection du groupe, mais ceux colorés qui nous rappelle des tenues de la noblesse occidentales du 12 ou 13 ème siècle avec des collerettes autour du cou. Sheena porte une longue robe rouge avec une fraise sur-dimensionnée et des plumes blanches de paon. Certains esprits moqueurs diront que la taille de cette fraise permet une bonne distanciation sociale. Chaque membre du groupe porte une tenue similaire mais de couleur différente comme s’il s’agissait d’un groupe d’idoles japonaises. En réfléchissant un peu, il s’agit plutôt des couleurs des anneaux olympiques car ce concert à été enregistré le 24 Juillet 2020, le jour supposé de la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de Tokyo. Le mégaphone fait son apparition dès ce premier morceau, et continue sur le suivant Gunjō Biyori où Sheena Ringo saisit également la guitare. Le rythme ne faiblit pas sur ces deux morceaux. C’est super agréable à voir, surtout quand Sheena fait son appel “guitare” et que Seiji Kameda, Ukigumo et Ichiyō Izawa partent sur un solo à trois (Izawa n’est pas au clavier sur les deux premiers morceaux). L’appel guitare sur Gunjō Biyori lance quant à lui un solo à quatre avec Sheena en plus donc, et quand ils s’alignent tous les quatre sur le devant de la scène, accompagné de Toshiki Hata se donnant déjà à fond à la batterie, ça tape vraiment très fort. Sheena pousse aussi beaucoup sa voix sur ces deux premiers morceaux jusqu’à la limite. Le rythme se calme ensuite avec le morceau suivant Botōmin. Le groupe change à ce moment-là de tenue et opte pour des longs manteaux grisâtres avec quelques logos Tokyo Jihen surimprimés. Ukigumo est très présent sur ce morceau, ainsi qu’Izawa qui est passé au clavier. Ce morceau me rappelle l’aisance vocale de Ukigumo. Izawa a un air détaché pendant toute la durée du concert mais les mains font tout le travail sur le clavier, et la vidéo du concert nous les montre souvent. Erabarezaru Kokumin est un des deux nouveaux morceaux du mini-album News. Son rythme plus lent continue sur la lancée du morceau précédent. Pas seulement sur ce morceau, mais l’exécution est dans l’ensemble irréprochable. L’ambiance devient plus sombre avec le rock de Fukushū, qui évolue dans des ambiances rougeâtres sur scène. C’est un beau morceau mais pas forcément, à mon avis, celui qui rend le mieux dans l’ensemble du concert. Le morceau se termine sur un geste de Sheena qui est étonnement brouillé d’une mosaïque. Je pense qu’elle imite le tir d’une arme à feu. On continue ensuite avec un morceau plus récent, Eien no Fuzai Shōmei, qui redonne un peu de dynamisme au concert après les trois morceaux précédents plus lents. Sheena Ringo est assez statique sur scène, ce n’est pas nouveau et on peut lui reprocher. Sauf sur Killer Tune dans la dernière partie du concert où elle fait quelques pas sur le devant de la scène d’une manière qui peut rappeler la vidéo du morceau. Elle porte des chaussures à très hauts talons. Je me souviens qu’il y avait eu des commentaires sur ces fameux talons pour les concerts de Février/Mars. Je comprends en les voyant sur la vidéo, qu’il doit être difficile de marcher d’un pas rapide.
Ensuite, une belle série de morceaux s’enchainent avec Zettai Zetsumei, que j’adore, Shuraba, Nōdōteki Sanpunkan et Denpa tsūshin. On est, pour moi, au coeur du concert à ce moment là, surtout quand Nōdōteki Sanpunkan s’enchaine de manière très serrée avec Denpa tsūshin où Sheena reprend la guitare. Les effets de lumière dans la salle semblent inarrêtables. Les caméras nous montrent d’ailleurs la salle vide à ce moment là. Le jeu est toujours parfait, comme si c’était du studio (c’en est assez proche finalement). Hata semble infatigable à la batterie, mais Kameda, lui, a l’air de souffrir un peu sur les derniers morceaux, notamment sur le solo final de Senko Shōjo, qu’il réussit pourtant très bien à la basse avec Ukigumo mais laisse esquisser un sourire de ses voisins. Il faut dire qu’il y a peu de pauses entres les morceaux. Sheena laisse tomber le manteau gris pour Nōdōteki Sanpunkan et sera en tenue blanche pour une bonne partie du reste du concert jusqu’à Konya ha karasawagi où elle se changera en robe noire avec chapeau noir sur-dimensionné (c’est apparemment la mode de la sur-dimension dans ce concert). Après le supersonique Denpa tsūshin, l’ambiance se calme de nouveau avec le morceau Superstar qui me donne tout de suite des frissons lorsqu’on entend les premières notes au clavier. J’avais un peu oublié ce morceau du deuxième album Adult, mais il est très beau. Les talons très hauts de Sheena ne l’empêchent pas de bouger tout de même. Elle fait notamment des petits mouvements de talons très discrets mais charmants sur Noriki, et fait des mouvements plutôt démonstratifs avec son petit drapeau jaune à une foule qui n’est pourtant pas présente, à la fin de Killer Tune. Comme les mouvements sont exagérés, on a l’impression qu’elle nous fait signe à travers l’écran. Elle se sert aussi de ce petit drapeau pour encourager tout le monde sur scène sur la fin de ce morceau. Sheena est souvent à la guitare dans ce concert notamment sur le morceau Superstar. OSCA est bien entendu au programme car il s’agit d’un des morceaux les plus emblématiques de Tokyo Jihen et on ressent sa folie dès les premières notes de basse et de batterie, accentuée à un moment par une spirale rouge tournante montrée sur scène. C’est peut être le morceau que je préfère du groupe. Dans l’ensemble, la sélection de morceaux du concert est excellente. OSCA manquerait certainement si il n’y était pas. Comme sur la vidéo du morceau, Sheena reprend le mégaphone. On voit souvent d’ailleurs des extraits des vidéos des morceaux sur les écrans en fond de scène, écrans reliés au disque dur qui s’est réveillé au début du concert, il y a déjà une bonne heure. Sur OSCA, Sheena pousse de nouveau sa voix et je n’ai pas l’impression qu’elle l’a perdue avec les années. On enchaîne ensuite sur le rythme hyper actif de FOUL accompagné d’effets de lumières fantastiques sur scène, avec le logo géant en forme de paon de Tokyo Jihen émettant des rayons laser verts dans la salle comme un Shin-Godzilla. Sheena Ringo reprend la guitare sur Kachiikusa et c’est la dernière ligne droite avec Tōmei Ningen et Sora ga natte iru. J’aime bien les quelques notes de complicité à certains moments comme des sourires sur Tōmei Ningen, comme pour apprécier le fait que le concert s’est déroulé sans pépins. Sora ga natte iru, qui est très dense émotionnellement, termine le set dans la pénombre et les guitares. Les nuages envahissent la scène jusqu’aux crédits de fin.
Vous aurez certainement compris que j’étais emballé par ce concert que j’ai regardé plus de 4 fois le week-end dernier, de l’ouverture le samedi à 19h00 jusqu’au dernières minutes le dimanche à minuit (en écrivant ces quelques lignes). Je ne suis pas vraiment en mesure de comparer avec les concerts récents de Sheena Ringo, car ceux que je possède en DVD sont plutôt anciens, d’avant Tokyo Jihen. Toujours est-il que, quand j’écoute ces morceaux et regarde ce concert, je me dis une nouvelle fois que c’est d’assez loin au dessus de tout ce que je connais en rock japonais (je ne connais pas tout non plus). J’espère qu’ils sortiront ce concert en Blue-Ray. Je n’ai pas vraiment l’habitude de regarder des concerts sur écran, mais celui-ci m’a réconcilié avec le genre, au point où c’était même un peu difficile de décrocher et de revenir à la réalité. Je n’exagère même pas en fait, il faut une petit période de réadaptation avant de décrocher de l’ambiance du concert, même si on n’était pas dans la salle. Le fait qu’il se soit déroulé sans public nous donne en fait l’impression qu’il s’agit d’un concert individuel qui nous est adressé.
Pour référence ultérieure, ci-dessous est la playlist des morceaux du set Live Tour 2O2O News Flash (ニュースフラッシュ):
1. Atarashii bunmeikaika (新しい文明開化) du 5ème album Daihakken (大発見)
2. Gunjō Biyori (群青日和) du 1er album Kyōiku (教育)
3. Botōmin (某都民) du 3ème album Variety (娯楽/バラエティ)
4. Erabarezaru Kokumin (選ばれざる国民) du mini-album News
5. Fukushū (復讐) du 3ème album Variety (娯楽/バラエティ)
6. Eien no Fuzai Shōmei (永遠の不在証明) du mini-album News
7. Zettai Zetsumei (絶体絶命) du 4ème album Sports (スポーツ)
8. Shuraba (修羅場) du 2ème album Adult (大人/アダルト)
9. Nōdōteki Sanpunkan (能動的三分間) du 4ème album Sports (スポーツ)
10. Denpa tsūshin (電波通信) du 4ème album Sports (スポーツ)
11. Superstar (スーパースター) du 2ème album Adult (大人/アダルト)
12. Noriki (乗り気) du 4ème album Sports (スポーツ)
13. Senkō shōjo (閃光少女) du 4ème album Sports (スポーツ)
14. Killer Tune (キラーチューン) du 3ème album Variety (娯楽/バラエティ)
15. Konya ha karasawagi (今夜はから騒ぎ) du mini-album Colors
16. OSCA du 3ème album Variety (娯楽/バラエティ)
17. FOUL du 4ème album Sports (スポーツ)
18. Kachiikusa (勝ち戦) du 4ème album Sports (スポーツ)
19. Tōmei Ningen (透明人間) du 2ème album Adult (大人/アダルト)
20. Sora ga natte iru (空が鳴っている) du 5ème album Daihakken (大発見)
Les quelques images ci-dessus proviennent du site What’s in Tokyo dont le lien était partagé par le compte Twitter de sheena Ringo / Tokyo Jihen, à part la dernière qui est une capture d’écran que j’ai pris moi-même (remarquons le « Merci » en français sous la pomme).