les chats discrets ne miaulent jamais

Les chats se sont faits discrets lors de mon passage à Gōtokuji (豪徳寺) tout simplement parce que je ne suis pas allé les voir. Ça peut paraître étrange d’aller jusqu’à Gōtokuji sans aller voir le fameux temple où s’amoncellent des centaines de petites statues de chats Maneki Neko. En fait, nous sommes déjà allés les voir il y a trois ans et j’avais pris un grand nombre de photographies de ces statuettes de chats blancs levant la patte droite. J’avais montré toutes ces photos dans un billet. Je me suis dis que si j’y retournais cette fois-ci, je ne pourrais pas m’empêcher de prendre ces statuettes une nouvelle fois en photo en me sentant ensuite obligé de les montrer dans un billet de ce blog. J’ai voulu éviter la tentation de me répéter. Je n’avais en fait que peu de temps devant moi, mais, en y réfléchissant maintenant, j’aurais quand même dû y aller pour le sceau goshuin que je n’ai pas encore dans ma petite collection. En regardant à quoi il ressemble sur internet, je me rends compte qu’il est particulièrement dense en écriture et que le carnet goshuinchō est particulièrement mignon. Ça me donne en tout cas une occasion d’y retourner bientôt. Et pour ce qui est des chats blancs, je me suis finalement contenté de prendre en photo un Maneki Neko posé derrière la vitre d’un café ou d’un restaurant à un coin de rue.

Je comptais d’abord marcher jusqu’à Gōtokuji mais j’ai dû me raviser en cours de route, vu le temps qui m’était disponible. Il m’a d’abord fallu traverser une partie de Shibuya, notamment le quartier des love hotels à Maruyamachō. J’y retrouve le petit bâtiment blanc Natural Ellipse de l’architecte Masaki Endoh qui a légèrement été modifié car maintenant recouvert d’un filet de cordes de couleur bleue. Cet accessoire décoratif est loin d’être indispensable et j’espère qu’il s’agit seulement d’une installation temporaire. Je comptais marcher en direction de Sangenjaya mais bifurque finalement vers la station Komaba-Tōdaimae, pour prendre le train jusqu’à Gōtokuji en faisant une halte dans le quartier de Shimo-Kitazawa. En marchant à Komaba-Tōdaimae, je trouve quelques maisons individuelles aux formes intéressantes mais je n’en connais pas les architectes. Ces maisons ont l’air relativement récentes, si on se réfère à la blancheur restée intacte des murs de leurs façades. Je regarde moins en ce moment les magazines d’architecture, car je passe tout simplement moins de temps dans les librairies. Le fait de beaucoup marcher me fait maintenant réaliser que je passe moins de temps à faire autre chose, ce qui est dommage mais le temps et mon énergie ne sont du tout façon pas extensibles.

Alors que j’évoquais le nouvel album d’4s4ki dans mon avant-dernier billet, je viens de me rendre compte qu’elle vient déjà de sortir un nouveau morceau intitulé Hyper 5th Dimension (超5次元), qui s’avère excellent. Le chant d’4s4ki est un peu différent des morceaux que je connaissais déjà et sa voix est plus présente. Je parlais aussi dans ce précédent billet du compositeur maeshima soshi qui travaille souvent avec 4s4ki et je vois qu’il co-écrit les musiques de ce morceau. Je trouve l’ambiance un peu plus pop et accessible que d’habitude, avec un rythme principal pour le refrain immédiatement accrocheur. Tricot vient de sortir un nouveau morceau intitulé Aquarium (アクアリウム) qui apparaîtra dans leur prochain album, Fudeki (不出来) prévu pour le 14 Décembre cette année. De ce nouvel album, on connaît déjà le morceau Endroll ni Maniau yō ni (エンドロールに間に合うように) qui a une approche très riche en guitares par rapport à ce nouveau morceau beaucoup plus pop rock. Bien qu’avec une ambiance de pop immédiate, ce morceau contient tout de même des changements de tons inattendus (à partir de la minute et demi par exemple) qui font tout le plaisir de la musique de Tricot. Ce nouvel album Fudeki (不出来) prend un nom à l’opposé de celui de l’album précédent sorti en Décembre 2021, Jōdeki (上出来) qui veut dire ‘excellent’. Ça attire bien entendu ma curiosité et m’a donné très envie d’aller les revoir en concert. Les voir en différé sur Instagram montrer des photos de leur tournée européenne a dû également contribuer à me donner envie d’aller les revoir. Tricot entamera une tournée nationale appelée Zang-Neng tour 2023 pour promouvoir cet album. La tournée se composera de six dates du 8 Janvier au 12 Février 2023 en démarrant par Fukuoka, puis Sendai, Nagoya, Kanazawa, Osaka pour terminer à Tokyo. J’irais donc les voir à la date de Tokyo, le Dimanche 12 Février 2023, dans la salle Liquidroom à Ebisu. Je découvre ensuite le morceau Blue (青) d’une compositrice et interprète dont je parle très souvent ici, a子. Il ne s’agit pourtant pas d’un nouveau morceau car il est sorti le 1er Novembre 2020, mais je l’avais bizarrement manqué. Ce morceau avait passé entre les mailles de mon filet. Je manque très certainement beaucoup de bonnes choses et j’apprécie toujours quand on me le fait savoir. J’ai en fait découvert ce morceau lors d’un InstaLive d’a子. Elle fait assez régulièrement des sessions live sur Instagram avec son groupe dans une pièce qui ressemble à une maison partagée. J’aime beaucoup ces petits concerts improvisés car ils se déroulent dans une ambiance bon enfant, sans trop de sérieux et en improvisant parfois. a子 prend en général en compte les demandes de morceaux faites dans les commentaires. Le problème de ce genre de sessions est qu’on ne sait jamais quand elles vont se dérouler et combien de temps elles vont durer. On tombe dessus par hasard et ce n’est pas toujours au meilleur moment, mais je les écoute par petits morceaux. Le morceau Blue que je ne découvre que maintenant après cette interprétation InstaLive est dans le style des morceaux précédents. a子 et son groupe arrivent à chaque fois à trouver une boucle électronique qui accroche et j’aime de toute façon beaucoup sa manière de chanter. Dans ma petite sélection musicale, je reviens vers Miyuna. J’écoute encore et toujours beaucoup son dernier album Guidance qui est un des meilleurs de l’année à mon avis, et ma curiosité me dirige maintenant vers son EP intitulé Reply sorti le 28 Octobre 2020 sur le label A.S.A.B, de la maison de disques Avex, sur lequel on trouve des artistes comme Mondo Grosso et Chiaki Satō (佐藤千亜妃). Le EP Reply n’est certes pas aussi abouti que son album Guidance, et plus inégal, mais on y trouve quelques très bons morceaux. Le dernier morceau ReinRei (レインレイ) est par exemple tout à fait dans l’esprit orienté rock d’un grand nombre de morceaux de l’album Guidance. Reply reste cependant très pop dans son ensemble. Le morceau Soleil (ソレイユ) est un des sommets de ce EP dans ce style pop très accrocheur. J’aime aussi beaucoup les deux premiers morceaux DeadRock et Ano Neko no Hanashi (あのねこの話) en duo avec un certain Kubotakai (クボタカイ) que je ne connaissais pas. Cet EP, certes un peu jeune et pas autant marqué que son album, laissait déjà présager ses qualités de chant et de composition. Et en poussant un peu les découvertes, j’écoute également ses premiers singles sortis en 2018: Tenjō Tenge (天上天下) et Gamushara (ガムシャラ), qui étaient déjà très prometteurs et même au dessus du lot du commun de la J-POP.

hey, must be a devil between us

Lorsque je n’ai pas d’idée particulière sur un endroit où aller, je marche de Shibuya à Shinjuku le long de la longue avenue Meiji. Je me perds volontairement en chemin en bifurquant soudainement vers d’autres rues plus étroites lorsque l’envie se fait sentir. Shinjuku est un centre qui m’attire, sans que je sache vraiment pourquoi. En chemin, j’y trouve à chaque fois des choses qui viennent intéresser mon regard: un sac qui interpelle les passants et me donne l’idée du titre du billet tiré de paroles d’un morceau des Pixies, des plantes qui envahissent tranquillement un building de béton, un motocycliste qui attend qu’on le regarde et qu’on le prenne en photo, ce que je fais bien sûr car je suis bon public (il me semble d’ailleurs avoir déjà vu cette moto il y a quelques mois à Yoyogi), une figure de manga posée sur le mur d’une galerie, un avion survolant la ville après 3h de l’après-midi et disparaissant rapidement derrière les nuages du typhon qui approche, un recoin près de la gare de Yoyogi voulant ressembler au métro new-yorkais. Je me demande si je regarde mieux depuis que je prends des photographies. Est ce que tous ces détails urbains passeraient inaperçus à mon regard si je n’étais pas continuellement à l’affut? Une chose est sûr, je ne m’ennuis jamais lorsque je parcours ces rues, même la longue avenue Meiji entre Shibuya et Shinjuku que je connais pourtant très bien.

La newsletter musicale de Patrick Saint-Michel me fait découvrir la compositrice et interprète Miyuna (みゆな) dont je n’avais jamais entendu parler jusqu’à maintenant. Et c’est une bien belle découverte! Son premier album intitulé Guidance (ガイダンス), sorti le 24 Août 2022, occupe beaucoup mon temps musical ces dernières semaines. En fait, dans la courte présentation de l’album sur sa newsletter, Patrick mentionnait l’influence qu’avait Sheena Ringo sur des jeunes artistes comme Ado et notait que cette influence se ressentait également sur cet album de Miyuna. Il ne m’en a pas fallu beaucoup plus pour jeter une oreille attentive à la musique de Miyuna. A vrai dire, je ne trouve pas de ressemblance directe entre Miyuna et Sheena Ringo, car leurs voix sont différentes, mais j’y ressens une aspiration similaire dans les nuances vocales et dans la densité et la complexité de la partition musicale. Certaines sonorités de voix et quelques accords par-ci par-là me rappellent bien Sheena Ringo, mais ça reste à mon avis plutôt discret. Miyuna a un atout de taille, celui de sa voix qui lui permet de faire varier rapidement les émotions qu’elle transmet, un peu comme Sheena Ringo pourrait le faire. Le premier morceau de l’album, Maisou (埋葬), en est un très bon exemple. J’ai découvert Miyuna par ce morceau, à la vidéo pour le moins particulière (il ne faut pas se laisser distraire par le zombie qui perd sans cesse son œil). Ce morceau alterne les ambiances rock et d’autres plus pop, que je qualifierais de post-vocaloid. Il n’y a pas de ressemblance avec la musique de Yoasobi mais la petite trame musicale pop traversant le morceau me fait penser à cette ambiance là. La composition musicale est très dynamique et changeante, et on s’accroche aux variations et à la passion transmise par sa voix. Maisou compte parmi les meilleurs morceaux que j’ai pu entendre pour l’instant cette année. Et ce morceau se conjugue bien avec le suivant, Giyōshi (凝視). Miyuna n’hésite pas à déstructurer ses morceaux, entrecoupés ici par des phrases parlées, et à mélanger les influences. Bien qu’un peu court, Giyōshi compte aussi dans les meilleurs morceaux de l’album. Sans passer en revue la totalité des titres de l’album, je dirais que même les morceaux apparemment plus classiques, ont ce petit quelque chose dans la composition qui nous donne envie d’y revenir. Le quatrième morceau Chōdai (頂戴) prend une ambiance electro pop très différente du reste de l’album. Miyuna utilise l’autotune pour sa voix sur ce morceau, ce que certains lui reprochent car sa voix n’en a pas besoin, mais cela reste assez léger. A vrai dire, je n’ai pas d’avis à priori négatif sur l’autotune s’il reste mesuré et je trouve que c’est à chaque fois une critique facile qu’on peut faire à un artiste dès qu’il ou elle utilise cet effet. Un morceau comme le neuvième intitulé Kyōai (狂愛) me fait un peu penser à des compositions que Sheena Ringo pourrait écrire, mais j’ai du mal à m’en convaincre complètement. Ce type de morceaux, tout comme le suivant Kanku (甘苦), m’a convaincu de sa capacité à créer des ambiances qui lui sont personnelles même si elles sont basées sur des elements musicaux qu’on a déjà pu entendre ailleurs. Elle arrive superbement à lier ces ambiances disparates pour créer un objet musical accrocheur. Et Miyuna n’a que 20 ans! Ses premiers morceaux sont sortis en 2018 alors qu’elle n’avait que 16 ans. Elle a l’avenir devant elle et je suis certain qu’elle fera parler d’elle. Espérons qu’elle conserve cette tension rock particulière et qu’elle n’adoucisse pas trop sa musique. Elle le fait déjà sur certains des morceaux de son album, mais ces morceaux là dans le style ballade apportent des moments d’apaisement à l’ensemble. La playlist de Guidance m’a tout de suite sauté aux yeux car tous les titres ont la même longueur, composées de deux kanji seulement. Ce petit détail est à mon avis très ringo-esque. Il faut noter également que Miyuna est originaire du Kyushu, comme son aînée, mais elle est par contre née à Miyazaki.