Mon premier voyage au Japon, une expérience qui m’a fait découvrir un nouvel horizon, géographique et personnel. Ci-dessous, mes impressions de voyage, avec les yeux neufs et naifs de l’époque … Retour donc à Nagasaki, par le texte…
Actuellement étudiant ingénieur à l’Ecole Supérieure d’Electronique de l’Ouest à ANGERS, je suis également les cours de japonais de Sylvie Vraux, proposés par l’Association Anjou-Interlangues. L’organisation d’un stage linguistique au Japon, dans la ville de Nagasaki, fut une opportunité formidable. En effet, il permettait de poursuivre des cours de japonais dans une université, effectuer des visites culturelles de la ville de Nagasaki et surtout de pouvoir vivre, pendant trois semaines, à la japonaise dans une famille d’accueil.
Partir au Japon était pour moi un rêve qui est devenu réalité. Et ce rêve, la fondation Sasakawa a particulièrement contribué à le rendre réel en accordant au groupe d’étudiants dont j’ai fait partie une subvention aux frais de voyage. Grâce à cela, chacun a pu profiter de cette expérience humainement enrichissante.
Nagasaki est une très belle ville, une ville agréable du Kyushu, île la plus au sud du Japon. C’est une ville portuaire entourée de montagnes. C’est une ville moderne, des reconstructions ont été nécessaires suite au désastre de la bombe atomique lancée par les Etats Unis contre le Japon, le 9 août 1945. Elle allie donc immeubles modernes, maisons typiques et nature verdoyante. C’est un mélange qui peut paraître dysharmonieux, mais qui finalement forme un tout et fait tout le charme de la ville. Et celle-ci en est d’autant plus vivante. Un élément du décor choque cependant, c’est l’abondance des fils électriques que l’on retrouve un peu partout et d’une façon désordonnée.
Pour un japonais, Nagasaki, c’est la campagne, mais pour un français, c’est une ville immense. Elle est comparable à Lyon si l’on considère les populations respectives de ces deux villes. Par contre, lorsque l’on sort de la ville, il est vrai qu’on rencontre assez vite un paysage de rizières et de forêts.
Nagasaki possède de grands chantiers navals, ceux de Mitsubishi, l’un
des plus grands zaibatsu (trust) japonais. Cet immense conglomérat
industriel et financier fut d’ailleurs fondé à Nagasaki en 1871. Les industries des produits chimiques et de la céramique sont également présentes. Nagasaki est donc un important pôle industriel mais aussi un grand centre culturel : temple shinto, université, mais aussi église catholique et vestiges hollandais. En effet, Nagasaki fut un des grands ports du Japon en relation avec la Chine, la Corée, l’Asie du Sud Est et les pays occidentaux jusqu’au XXe siècle. Cette tradition de ville ouverte sur l’extérieur reste prépondérante aujourd’hui.Du fait de son passé, Nagasaki est avec Hiroshima, une ville très impliquée dans les mouvements pour la paix. Une manifestation a d’ailleurs lieu tous les ans dans le Parc de la Paix (Peace Park). Il s’agit d’une ville porte-parole de la paix dans le monde, elle projette donc une idéologie saine et bonne à suivre.
Ce voyage a été pour moi l’occasion de vérifier un certain nombre d’aspects du Japon et notamment ceux que j’avais pu percevoir en France à travers les livres et reportages télévisés. J’avais du Japon l’image d’un pays moderne qui a gardé ses traditions et j’ai été heureux de vérifier cela dans mon hébergement. Bien qu’en France on soit prévenu de certains faits et traditions typiques du Japon, on est toujours étonné lorsqu’on les pratique soi-même. Dans ma famille d’accueil, la famille Idemoto, j’ai eu la chance d’être confronté à tout ceci. J’ai eu l’occasion de me relaxer dans un bain o-furo, prendre les repas sur une table basse, bien sûr enlever ses chaussures en entrant dans la maison … C’est tout ce qui fait le charme du pays, et ce à quoi je voulais particulièrement être confronté.
La maison dans laquelle je logeais était assez traditionnelle avec son intérieur en bois et une pièce couverte de tatamis. Il est d’ailleurs intéressant de constater que même dans les immeubles les plus modernes, il y a toujours une place pour des tatamis.
Ma famille d’accueil m’a permit de découvrir de nombreux aspects de la vie quotidienne. Loger chez l’habitant me semble d’ailleurs le meilleur moyen de découvrir un pays car il permet de réellement s’immerger dans sa culture et par là même de mieux le comprendre. Cela a aussi été pour moi synonyme de progrès énormes en japonais. Je n’avais commencé le japonais que depuis un an et les premiers jours dans la famille ne se sont pas passés sans problèmes de compréhension. Mais avec le sourire et un bon dictionnaire de poche tout se passe toujours très bien. Et c’est peut être le sourire des japonais que j’ai rencontré qui m’a le plus marqué, grâce à lui bien qu’éloigné de son pays, on se sent un peu chez soi. J’ai rapidement eu le sentiment d’être bien intégré dans ma famille d’accueil en partageant les gestes du quotidien, les fêtes (les feux d’artifice de tanabata, fête des étoiles) et en rencontrant les différents membres de la famille.
J’ai donc grâce à eux découvert Nagasaki sous tous les angles, du haut du mont Inasa duquel on a une vue magnifique de la ville aux petites rues commerçantes et restaurants du centre ville. Nous avons également parcouru le kyushu en stoppant dans les villes de Saga, Hita et Oita.
J’ai donc appris beaucoup de choses. Nous avons pu comparer nos façons de vivre et discuter de nos différences et ressemblances.
C‘est dans ce contexte propice que j’ai donc pu progresser en japonais. C’est l’université « Nagasaki College of Foreign Languages » qui dispensait les cours de japonais. Cette université est spécialisée dans les langues étrangères: l’anglais, le français, l’allemand, l’espagnol, le chinois,… C’est dans ses locaux modernes et équipés que des professeurs japonais nous enseignaient leur langue. Le fait que ces professeurs ne parlaient pas le français a été très bénéfique car cela nous obligeait à les interroger exclusivement en japonais.
Notre formation se composait également de nombreuses conférences en français sur la culture japonaise: l’histoire et l’économie japonaise, une présentation de Nagasaki, la situation de l’île de Kyushu et de la ville de Fukuoka (capitale du Kyushu), la publicité française au Japon, la difficulté de devenir japonais, une étude comparée de différentes versions de Madame Butterfly de Puccini. Les intervenants étaient très intéressants et nous faisaient partager leur enthousiasme pour leur domaine. Nous avons d’ailleurs pu comprendre les difficultés du travail de traduction et d’adaptation en français d’un livre pour enfants « iina iina ». En effet, au delà des mots, c’est la dynamique des phrases japonaises qu’il est parfois très difficile de recréer en français. Le travail du traducteur étant d’ailleurs en cours au moment de la conférence, nous avons pu donner nos impressions sur son travail et même proposer des idées d’adaptation.
Au programme de ce stage, nous avons également pratiqué la calligraphie japonaise. Un professeur corrigeait nos oeuvres écrites au pinceau et à l’encre de Chine. Après un entraînement à l’écriture de nos nom et prénom en japonais, nous avons écrit sur un support spécial notre kanji préféré et l’avons présenté lors de la petite fête d’adieu.
Ce stage à Nagasaki était culturellement riche. En dehors des 20 heures de cours hebdomadaires, de nombreuses visites de lieus clés de Nagasaki étaient organisées.
Nous avons ainsi été accueillis à la mairie de Nagasaki par l’adjoint au maire, à la préfecture et à la chambre du commerce. Ces visites se présentaient sous forme de tables rondes ouvertes à toutes nos questions. Les autorités en place nous ont d’ailleurs demandé nos impressions sur la ville, d’indiquer les points positifs et les aspects à améliorer. Nous avons insisté sur le fort sentiment de sécurité à Nagasaki, bien que celui-ci soit généralisable à tout le Japon. J’ai été particulièrement impressionné par l’extrême propreté des rues et voitures, par le fait que les bus et trams soient agréables et bien conçus (adaptés aux enfants, annonce orale des prochains arrêts). Nous avons par contre suggéré une plus grande proportion des indications routières (panneaux de direction,…) écrites en alphabet romain.
Nous avons également visité le temple shinto Suwa où s’est déroulée la découpe du poisson. C’est une véritable cérémonie où les acteurs doivent être habillés traditionnellement et pratiquer des gestes lents et appliqués. La tradition veut que la découpe s’effectue sur un poisson encore vivant ce qui n’était malheureusement pas le cas lors de la représentation. Pour clôturer cette démonstration, on nous a gracieusement offert le thé vert.
L’école de cuisine de Nagasaki nous a accueilli. Nous avons eu l’occasion de cuisiner des plats que nous avons ensuite dégusté, notamment la tenpura (crevettes, poisson, légumes frits). A ce sujet, j’ai été agréablement surpris par la nourriture, bien que la pieuvre semble, en apparence, peu appétissante. Cependant, j’ai été heureux, à mon retour en France, de pouvoir manger du pain et un peu moins de riz.
Deux chaînes locales de télévision nous ont accompagné dans un lycée de Nagasaki. Une classe nous a aidé à fabriquer des origami (oiseau en papier), nous a permis de goûter quelques gourmandises japonaises, et les élèves nous ont fait part de leur talent de choriste en interprétant spécialement pour nous une chanson japonaise.
Finalement, un week-end à Unzen, cité thermale aux environ de Nagasaki, nous a permit de découvrir les joies des bains bouillonnants (onsen) aux vertus thérapeutiques mais à la désagréable odeur de soufre. Ces bains publics, non mixtes, sont de plus en plus populaires au Japon et constituaient donc une étape indispensable de notre voyage.
On dit, en France que la vie dans les villes au Japon isole les individus, qu’il y a très peu de dialogues entre les personnes. J’ai pu constater le contraire à Nagasaki où un très grand nombre de magasins sont vivants. Le gaijin, l’étranger, y est d’ailleurs toujours bien accueilli et il n’est pas rare, dans les petits magasins d’Hamanomachi, quartier commercial au centre de Nagasaki, d’entendre un vendeur nous dire les quelques mots français qu’il connaît.
Les japonais sont en général des personnes d’une extrême gentillesse et toujours prêts à rendre service, que ce soient les passants qui vont jusqu’à nous accompagner à notre destination lorsque l’on s’est perdu, ou la famille d’accueil. Les familles sont accueillantes au point que l’on finit par en faire partie.
J’ai été également extrêmement étonné de l’honnêteté des japonais. Les vols sont rares et les villes très sures. Des petits détails sont inimaginables en France, on peut par exemple déposer son parapluie à l’extérieur d’un bâtiment sans risquer de ne pas le retrouver à son retour. De plus, à la place de nos signatures, on utilise au Japon des petits tampons pour marquer son sceau sur des documents officiels : là encore les cas de vols de ces fameux sceaux sont inexistants. C’est une façon d’être, basée sur le respect d’autrui qui mériterait bien sa place en Occident.
Je pense que les français sont particulièrement bien accueillis au Japon d’autant plus que cette année est l’année de la France au Japon. Mais ce qui a surtout marqué les Japonais, c’est la victoire de notre équipe à la Coupe du Monde de Football, je ne peux compter sur mes deux mains le nombre de fois où l’on a été félicité.
La France est aussi bien représentée dans les grands magasins. Sa présence dans les domaines de la mode et du parfum est remarquable, les marques françaises de prestige (Chanel, Yves Saint Laurent, Guerlain,…) ont quasiment le monopole. Il est aussi assez amusant de constater la popularité des noms français pour ce qui est des marques japonaises d’habillement: ce sont souvent des noms grammaticalement loufoques (« Comme ça du mode ») ou reflétant une caractéristique typiquement française (« Faire la bise »). Toujours est-il que la France au Japon est synonyme de chic. Je n’ai par contre trouvé aucun vin français mais d’innombrables vins japonais prétendant être français en adoptant un nom français (« Bon Marché »).
Finalement, de ce voyage, je garderai un souvenir merveilleux. Cette expérience restera gravé dans ma mémoire. J’ai pu constater qu’on se fait très vite à la vie japonaise, on apprécie les différences, le dépaysement et le charme du Japon. On a beaucoup a apprendre d’une culture étrangère pour s’enrichir soit même. Aujourd’hui, le Japon et par extension toute l’Asie, propage une certaine idée de sérénité et de respect qu’il m’a intéressé d’explorer et que je souhaite continuer à approfondir. Ca a été l’occasion de nouer des contacts avec des étudiants et étudiantes en français, et leur a, je l’espère, donné envie de découvrir à leur tour la France.
Je vais désormais continué à étudier le japonais car je me suis promis de revenir aussi vite que possible, peut être dans le cadre de mon futur emploi.
GAUTRON Frédéric, Japonais Niveau 1A.
Ville de Nagasaki, Préfecture de Nagasaki, KyuShu. 28 Juin au 22 Juillet 1998.
Pour en savoir plus:
– Une visite en images de Nagasaki: Nagasaki Virtual Tour.
– La petite ville de Shimabara.
– Le site d’Oita, Est du kyushu.