भीड़वाला शहर

Quand l’impression de prendre toujours les mêmes photographies me gagne, rien de tel que de changer d’objectif. Je n’utilise en général que mon objectif Canon L EF 17-40mm et j’avais presque oublié mes autres objectifs, dont un Canon pancake 40mm que je ressors de son sommeil. Changer d’objectif permet d’avoir une autre vision de la rue. Ce 40mm donne une proximité sur les objets qui force à prendre du recul ou à se concentrer sur les détails. Cet objectif n’est clairement pas fait pour les photographies d’architecture, du moins pour les vues d’ensemble. J’ai toujours aimé les objectifs à focale fixe car ils obligent à réfléchir au cadre, mais ils ne sont bien sûr pas exempt de frustrations. Je n’utilise pratiquement jamais la fonctionnalité zoom sur le EF 17-40mm, car je reste presque toujours sur le plus grand angle possible. Passer tout d’un coup à une vision rapprochée avec l’objectif 40mm me surprend à chaque fois. Je ne prends pourtant pas de photos fondamentalement différentes de l’habitude, mais je regagne un peu du plaisir initial de prendre des photos. En fait, sur ce billet, seule la première photographie est prise au grand angle, tandis que toutes les autres sont prises avec cet objectif 40mm. La photographie au grand angle et celles au 40mm ont été prises pendant des journées différentes car je n’amène jamais deux objectifs dans mon sac lors de mes déplacements. Dans cette série, j’essaie de m’approcher un peu plus près de la foule que j’ai plutôt tendance à éviter. J’évite en général les lieux trop encombrés mais cette fois-ci, je suis allé sur l’avenue principale d’Omotesando et dans les petites rues aux alentours. La sixième photographie montre des personnages de Gorillaz en association avec une marque de vêtements. Je me rends compte en voyant ces personnages que je n’ai jamais vraiment écouté d’albums de Gorillaz. J’ai pourtant un apriori plutôt positif pour l’approche artistique de Damon Albarn. Dans les grandes « batailles » musicales anglaises, j’ai toujours été plus Blur qu’Oasis et je réécoute d’ailleurs régulièrement Parklife, l’album de 1994 de Blur. Tout comme j’ai toujours été plus Beatles que Rolling Stones. En parlant des Rolling Stones d’ailleurs, ou plutôt de Mick Jagger, l’émission Very Good Trip de Michka Assayas (j’en parle beaucoup ces derniers temps) m’a fait découvrir récemment un nouveau morceau intitulé Easy Sleazy qu’il interprète à distance avec Dave Grohl. Je suis franchement étonné par la vivacité punk de Mick Jagger sur ce morceau, très bon et accrocheur d’ailleurs. En écoutant ce morceau, on a beaucoup de mal a imaginer qu’il a 77 ans. C’était en tout cas une bonne idée de s’associer avec la puissance brute de Dave Grohl. Sur la photographie suivante, je remarque un nouveau bâtiment noir en forme de valise pour la marque de cosmétique Shu Uemura. On le trouve dans les petites rues parallèles à l’avenue principale d’Omotesando. Je me souviens que l’ancien magasin se trouvait au rez-de-chaussée d’un vieil immeuble aujourd’hui disparu sur l’avenue principale, juste à côté de l’immeuble TOD’s de Toyo Ito. Je me souviens bien de cette boutique car je l’avais prise en photo à la demande d’un directeur artistique français de la marque à l’époque en 2006. C’était seulement des essais qui ne se sont pas concrétisés en un projet au final. En y repensant maintenant, je me souviens de beaucoup de propositions ou projets de ce type dans ces années là avant 2008, mais ils ne se sont que très rarement concrétisés. Ce type de proposition est beaucoup plus rare maintenant et la dernière en date pour le magazine du musée du Quai Branly a été une mauvaise expérience. Au final, l’effort est rarement récompensé. C’est malheureusement une réalité que je retiens pour ce blog. La dernière photographie montre une nouvelle fois le béton de l’annexe de la galerie The Mass sur Cat street. J’y avais vu des bonsaïs lors d’une visite précédente mais cette fois-ci, rien n’était mis en exposition. Je pense que l’espace a été reconverti en café, peut-être de manière temporaire.

Dans les découvertes musicales de ces derniers jours ou semaines, je ne découvre pas de nouveaux groupes ou artistes mais plutôt quelques nouveaux morceaux sélectionnés d’artistes que je connais déjà depuis un petit moment et dont j’ai déjà parlé ici. Il y a d’abord le single My Lovely Ghost de YUKI sur son dernier album intitulé Terminal. Je n’aime pas tous les morceaux de YUKI mais j’apprécie beaucoup sa voix très particulière, surtout quand elle l’exerce avec un léger excès sur ce type de morceau très pop et forcément ultra accrocheur. Je garde également une oreille attentive aux morceaux du groupe EMPiRE. Le groupe de l’agence d’idoles alternatives Wack a sorti très récemment un double A side single HON-NO/IZA!! . Le morceau HON-NO m’intéresse moins mais j’aime par contre beaucoup le deuxième morceau IZA!!. La musique est composée par le musicien électronique Seiho qui assure également la production. Je ne connais pas beaucoup Seiho à part un de ses morceaux connus, I feel tired everyday. Dès les premières secondes, on est tout de suite pris par le rythme des quelques notes electro pop qui démarrent le morceau. On retrouve d’ailleurs cette intro sur trois bandes annonces assez énigmatiques (1, 2 et 3), mettant en scène Midoriko, seule avec deux autres personnes n’ayant à priori rien à voir avec le groupe et le morceau. Il n’y a aucune fausse note dans l’interprétation de EMPiRE, ce qui est un peu dommage car j’aime bien les légères dissonances, mais le chant de EMPiRE est de toute façon plus harmonieux que celui des grandes sœurs de BiSH. Et en parlant de BiSH, je passe également écouter le dernier morceau d’AiNA THE END qui sort décidément beaucoup de nouveaux morceaux en ce moment. Le dernier en date est intitulé Watashi ha koko ni imasu (ワタシハココニイマス for 雨). AiNA n’hésite pas à pousser sa voix jusqu’à la cassure. J’ai l’impression que depuis qu’elle a démarré sa carrière solo en parallèle de BiSH, elle apparaît un peu plus fréquemment dans les émissions musicales télévisées. On pouvait la voir le week-end dernier dans l’émission Music Fair sur Fuji TV, reprenant les pieds nus un morceau de Yutaka Ozaki. Je découvre aussi par hasard sur YouTube qu’AiNA avait repris le morceau Mayonaka Ha Junketsu avec Tokyo Ska Paradise Orchestra. Ce n’est d’ailleurs pas le seul morceau de Sheena Ringo qu’elle a repris. Le problème de ces reprises, c’est qu’on a tendance à comparer les voix. Celle d’AiNA convient mieux à des compositions originales comme sur le morceau ci-dessus qui laisse sentir toute l’émotion qui se dégage de sa voix. J’apprécie également le fait qu’elle n’hésite pas à se mettre en difficulté en repoussant les limites de ses capacités vocales. Le morceau n’est pas franchement simple à interpréter et elle le chante avec une grande passion. Finalement, pour compléter cette petite sélection de quatre morceaux, je reviens vers 4s4ki pour le morceau FAIRYTALE interprété avec Zheani. On passe là sur un morceau électronique beaucoup plus agressif, dans le style des derniers morceaux que j’avais écouté d’elle. Elle y pose une voix rappée plus apaisée que le son électronique qui l’accompagne. Zheani qui est invitée vient perturber le morceau par un chant tranchant ressemblant à des cris qui me font un peu penser à ceux d’Alice Glass à l’époque de Crystal Castles. Sur ces quatre morceaux, l’étendue des styles musicaux est relativement large mais j’aime de toute façon beaucoup varier les atmosphères, jusqu’à aller aux limites des styles que j’aime habituellement. Ce sont des petites doses musicales d’une énergie directe que j’aime me mettre dans les oreilles régulièrement. Ça me permet également de vérifier si je suis toujours en mesure d’apprécier la musique d’artistes ou groupes qui sont beaucoup plus jeune que moi. Enfin, dans ma sélection, ce n’est pas le cas de YUKI qui a déjà une longue carrière en solo qui suivait celle dans le groupe Judy and Mary. Mais il se dégage de son nouveau single, une jeunesse qui me ramènerait à mes premières années à Tokyo.

cloud.city.3

Une petite série en trois épisodes qui se passe de commentaires, sauf ceux que je suis en train d’écrire maintenant mais que j’aurais mieux fait d’éviter pour aller au bout du concept de série sans commentaires. Les nuages côtoient l’architecture comme deux éléments d’une recette visuelle que je n’ai cette fois-ci pas mélangé bien que la tentation fut grande et les essais non concluants. L’architecture sur cet épisode n’est plus à présenter mais sur les deux premiers épisodes, elle n’était pas présentable car les noms des créateurs me sont inconnus. Je tente une nouvelle fois avec cette petite série un format de billets plus court, car j’avais un peu tendance à m’allonger ces derniers temps et l’effort ne vaut pas toujours la chandelle.

閏年エンディング ~其ノ弐~

Le but de ma marche en ville cette fois-ci était de trouver un bâtiment conçu par Kengo Kuma en 2009, Le Hall TOGO, se trouvant à proximité du sanctuaire Tōgō. Les formes en lamelles de bois sur l’avant et l’arrière du hall tout en longueur sont typiques du style de Kuma. J’aime surtout le design en forme de losange des murs légèrement obliques servant d’espaces pour y faire pousser des plantes. Le bâtiment a déjà plus de dix ans et on ressent déjà l’effet de l’humidité sur la surface du bois. Je découvre ce bâtiment que je ne connaissais pas du tout grâce au compte Instagram de l’amoureux d’architecture Toshy129. Je consulte de moins en moins Instagram et j’y publie également beaucoup moins, mais je garde toujours un œil sur quelques comptes surtout architecturaux qui me donneront des idées de visites ultérieures. Le compte Instagram de Toshy est extrêmement complet avec à chaque fois, ou presque, l’adresse notée, l’année de construction et le nom de l’architecte. Vu comment je galère parfois à trouver certains bâtiments sans avoir l’adresse, je me demande comment il réussit à réunir autant d’information sur l’architecture tokyoïte. Ceci-dit, je ne vois pas beaucoup de maisons individuelles dans sa liste et ce sont principalement celles-ci qui sont difficiles à trouver, et qui m’intéressent le plus, il faut bien le dire.

En remontant l’avenue Omotesando, on ne peut pas manquer de voir la grande mosaïque créée par Taniuchi Rokuro en 1975 sur l’ancienne librairie Sanyodo shoten, toujours en activité. En fait, cette mosaïque fait tellement partie du décor qu’on la remarque pratiquement plus. Je me suis rendu compte que je ne l’avais jamais prise en photo jusqu’à maintenant. Ma photographie est malheureusement incomplète. Elle s’intitule « Le trou dans le parapluie est la première étoile » (傘の穴は一番星), car le parapluie couleur bleue nuit du petit garçon est percé et la lumière qui le traverse lui fait penser à une étoile. Je n’ai pas eu la présence d’esprit d’intégrer cette étoile imaginaire dans le cadre de la photographie, certainement parce que je voulais inclure des passants dans cadre. Ça me donnera une occasion de revenir un peu plus tard pour rectifier cette omission. Sur l’avenue d’Omotesando, ce petit bâtiment préservé des reconstructions fait figure d’exception. Espérons que l’aspect symbolique de cette mosaïque lui permette d’être conservé encore longtemps à cet endroit, mais j’ai quelques doutes que cela soit suffisant.

Les deux dernières photographies montrent quelques lumières néons de la gare de Shibuya, celles de la passerelle reliant l’immeuble Scramble Square à Hikarie, et celles en sous-sol de la station de la ligne Fukutoshin, dont je montrais le dôme dans un billet précédent. Quant aux feuilles mortes qui se ramassent à la pelle, je prends la première photographie de ce billet en réécoutant à ce moment précis la reprise que fait Sheena Ringo des Feuilles Mortes de Jacques Prévert, chantée en français puis en anglais, sur l’album Utaite Myōri: Sono Ichi (唄ひ手冥利 ~其ノ壱~) sorti en 2002. Le morceau prend le titre japonais Kareha (枯葉). Il est également interprété lors du concert Baishō Ecstasy. Je me suis mis à réécouter par petites touches cet album que j’avais acheté à l’époque mais que j’avais longtemps ignoré (à part quelques morceaux).

Alors qu’il ne reste plus que quelques jours avant la fin de l’année, l’envie me prend comme tous les ans à cette époque, de regarder les statistiques de Made in Tokyo. J’ai écrit 141 billets en cette année 2020, ce qui est à peu près similaire à l’année dernière avec 137 billets, mais beaucoup plus que les années précédentes (126 billets publiés en 2018 et 95 en 2017). Je n’ai bien entendu pas d’objectif quant au nombre de billets que je vais écrire sur ce blog, mais le fait que j’arrive d’année en année à maintenir un rythme soutenu me satisfait beaucoup. J’ai aussi le sentiment que les billets que j’ai écrit cette année sont dans l’ensemble plus longs, certainement parce que je parle beaucoup de musique japonaise, sujet qui me passionne depuis quelques années et qui est souvent le déclencheur de l’écriture d’un nouveau billet. En fait, je commence souvent à écrire un billet en pensant à la musique que j’écoute au moment de démarrer l’écriture. Les photographies que je prends sans relâche dans les rues tokyoïtes sont bien sûr l’autre principal déclencheur, mais j’ai beaucoup plus de mal à parler seulement des lieux photographiés sans les lier à une ambiance musicale. Ce besoin de liaison est loin d’être nouveau et me suit depuis de très nombreuses années (depuis toujours en fait). Pour apprécier ce blog, il faut, je pense, être sensible à ces deux éléments. Je ne prétends pas arriver à lier musique et photographie d’une manière convaincante. Il faut souvent passer par les mots pour essayer de construire un parallèle. Mes tentatives de liaison doivent souvent passer inaperçues. En regardant à la date d’aujourd’hui, il y a eu un total de 17,209 visites sur Made in Tokyo, ce qui fait une moyenne de 47 visites par jour. On est dans le même ordre l’idée que l’année dernière avec 16,381 visites et une moyenne de 45 visites par jour. Le nombre de commentaires est par contre en très nette progression avec un total de 173, ce qui est presque 3 fois plus que l’année dernière avec 62 commentaires. Ceci étant dit, beaucoup proviennent de deux ou trois personnes en particulier qui se reconnaîtront et que je remercie grandement. Je ne peux m’empêcher de renouveler mon appel aux commentaires, surtout parmi ceux qui viennent régulièrement visiter ces pages en restant silencieux. J’ai beaucoup considéré ajouter un champ avec le nombre de commentaires par billets affiché près du titre de chaque billet, comme moyen pour susciter les commentaires, mais j’ai finalement décidé de maintenir la manière actuelle. J’aime bien l’idée que les commentaires ne soient pas immédiatement visibles depuis la page principale, comme cachés à l’abri des regards, mais visibles pour ceux qui prennent la peine d’être intéressé par le sujet traité dans le billet. Comme je le dis souvent, ces statistiques ne sont pas la raison pour laquelle j’écris sur ce blog. Je pense qu’en plus de montrer Tokyo et de parler des musiques que j’aime, je ressens aussi de plus en plus le besoin d’écrire en français.

un rond olympique rouge

Les drapeaux japonais sont de sortie pendant les tous premiers jours de l’année, comme pendant tout jour férié d’ailleurs. On les vois alignés dans les grandes rues et avenues comme celle de Omotesando ci-dessus. En voyant cet alignement, je pense tout de suite à la photographie prise par Masataka Nakano à Ginza pendant cette même période après le premier de l’An. Je ne suis pas sorti pour les drapeaux, mais pour voir l’état d’avancement de la construction du nouveau stade olympique conçu par Kengo Kuma, bien qu’on ne puisse pas encore l’approcher de près car il est toujours entouré de barrières blanches. Nous avons réussi à acheter des places dans le stade pour les épreuves olympiques d’athlétisme. Il y avait une loterie pour l’achat des places pour toutes les compétitions et nous avons eu la chance d’avoir été sélectionné pour un de nos choix, surtout dans ce stade. Les compétitions que l’on verra seront le soir au début du mois d’août. J’ai un peu peur que la chaleur et la foule nous étouffent, malgré les systèmes d’aération du stade. Autour du stade, je ne suis pas le seul à prendre des photos. Il y une foule éparse près du nouveau petit musée olympique et autour du stade. Tous essaient tant bien que mal de le prendre en photo par dessus les barrières. Je tente la même chose en prenant plusieurs photographies à l’aveugle en étirant les bras.

Au tout début du mois, j’ai eu la surprise de voir arriver dans notre boîte aux lettres, une enveloppe blanche frappée du logo rouge de forme ronde de Tokyo Jihen. Il y a un petit morceau de tissu couleur indigo à l’intérieur et un message de bonne année. Le message annonce d’ailleurs la réformation de Tokyo Jihen et me rappelle leur tournée 2020 東京事変 Live Tour 2O2O 『ニュースフラッシュ』 pour 13 dates dans plusieurs villes (Tokyo, Osaka, Sendai, Sapporo, Fukuoka, Nagoya et retour à Tokyo). Il y a deux semaines, je tente ma chance pour acheter des places de concert pour les dates à Tokyo. Là encore, il s’agit d’une loterie donc je ne sais pas encore si je pourrais assister au dit concert. En fait, je me suis inscrit au fan club de Sheena Ringo l’année dernière dans le but de pouvoir acheter des places. On verra début février si la chance me sourit cette fois-ci.

light in darkness

Jouons encore un peu avec les ombres et les lumières sur l’architecture tokyoïte, en y ajoutant quelques touches de couleur rouge comme pour y introduire une petite dose de mystère et d’angoisse. Juste un peu. Juste une touche légère. Comme c’est très souvent le cas, ces manipulations photographiques sont conçues sous influence musicale. Il n’y a pas forcément de liens très directs ou évidents entre la musique que j’écoute en ce moment et ces images en noir et blanc colorées de rouge, mais il y a pourtant une certaine idée de noirceur et de lumière soudaine.

En images ci-dessus, deux albums de Necronomidol: DEATHLESS (2017), VOIDHYMN (2018) et le EP Scions of the blasted heath (Juin 2019), ainsi qu’une image extraite de la vidéo sur YouTube du morceau ITHAQUA sur l’album DEATHLESS.

A priori, je ne pensais pas que j’allais aimer la musique de NECRONOMIDOL, mais c’est pourtant ce qui m’arrive en ce moment en écoutant l’album DEATHLESS sorti il y a deux ans et le EP Scions of blasted heath qui est lui sorti le 13 Juin 2019. Je connaissais le nom de ce groupe depuis quelques temps sans avoir écouté leur musique. Ce nom est d’ailleurs une référence directe à l’ouvrage fictif Necronomicon imaginé par HP Lovecraft, ce qui donne tout de suite une idée assez précise de l’ambiance musicale du groupe. NECRONOMIDOL y emprunte l’ambiance sombre flirtant avec l’horreur et le fantastique, dans les paroles comme dans la tonalité musicale générale. Mais comme il s’agit d’un groupe d’idoles comme le nom l’indique aussi, on devine également que des rayons de lumières J-POP viendront éclaircir ce tableau aux allures à priori oppressantes. Je n’ai pas d’attirance particulière pour ces univers effrayants (je fuis même les films d’horreur), et je n’ai pas non plus d’intérêts particuliers pour le monde musical des idoles. On peut donc se demander ce qui m’a amené à écouter cette musique alors qu’au même moment Autechre sort Warp Tapes 89-93 c’est à dire deux heures de musique électronique gratuite et que Thom Yorke sort un nouvel album Anima qui a l’air génial rien qu’en regardant la pochette?

Image extraite de la vidéo sur YouTube de SKULLS IN THE STARS sur l’album DEATHLESS. La vidéo est construite comme un jeu vidéo rétro en 2D avec boss de fin de niveau et possibilité de permuter les personnages en court de partie. Le premier niveau se passe à Aokigahara, la tristement célèbre forêt des suicidés. L’action se poursuit pour le deuxième niveau à Kholat Syakhl, surnommée la montagne de la mort, dans les monts Oural en Russie. Le troisième et dernier niveau se déroule à Tokyo-IV. Comme Tokyo-3 est la ville forteresse située à Hakone dans le manga Neon Genesis Evangelion, j’imagine que Tokyo IV est la version de la ville après une nouvelle destruction et reconstruction imaginaire.

Il s’agit peut être de l’attrait de la nouveauté et l’envie d’écouter un univers musical sur lequel je suis néophyte. Il faut dire aussi que NECRONOMIDOL entre dans la catégorie des Anti-Idols, ce qui me laisse penser qu’on doit y trouver une certaine déviance des chemins tout tracés de la J-POP. Malgré le qualificatif de Anti-Idol, le groupe n’en est pas moins monté de toute pièce avec renouvellement des membres du groupe de manière régulière. La musique est créée par des compositeurs et l’implication de chaque membre dans le processus créatif est très limité. Bref, tout ce qui fait les caractéristiques des groupes d’idoles s’applique également à NECRONOMIDOL. Le nom du groupe et l’imagerie très noire et occulte me rebutaient un peu à priori. Mais le hasard de la lecture d’un article de Patrick Saint Michel (un des critiques que je respecte le plus en terme d’appréciation musicale de la scène underground ou non mainstream japonais – si ce n’est le seul d’ailleurs) m’amène à écouter par curiosité le EP mentionné plus haut Scions of the blasted heath, et je suis très agréablement surpris par ce que j’entends. Un autre article du même auteur NECRONOMIDOL and New Directions in Japanese Metal sur le site de Bandcamp, sur lequel tous les albums et EPS sont disponibles, vient me convaincre un peu plus en interviewant une des figures du groupe Risaki Kakizaki. Elle a ses quelques mots sur la musique du groupe: “Some groups doing idol and ‘loud music,’ the voices mesh too well with the music. I feel with NECRONOMIDOL, we actually have more of an unbalance—a good unbalance—between the vocals and the actual instrumentation. And that’s something we want to push forward, a feeling of uncertainty”. Mes goûts musicaux sont pratiquement toujours fondé sur ce sentiment difficile à décrire de ‘déséquilibre’. Le chant des cinq filles du groupe posé sur du black métal donne un contraste très intéressant, d’autant plus qu’on n’est pas du tout ici dans le registre kawaii, bien heureusement. Je ne suis pas spécialiste en metal, à part écouter de temps en temps X JAPAN dans un style plus Visual Kei, mais j’ai l’impression que ce style de musique black métal reste inchangé depuis des décennies. Le style des morceaux évolue aussi vers du dark wave, style électronique sombre plutôt orienté années 80. L’instrumentation est parfaitement construite et agencée. Elles chantent toutes les cinq et la qualité peut être variable, mais dans l’ensemble, ça se tient très bien. Mais c’est surtout le contraste du chant avec la tension musicale qui rend ces morceaux interessants et même addictifs.

Image extraite de la vidéo sur YouTube de Psychopomp sur l’album VOIDHYMN. Les images sont tournées dans la forêt de Aokigahara au pied du Mont Fuji dans la préfecture de Yamanashi.

En fait, je me suis laissé très vite convaincre en écoutant le morceau Salem sur le EP Scions of blasted heath, avec ces voix très mélodiques et sombres posées sur un magma de guitares. L’ambiance y est fantastique. Il y a un ou deux morceaux beaucoup plus classiques de ce qu’on peut entendre d’un groupe d’idoles mais il faut garder en tête qu’elles chantent en général des atrocités dans les paroles. Les paroles vont d’ailleurs de paire avec l’imagerie inquiétante qui accompagne chaque album, dans un style d’horreur grotesque. J’ai l’impression de donner à chaque fois des précautions d’usage dans les recommandations musicales ces derniers temps et je ferais de même avec NECRONOMIDOL. Comme il peut y avoir des films de genre, il s’agit là d’une musique de genre, et tout l’intérêt vient dans les contrastes. Après quelques écoutes, cette musique devient irrésistible et absorbante, comme s’il y avait là un léger goût d’interdit, au point que je me mets assez vite à découvrir les autres albums du groupe, comme VOIDHYMN sorti en 2018. Dans l’ensemble, la qualité des morceaux peut être inégale mais il y a beaucoup de morceaux tout simplement grandioses. Pour en citer quelques uns comme points d’entrée: End of Days, Skulls in the Stars, Hexennacht et Ithaqua sur l’album Deathless, Salem et The festival sur le EP Scions of the blasted heath, Innsmouth, Psychopomp et une autre version avec plus de guitares de Skulls in the Stars sur VOIDHYMN. La pochette de ce dernier album est d’ailleurs signée par Suehiro Maruo, un des maîtres du manga d’horreur japonais. Et cette ambiance picturale correspond bien avec celle de nombreux morceaux, comme des contes macabres.