J’ai beaucoup marché dans le quartier de Meguro, d’où proviennent la plupart des photographies de ce billet (sauf l’avant dernière prise dans le centre de Roppongi), avec le très vague objectif de retrouver une maison de béton aperçue et prise en photo il y a longtemps. Je ne me souviens plus exactement du lieu et je ne l’ai malheureusement pas retrouvé. Ce n’était en fait qu’un prétexte pour marcher tout en écoutant les albums compilations de Blankey Jet City que je mentionnais dans le billet précédent. Il y a quelque chose de stimulant dans la musique du groupe (un morceau comme I Love Tokyo par exemple), qui a pour effet de me pousser à continuer à marcher, simplement pour pouvoir écouter les morceaux suivants. J’ai marché plus de deux heures sans pourtant terminer l’écoute en entier. J’essaie d’emprunter des rues que je ne connais pas, celles plus calmes à l’écart de la grande artère Yamate passant devant la gare de Naka-Meguro. J’y trouve souvent des maisons particulières comme celles de la première et de la dernière photographie, sans forcément reconnaître leurs architectes. C’est en ce moment la saison de floraison des hortensias. Elles sont nombreuses et égayent les rues de Tokyo. En les prenant en photo, je me demande toujours si je ne devrais pas les prendre en noir et blanc. Je pense que le noir et blanc me manque et il faudrait que j’y revienne bientôt. J’ai d’ailleurs toujours une pellicule argentique en cours sur l’appareil photo EOS1 qu’il faudrait que je termine. Je ne me souviens d’ailleurs plus de quand datent les photos déjà prises. Le développement argentique (que je ne fais pas moi-même) à cet avantage de procurer un effet de surprise lorsque l’on voit les photographies pour la première fois.
Il ne reste plus que quelques jours à attendre avant la sortie du nouvel album Music (音楽) de Tokyo Jihen. Pour nous faire gentiment attendre, le groupe nous conviait à une émission en direct sur YouTube destinée à presenter morceau après morceau le nouvel album. L’émission était intitulée Tokyo Jihen no Hanakin Night Ajito Nau (東京事変の花金ナイト 「アジトなう。」) et se déroulait le vendredi 4 Juin à 9h du soir pour un peu plus d’une heure. C’était une première pour Tokyo Jihen de se montrer en direct dans ce genre de situation. Plus de 50,000 personnes s’étaient connectées sur YouTube et je ne pouvais pas manquer cet événement. En fait, j’étais très curieux de voir quelle allait être la dynamique de ce talk-show autour de la présentation de l’album. Le décor ressemblait à celui d’un bar et les cinq membres du groupe étaient disposés en rond. D’après les crédits à la fin de l’émission, le lieu serait le rez-de-chaussée du nouvel hôtel Aloft à Ginza. Ils portaient tous des tenues colorées assez surprenantes au premier abord. Le thème des costumes était plus ou moins inspiré par une imagerie de commando avec des faux fusils placés dans le décor. Ils n’ont pas expliqué le pourquoi de ces tenues, mais les explications superflues ne sont de toute façon pas forcément nécessaires. Sheena avait un casque en plastique sur la tête, ce qui lui donnait un air charmant car plutôt déplacé par rapport à la tenue qu’elle portait.
L’ambiance était détendue, assez loin des interviews télévisées très formatées. Sheena menait principalement la discussion mais Kameda et Izawa étaient également assez bavards, surtout par rapport à Ukigumo et Hata qui sont moins à l’aise sur ce genre d’exercice. Le fait que l’émission était un peu flottante par moment la rendait intéressante et même accueillante, car elle n’était pas orientée marketing même si un des buts était de présenter le nouvel album. En fait, ils semblaient tous les cinq très humbles sur le travail accompli, sans utiliser les superlatifs exagérés qu’on entend souvent dans les exercices de promotion. C’est certainement dû au fait qu’ils n’étaient que tous les cinq devant les caméras, sans intervention d’un interviewer extérieur au groupe. L’album entier passait en fond et chaque membre du groupe donnait quelques anecdotes à leur propos. On pouvait donc entendre les nouveaux morceaux mais c’était pour moi difficile de se concentrer pour écouter leur conversation tout en essayant d’écouter le morceau. Comme ils ne faisaient pas de pause pour nous laisser écouter, je n’ai pas pu vraiment me faire un avis sur les nouveaux morceaux, mais les courts passages qu’on pouvait entendre me semblaient très intéressants. C’est amusant car Ukigumo fait la remarque au début de l’émission, en se demandant s’il ne faut pas mieux se taire et laisser jouer les morceaux.
L’émission était de toute façon orientée sur la discussion plutôt qu’une écoute concentrée du nouvel album. On apprend que certains morceaux datent d’il y a trois ans. A cette époque, Tokyo Jihen se réunissait en cachette car c’était avant l’annonce de leur réformation. Izawa, qui est souvent appelé par son surnom Watchi (わっち ) pendant l’émission, nous apprend que la première réunion a eu lieu en Juin 2017 où ils ont commencé à réfléchir au fait de se réunir. Sheena nous dit que certains fans avaient décelé des indices de la réformation de Tokyo Jihen dès son dernier album solo Sandokushi, car il y aurait un lien entre les symboles des trois poisons utilisés dans Sandokushi et le paon, symbole de Tokyo Jihen. Sur la petite table à côté de Sheena pendant l’émission, on trouve d’ailleurs des figurines en porcelaine Herend représentant un cochon, un serpent et un poulet, les symboles qu’on pouvait voir dans Sandokushi notamment sur le premier morceau Niwatori to Hebi to Buta (鶏と蛇と豚), accompagné d’un paon. Ces animaux en porcelaine posés sur la table font en quelque sorte le lien entre le dernier album solo de Sheena et le redémarrage de Tokyo Jihen. C’est un clin d’oeil bien vu. La discussion pendant l’émission se concentre beaucoup sur les morceaux, mais donnent quelques anecdotes, notamment le fait que Sheena ne boit plus d’alcool depuis 10 ans ou que son fils aîné apprend la batterie avec Hata. Kameda mentionne également le fait qu’il change sa raie de côté quand il fait partie de Tokyo Jihen, ce qui fait dire à Sheena que, pendant Jihen, chaque membre du groupe prend un autre visage (事変の時、事変の顔). C’est amusant comme Sheena continue à appeler Kameda, Shishō (maître), mais c’était la première fois que j’entendais Kameda appeler Sheena, Rin-chan, car on l’appelle plutôt Ringo-chan dans le groupe.
On apprend aussi qu’Izawa et Hata ont besoin de beaucoup de temps pour s’entrainer sur chaque morceau et que la partition de piano sur Ao no ID (青のID) composée par Sheena était particulièrement difficile à maîtriser. Le groupe évoque aussi le morceau Inochi no Tobari (命の帳) qui a demandé beaucoup de travail, avec de nombreux changements en cours de route, notamment la partition de piano. Pour le morceau Yaminaru Shiro (闇なる白), Ukigumo évoque l’approche disruptive d’Izawa dans sa composition musicale ce qui rend le chant en duo avec Sheena assez complexe. Il compare le chant à deux sur ce morceau à une course de voitures qui roulent en s’entrechoquant les unes aux autres pour se dépasser l’une l’autre. Je n’avais pas remarqué que les trois morceaux centraux du nouvel album avaient des titres faisant référence à une couleur, comme l’explique Sheena. Ao no ID (青のID), puis Yaminaru Shiro (闇なる白) et Aka no Dōmei (赤の同盟) nous donnent les couleurs Bleu-Blanc-Rouge (Tiens donc, un petit clin d’oeil français?). Ukigumo n’est clairement pas super à l’aise devant la caméra, et peu bavard, mais il nous fait quand même part d’un épisode au moment du tournage de Ryokushu (緑酒) où il recherchait un restaurant de tempura sans succès. Sa manière de l’évoquer pousse à sourire car il est pince-sans-rire. On le remarque aussi au moment où il fait exprès de poser une question plus profonde sur l’album alors que l’ambiance générale de la discussion est plutôt légère.
J’ai beaucoup aimé l’ambiance de cette émission car on s’y sentait bien. Kameda regardait de temps en temps la page YouTube pour voir les commentaires, mais c’était tout simplement impossible de suivre le flot incessant de ces commentaires qui défilent à grande vitesse à l’écran. Personnellement, je ne les ai pas regardé car ces commentaires n’apportent en général pas grand chose d’intéressant. Je jetais par contre un œil au nombre de personnes connectées, car plus de 50k, c’est quand même impressionnant et ça fait plaisir à voir. A ce propos, après s’être remémoré en souriant l’episode Heavy Metal sur le morceau Kenka Jōtō (喧嘩上等) sur la tournée Just can’t help it, Sheena évoque l’envie de revoir le public en concert. Il n’y a cependant pas eu d’annonces particulières en ce sens. Il faudra attendre encore un peu. A la toute fin de la vidéo, on pouvait voir pour la première fois un teaser de l’album avec une petite partie du premier morceau 孔雀 (Kujaku) aux airs rappés (une première pour Sheena) et une partie plus longue du dernier morceau 一服 (Ippuku) mélangeant les voix, notamment celle d’Ukigumo. Je ne peux d’ailleurs plus me l’enlever de la tête, ce qui doit être bon signe. La vidéo de ce teaser est disponible sur YouTube. A noter qu’elle contient une DMC Delorean mais le groupe n’y apparait pas, à part Sheena à travers un vieil écran cathodique. La vidéo montre en fait les danseuses Sakra et Chinatsu du groupe SIS d’Osaka. Sheena est bien présente avec elles mais elle est à peine reconnaissable. L’émission sur YouTube était donc diffusée en direct mais elle n’est plus disponible dans les archives de la chaîne YouTube de Tokyo Jihen, ce qui est peu dommage car on ne peut plus la revoir (sur YouTube mais on peut la trouver ailleurs). Elle sera peut-être ajoutée plus tard. C’est en tout cas une excellente idée de faire ce genre d’émission, qui nous rapproche un peu du groupe et nous permet de constater une fois de plus qu’ils sont très complices, vus les sourires fréquents qui ont égayé l’émission. En même temps, ils ont gardé la distance nécessaire par rapport au public, sans se laisser emporter par les commentaires en direct sur YouTube. A la fin de l’émission (qui avait la référence #0), on nous annonce qu’il y en aura d’autres, à partir du 11 Juin à 10h du soir, mais je ne pense pas que ça soit avec le groupe complet. C’est une affaire à suivre, juste après la sortie de l’album le 9 Juin.