δАrэ чoὖ drivэ мy Ϛrαshed cаг

La nuit peut donner l’impression d’une ville électrique. Par la photographie, je l’approche sans la toucher sous peine d’électrochoc. L’énergie est palpable de toutes parts et, si on regarde bien, les ondes électriques affleurent sur la surface des choses, prêtes à jaillir dans toutes les directions. Les ondes électriques sont également dans mes écouteurs. L’ensemble du paysage urbain se distord aux sons des guitares qui prennent un malin plaisir à faire danser les lumières de la ville, à créer des déflagrations dans notre vision de la réalité. Le monde se présente ainsi devant nous sous une nouvelle forme. Il faut l’imaginer bien sûr mais il est bien réel devant moi ce soir là. Je m’arrête quelques instants pour ne pas perturber son mouvement perpétuel et saisir doucement en images l’énergie qui s’en dégage. Les couleurs se mélangent et s’additionnent. Les formes convergent et se séparent ensuite. Si on prête bien l’oreille, la partition musicale de la ville se révèle, rythmée sur ces ondes électriques. Elles dansent devant nous zigzaguant entre les êtres sans les toucher, les poursuivant à la trace parfois et donnent la pulsation de cette ville comme un électrocardiogramme.

Je ne suis pas déçu par ce nouveau single d’Ado, Yukue Shirezu (行方知れず), écrit et composé par Sheena Ringo. Il peut paraître chaotique aux premiers abords et il le reste après plusieurs écoutes car le morceau part sur différentes pistes, comme sait si bien le faire sa compositrice. Le chant d’Ado est assez exceptionnel mais on n’en attendait pas moins d’elle. A chaque nouveau morceau, on lui découvre des tons différents. Je pense qu’il s’agit ici de l’influence de Sheena Ringo, qu’on reconnaît beaucoup tout le long du morceau. De Sheena Ringo, on sait qu’Ado respecte sa manière de chanter et de s’exprimer (歌い方や表現の仕方をリスペクトしている). Sheena aurait pu, en fait, chanter ce morceau, mais je ne suis pas sûr qu’elle soit en mesure actuellement d’apporter la violence vocale dont Ado est capable. Ce morceau, dans son agressivité générale, est d’ailleurs dans la lignée du morceau Backlight écrit par Vaundy que je mentionnais auparavant. C’est un morceau exigeant et je ne peux m’empêcher de penser que les compositeurs et compositrices d’Ado cherchent à la pousser dans ses derniers retranchements, comme pour tester ses capacités vocales, notamment sa versatilité. La voix d’Ado, avec ses accentuations et ses nuances, est bien entendu l’attraction principale du morceau mais musicalement, il faut quand même noter que ce morceau fait intervenir des musiciens fidèles à Sheena Ringo, à savoir un certain Ichiyō Izawa (伊澤一葉) de Tokyo Jihen au clavier, Yukio Nagoshi (名越由貴夫) à la guitare, Keisuke Torigoe (鳥越啓介) à la basse et Atsushi Matsushita (松下敦) à la batterie. Atsushi Matsushita fait partie du groupe Zazen Boys (ザゼン・ボーイズ), formé par Shutoku Mukai après Number Girl. Ajoutez à cela le fait qu’il est originaire du Kyushu (de Nagasaki) et on comprend assez bien sa présence dans ce groupe spécialement composé pour ce morceau. Je me demande quel est le nom du groupe car Sheena donne normalement un nom spécifique à chaque formation même temporaire. Dans un message sur son blog sur le site du fan club Ringohan, Sheena mentionnait très brièvement le 5 Juin 2022 (六月五日二〇二二) qu’elle avait fait un enregistrement à Ikejiri Ohashi avec un certain Okayama-zei (岡山勢), c’est à dire le groupe d’Okayama. Quelques recherches m’avaient permis de comprendre que Okayama-zei fait référence à Yukio Nagoshi et Keisuke Torigoe, tous les deux originaires de la préfecture d’Okayama. En y repensant maintenant, il est très possible qu’ils travaillaient avec Sheena sur ce morceau pour Ado. Ils sont tous les deux des habitués des concerts de Sheena Ringo. En y repensant maintenant, je ne suis pas certain que ce morceau soit très adapté à l’émission Kōhaku de NHK, et je fais donc un trait sur ma prédiction de voir Ado à visage découvert avec Sheena sur scène pour chanter ce morceau en duo. Je suis en tout cas très satisfait que Sheena ait toujours cette capacité à créer ce type de morceaux, aux sons incisifs et aux guitares très métalliques.

Et comme je suis d’un naturel très curieux, je n’ai pu m’empêcher d’essayer d’en savoir un peu plus sur le personnage mystérieux qu’est Ado. Comme sa fiche Wikipedia japonaise l’indique, son nom serait tiré du théâtre japonais Kyōgen (狂言) qui est également le titre de son premier album. Le Kyōgen est exécuté par des acteurs appelés kyōgenkata (狂言方). L’acteur principal s’appelle ‘shite’ (シテ) tandis que les acteurs secondaires s’appellent ‘ado’ (アド). Ado aurait pris connaissance du kyōgen à l’école primaire et aurait été attiré par la sonorité du mot ‘ado’. Elle interpréterait ce nom ‘ado’, se référant donc à un personnage secondaire, au fait qu’elle veuille devenir un rôle secondaire dans la vie des gens en les supportant grâce à ses chansons. On ne connaît d’Ado que sa représentation dessinée, actuellement illustrée par ORIHARA, et son visage reste inconnu. Les rumeurs (qui par définition peuvent être complètement fausses) indiquent qu’Ado aurait fait partie à l’époque du lycée d’un groupe de trois filles appelé Amaru. A, Ma et Ru correspondraient aux premières lettres des prénoms de chaque membre avec Ru pour Ruri (るり) qui serait-il possiblement le prénom d’Ado. Certains sites ou compte Twitter montrent même des photos de ce groupe…

Je parle régulièrement de la compositrice et interprète 4s4ki sur les pages de Made in Tokyo car j’aime beaucoup son approche musicale, que certains qualifient d’hyper pop. Je ne sais pas vraiment ce que ce terme veut réellement signifier mais toujours est-il que j’ai constamment l’impression qu’4s4ki a un temps d’avance sur les autres. On peut certainement comprendre l’utilisation du mot ‘hyper‘ dans l’extrême dynamique et l’approche chaotique qui caractérisent certains de ses morceaux. Je n’ai pas encore écouté entièrement son dernier album Killer in Neverland, car je l’approche tranquillement pour ne pas me brûler les oreilles. Le meilleur morceau que j’ai pu entendre pour l’instant sur l’album est le sixième, paranoia. Il s’agit peut-être tout simplement du morceau que je préfère de l’artiste, peut-être parce qu’il est un peu plus ‘apaisé‘ que les autres. Apaisé n’est pas être pas le meilleur qualitatif car les guitares sont très présentes dans le refrain, se mélangeant avec les sonorités électroniques et la voix légèrement modifiée d’4s4ki. J’aime aussi beaucoup le neuvième morceau Freedom Kingdom en collaboration au chant avec la rappeuse coréenne Swervy. Le morceau est co-écrit avec le musicien électronique Masayoshi Iimori (マサヨシイイモリ) et c’est un des singles de l’album. Le rythme est beaucoup plus accentué sur ce morceau que sur paranoia. 4s4ki alterne régulièrement les ambiances avec certains morceaux principalement à base de guitares comme le cinquième Cross out, et des morceaux plus fidèles à l’image hyper-pop qu’on peut avoir d’4s4ki, comme le deuxième morceau et single Log Out, même s’ils ne vont pas aussi loin que, par exemple, le morceau Hyper Angry Cat (超怒猫仔) qui reste pour moi un de ses morceaux les plus novateurs. Le morceau Log Out ainsi que quelques autres de l’album sont co-écrits avec le musicien et producteur maeshima soshi qui était déjà intervenu sur de nombreux morceaux précédents d’4s4ki. Je cite les noms de ces musiciens, créateurs et producteurs Masayoshi Iimori, maeshima soshi mais aussi Mega Shinnosuke (メガシンノスケ) qui collaborait sur Hyper Angry Cat, car ce sont des noms que je croise de plus en plus souvent dans mes découvertes de la musique électronique japonaise. Et que dire de cette photographie / illustration du visage d’4s4ki sur la pochette de l’album Killer in Neverland. Je ne sais si c’est voulu, mais je lui trouve quelque chose de, comment dirais-je, christique. Je ne suis pas sûr qu’4s4ki soit le nouveau ‘messie‘, mais, à 24 ans, elle représente déjà un modèle pour de nombreux jeunes artistes, comme on pouvait le comprendre dans l’interview qui lui était dédié sur Pitchfork. A noter pour terminer ce billet que la vidéo du morceau Log Out a été tournée en grande partie sur le grand pont piéton de Shibuya, duquel j’ai pris quelques photographies de ce billet, notamment la deuxième photographie de cette voiture aux apparences accidentées qu’on oserait à peine conduire.

さあ行くよニューワールド

Je mentionnais dans un billet précédent que j’aime marcher de Shibuya à Shinjuku, lorsque je n’ai pas d’idée très précise où aller. Je marche cette fois-ci jusqu’à la station de Yoyogi, en m’arrêtant donc aux portes de Shinjuku. Le chemin que j’emprunte cette fois-ci est différent du précédent car je ne suis pas la longue avenue Meiji. Je préfère pour cette série marcher dans des plus petites rues parallèles que je finis également par bien connaître. A force de marcher dans ces rues, je fais de moins en moins de découvertes mais l’envie de photographier est toujours très présente. Toutes les photographies ci-dessus sont prises le même jour sauf la première, qui est d’ailleurs prise avec un objectif Zoom que je n’utilise pas très souvent, le Canon EF 28-135mm f/3.5-5.6 IS USM. La qualité de l’optique est bien inférieure à l’objectif Canon EF 17-40mm f/4L USM que j’utilise principalement et presqu’exclusivement. Les prix des deux objectifs sont aussi bien différents.

Alors qu’Ado doit sortir son nouveau single Yukue Shirezu (行方知れず), celui écrit et composé par Sheena Ringo, dans quelques jours le 10 Octobre 2022, l’envie me prend d’aller piocher dans sa discographie des morceaux qui pourraient me plaire. Sur son dernier album Uta no Uta One Piece Film Red (ウタの歌 ONE PIECE FILM RED), qui est comme son nom l’indique lié à la sortie du dernier film d’animation One Piece, je trouve deux morceaux qui me plaisent particulièrement: le premier morceau New Genesis (新時代) et le troisième Backlight (逆光). Depuis que cet album est sorti le 10 Août 2022, il connait un grand succès avec plusieurs morceaux, dont ceux que je mentionne ci-dessus, occupant les premières places des meilleures ventes de singles au Japon. La particularité de cet album est que chaque morceau voit ses paroles et sa musique écrites et composée par un artiste différent. Sans le remarquer avant d’écouter l’album en entier sur YouTube, il se trouve que les deux seuls morceaux que j’apprécie vraiment sont composés par des artistes que j’apprécie, à avoir Yasutaka Nakata (中田ヤスタカ) pour New Genesis et Vaundy pour Backlight. Les deux morceaux sont très accrocheurs et je comprends très bien leur succès. Le morceau Backlight a une ambiance rock très aggressive qui met à partie les capacités vocales d’Ado, comme si Vaundy voulait pousser Ado dans ses derniers retranchements. La voix d’Ado fonctionne très dans ces moments de violence et il faut bien avouer qu’elle est impressionnante. On reconnaît en fait assez bien l’écriture musicale de Vaundy sur ce morceau. A noter parmi les musiciens contributeurs, qu’un certain Ue-chan du groupe Maximum the Hormone (que je ne connais que de nom) assure la guitare basse. Le morceau de Yasutaka Nakata a une ambiance électronique rétro dans l’esprit des morceaux récents, très bons d’ailleurs, qu’il a composé pour son groupe Capsule. J’en parlais dans deux billets précėdents, et c’est amusant de constater que dans ces mêmes billets, je parlais également de Vaundy et d’Ado. Sur ce morceau également, Ado pousse volontiers sa voix pour notre plus grand plaisir. Les autres morceaux de l’album m’intéressent moins donc je ne pense pas m’y attarder. J’ai le sentiment qu’Ado est capable de grandes choses si elle est bien accompagnée. Je repense au monumental et chaotique morceau Odo (踊) sorti l’année dernière en single et inclu cette année en Janvier sur son premier album Kyōgen (狂言). La manière dont Sheena Ringo va influencer Ado sur son nouveau morceau Yukue Shirezu m’intrigue vraiment beaucoup. Vu le succès commercial confirmé d’Ado cette année encore, je me demande si elle va finalement participer à l’émission Kōhaku du 31 Décembre sur NHK. Je doute par exemple que Sheena Ringo soit présente sur scène à Kōhaku cette année, car elle ou Tokyo Jihen n’a pas sorti de morceaux majeurs. Il y a bien le morceau Ito wo kashi (いとをかし – too good) pour l’anime Ojarumaru (おじゃる丸) de NHK, mais il me parait un peu trop anecdotique pour Kōhaku. En fait, même avant de connaître son nouveau morceau, je rêverais qu’Ado saisisse l’opportunité de ce Kōhaku là pour finalement montrer son visage, et pourquoi ne pas le faire en duo sur scène avec Sheena Ringo. Ado a maintenant 20 ans, tout comme Miyuna, un autre talent précoce font je parlais récemment, et elle a de toute façon tout le temps devant elle pour décider à se montrer. J’imagine le confort de vie d’être l’artiste qui vend le plus de disques en ce moment au Japon et de pouvoir mener une vue normale.

dans le flou des ombres du soir

En composant ce billet de photographies volontairement floues en noir et blanc, j’ai en tête un billet de Septembre 2017 intitulé we are walking in the air, qui me sert en quelque sorte de maître-étalon ou plutôt de référence. Ce billet de 2017 m’avait d’ailleurs inspiré le billet de Septembre 2018 intitulé we speak silence, faisant intervenir cette fois la couleur. Ces billets sont construits de la même manière, que ça soit le flou des photographies, l’abstraction du texte accompagnant les images et le titre volontairement incohérent. Ces billets ont pour moi une importance certaine et j’y reviens de temps en temps pour me souvenir de la direction que doit garder Made in Tokyo. Je m’en éloigne malheureusement petit à petit, car un grand nombre de mes séries de photographies tendent vers le descriptif plutôt que vers l’abstraction. C’est un débat interne que j’ai longtemps eu sur ce blog, à savoir montrer de la photographie directe, comme je le fais en très grande partie maintenant, ou montrer une photographie altérée, faite de superpositions et de parasitages. La deuxième catégorie m’apporte le plus de satisfaction mais l’inspiration ne se commande pas, et se fait malheureusement de plus en plus rare ces dernières années. Fut une époque où je créais des megastructures et des formes urbano-végétales voguant au dessus de la ville. Cette forme de poésie urbaine me manque parfois même si j’ai un peu tourné la page. La série de photographies ci-dessus n’est pas aussi intéressante que celles de Septembre 2017 ou 2018, mais je ressens depuis quelques temps le besoin de retourner vers ce type d’abstraction de l’image, suite aux deux billets du mois de Septembre: will you watch petals shed from flowers in bloom? et D1$4PP34R1NG 1N c̶̳͚̈́͌̿͋̔ͅL0VDZ 4n̶͓͉̣͉͚̂̏͐D SK4𝖗Z. Je n’ai jamais voulu choisir une direction unique, mais il faut que je me souvienne de garder une bonne proportion entre photographies directes et photographies altérées.

Nous sommes ci-dessus au sanctuaire d’Hikawa à Shibuya à l’occasion du matsuri d’automne (j’y reviendrais un peu plus tard), tout comme sur les deux billets de 2017 et 2018. Certaines des photographies ont par contre été prises autour du sanctuaire.

will you watch petals shed from flowers in bloom?

Voir 1797071, aka Mako de Ms Machine, porter un t-shirt de l’album III de Crystal Castles me fait dire que je ne m’étais pas vraiment trompé en parlant d’une influence du son de Crystal Castles sur le EP D1$4PP34R1NG de 1797071, dont je parlais dans un billet précédent. L’album III de Crystal Castles est celui qui est souvent apparenté au style witch-house, donc tout parait très logique. Du coup, je me suis mis à réécouter les albums du groupe en commençant par III puis en écoutant les albums précédents. Je me souviens avoir développer une sorte d’obsession pour le morceau Magic Spells du premier album. Je ne suis apparemment pas le seul car je découvre qu’un compte YouTube a créé une boucle d’1h de ce seul morceau. Le morceau principalement instrumental s’y prête bien. Mais la fascination pour ce morceau provient également des courtes et énigmatiques paroles « Don’t worry, dear Pamela, I’ll do my scientific best to command your fleet » extraites de la série de science-fiction V qui certains se souviendront peut-être. Je pense préférer l’album III à l’album II même si un morceau comme Celestica est particulièrement mémorable. Crystal Castles n’est plus actif depuis quelques années suite aux problèmes de type judiciaire entre les deux membres du groupe. Alice Glass trace son chemin de son côté, en essayant de se reconstruire, et j’ai toujours en tête d’écouter un jour ou l’autre son album PREY//IV. J’avais beaucoup aimé le morceau Without Love de son premier EP éponyme. Crystal Castles avait pourtant fait un retour en 2016 avec l’album Amnesty (I), Edith Frances remplaçant Alice Glass au chant, qui était très bon, notamment un morceau particulièrement marquant comme Concrete. Je me suis demandé si je devais arrêter d’écouter Crystal Castles, mais je parviens en général à séparer l’œuvre des comportements de son/sa/ses artistes. Une fois qu’une œuvre musicale est ouverte au public, son destin dépend des auditeurs qui lui donne une vie indépendante.

blackout nights

Je ne prends que très rarement des photographies de nuit, trop rarement peut-être. Je ne possède pas de pied tri-pod pour me poser à un endroit et prendre des photos en longue exposition et je préfère de toute façon me déplacer sans arrêts. J’avais tout d’abord dans l’idée de prendre en photo des traînées de lumière pour obtenir des images que je pourrais ensuite réutiliser en superposition avec d’autres. Mais j’ai finalement ramené de mes marches nocturnes des photographies ’posées’ dont je montre certaines sur ce billet. Les couleurs bleutées inattendues sur le béton de l’autoroute intra-muros au niveau de Shibuya sur la première photographie m’ont finalement donné envie de me poser quelques instants. Ces photographies ont été prises à Shibuya et autour lors de deux soirées différentes, mais l’obscurité ambiante ne permet pas de les différencier. L’envie me vient maintenant de retourner à Shinjuku le soir pour en saisir les lumières.

Pendant les deux mois d’été, l’émission Very Good Trip sur France Inter diffusait une série spéciale de neuf épisodes consacrée à David Bowie. Cette série était nommée pour l’occasion Very Good Bowie Trip et était présentée comme d’habitude par Michka Assayas. J’ai écouté cette série avec beaucoup de plaisir et une certaine gourmandise. Je sais pertinemment que je finirais un jour ou l’autre par écouter tous les albums de David Bowie mais j’y vais doucement. Je n’avais jusque là que trois albums dans ma discothèque personnelle, à savoir Scary Monsters (And Super Creeps) sorti en 1980, son dernier album Blackstar sorti en 2016 et le premier album de la trilogie berlinoise, Low, sorti en 1977. Cette époque dite berlinoise à la fin dès années 1970 en collaboration avec Brian Eno est la période qui m’intéresse à priori le plus. Écouter l’émission Very Good Trip me donne l’envie irrésistible d’aller acheter au Disc Union le plus proche, l’album Heroes sorti en 1977 qui est le deuxième album de cette trilogie berlinoise. Je ne me lancerais bien sûr pas dans une critique de cet album, mais je noterais juste qu’il est fabuleux. C’est pour l’instant l’album que je préfère dans ma petite collection personnelle des albums de Bowie que je possède. L’album Heroes ressemble à Low dans le sens où la deuxième moitié de l’album est presque totalement instrumentale. Dans les morceaux chantés dans la première partie de l’album, le morceau titre Heroes est bien entendu le plus connu et un des plus beaux de sa carrière, mais la plupart des morceaux sont fascinants (Sons of The Silent Age, par exemple). C’est certainement dû à la manière non conventionnelle de chanter de David Bowie et à une certaine non prédictibilité musicale. Il a trois morceaux instrumentaux sombres et inquiétants (Sense of doubt, Moss Garden et Neukoln) faisant une coupure très nette avec le reste de l’album. Ils forment une longue trame se terminant en apogée sur le dernier morceau Neukoln et sa complainte de saxophone. J’ai une petite préférence pour les morceaux instrumentaux de Low, notamment le grandiose Warszawa et Subterraneans, mais ceux de Heroes sont également superbes. Sur Heroes, j’aime particulièrement le morceau intitulé Blackout. Dans les paroles de ce morceau, Bowie glisse la phrase suivante « I’m under Japanese influence and my honour’s at stake ». On sait que David Bowie apprécie beaucoup le Japon (trop peut-être si on comprend bien ce qu’il veut nous dire dans ces paroles). Son premier voyage au Japon date d’Avril 1973. Il a notamment collaboré avec le couturier Kansai Yamamoto (山本寛斎) et le photographe Masayoshi Sukita (鋤田正義) qui signe les photographies de l’album Heroes (la photo de droite ci-dessus).

Pourquoi donc ces deux photographies de Sheena Ringo sur la gauche, me direz-vous? Je trouve que les positionnements de mains de Sheena Ringo sur ces photographies, notamment sur celle du bas, ressemblent beaucoup à ceux de David Bowie sur les photographies du photographe Sukita. Il ne s’agit pourtant pas du même photographe et je n’ai pas réussi à trouver de référence précise mentionnant une éventuelle influence. Mais la référence me paraît tout à fait évidente. Les photos de Sheena Ringo sont tirées du livre officiel Channel Guide Tokyo Incidents, sorti le 29 Février 2012 au moment de la séparation de Tokyo Jihen. L’émission Very Good Trip de Michka Assayas insiste beaucoup sur les multiples métamorphoses et la curiosité musicale de David Bowie tout au long de sa carrière. On retrouve ces métamorphoses et cette curiosité chez Sheena Ringo, et un journaliste lui avait d’ailleurs fait la remarque dès 2003 dans une interview du magazine GB que je suis en train de lire. J’y reviendrais certainement très vite, car c’est une piste qui m’est particulièrement intéressante.