feeling toooo lazy

C’est peut être l’effet Golden Week, mais je me sens paresseux pour écrire de nouveaux billets sur ce blog, même si les photographies à montrer ne manquent pas, car nous sommes allés à différents endroits ces dernières semaines. J’ai en fait tellement de billets en brouillon en attente d’écriture que je ne sais pas par lequel commencer. Ces billets ont déjà des photos allouées et un titre provisoire mais il me reste les textes à écrire pour une douzaine d’entre eux, dont celui-ci. Nous sommes actuellement entrés dans une des deux meilleures périodes de l’année au Japon et l’envie de prendre des photos est très forte. Celles de ce billet sont relativement classiques, prises à Daikanyama, Ebisu et Shibuya. Sur l’avant-dernière photographie, je montre une nouvelle fois mais en contre-plongée l’unité d’appartements haut de gamme conçue par Toyo Ito à Shibuya Tokiwamatsu. J’ai également déjà montré le bâtiment rond couvert de bois de la première photographie. On y trouve actuellement un café et une galerie appelés Monkey Café & Gallery D.K.Y. Ce bâtiment a été conçu par Hiroshi Nakamura (中村拓志) & NAP et se nomme Sarugaku Cyclone. Les plaquettes de bois du haut du bâtiment subissent malheureusement l’usure du temps et ont perdu de leur fraîcheur d’origine. On peut voir un phénomène similaire sur certains bâtiments de Kengo Kuma, qui ne vieillissent pas très bien par rapport, par exemple, au béton de Tadao Ando.

Les petits tunnels de Biku et de Koshin sous la voie ferrée entre les gares d’Ebisu et de Shibuya sont souvent taggés en long et en large, puis nettoyés et re-taggés dans une boucle infinie qui n’est pas sans intérêt pour le photographe que je suis. Depuis quelques semaines, une grande fresque de l’artiste californien Barry McGee vient occuper un des murs du tunnel sur une surface de 16m de large sur 3.5m de long. L’art de Barry McGee combine des graphismes géométriques très riches en couleurs avec des dessins de portraits. Cette fresque vient s’inscrire dans un projet appelé Shibuya Arrow qui a été lancé en 2017 dans le but de diffuser des informations sur les sites d’évacuation temporaires et les itinéraires d’évacuation en cas de catastrophe tel qu’un tremblement de terre. En regardant bien les dessins de Barry McGee, j’ai quand même beaucoup de mal à y déceler des informations d’évacuation en cas de tremblement de terre. Toujours est-il que ces dessins viennent embellir un tunnel qui ne l’était pas et je suis curieux de voir apparaître soudainement d’autres œuvres de ce projet. Voici donc un nouveau sujet à suivre de près. Tout comme les toilettes publiques d’architectes dans Shibuya, j’imagine que la découverte de nouvelles fresques dans Shibuya créera de nouvelles vocations de guides pour les touristes venus de loin. Et comme je le mentionnais au début du billet, nous terminons la deuxième partie de la Golden Week, période pendant laquelle on voit apparaître aux quatre coins du pays des carpes colorées accrochées en haut de mâts et se laissant porter par les vents.

Lors du concert final de For Tracy Hyde, le 25 Mars 2023 dans la salle WWWX de Shibuya, Azusa Suga (管梓) nous avait fait part qu’il continuerait à composer pour son autre groupe April Blue (エイプリルブルー) mais également plus occasionnellement pour des groupes d’idoles alternatives. Je pensais à RAY pour lesquelles il a déjà composé un certain nombre de titres rock. J’ai appris à travers son fil Twitter qu’il compose également pour un autre groupe appelé airattic (エアラティック) que je ne connaissais pas. Le morceau Film Reel of Our Youth (フィルムリールを回して) est sorti il y a plus d’un d’un an, en Septembre 2022, mais je ne le découvre que maintenant. Dès les premiers accords de guitares, on reconnaît tout de suite les compositions d’Azusa Suga pour ses ambiances de rock indé au style Dream pop légèrement mélancolique. Le titre même du morceau m’évoque tout de suite For Tracy Hyde, ce qui me fait penser que ce morceau aurait très bien pu être chanté par Eureka si le groupe n’avait pas pris fin le 25 Mars 2023, d’autant plus qu’il s’agit de Mav, également un ancien de For Tracy Hyde, qui y joue de la basse. Le morceau est donc chanté à plusieurs voix, celles des cinq idoles alternatives d’airattic, à savoir Hinari Koizumi (小泉日菜莉), Nene Kagura (神楽寧々), Madoka Momose (百瀬円香), Honoka Sakuragi (桜木穂乃花) et Ami Mukai (向日葵海). La production du groupe, dirigée par un certain Shota Homma (本間翔太), nous indique que le nom de la formation provient des mots air (空気) et attic (屋根裏), mais je ne peux m’empêcher d’entendre phonétiquement le mot Erratique, qui ne caractérise pourtant pas la musique du groupe. Tout comme pour RAY, plusieurs compositeurs indépendants rock ou électro composent pour airattic. J’aime beaucoup le morceau Film Reel of Our Youth mais je lui préfère celui intitulé Lightning (閃光) sorti en Décembre 2022. Ce deuxième single a une approche complètement différente, beaucoup plus rapide et dynamique. On dirait un single de Nogizaka 46 qui serait passé en accéléré. Ce qui fonctionne très bien sur ce morceau, c’est le rythme vocal soutenue des filles du groupe tenant très bien la route et n’ayant pour le coup absolument rien d’erratique. La vitesse excessive du morceau a même quelque chose de ludique, tout comme leur chorégraphie, dans la pénombre d’un vieil hangar. Parmi les autres découvertes musicales récentes, je ne suis pas mécontent de revenir vers le beat électronique de type house music de tofubeats avec le morceau I CAN FEEL IT sur son nouvel EP NOBODY sorti le 26 Avril 2024. La vidéo du morceau est concentrée sur l’actrice et cascadeuse (notamment dans l’épisode de John Wick sorti en 2023), Saori Izawa (伊澤彩織) devant des claviers ou au volant d’un 4WD sur l’autoroute express de Tokyo intra-muros. Ce n’est pourtant pas elle qui chante sur ce morceau, car tofubeats utilise ici un software vocal appelé Synthetiser V doté d’intelligence artificielle. La voix auto-tunée qui en ressort a quelque de neutre et d’inorganique mais elle n’en reste pas moins expressive, ce qui est au final assez étonnant. Pour être très honnête, j’aurais préféré qu’il utilise une véritable voix, car ce ne sont pas les belles voix qui manquent dans le paysage musical japonais. Cette voix artificielle combinée aux beats plein de cascades de tofubeats rendent tout de même ce morceau extrêmement intéressant et accrocheur. Depuis qu’elle a signé sur une major, je trouve que les vidéos d’a子 gagnent en qualité. Son dernier single intitulé Lazy est sorti le 17 Avril 2024, date facile à retenir car c’était le même jour que la sortie du dernier single de Sheena Ringo. L’amateur que je suis des compositions et de la voix d’a子 n’est pas déçu par ce nouveau single qui continue vers des terrains musicaux qu’on lui connaît. J’ai un avis un peu partagé sur les derniers singles d’a子 car j’aimerais qu’elle explore des horizons un peu différents, mais j’ai en même temps le sentiment qu’elle a trouvé une ambiance qui lui convient et lui correspond, à mi-chemin entre rock indé et pop. Continuer sur cette voie lui permet en même temps de se construire une identité immédiatement reconnaissable. On est en tout cas très loin de s’ennuyer en écoutant ce nouveau single car a子 parvient à chaque fois à attraper notre attention avec un refrain bien vu. Le quatrième morceau de cette playlist me fait particulièrement plaisir à écouter car il s’agit du dernier single intitulé Yogensha (預言者) du groupe Tempalay sur leur cinquième album ((ika)) sorti le 1er Mai 2024. Tempalay est le groupe dans lequel AAAMYYY joue du clavier et assure les chœurs, avec Ryōto Ohara (小原綾斗), le chanteur, guitariste et compositeur du groupe, et Natsuki Fujimoto (藤本夏樹), le batteur. Sachant qu’AAAMYYY jouait dans ce groupe, j’ai eu à plusieurs reprises envie de découvrir Tempalay, sans être malheureusement très convaincu par le rock un peu psychédélique qui les caractérise. Je trouve par contre ce dernier single excellent, avec une bonne balance entre les voix d’AAAMYYY et de Ryōto Ohara. En fait j’adore quand AAAMYYY vient mélanger sa voix avec celle d’un autre chanteur car elle a une tonalité un peu différente, très légèrement rugueuse qui complète bien l’autre voix. Le single a une atmosphère très cool et on s’y sent bien. J’ai du coup très envie de découvrir cet album de Tempalay, car j’y retrouve assez clairement l’empreinte d’AAAMYYY.

人類最後の少女元年

Je me promène autour du S de Shibuya dans lequel on ne peut pas encore entrer. Le complexe Shibuya Sakura Stage ne semble pas complètement ouvert mais il s’y déroule déjà quelques événements comme celui de la marque de cosmétique Essential de Kao Corporation présentant ses nouveaux produits et la publicité qui va avec. Le groupe NewJeans fait la promotion de cette marque et sort par la même occasion un nouveau single lié à sa publicité. Une file d’attente s’était formée dans le large couloir du building pour entrer à l’intérieur de l’espace d’exposition, mais les membres du groupe ne semblaient pas avoir fait le déplacement. J’imagine la cohue si elles avaient été là dans les couloirs du Sakura Stage. Les jeunes fans se prenaient plutôt en photo devant une grande affiche publicitaire prévue à cette effet. La dernière photographie du billet n’est pas prise au même endroit. Il s’agit d’une vue en contre-plongée du building Octagon Ebisu (オクタゴン恵比寿) par l’architecte Shin Takamatsu (高松伸). Elle a été construite en 1992 mais n’a pas pris une ride. Son maquillage coule par contre un peu autour de ses gros yeux noirs globuleux. Le tour se tient fièrement comme au premier jour au pied d’un croisement de cinq rues.

Le weekend dernier était la deuxième édition du festival Coachella 2024 qui m’a donné l’occasion de voir certains des artistes que j’avais manqué lors du premier week-end. J’ai donc pu voir la prestation du groupe électronique L’Impératrice dont je parlais dans un billet précédent et qui a confirmé tout le bien que je pense de la musique de cette formation. La jubilation de jouer sur la scène de Coachella se lisait très clairement sur leurs visages et ça faisait plaisir à voir. Je n’en avais pas parlé dans mon billet précédent mais j’avais vu lors du premier week-end une partie du live du groupe new-yorkais Vampire Weekend, dont je n’ai pas écouté la musique depuis plus de dix ans. Sans être un amateur inconditionnel du groupe, je trouve leur single Classical sur leur nouvel album Only God Was Above Us vraiment excellent. Il est même très étonnement numéro 1 du classement Tokio Hop 100 de la radio J-Wave pour le week-end dernier. Ce morceau me replonge une nouvelle fois dans cette musique alternative du tout début des années 2010 et de la toute fin 2000, que je trouvais particulièrement imaginative. Merriweather Post Pavillon d’Animal Collective et Veckatimest de Grizzly Bear sont deux monuments sortis en 2009 qui symbolisent pour moi cette période. De ces deux albums, les morceaux Ready, Able et No More Runnin’ sont d’une grande sensibilité et tout simplement beaux à en pleurer. J’ai pu voir lors du deuxième week-end une partie du set de Grimes qui n’a pas rencontré cette fois-ci de problèmes techniques majeurs mais qui n’en restait pas moins assez fade. Ce ne sont pas les grandes images synthétiques en fond d’écran qui ont rattrapé le coup. Une bonne partie de ces images de personnages animés étaient certainement générées par intelligence artificielle car elles avaient ce côté lisse et déjà vu, qui me mettent personnellement mal à l’aise. Les images générées par AI ont tendance à tendre vers une même imagerie standard qui essaie à mon avis de rétrécir les angles de la perception humaine. Côté musique électronique, le set des français de Justice était par contre tout à fait exceptionnel en ayant une approche scénique plus traditionnelle. Gaspard Augé et de Xavier de Rosnay étaient débout imperturbables en costumes blancs devant leurs claviers et consoles électroniques, et la puissance des faisceaux de lumières autour d’eux étaient impressionnantes. Accompagnant des morceaux instrumentaux au son puissant comme Generator, cela créait un espace conceptuel futuriste froid de toute beauté. Du coup, je me suis mis à écouter plusieurs morceaux de leur nouvel album Hyperdrama, comme Generator, Incognito, Saturnine et surtout One Night/All Night interprété en collaboration avec les australiens de Tame Impala. J’ai développé une sorte d’obsession pour ce morceau et ce refrain qui se répète (And I can be your woman ‘Cause if that’s the only answer Then we could be together) que j’ai écouté plusieurs dizaines de fois. J’ai toujours aimé la voix de Kevin Parker, mais elle s’accorde particulièrement bien avec le son électronique de Justice. De Tame Impala, il faut écouter le morceau Let it Happen de l’album Currents de 2015, qui atteint à mon avis un des sommets de la musique du groupe, notamment pour son décrochage conceptuel à mi-morceau tout simplement génial.

Dans les groupes japonais à Coachella, j’étais particulièrement curieux de voir la performance d’Atarashii Gakko! (新しい学校のリーダーズ) qui concluait le festival sur la scène Gobi. Leur set valait clairement le détour car elles sont de véritables furies inarrêtables sur scène. Je ne suis particulièrement amateur de leurs morceaux récents comme Otona Blue (大人ブルー) qui mettait beaucoup en avant leur chorégraphie facilement imitable sur TikTok, au profit de la qualité de leur musique. Mais ce morceau leur a donné une grande popularité et une assurance sur scène qui est assez impressionnante. Elles ont certes l’habitude de la scène américaine et étaient même populaires là bas avant de l’être au Japon, mais je trouve qu’elles se sont transformées et maîtrisent parfaitement les techniques pour faire bouillir un public qui ne demande que ça, beaucoup mieux que la politesse timide de Yoasobi. Suzuka est par exemple hyper active, s’activant au plus près du public, se faisant tenir en l’air par les personnes du public au pied de la scène. Elles étaient très clairement électrisées par le public et heureuses d’être sur scène. Le problème tout de même est qu’elles ont tendance à surjouer la carte du crazy Japanese, c’est à dire les japonais qui vont des choses folles qu’on arrive pas à comprendre mais qui font bien rire. Elles arrivent bien sûr à jouer de cela. Visuellement, leur set était impressionnant et extrêmement ludique mais musicalement, je reste quand même un peu sur ma faim. Si j’avais l’occasion de les voir en concert, j’irais tout de même très volontiers même si je n’aime pas beaucoup voir Suzuka tirer la langue sans arrêt, car ce n’est pas très poli.

En fait, j’aime beaucoup certains morceaux plus anciens d’Atarashii Gakko! comme Saishū Jinrui (最終人類) sorti en 2018 sur leur tout premier album Maenarawanai (マエナラワナイ). Elles ont en fait interprété ce morceau avec beaucoup d’énergie sur la scène de Coachella, ainsi qu’un autre intitulé NAINAINAI, dont j’avais déjà parlé sur ce blog, pour le final mouvementé et plein de rebondissements. Les musiques de Saishū Jinrui, et de tout leur premier album d’ailleurs, ont été composées par H ZETT M, aka Masayuki Hiizumi (ヒイズミマサユ機). Il joue d’ailleurs du piano sur ce morceau et rien que le fait de savoir que c’est lui qui joue me procure un sentiment de grande satisfaction. Je ne suis pas sûr d’en avoir déjà parlé sur ce blog, mais j’aime aussi réécouter de temps en temps le morceau ShōJo Gannen (少女元年) du groupe pop électronique Urbangarde (アーバンギャルド) sur lequel Atarashii Gakko! danse et chante dans les chœurs. Urbangarde est un groupe actif depuis 2002 avec actuellement trois membres permanents à savoir Yōko Hamasaki (浜崎容子) au chant, Temma Matsunaga (松永天馬) également au chant et Kei Ohkubo (おおくぼけい) aux claviers. La présence de Yōko Hamasaki est tout a fait remarquable avec un look mélangeant underground SM et kawaii pop, mais c’est la figure théâtrale du deuxième chanteur Temma Matsunaga qui m’intrigue beaucoup car on a d’abord un peu de mal à comprendre son rôle exact dans le groupe. Il accompagne bien Yōko au chant mais on ne remarque vraiment sa voix que si on écoute le morceau au casque. Son look étrange avec une coupe de cheveux au carré et des lunettes de professeur apporte un certain décalage à l’image générale du groupe. Le pianiste Kei Ohkubo est brillant et il a même collaboré il y a quelques années avec Jun Togawa pour un album collaboratif, que je n’ai pas écouté car Jun a malheureusement beaucoup perdue de sa voix tellement unique. Shōjo Gannen a une dynamique et une accroche assez immédiate et cette association avec Atarashii Gakko! est très bien vue. Du coup, j’ai une grande envie d’aller piocher dans la discographie très étoffée d’Urbangarde et dans le premier album d’Atarashii Gakko!.

sakura overload (un dernier sanctuaire)

Le sanctuaire de Yasukuni se trouve juste à côté de Chidorigafuchi. Il suffit de traverser une passerelle piétonne pour se retrouver à l’entrée de l’immense torii du sanctuaire et de la large et longue allée qui y mène. La foule s’intensifie plus on approche du hall principal du sanctuaire, mais ça n’empêche pas d’apprécier l’effet de cadrage que forme la grande porte juste avant le hall sur le paysage de fleurs qui se révèle petit à petit devant nous. Je resterais assez peu de temps dans l’enceinte du sanctuaire car il était plus que difficile de cadrer ses propres photographies avec autant d’éléments mouvant autour de soi. Cette année, je ne suis volontairement pas allé voir les cerisiers au bord de la rivière Meguro car la foule doit y être encore plus dense sur des allées beaucoup plus étroites. Il y a quelques années, il n’y avait pas autant de monde à Naka-Meguro. Le lendemain, nous irons voir les cerisiers ailleurs, en dehors du centre de Tokyo, mais en attendant, je passe par le centre de Shibuya pour une autre foule entassée devant la station. Il faut croire que cette densité humaine m’attire sans cesse. Après cette fatigue accumulée à piétiner sans marcher sur les autres, je ne sais pour quelle raison l’envie de boire une bière pression bien fraîche me prend soudainement (生きれば生きるほど生ビールはうまい!).

Je découvre grâce à YouTube le morceau Exit A8 (A8番出口) d’une jeune compositrice et interprète appelée Noa (乃紫) que je ne connaissais pas. Elle a sorti une bonne dizaine de singles mais pas encore d’albums ou de EP. Le morceau Exit A8, qui doit certainement faire référence à la sortie débouchant sur Hachiko (ハチ公口) de la station de Shibuya si on lit les paroles, a une composition rock relativement classique mais bien maîtrisée, et le chant de Noa est très convaincant et engageant. La fiche Wikipedia donne très peu d’information sur sa jeune carrière mais note un point qui m’intéresse sur ses influences. Lors d’une interview avec le journaliste de la presse musicale Tomonori Chiba (柴那典), de Rockin’on Japan entre autres, elle a cité Sheena Ringo, Tokyo Jihen et Radwimps comme influences de sa musique. Je suis donc en terrain connu, et me réconforte dans cette idée que de nombreuses jeunes compositrices et interprètes rock ont été influencées par la liberté artistique de Sheena Ringo, du moins par sa première partie de carrière.

Toujours dans le rock japonais, mais plus underground, je reviens vers la musique du groupe SOM4LI (ソマリ) avec un nouveau morceau intitulé (I’m) SICK OF IT. J’avais déjà parlé de ce groupe basé à Tokyo et composé de quatre membres: Rio Shimamoto (également du groupe Strip Joint), Mako et Risako (de feu Ms.Machine) et SHV du groupe KLONNS. C’est dommage que le groupe Ms.Machine se soit dissolu, mais je me réconforte en quelque sorte avec les nouveaux morceaux de SOM4LI qui arrivent malheureusement au compte-gouttes. J’imagine bien que les membres du groupe sont déjà occupés leurs formations respectives. Mako a par exemple une activité principale en tant qu’artiste électronique de style Witch House, sous le nom 1797071. Elle écrit également les paroles des morceaux de SOM4LI et chante. Le style général de SOM4Li et de ce morceau en particulier est brut, que ça soit dans le chant de Mako ou les guitares bruitistes qui l’accompagnent rappelant le rock alternatif américain. J’aime beaucoup la dernière partie du morceau où elle crie dans ce qui ressemble à une complainte répétitive.

sakura overload (un fleuve urbain)

Les sakura étaient cette année comme une belle princesse qui se fait attendre à une réception (ou comme une rockeuse en kimono qui tarde à monter sur scène). Les cerisiers en fleurs se sont fait attendre en arrivant beaucoup plus tard que d’habitude, et en bouleversant par la même occasion l’organisation des diverses festivités ponctuelles accompagnant leur arrivée. La floraison est aussi imprévisible qu’éphémère et on nous avait assez répété à la télévision que ce week-end était le moment ou jamais pour apprécier les cerisiers en fleurs cette année. On sait que pluie et vent nous attendent la semaine prochaine, et il faudra être stratégique pour pouvoir profiter pleinement des paysages fleuris avant le point de non-retour. Cette présentation de la situation semble bien dramatique mais il n’en est rien. Cela fait 25 ans que je vois des cerisiers en fleurs tous les ans et l’effet de surprise s’est quelque peu estompé. Malgré cela, nous restons tout de même comme hébétés devant la beauté de ces cerisiers quand ils sont à leur pic de floraison. Je me demande bien quel effet addictif ces arbres parviennent à nous transmettre. On ne se lasse pas de les regarder et on éprouve à chaque fois le besoin renouvelé de partir à leur recherche, que ça soit dans l’environnement urbain proche de nous ou dans les campagnes aux alentours de la ville. Nous essayons en général de profiter des deux. Et les Sakura ne sont jamais aussi beaux que quand ils se réunissent pour former des toits ou des tunnels. L’avenue Meiji entre les carrefours de Tengenjibashi et de Shibuyabashi est trop large pour que les cerisiers de chaque coté se rejoignent pour former un tunnel mais l’endroit n’est en pas moins magnifique en cette période. Les cerisiers sont ensuite plus petits et moins fleuris entre Shibuyabashi, au niveau de la salle de concert Liquidroom que je montre en photo, et la station de Shibuya. L’avenue Meiji est souvent le premier endroit où je vais admirer les cerisiers en fleurs et naviguer cette rivière urbaine en voiture est à chaque fois une belle expérience.

Et pour accompagner la beauté parfois oppressante des cerisiers, je sélectionne quatre morceaux à tendance hip-hop plus ou moins marquée. Je n’avais jusqu’à maintenant jamais vraiment eu l’idée d’écouter la musique du groupe Kroi. Je pensais, pour je ne sais quelle raison, que leur style musical n’était pas pour moi. Je me rends compte que c’était une erreur en écoutant le single Hyper sur un EP du même nom sorti en Octobre 2023. Kroi est un groupe de Tokyo créant sa musique en fusionnant les genres, entre rock et hip-hop mais aussi Funk, Soul et R&B. L’idée du groupe est de créer une nouvelle musicalité en mélangeant tous ces styles musicaux et c’est en fait la signification de leur nom de groupe. Kroi vient du mot Kuroi (黒い), « noir » en japonais, qui est la couleur résultante lorsque toutes les couleurs sont mélangées. Kroi a été fondé en 2018 par Reo Uchida (内田怜央), au chant et guitare, et Yūki Hasebe (長谷部悠生), à la guitare, accompagnés de Masanori Seki (関将典) à la basse, Hidetomo Masuda (益田英知) à la batterie et Daiki Chiba (千葉大樹) aux claviers. Le morceau Hyper que j’écoute en ce moment correspond tout à fait à cet esprit de fusion musicale. Le tout début du morceau commence par une guitare très lourde et la voix sombre de Reo Uchida me rappellerait presque le grunge hardcore d’Alice in Chains, mais l’ambiance du morceau change très vite avec une voix rappée et un rythme extrêmement dynamique mélangeant même les cuivres. Ce melting-pot musical a une construction certes atypique mais montre une très grande maîtrise. Ce style aux apparences chaotiques n’est pas sans me rappeler l’approche stylistique du Millenium Parade de Daiki Tsuneta. Je ne soupçonnais pas que Kroi créait une musique aussi dense et maîtrisée. On reste ensuite dans les ambiances hip-hop avec le morceau Jibun no Kigen ha Jibun de Toru (自分の機嫌は自分で取る) d’ASOBOISM, sur son album YOLO sorti en Août 2023. ASOBOISM est compositrice, interprète et rappeuse originaire de Totsuka dans préfecture de Kanagawa. Je connaissais son nom depuis quelque temps car elle évolue dans les cercles du hip-hop féminin proche d’Akko Gorilla (あっこゴリラ) et de Valknee dont j’ai déjà parlé sur ce blog. Akko Gorilla participe d’ailleurs au morceau d’ASOBOISM que j’écoute en ce moment avec une autre rappeuse nommée CLR. J’aime beaucoup les nappes musicales enveloppantes et vaporeuses de ce morceau et la manière dont la voix rappée d’ASOBOISM et des deux invités viennent s’y intégrer d’une manière parfaitement fluide. C’est un superbe morceau qui a même un petit quelque chose de relaxant. Le morceau de Valknee, Not For Me, de son premier album Ordinary sorti le 10 Avril 2024, a en comparaison une trame musicale de synthétiseur beaucoup plus agressive. J’ai toujours aimé cette approche sans concession mélangée à la voix rap tout à fait atypique de Valknee, mais j’avais un peu perdu le fil ces dernières années. J’aime beaucoup ce morceau, même si je ne suis pas certain d’écouter tout l’album. De l’album, le morceau Loose est très particulier dans sa manière de forcer les fins de phrases, mais démontre qu’elle maîtrise extrêmement bien son flot. Elle n’intègre pas de coréen dans ses morceaux, ce qui est un peu dommage car j’adore quand elle le mélange avec le japonais, mais elle garde un certain accent de Kanagawa. DAOKO vient de sortir un nouveau single Tenshi ga Itayo (天使がいたよ) qui est assez génial, très rythmé et dense musicalement dans une ambiance de néons que j’adore. Ce morceau sera à priori sur son cinquième album Slash-&-Burn qu’elle vient d’annoncer et qui sortira le 22 Mai 2024, accompagné d’une petite tournée de deux dates à Osaka et Tokyo en Juin à laquelle j’aimerais bien assister, si le fan club (dont je ne fais pas partie) ne raffle pas toutes les places. Vue qu’elle n’a pas sorti de nouvel album depuis quatre ans, avec Anima, j’imagine qu’il n’y aura pas beaucoup de places disponibles. Ça fait en tout cas plaisir d’écouter ce genre de morceaux où DAOKO semble trouver parfaitement sa place, à mi-chemin entre la J-POP mainstream et une approche musicale beaucoup plus indépendante.

city scape with film 9
(une disparition)

Je suis moi-même surpris de revoir la tour Nakagin de Kisho Kurokawa parmi les photographies argentiques prises il y a quelques années. J’aurais dû mal à dater exactement les quelques photos de la tour que je montre ci-dessus, mais c’était en tout cas avant l’annonce officielle de sa disparition définitive. Le parc Hamarikyū se trouve dans le même quartier que Nakagin, en se rapprochant de la baie. Je me souviens avoir observé pendant un petit moment le chat de la septième photo. Il s’y promenait comme s’il était le propriétaire, d’un air sûr et d’une allure royale, d’autant plus qu’il n’y avait pas un chat dans ce parc, sauf lui et moi. Enfin, moi, je ne suis pas un chat, sauf la nuit dans mes rêves. Je m’échappe toujours par les toits. La partie Sud de la résidence est plus basse et donne facilement accès au parc adjacent qui donne ensuite un accès facile à la rue. Découvrir la ville la nuit avec les yeux d’un chat est une expérience très différente de ce que j’éprouve le jour dans les rues de Tokyo. Il arrive parfois que je me vois rentrer du bureau d’un pas rapide, les écouteurs dans les oreilles et le regard fixé vers l’avant. Il ne me voit pas car je me cache toujours à son passage. Je disparais dans la pénombre. Je l’observe tranquillement puis repars quand la voie est libre. Je ne peux malheureusement pas ramener d’images de ces virées la nuit. Ces images ne me restent pas en tête pour pouvoir les raconter ensuite, car je ne me souviens jamais de mes rêves. Les autres photographies du billet se mélangent à celles d’Hamarikyū et de la tour Nakagin. Elles ont été prises dans le parc Inokashira et à Shibuya.