果てまでゆく荒野をかける

Les cactus sont arrivés à la maison il y a quelques semaines et ils y vivent paisiblement sans faire de bruit et en ne dérangeant personne à part ceux qui ont la mauvaise idée de s’en approcher de trop près. On a de plus en plus de plantes à la maison et notre appartement va bientôt devenir une jungle. C’est moi qui m’en occupe principalement et qui prend toutes les responsabilités quand une d’entre elles décide de nous quitter parce qu’on pas su bien la comprendre. Je passe parfois beaucoup de temps le week-end sur le balcon à changer les pots quand ceux-ci deviennent trop petits pour certaines plantes qui se sont décidés à devenir envahissantes, ou à redresser d’autres avec des tiges métalliques pour leur redonner une fière allure ou les remettre sur le droit chemin. Mais peu importe les garde-fous qu’on peut leur imposer, elles finissent toujours par grandir à leur manière sans nous demander notre avis. Une chose est sûre cependant, on se sent bien à vivre parmi elles.

Les autres photographies du billet sont prises dans les environs du musée Watari-Um. Une grande fresque se présente d’abord sur la façade arrondie de l’ambassade du Brésil. En face du musée, les formes géométriques colorées de Harajuku Kindergarden m’attirent toujours car elles restent très vives. On doit cette architecture à l’atelier Ciel Rouge Creation fondé par Henri Gueydan. Dans cette même rue, je capture discrètement d’autres couleurs vues sur les kimonos de deux demoiselles. Je vois également d’autres couleurs vestimentaires à travers la vitrine d’une petite boutique. L’inspiration des ces vêtements provient ici du manga Jojo Bizarre Adventure (ジョジョの奇妙な冒険) de Hirohiko Araki (荒木飛呂彦). La dernière photographie du billet me fait repasser dans une vieille baraque joliment décorée de personnages dessinés et de plantes envahissantes. Il n’y a par contre pas de cactus.

Une émission radio dont je n’ai pas retenu le nom passe un morceau récent de la rappeuse japonaise Awich. Il s’intitule Raisen in Okinawa et est interprété à quatre voix. Celle d’Awich d’abord, puis celles de Tsubaki (唾奇), OZworld et Chico Carlito. En écoutant ce morceau pour la première fois, je suis tout de suite épaté par l’ambiance qui s’en dégage. La puissance du hip-hop d’Awich, dans ses mots et son phrasé, me fait dire que je devrais me pencher un peu plus souvent sur sa musique. Je ne connais pas vraiment les autres intervenants sur ce morceau, mais l’émission de radio que j’écoutais semblait dire qu’ils étaient tous d’Okinawa, comme Awich. Je n’écoute pas beaucoup de hip-hop mais ce genre de petites piqûres de rappel font beaucoup de bien. J’aime beaucoup le hip-hop à petite dose, en choisissant ce genre de morceaux particulièrement inspirés. La trame de fond composée de sanshin apporte également beaucoup à ce morceau.

Yua Uchiyama (内田結愛) est une des membres du groupe d’idoles alternatives à tendance shoegaze RAY, dont je parle assez régulièrement sur ces pages. Je la suis sur Twitter depuis quelques temps, car elle présente régulièrement les albums qu’elle écoute, assez souvent des albums clés de l’histoire du rock. Je suis souvent en phase avec ses goûts et je me demande si ce sont des albums qu’on lui conseille ou qu’elle découvre par elle-même. Son expérience d’écoute est tout à fait authentique car elle écrit en général un rapport d’écoute donnant en détail ses impressions. L’annonce sur son compte Twitter d’un premier CD solo de deux titres intitulé simplement I m’a tout de suite intrigué car je me suis demandé si le style allait être similaire à celui de RAY. Le premier morceau intitulé Y est plutôt pop mais j’y ressens un certain déséquilibre musical qui me plaît bien. Il y a quelque chose d’atypique dans l’approche et l’ambiance de ce morceau, dans la composition au clavier accompagnant la voix d’Uchiyama. Le deuxième morceau Kurū (狂う) a par contre une ambiance rock, mais déconcerte tout de suite avec une introduction librement inspirée d’un chant religieux chrétien. Mais cette introduction idyllique dérape très vite et se laisse envahir pour les larsens des guitares qui viennent prendre rapidement le dessus. Le phrasé d’Uchiyama est rapide et maîtrisé. Je me dis tout de suite que sa manière de chanter et de prononcer certains mots me rappellent Haru Nemuri (春ねむり). Je vérifie rapidement les informations accompagnant la vidéo sur YouTube et je confirme qu’Haru Nemuri a en effet écrit les paroles, composé la musique, programmé et arrangé ce morceau. L’influence se ressent très fortement et je trouve que Yua Uchiyama assure très bien. Elle pourrait très bien être la soeur d’Haru. Je n’étais pas vraiment convaincu par les morceaux récents d’Haru Nemuri mais celui-ci est vraiment très bon. Je pense que la musique d’Haru Nemuri demande ce genre d’orchestration rock, comme sur son premier album Haru to Shura (春と修羅). J’aimerais vraiment qu’elle reparte vers cette direction.

Shibuya za rock

Les deuxième et troisième photographies de ce billet sont prises depuis un des derniers étages du Department Store PARCO de Shibuya. La troisième photographie montre une vue en contre-plongée de l’ancien Cinéma Rise reconverti en salles de concert WWW et WWWX. J’ai toujours aimé ce petit bâtiment atypique conçu par l’architecte Atsushi Kitagawara et je suis particulièrement satisfait de voir qu’il a pu trouver une seconde vie après la fermeture du cinéma. Tokyo est en général sans pitié pour les vieux buildings qui faiblissent même s’ils ont été créés par des architectes reconnus. Je suis en fait venu au PARCO pour voir une petite exposition consacrée au magazine mensuel gratuit Kaze to Rock (風とロック). L’exposition intitulée Kaze to Rock to PARCO: Minna Waratteru (風とロックとPARCO:みんな笑ってる) se déroulait du 28 Avril au 8 Mai 2023 au PARCO Museum Tokyo situé au quatrième étage de PARCO. Je pensais d’abord que cette galerie se trouvait au dernier étage d’où le petit détour qui m’a permis de prendre les photographies ci-dessus. La galerie est en fait perdue au milieu des boutiques du grand magasin. J’avais déjà très brièvement évoqué le magazine Kaze to Rock après avoir acheté le livres de photographies de Mika Ninagawa car on y montrait une photographie de Sheena Ringo accompagnée des acteurs Shun Oguri, Lily Franky et Kenichi Matsuyama. Cette photographie était en fait tirée d’une édition spéciale du magazine Kaze to Rock sortie en Novembre 2006 et intitulée Kaze to Rock to United Arrows (風とロックとユナイテッドアローズ).

Le magazine Kaze to Rock a été créé en 2005 par le directeur créatif Michihiko Yanai (箭内道彦). Michihiko Yanai est originaire de Koriyama dans la prefecture de Fukushima. Après des études de design à l’Université des Beaux-arts de Tokyo, il travaille d’abord pour la grande agence publicitaire Hakuhodo et devient ensuite indépendant en 2003, créant sa propre agence Kaze to Rock Co. Limited qui est toujours active. Ce nom n’est pas choisi par hasard car en plus d’être professeur à l’Université des Beaux-arts de Tokyo, il est également guitariste dans un groupe de rock, animateur d’émissions radio, organisateur d’évènements musicaux, entre autres. On lui doit notamment la fameuse campagne publicitaire au long court « No Music No Life » pour Tower Records. Il n’y a pas de doutes que Michihiko Yanai vit et respire pour cette musique rock, et c’est dans ce contexte là qu’il a créé le magazine mensuel Kaze to Rock en 2005, sans but lucratif et même à perte car il s’agit d’un magazine gratuit. A vrai dire, je ne sais pas où il est distribué car je ne l’ai jamais vu disponible, au Tower Records par exemple, mais il y a en tout 100 numéros publiés. Vu le nombre de numéros, la publication n’est certainement pas régulière. En tant que rédacteur en chef du magazine, Michihiko Yanai semble choisir sans contrainte les artistes et groupes dont il veut parler sur ses pages. On reconnaît tout de suite cette liberté créative dans le format du magazine donnant une grande place aux photographies. L’exposition permet de feuilleter un grand nombre de numéros du magazine et je remarque que les pages de photos consacrés au groupe ou à l’artiste en couverture sont très importantes, de quarante a cinquante pages environ suivant le numéro. Cela fait ressembler ce magazine à un véritable livre d’art plutôt qu’à un magazine classique que l’on trouverait en librairie. Outre la possibilité de feuilleter ces magazines, l’exposition montre de nombreuses photographies sur écrans géants dans plusieurs pièces avec des éléments d’explication et de chronologie.

Une des raisons pour laquelle j’ai fait le déplacement était de voir deux numéros du magazine consacrés à Sheena Ringo et à Tokyo Jihen, car je savais qu’ils étaient visibles parmi les magazines présentés à l’exposition. J’ai pris mon temps pour les feuilleter pendant l’exposition. On ne pouvait malheureusement (ou heureusement) pas les prendre en photo. J’ai tout de suite été interpellé par la qualité des photographies qu’on y montrait. Beaucoup de photos se ressemblent, comme des versions différentes d’une même situation, mais sont prises sous des angles différents et avec des expressions du visage semblant être prises sur le vif. Certaines photographies font des plans resserrés sur des objets ou des parties du corps. Ce ne sont clairement pas des photos qu’on trouverait dans un magazine musical traditionnel. J’ai eu forcément très envie de me procurer ces numéros que j’ai trouvé assez facilement sur Mercari pour pas très chers. La plupart des photographies des deux magazines m’étaient inconnues et je les feuillette tranquillement et avec beaucoup d’attention comme des petits trésors. Le numéro avec Tokyo Jihen est celui du 1er Septembre 2007, ce qui correspond à la sortie de l’album Variety (娯楽). Les photographies sont prises par Kazunari Tajima (田島一成) qui a déjà capturer le groupe pour le numéro de Mars 2010 du magazine Switch. Kazunari Tajima a également photographié Sheena Ringo pour le numéro de Février 2003 de Rockin On Japan à l’occasion de la sortie de son troisième album KSK. C’est également un magazine que j’ai dans ma petite collection. Le numéro de Kaze to Rock consacré à Sheena Ringo est celui du 1er Juin 2009. Ce numéro correspond à la période où elle revenait vers sa carrière solo en sortant l’album Sanmon Gossip (三文ゴシップ). Les photographies sont également superbes, notamment celles en plan serré dont une est utilisée en couverture du magazine. Elles sont du photographe Jin Ohashi (大橋仁), qui a également pris en photo Sheena Ringo pour le magazine Switch du mois d’Avril 2000 sur une série intitulée In the Room. Sur ces deux magazines, j’aime aussi beaucoup le titrage avec une police de caractère très stylisée. L’organisation même du magazine me fait penser à un fanzine et je pense que c’est le souhait de son créateur car il a fait le choix de ne parler que des artistes qu’il aime. Feuilleter ces magazines me relance dans l’idée de faire ce genre de fanzine, si j’en avais le temps, le courage et surtout l’inspiration.

Continuons encore un petit peu en musique avec un autre album de Blankey Jet City que j’écoute beaucoup en ce moment, Love Flash Fever sorti en 1997. J’ai acheté cet album au Disk Union de Shimo-Kitazawa en même que l’album solo de Kenichi Asai, Red Snake Shock Service, dont je parlais récemment. Vous l’aurez peu être compris, je suis actuellement dans une période rock très pointue allant de Kenichi Asai et ses groupes jusqu’à Buck-Tick que je continue à beaucoup écouter depuis quelques mois. Cette profusion de guitares explique mon besoin de me dégourdir de temps en temps les oreilles avec une musique plus pop, comme celle mentionnée dans le billet précédent. De cet album Love Flash Fever, je connaissais déjà plusieurs morceaux déjà présents sur la compilation Blankey Jet City 1997-2000, à savoir Gazoline no Yurekata (ガソリンの揺れかた), Planetarium (プラネタリウム), Spaghetti Hair et Dennis Hopper (デニスホッパー). Ces morceaux comptent dans les meilleurs de l’album mais celui que je préfère est le deuxième intitulé Pudding. Il n’est étonnement pas présent sur la composition mentionnée ci-dessus. Il s’agit d’un morceau plein de la furie typique du groupe. Il y a une urgence et une frénésie assez géniale, accompagnée par des riffs de guitares particulièrement incisifs et Kenichi Asai accélérant démesurément son phrasé. J’aime aussi beaucoup le quatrième morceau Minagoroshi no Trumpet (皆殺しのトランペット) car il a une composition singulière démarrant par un monologue de Kenichi Asai accompagné par un son de trompette et une basse, pour se transformer dans une deuxième partie vers une composition plus classique. J’aime beaucoup l’atmosphère sombre de ce morceau ponctuée par des cris d’Asai. L’ambiance est très différente du morceau que je mentionnais précédemment, et ils forment à eux deux les pics de cet album. Enfin, il y a beaucoup d’autres très bons morceaux sur cet album, comme le cinquième intitulé Kanjō (感情) toujours avec cette rage naturelle et ses émotions fortes, qui se sont ensuite un peu apaisées plus tard sur ses albums solo. Et il y a ce morceau intitulé Dennis Hopper où le chant de Kenichi Asai n’est pas des plus faciles à apprécier aux premiers abords. Mais la deuxième partie du morceau est assez fantastique et me donne à chaque fois des frissons.

アクアマリン・コカコーラレッド

Une Dodge Challenger aquamarine au repos sans conducteur apparent derrière ses vitrages teintés, la moto futuriste de Bulma sur une collection de t-shirts de la série Dragon Ball pour la marque Graniph, des stickers à profusion envahissant des poteaux électriques à Jingūmae, cinq chanteuses et danseuses de K-Pop faisant la promotion d’une marque de jeans sur la devanture d’une boutique de Cat Street, un bonsaï de taille réelle installé à l’entrée d’un nouvel immeuble toujours en construction près de la rue Kotto, une interdiction de skater en rond dans une ville qui a pourtant vu défiler quelques champions nationaux et une révolution pacifiste en cours de décrépitude. L’arrondissement de Shibuya ne manque pas d’imageries en tout genre et c’est ce qui me fait toujours y revenir, appareil photo en mains. Outre leur attrait esthétique, ces images de rue attisent ma curiosité et je les prends souvent en photo pour qu’elles m’ouvrent plus tard des nouvelles portes vers des choses qui me sont peut-être inconnues ou peu familières. C’est une chose que de prendre des photographies et de s’en contenter, et c’en est une autre que de chercher où ces photographies peuvent nous mener. Je me demande même si pour moi prendre des photos n’est pas qu’un prétexte pour partir en recherche. Les photographies peuvent parfois être des liens directeurs vers d’autres mondes dont on ne soupçonnait pas l’intérêt qu’on pourrait éventuellement y trouver.

Les cinq filles qui posent sur l’affiche de la devanture du magasin de jeans Levi’s s’appellent Minji, Hanni, Danielle, Haerin et Hyein. Elles composent le groupe de K-Pop mondialement connu NewJeans qui n’a fait ses débuts que très récemment en Juillet 2022. Elles ont déjà un très grand succès en n’ayant sorti que quelques singles, un EP mais pas encore d’album complet. Leur succès tient peut être au fait qu’elles représentent une nouvelle génération dans la musique pop coréenne, passant après des dizaines de groupes répétant les mêmes recettes musicales et se transformant rapidement en purs produits commerciaux. Côté relations commerciales, Newjeans se surpassent déjà car, malgré leur jeune existence, le groupe représente de nombreuses marques, comme Levi’s, Coca Cola ou la marque d’électronique sud-coréenne LG. Mais ça n’est pas tout car chaque membre de Newjeans est également ambassadrice de marques de luxe. Hanni représente Gucci et Armani Beauty, Danielle s’affiche pour les marques Burberry et YSL Beauty, Hyein pour Louis Vuitton, Minji pour Chanel Corée et Haerin pour Dior. Il est difficile de faire mieux comme couverture commerciale, mais on sait aussi que ces marques de luxe se copient beaucoup entre elles. Newjeans passe même une étape supplémentaire en sortant un nouveau single intitulé Zero entièrement publicitaire pour la boisson sans sucre de Coca Cola. En plus de voir des cannettes de Coca Cola Zero dans la vidéo du morceau, le refrain utilise clairement le nom de la marque. Ce qui est particulièrement agaçant pour moi, c’est que malgré tous ces artifices commerciaux qui nous bouchent la vue, le morceau à tendance dubstep qui en résulte est excellent, assez loin de l’excès musical qui caractérise la plupart du temps la K-Pop. Et comme je me trouve à beaucoup aimer ce morceau Zero après l’avoir entendu une première fois à la radio, je lâche progressivement les préjugés qui m’empêchaient volontairement d’écouter les autres singles du groupe comme OMG et Ditto. Newjeans rentre ainsi, au côté de 2NE1, dans le cercle très sélectif des groupes de K-Pop dont j’aime beaucoup quelques morceaux.

J’arrive progressivement à un point d’entente avec Zoa sur les anime que l’on regarde. Je ne regarde pas beaucoup d’anime mais il est vrai que ces derniers mois, j’en ai regardé plus qu’à l’accoutumée. Chainsaw Main d’abord, puis Spy x Family et maintenant Oshi no Ko (推しの子) qui a un grand succès actuellement. Je ne suis pas assez informé sur les manga et anime pour confirmer s’il y a une amélioration de la qualité ces derniers temps, mais c’est du moins l’impression que ça me laisse. Ils sont tous disponibles sur NetFlix ce qui facilite beaucoup le visionage. Le premier épisode d’Oshi no Ko faisant plus d’une heure était d’abord sorti au cinéma et le fait que Yoasobi en compose et chante le thème musical avait été apparemment gardé secret. Dans cet anime, on y parle du monde des idoles. Et comme pour Bocchi The Rock, que je regarde aussi en ce moment, traitant du monde du rock indé à Shimo-Kitazawa, Oshi no Ko donne de nombreux indices et explications sur la manière dont fonctionne le monde très codifié des idoles, sans hésiter à en montrer le pire. Je ne raconterais pas l’histoire d’Oshi no Ko car elle démarre par une situation des plus improbables, qui fait à mon avis toute la beauté disruptive des manga. J’aime aussi beaucoup les thèmes d’ouverture et de fermeture de chaque épisode de l’anime. J’ai déjà mentionné Yoasobi avec un morceau composé par Ayase intitulé tout simplement Idol (アイドル). Le morceau est hyper dynamique et assez typique de l’empreinte musicale du groupe. Pourtant, la manière de chanter d’Ikura est changeante comme un caméléon avec des parties presque parlées hip-hop ressemblant à de la K-Pop et d’autres plus proches de l’image qu’on peut avoir de la musique d’idoles. J’aime aussi beaucoup le thème de fin intitulé Mephisto (メフィスト) par un groupe nommé Queen Bee (女王蜂). Queen Bee est un groupe japonais rock originaire de Kobe fondé en 2009 que je connaissais par la présence d’Avu-chan (アヴちゃん) au chant. A ma grande surprise, je me rends compte maintenant qu’Avu-chan a également créé un autre groupe nommé Gokumontō Ikka (獄門島一家) pendant une période de hiatus de Queen Bee. Et dans ce super-groupe Gokumontō Ikka, j’y retrouve quelques noms de musiciens qui me sont très familiers comme un certain Ryosuke Nagaoka (長岡亮介 aka Ukigumo) de Tokyo Jihen et de Petrolz, ou encore le batteur Tatsuya Nakamura (中村達也) de feu Blankey Jet City. En attendant de partir à la découverte de Gokumontō Ikka, j’apprécie Mephisto et les envolées de voix d’Avu-Chan.

危険すぎる香りで

C’était une journée particulièrement nuageuse sur Tokyo. J’utilise volontairement préposition ‘sur’ car je place ces nuages en superposition au dessus d’images de la ville. Ces nuages superposés sur ces photographies prises à Shibuya ne se trouvent pas seulement dans le ciel mais envahissent pleinement les rues. J’aime beaucoup ajouter ce genre de fumées et de nuages comme partie intégrante du paysage urbain. Peut-être parce qu’ils viennent rendre les contours de la ville plus flous et insaisissables. J’y vois également une notion de secret (秘密), de choses cachées des yeux de tous. Cette notion de secret n’est pas étrangère à la tentative de création de pages cachées dont j’ai fini par donner la piste sur ma page En savoir plus. Par extension, ce blog tout entier devrait peut-être se cacher derrière des draps de fumées nuageuses. Un jour peut-être il le sera.

Le chat noir sur la photo ci-dessus sert de couverture à l’album Rod Snake Shock Service de Kenichi Asai (浅井健一) sorti en 2007. Je l’ai trouvé au Disk Union de Shimo-Kitazawa et l’ai choisi un peu au hasard sans ne connaître aucun de ses titres. Après la séparation de Blankey Jet City, Kenichi Asai a formé plusieurs groupes comme Jude ou Sherbets dont je parlais récemment, mais a également sorti quelques albums solo comme celui ci-dessus. On ne peut pas dire que l’ambiance rock de sa carrière solo diffère franchement de ce qu’on connaît de Blankey Jet City, car le jeu de guitare et la voix si particulière de Kenichi Asai nous rappellent tout de suite à qui on a affaire. Le style général est tout de même ici un peu plus apaisé. Ce sont certainement les années qui sont passées par là. Mais on n’est pas non plus très dépaysé. Les guitares n’en sont pas moins lourdes et incisives, notamment sur les deux premiers morceaux Fixer et Dead Rock Star, et c’est un vrai plaisir de se plonger les oreilles dans ses sons là. Il y a toujours ce quelque chose d’insolemment naturel dans le chant et le jeu de guitare d’Asai. L’ensemble se tient très bien mais il y a quand même des morceaux qui sortent du lot, comme le premier morceau Fixer, le troisième Black Cherry, le huitième vers la fin de l’album Ashita (明日) qui fait intervenir des instruments classiques ou encore l’avant dernier morceau Santa ga Uchi ni Yattekite (サンタが家にやって来て). Émotionnellement, le morceau Ashita est peut-être le plus poignant et celui qui est le plus différent du reste de l’album, certainement par la présence du violon et de chœurs à certains moments. Le violon est joué par Mio Okamura (岡村美央) tandis que les chœurs sont chantés par Tabasa Hayashi (林束紗), également à la basse sur l’album, qui accompagne d’ailleurs Kenichi Asai sur d’autres albums comme notamment celui intitulé Chelsea sorti en même temps que Rod Snake Shock Service. Ce sont en fait les volumes 1 et 2. En écoutant cet album, je me convainc moi-même que je peux choisir n’importe quel album de Kenichi Asai et de ses groupes au hasard, sans être déçu par ce que je vais écouter. A suivre donc. Cette notion de danger excessif (危険すぎる) est un thème récurrent car il s’agit également d’un single sur son premier album solo Johnny Hell sorti en 2006, sur lequel une certaine Sheena Ringo chantait les chœurs. Elle l’avait d’ailleurs inclus sur la compilation Ukina (浮き名) sortie en 2013.

東京で一番美しいロックバンドだった

C’était le plus beau groupe de rock de Tokyo (東京で一番美しいロックバンドだった). J’ai vu écrite cette phrase à de nombreuses reprises sur Twitter après le dernier concert du groupe For Tracy Hyde (FTH) le Samedi soir 25 Mars 2023 dans la salle WWWX près du PARCO à Shibuya. Je l’ai aussi repris sur mon message Twitter après l’avoir vu écrite sur le compte Twitter de Yua Uchiyama (内山結愛) du groupe RAY pour lequel écrivent notamment Azusa Suga et Mav, respectivement compositeurs, guitariste et bassiste de FTH. Je voulais également rendre hommage à un excellent groupe de rock indépendant qu’il est bien dommage de voir partir. J’ai toujours considéré For Tracy Hyde (FTH) comme les chefs de file de ce rock indépendant tokyoïte penchant très fortement sur les ambiances shoegazing que j’aime tant. FTH s’inscrit très bien dans la lignée de grands groupes des années 1990 comme Ride, dont le leader Mark Gardener a d’ailleurs mixé le dernier album Hotel Insomnia, comme en quelques sortes un passage de relai. Autre détail intéressant, le leader et guitariste de FTH, Azusa Suga, portait sur scène un t-shirt de Lush, autre groupe important du shoegazing anglais de cette époque là.

Peu après la sortie de l’album Hotel Insomnia, leur meilleur album à mon avis, on avait été surpris d’apprendre l’intention du groupe de se séparer. Ça m’avait notamment pousser à aller les voir lors d’un mini-live au magasin Tower Records de Shibuya le Samedi 21 Janvier 2023, en pensant que ça serait la dernière fois que je pourrais les voir. J’avais tout de même tenté d’acheter une place pour leur dernier concert du 25 Mars à Shibuya. Il n’était par chance pas encore complet à ce moment là. Comme j’ai acheté ma place un peu tard en Janvier, j’étais placé vers le fond de la salle mais ça ne m’a bien sûr pas empêché de voir le groupe sur scène et d’apprécier pleinement la qualité musicale de ses compositions. Au fur à mesure des albums, j’ai appris à apprécier pleinement la voix d’Eureka qui s’inscrit vraiment très bien dans les musiques de ce dernier album. Sa voix y est par moment pénétrante. Pendant le concert, 19 morceaux ont été interprétés dont la quasi-totalité d’Hotel Insomnia dans l’ordre, ou presque. Vers le milieu du concert, ils sont revenus vers quelques morceaux plus anciens des albums précédents comme New Young City, Ethernity et Film Bleu, leur premier album. Ils n’ont par contre pas interprété de morceaux de leur deuxième album he(r)art de 2017 qui est celui par lequel j’ai découvert le groupe.

Azusa Suga s’est adressé plusieurs fois à la foule dans la salle et sur YouTube car le concert était retransmis gratuitement en direct. FTH a eu la bonne idée de maintenir le concert sur YouTube, ce qui fait qu’il y est toujours disponible en intégralité. On ne saura pas les raisons exactes de la séparation du groupe mais chaque membre nous a expliqué leurs projets musicaux futurs. Je pense que FTH devait arriver à une période de maturité où les évolutions futures devenaient moins claires. C’est dommage car un morceau comme House Of Mirrors sur Hotel Insomnia, assez différent du reste de l’album par son rythme plus pop et son passage hip-hop, était une direction très intéressante qui s’est révélée puissante pendant le concert. Eureka s’y est montrée beaucoup plus gestuelle, alors qu’elle se montre plutôt réservée sur scène. Sa voix est bien sûr omniprésente sur pratiquement tous les morceaux, sauf Sirens interprété seulement par Azusa Suga, mais elle parle très peu pendant les courts intermèdes avec le public. Azusa Suga lui fait d’ailleurs une gentille petite remarque sur le fait qu’elle était censée prendre la parole un peu plus tôt pendant le concert. Mais FTH est un groupe indé, d’autant plus de shoegazing, donc pas censé s’attarder à distraire les foules. On sent quand même qu’Azusa Suga voudrait que le public soit plus démonstratif, comme un public étranger par exemple. Il parle très bien anglais et nous a fait part de son regret de ne pas avoir tourné plus à l’étranger. Le public japonais se montre bien présent mais les modes d’expression sont différents, d’autant plus que l’on vient de sortir de la crise sanitaire. Il est maintenant autorisé de pousser la voix, ce qui est tout de même une bonne chose et la foule ne s’en est pas privée. La concert a duré environ deux heures qui ont passé trop vite, malgré les deux rappels. Vers la fin du concert, le groupe a posé devant le public pour une photo souvenir. J’arrive d’ailleurs à m’apercevoir vers le fond de la salle sur la gauche (pour ceux qui peuvent me reconnaître).

Musicalement, le concert était proche des versions présentes sur les albums avec des démarrages et fins de morceaux parfois différents ou plus longs. Le public était très varié avec une majorité masculine, par rapport à des groupes comme Tricot par exemple. J’ai tendance à penser que FTH s’adresse aux Otakus de la musique indé shoegaze, ceux qui sont intransigeants sur la qualité de ce son rock. On sent qu’Azusa Suga est lui-même intransigeant sur la qualité des morceaux qu’il compose et nous dit même assez directement pendant le concert qu’il pense que certains morceaux sont meilleurs que d’autres. Ça fait toujours sourire le public car on est tous bien convaincu de la qualité de la musique qu’on est venu écouter ce soir. Je me reconnais plutôt bien dans ce public intransigeant, même si dans l’ensemble la moyenne d’âge devait être d’une dizaine d’années inférieure à mon âge. Ceci n’a de toute façon pas beaucoup d’importance. Ce concert était également l’occasion pour moi de rentrer à l’intérieur de l’ancien cinéma Rise conçu par l’architecte Atsushi Kitagawara, que j’ai maintes fois pris en photo de l’extérieur. En rentrant du concert à pieds, je réécoute une nouvelle fois l’album Hotel Insomnia de For Tracy Hyde pour faire durer un peu plus l’ambiance. Il faut vraiment que je continue à régulièrement assister à ce genre de concert, c’est un des enseignements que je tire de la crise sanitaire. Il faudrait même que je crée une catégorie Live report sur le blog. Et le mois prochain, ça sera le concert de Sheena Ringo. Mais en attendant, j’ré-écoute l’excellent album Spooky (1992) de Lush (j’avais un peu oublié la beauté de cet album) en écrivant ce petit compte-rendu de concert. Les photos ci-dessus sont les miennes (elles étaient autorisées pendant le concert), sauf les quatre dernières disponibles sur le compte Twitter du groupe et que je permets de montrer ici pour garder une trace de ce beau moment musical. Le concert est également disponible sur YouTube sur le compte du groupe, comme mentionné auparavant.

Pour référence ultérieure, ci-dessous est la setlist du concert final de For Tracy Hyde du 25 Mars 3023 au Shibuya WWWX:

1. Undulate, de l’album Hotel Insomnia
2. The First Time (Is The Last Time), de l’album Hotel Insomnia
3. Kodiak, de l’album Hotel Insomnia
4. Lungs, de l’album Hotel Insomnia
5. Estuary, de l’album Hotel Insomnia
6. Friends, de l’album Hotel Insomnia
7. Tsunagu Hi no Ao (繋ぐ日の青), de l’album New Young City
8. Kimi ni shite Haru wo Omou (君にして春を想う), de l’album New Young City
9. Sakura no En (櫻の園), de l’album New Young City
10. Interdependence Day – Part I, de l’album Ethernity
11. Heavenly (ヘヴンリイ), de l’album Ethernity
12. Sister Carrie, de l’album Ethernity
13. House Of Mirrors, de l’album Hotel Insomnia
14. Sirens, de l’album Hotel Insomnia
15. Milkshake, de l’album Hotel Insomnia
16. Subway Station Revelation, de l’album Hotel Insomnia
17. Leave The Planet, de l’album Hotel Insomnia
18. Can Little Birds Remember?, de l’album New Young City
19. Her Sarah Records Collection, de l’album Film Bleu