un été sur la péninsule de Kii (2)

Le building principal de l’hôtel Shima Kanko (志摩観光ホテル) où nous avons passé une nuit a vu sa construction se terminer en 1969. Possédant 200 chambres, il s’agissait à l’époque du plus grand hôtel de villégiature du Japon. Les empereurs japonais, de Showa à l’actuel, y ont fait un séjour tout comme la princesse Grâce de Monaco. L’hôtel a d’abord ouvert ses portes en 1951. Je montrais sur mon précédent billet le premier bâtiment de l’hôtel principalement construit en bois, réutilisé d’un hall de l’Arsenal Naval de Suzuka également conçu par Togo Murano. Le parc de l’hôtel est très bien entretenu et se trouve en même temps dans une végétation environnante extrêmement dense. Depuis l’hôtel, un petit chemin en escaliers donne accès au bord d’une partie de la baie. Sur les marches de l’escalier, les crabes rouges sont nombreux et s’écartent rapidement à notre passage pour se cacher. Cette parade de crabes est très amusante à regarder et je prends à malin plaisir à les observer dans leurs cachettes sous les marches. Ils me regardent, je les regarde. Je ressens qu’ils se demandent quoi faire à cet instant précis mais je décide de ne pas les embêter plus longtemps.

Un des meilleurs moyens de découvrir le paysage accidenté de la baie d’Ago est de partir en promenade en bateau. Depuis la station de Kashikojima, des petites croisières d’une quarantaine de minutes nous donnent une bonne vue d’ensemble des lieux. En chemin, nous apercevons les établissements Mikimoto, spécialisés dans les perles pour bijoux. On trouve bien entendu de nombreux vendeurs de perles près du port, mais j’imagine qu’on doit trouver des bijouteries de perles dans tout Ise-Shima. A une dizaine de minutes en voiture de la station de Kashikojima, nous ne manquons pas la vue panoramique sur la baie d’Ago depuis les 203m de hauteur du point de vue Yokoyama. La baie se constitue d’environ 64 îles mais je n’ai pas essayé de les compter tant elles m’apparaissent comme un grand labyrinthe de chemins de mer zigzaguant entre les bras de terre biscornus. Avec ses images en tête, nous reprenons la route. Notre prochaine étape est Kumano, toujours dans la préfecture de Mie. Nous passerons une nuit au pied des montagnes de la chaine de Kumano avant de s’y enfoncer un peu plus pour l’étape suivante de notre voyage sur les terres sacrées de la péninsule de Kii.

un été sur la péninsule de Kii (1)

Contrairement à notre habitude, nous avions programmé notre trajet de vacances d’été et réservé les hôtels plusieurs semaines à l’avance, et j’avais même pris le temps de noter précisément les endroits par où nous devions passer. Mais toute notre planification fut soudainement remise en question par le tremblement de terre au large de Miyazaki le 8 Août 2024 et la notification du risque accru d’un possible grand tremblement de terre dans la semaine qui suit sur les plaques tectoniques de la fosse du Nankai (南海トラフ). Cette fosse démarre du Kyushu jusqu’à la préfecture de Shizuoka et notre destination, la péninsule de Kii, se trouve en plein milieu. Les prédictions de tremblement de terre sont bien sûr impossible et cette notification était uniquement basée sur des statistiques et sur un souci de rappeler à la population de se préparer à toute éventualité, incluant le risque de tsunami. Nous avons d’abord considéré tout annuler pour partir dans un autre endroit du Japon, puis considérer attendre une semaine pour décider de maintenir notre itinéraire si rien ne se passait pendant cette période là. Bref, on a beaucoup hésité, en se raisonnant tout de même car les tremblements de terre peuvent de toute façon arriver à tout moment en tout endroit au Japon. Nous avons finalement maintenu notre trajet initial qui nous a fait passer par les préfectures de Mie, Wakayama et Nara constituant une grande partie de la péninsule de Kii.

Nous partons en voiture tôt le matin car la route est longue (presque 6 heures) jusqu’à notre première destination, Ise Shima. Nous ne visitons pas le sanctuaire d’Ise Jingu car nous y sommes déjà allés en Novembre 2013, au moment de la construction du nouveau sanctuaire qui a lieu tous les 20 ans. Nous filons vers les rochers de Meoto (夫婦岩) que j’ai souvent vu en photo. La crainte qu’un tsunami soudain nous surprenne alors qu’on s’approche de l’océan me reste en tête, mais cette impression disparaît en fait rapidement alors que les deux rochers se dévoilent devant nous. Nous sommes surpris de voir un milan noir (トンビ) perché sur le petit torii du rocher. La curiosité me pousse à demander aux deux jeunes assistants du sanctuaire si cet oiseau a pris ses habitudes sur le torii du rocher, en insistant bien sûr sur la ressemblance des mots torii et oiseau en japonais (鳥居の鳥), ce qui les fait sourire une petite seconde. Le milan noir est en fait souvent perché sur ce torii, et il est resté tranquillement à cet endroit pendant toute la durée de notre visite. Nous continuons ensuite notre route jusqu’à Ise Shima. Notre hôtel se trouve au milieu du parc national d’Ise-Shima (伊勢志摩国立公園), qui se caractérise par une côte en ria constituée de nombreuses baies, comme des vallées noyées par la mer, et d’îles. Nous passerons une nuit dans l’hotel Shima Kanko situé près de la station de Kashikojima au terminus de la ligne Kintetsu Shima et au bord de la baie d’Ago. Un sommet du G7 avait eu lieu dans une partie de cet hôtel en 2016. L’hôtel est ancien, construit en 1960, sauf une dépendance construite en bois datant de 1951. Togo Murano en est l’architecte. L’hôtel situé sur les hauteurs d’une colline boisée de l’île Kashikojima donne une belle vue sur une petite partie de la baie. On y pratique la culture des perles. La météo n’était pas idéale pour cette première journée mais les nuages nombreux nous ont quand même bien protégé des grosses chaleurs estivales, ce qui était finalement bienvenue.