La saison des pluies était omniprésente au mois de juin car il pleuvait pratiquement tous les jours, mais continue malheureusement en ce début du mois de juillet, particulièrement froid (et agréable de ce point de vue) pour la saison. Quand il ne pleut pas, le ciel est tellement couvert qu’on peut craindre une averse à tout moment. Je ne me souviens pas qu’il y avait eu autant de jours de pluie l’année dernière pendant cette même saison. Lorsque je sors samedi matin un peu avant midi, un léger filet de pluie ne m’arrête pas. Il faut dire que depuis le week-end dernier avec mon cousin, j’ai pris une certaine habitude à marcher sous la pluie sans parapluie et je me sens comme immunisé. Je marche vers le centre de Shibuya en réfléchissant à quel pourrait être cette fois le sujet principal de mes photographies. J’avais en tête de prendre en photo une grande affiche que j’avais vu auparavant à l’intérieur de la gare. Je ne la prendrais finalement pas en photo car elle a déjà disparu, mais resterais sur mon idée de saisir en images ces grandes affiches qui changent souvent à Shibuya. Depuis que j’ai pris en photo la grande affiche de l’agence Wack sur la façade de la gare de Shibuya, celle qui montrait le visage de Aina The End du groupe BiSH, marqué du logo de l’agence, l’intérêt me revient de saisir ces grandes fresques commerciales dans leur environnement urbain.
En ce moment, la série Netflix Stranger Things 3 envahit les rues de Shibuya. Je n’ai pas eu besoin de me laisser convaincre par ses affiches pour commencer à regarder la série, car j’avais suivi cette histoire fantastique avec une ambiance des années 80 depuis la première saison. J’attendais cette troisième saison avec beaucoup d’impatience et j’ai dévoré les 8 épisodes pendant le week-end. L’effet de surprise de la première saison n’est bien sûr plus trop présent. La satisfaction de voir l’histoire se dérouler dans les années 80 s’est également beaucoup érodé et le scénario se répète un peu et devient même très prévisible. Mais, cette troisième saison est tout de même passionnante, et il faut bien dire assez effrayante. La série finit quand même par s’essouffler et je ne pense pas qu’une quatrième saison soit nécessaire, à moins de repartir sur d’autres personnages et d’autres lieux.
Mais revenons aux affiches de Shibuya. J’aime beaucoup la taille du visage sur l’affiche de la première photographie, notamment quand on mélange ce grand visage avec la silhouette des passants. Sur le bord de la photographie, une dame tout sourire semble poser pour ma photographie mais il s’agit plutôt d’une coïncidence heureuse.
Les photographies prennent une inspiration musicale quand j’aperçois une guitare Gibson SG seule au milieu d’une devanture d’une boutique de mode. Elle me rappelle ma Gibson noire que j’ai malheureusement vendu il y a très longtemps. Il faut dire que je ne savais jouer aucun air connu et mon approche « guitaristique » était plutôt expérimentale. Je l’avais acheté à l’époque avec un amplificateur Marshall et avec la ferme intention d’apprendre à jouer. Mais la difficulté de la tâche à dépasser mes illusions les plus optimistes. Une mauvaise chute sur le manche avait mis en miettes tous mes efforts et j’avais finalement vendu la guitare et l’ampli au Book Off pour un assez bon prix d’ailleurs. Cette guitare posée là me donne envie d’aller faire un tour vers le magasin de disques Tower Records de Shibuya. Je n’ai rien à acheter en tête mais j’aime aller me promener dans les rayons pour aiguiser ma curiosité musicale. Une des nombreuses grandes affiches couvrant l’entrée du magasin montre le groupe d’anti-idoles, ou idoles alternatives, BiSH en photo pour la sortie de leur troisième album intitulé CARROTS and STiCKS (toujours avec des « i » en minuscule). Je suis presque sûr que chacun des deux mots de ce titre assez énigmatique est en fait un acronyme inventé par l’esprit décalé du producteur Junnosuke Watanabe. J’avais fait quelques pics faciles dans un billet précédent sur l’agence Wack dont BiSH est le groupe principal, mais en voyant là sous mes yeux l’annonce de ce nouvel album, ma curiosité m’a poussé à aller écouter ce que ça donne. Je sais que le groupe et son producteur sont capables de concevoir des bons morceaux. Je sais également que l’esprit rock et décalé du groupe est bien présent, s’ils veulent se donner la peine de le laisser s’exprimer pleinement dans la musique qu’ils construisent. Je suis en fait curieux de savoir si la direction prise sera celle du morceau NON TiE-UP que j’avais apprécié à l’époque.
Sur les deux photographies ci-dessus prises à l’iPhone, l’affiche de l’album CARROTS and STiCKS du groupe BiSH à l’entrée du magasin de disques Tower Records de Shibuya et, à l’intérieur, des affichettes typiques complètement faites à la main (un des nombreux paradoxes très japonais pour un pays technologique utilisant encore beaucoup ce genre d’affichages faits à la main). Sur l’affiche, les six membres de gauche à droite: AiNA THE END (アイナ・ジ・エンド), LiNGLiNG (リンリン), CENT CHiHiRO CHiCCHi (セントチヒロ・チッチ), MOMOKO GUMi COMPANY (モモコグミカンパニー), AYUNi D (アユニ・D) et HASHiYASUME ATSUKO (ハシヤスメ・アツコ).
J’écoute les morceaux du nouvel album de BiSH sur iTunes en rentrant à la maison et je suis très agréablement surpris par la qualité générale de l’album. Le premier morceau DiSTANCE est d’ailleurs assez grandiose, avec une vidéo aux couleurs magnifiques et aux paysages fantastiques, un peu comme sur la vidéo de NON TiE-UP. Le morceau a tout de suite des allures de single. J’aime beaucoup les notes de guitare et la passion vocale que déploie le groupe. Cet album est résolument de style rock même s’il flirte avec la pop à de nombreuses occasions. Il y a quelques morceaux particulièrement agressifs musicalement comme le deuxième morceau Tsui ni Shi (遂に死) et le quatrième FREEZE DRY THE PASTS. Ce sont également quelques uns de mes morceaux préférés car le bruit et la fureur des guitares est sans compromis. C’est avec ce type de morceaux que BiSH se positionne clairement en groupe anti-idole, et ce sont ces morceaux qui m’accrochent à l’album. La vidéo accompagnant le morceau Tsui ni Shi (finally death) est également des plus agressives, jusque dans la typographie rouge utilisée. Ce deuxième morceau vient d’ailleurs contrasté avec le morceau juste après, comme un jeu de chaud et froid. Ce troisième morceau MORE THAN LiKE est beaucoup plus pop, mais toujours avec un rythme très accrocheur, qui me rappelle un peu ce qu’on peut entendre chez le groupe Radwimps. Ce n’est pas un morceau particulièrement original et c’est d’ailleurs le cas de quelques morceaux de cet album, qui n’ont pas un style résolument novateur, mais qui restent malgré tout très accrocheurs et très bien construits. Le quatrième morceau FREEZE DRY THE PASTS est certainement le plus décalé, alternant les moments calmes parlés et le bruit presqu’inaudible d’un magma de guitares qui démarre subitement sans prévenir. Il y a comme une harmonie dans cet océan de bruit où on entend à peine les voix mais où les flots subtils attirent nos oreilles. Ces passages bruyants où les voix se noient dans le bruit des guitares ont même un côté addictif. CHOP ensuite part sur un autre style musical plus électronique mais tout aussi agressif voire même poussif dans le rythme.
Images extraites de la vidéo sur YouTube du morceau DiSTANCE sur le troisième album CARROTS and STiCKS du groupe BiSH.
Dans presque tous les morceaux, la voix de Ayuni D, alias PEDRO lorsqu’elle est en solo, se fait remarquer par ses accents aigus et une façon de chanter un peu particulière qui ne plaira pas à tous, contrastant avec les voix du reste du groupe, beaucoup plus portantes. Je trouve que son chant apporte quelque chose d’interessant dans l’ensemble d’un morceau. Le sixième morceau I am me. ressemble également à un single, beaucoup plus posé comme morceau de pop rock dynamique avec des allures de rock indépendant. Dans cet album, il y a tout de même des morceaux que j’aime beaucoup moins comme NO SWEET, qui ressemble trop à ce qu’on peut attendre d’un groupe d’idoles classiques. Bien sûr, il y a des petits détails décalés comme le fait que l’on puisse entendre une des chanteuses, je pense AiNA, reprendre sa respiration à chaque paroles chantées. Disons qu’il y a quelques morceaux sans véritable personnalité, mais ils sont heureusement assez peu nombreux. J’ai toujours un faible pour les morceaux les plus puissants comme O・S ou FiNALLY où les paroles scandées façon rap de manière très rapide font leur effet. FiNALLY est un de mes morceaux préférés de l’album avec Yasashii PAIN (優しいPAiN), un morceau de rock indé assez différent du reste de l’album.
Toujours est-il que cet album est très consistant. J’avais un peu peur que certains morceaux soient mièvres ou kawaii (ce que je n’aime pas en musique, à part pour Kyary car le kawaii y est décalé), mais ce n’est pas le cas sur cet album. Il s’agit en fait d’un album résolument rock avec des passages puissants et désarçonnants et d’autres plus pop-rock. En fait, ce groupe brouille les pistes car on ne s’attend pas à ce qu’un groupe d’idoles, même alternatives, chantent ce style de musique de manière si convaincante et efficace. Tout doit être bien entendu très étudié par le producteur, mais au final, ce sont des morceaux qu’on a envie d’écouter en boucle.