Alors que nous redescendons en direction de la maison de thé Flying Mud Boat (空飛ぶ泥舟), nous apercevons un petit groupe s’apprêtant à la visiter. Ce groupe de deux personnes est accompagné d’un guide et d’une assistante, car il faut bien un peu d’aide pour grimper en haut de la maison de thé. L’échelle est montée et le guide passe en premier pour aérer la petite cabine suspendue dans les airs. La porte qui permet l’accès est étroite mais il ne semble pas avoir de mal à entrer. On le voit ensuite ouvrir les petites fenêtres et accueillir les deux visiteurs qui montent lentement l’échelle. Nous avons eu de la chance d’avoir pu assister à cette petite scène, même si nous ne sommes pas montés nous-mêmes. Nous redescendons ensuite la petite route pour atteindre le petit musée historique Jinchokan Moriya (神長官守矢史料館) également conçu par Terunobu Fujimori. On se rend compte que la visite du site aurait en fait dû commencer par le musée. On peut le visiter mais les accès à l’intérieur sont assez limités. On ne peut par exemple pas monter à l’étage. Une partie de l’escalier montant à l’étage se compose d’une sorte de pont-levis qui était en fait remonté, comme pour éviter toute attaque extérieure imaginaire. Après avoir fait le tour du musée, on peut remonter à travers les champs en direction des trois maisons de thé. La route qui nous y amène n’est pas très bien définie et on a un peu peur de traverser des endroits non autorisés. Il n’y avait heureusement aucun piège tendu sur notre chemin, à part peut être une poignée de châtaignes posées sur un rondin de bois sur lequel il fallait bien évidemment éviter de s’asseoir. En remontant vers la voiture pour reprendre la route en direction du lac de Suwa, je jette un dernier coup d’oeil vers Flying Mud Boat et Takasugi-an en me disant que j’ai enfin accompli une mission, celle de voir de mes propres yeux les fameuses maisons de thé volantes de Terunobu Fujimori. J’en avais parlé pour la première fois sur Made in Tokyo en Juillet 2013. Je me rends d’ailleurs compte en parcourant ce billet, qu’il y a plusieurs autres tea houses créées par l’architecte. Je connaissais celle nommée Go-an (五庵) qui avait été installée de manière temporaire devant le stade olympique de Tokyo pendant l’été 2021 à la période des Jeux Olympiques. Il y a une autre très belle maison de thé conçue par Terunobu Fujimori s’appelant Ichiya-Tei, mais on ne peut malheureusement pas la visiter car elle est située à l’intérieur de la résidence secondaire de l’ancien premier ministre japonais Morihiro Hosokawa (細川護煕) à Yugawara-machi dans la préfecture de Kanagawa. C’est un grand amateur des arts et, coincidence intéressante, j’avais justement vu au printemps dans le temple Ryōan-ji (竜安寺) à Kyoto des superbes fresques de dragons peintes par le même Morihiro Hosokawa. Et de l’architecte Terunobu Fujimori, on ne peut pas oublié la formidable Collina Omihachiman dans la préfecture de Shiga. C’est un endroit tout simplement inoubliable.
Étiquette : Terunobu Fujimori
un automne à Nagano (1)
Une fois n’est pas coutume, nous sommes partis quelques jours au début du mois de Novembre dans les montagnes de la préfecture de Nagano. Je n’ai pas l’habitude de prendre des congés à cette période de l’année, et je ne suis pas sûr qu’on pourra renouveler cette expérience automnale l’année prochaine. Toujours est-il que cette période est idéale pour observer les changements de couleurs des feuillages dès qu’on monte un peu en altitude. Les feuilles rouges, jaunes et oranges se montrent en général au mois d’Octobre mais cette année a été particulièrement chaude au delà de la période estivale. Notre séjour de trois journées seulement nous fait passer en voiture par le grand lac de Suwa, puis vers Tateshina pour remonter ensuite vers le centre de Nagano et redescendre finalement vers Karuizawa. Notre première étape est la petite ville de Chino (茅野) au bord du lac Suwa. Avant de nous approcher du lac, j’insiste pour passer voir les fameuses et excentriques maisons de thé construites par l’architecte et professeur historien de l’architecture Terunobu Fujimori (藤森照信). Il est né dans cette petite ville de Chino et on peut y voir naturellement plusieurs de ses créations architecturales particulièrement originales ayant la particularité de s’intégrer pleinement dans l’environnement naturel. Dans un espace naturel perdu entouré de jardins potagers, on découvre trois maisons de thé et un musée appelé Jinchokan Moriya Historical Museum (神長官守矢史料館). Ce musée construit en 1991 est la premier bâtiment du site et la première construction architecturale de Terunobu Fujimori. Les trois maisons de thé du site sont: la maison de thé trop haute appelée Takasugi-an (高過庵) construite en 2004, le bateau de boue volant appelé Soratobu Dorofune (空飛ぶ泥舟) ou Flying Mud Boat construit en 2010 et la maison de thé trop basse appelée Hikusugi-an (低過庵) construite en 2017. La petite route qui monte vers ces édifices très particuliers est étroite et n’est pas facile à trouver, mais on devine rapidement qu’on approche du but en trouvant sur le chemin une autre création architecturale de Terunobu Fujimori, le Centre communautaire de Takabe (高部公民館). La petite route monte entre quelques maisons pour finalement donner accès aux jardins où se trouvent les maisons de thé. Il n’y a pas de parking alors on s’arrête le long d’une rivière près d’un petit cimetière en bord de forêt. Nous apercevons d’abord avec émerveillement la maison de thé Flying Mud Boat. Elle ressemble en effet à une petite barque couverte d’un toit accrochée par quatre câbles tenus par des piquets. On y monte grâce à une échelle posée sur le côté près de l’entrée du jardin où elle se trouve. On ne peut pas la visiter à moins de s’enregistrer pour une visite guidée de trois heures pour environ 19,800 yens pour deux personnes. On s’est contenté de les admirer de l’extérieur. Les trois premières photographies montrent Flying Mud Boat. Elle bouge un peu avec le vent et on sent une certaine précarité liée à sa légèreté. On se demande vraiment comment plusieurs personnes peuvent tenir à l’intérieur. En remontant un peu le jardin, on découvre rapidement l’autre maison de thé nommée Takasugi-an, posée elle en haut d’un arbre. On ne peut également seulement y accéder par une échelle. Cette petite maison a l’air très fragile et à la merci du premier coup de vent ou typhon venu, mais elle a quand même été construite il y environ vingt ans et a tenu tout ce temps là. Au pied de Takasugi-an, la maison ce thé trop haute, se trouve Hikusugi-an, la maison de thé trop basse. Je la montre sur la dernière photographie du billet. Elle ressemble à un toit sans murs posé à même le sol, mais elle est se trouve au bord d’une zone de terre surélevée. Une porte d’entrée se situe dans le dénivelé mais on devine également une trappe d’entrée cachée dans le toit. Ce toit se compose en fait de deux parties. La partie haute peut coulisser en arrière sur un rail pour ouvrir le toit, d’une manière similaire à un toit ouvrant sur une voiture. On peut donc imaginer prendre le thé dans cette petite maison à ciel ouvert. Elle était cependant fermée à notre passage et on ne pouvait pas entrer à l’intérieur. L’ambiance bucolique tranquille des lieux est particulièrement agréable. Nous ne sommes pas les seuls curieux à venir voir ces maisons de thé, mais seulement trois ou quatre autres personnes étaient présentes sur le site. C’est particulièrement intéressant de voir ces petits bâtiments flottant dans les airs et se détacher des potagers alentours. On trouve un petit quelque chose de merveilleux et de magique, comme si ces maisons étaient sorties d’un manga ou d’un film d’animation. J’apprécie tellement ce moment que le prochain billet continuera à montrer cette architecture unique, élégante et particulièrement inspirante. Je montre également quelques autres photos sur mon compte Instagram, pour continuer la visite avant le prochain billet.
ちょっとした夏休み (5)
Après avoir longer le lac Biwa sur plusieurs quelques kilomètres, nous quittons finalement sa rive pour rentrer dans les terres. Nous nous dirigeons maintenant vers un ensemble architectural fantastique dans la petite ville de Omihachiman. J’avais déjà vu l’ensemble de bâtiments que je montre en photos ci-dessus dans des magazines d’architecture ou en photo sur internet, mais le voir en réalité devant ses yeux donne une très forte impression. Cette architecture ressemblant à une colline végétale est bluffante et on croirait presque qu’elle est irréelle. Nous sommes ici à La Collina Omihachiman, ensemble conçu par l’architecte et historien de l’architecture japonaise, Terunobu Fujimori. Fujimori, originaire de Chino dans les montagnes de la préfecture de Nagano, a conçu plusieurs bâtiments au Japon faisant fusionner l’architecture et la nature, mais ce bâtiment là datant de 2015 semble être l’un des plus aboutis de son œuvre architecturale. Je suis loin d’être spécialiste de son architecture car je ne lui connais pas de bâtiments à Tokyo, à part la petite maison de thé temporaire Tea House Go-an (茶屋「五庵」), faisant office de pavillon à côté du stade olympique. Terunobu Fujimori est d’ailleurs spécialiste des maisons de thé aux structures improbables comme celle appelée Takasugi-an accrochée sur un arbre comme une cabane. L’architecture de La Collina n’est pas conventionnelle et nous évoque immédiatement l’univers fantastique et bucolique de Ghibli. On pourra chercher Totoro dans les recoins de La Collina mais il s’y était certainement très bien caché. Ce complexe caché dans la campagne est en fait un atelier de confiserie du groupe Taneya, dont j’avais déjà parlé. La spécialité de l’endroit est le Baumkuchen de la branche Club Harie du groupe. On peut bien sûr y acheter toutes sortes de pâtisseries et les manger sur place, mais on a préféré admirer les bâtiments depuis l’extérieur. Fujimori est connu pour son utilisation de techniques ancestrales comme je l’évoquais déjà pour la maison de thé Go-an et on les retrouve sur La Collina. Il utilise pour ce complexe des matériaux des forêts locales et construit un véritable écosystème avec des plantations de riz noyées dans l’eau au centre de l’espace du complexe.
パビリオン②
Je l’ai appris juste après avoir publié mon billet précédent, les Jeux Olympiques de Tokyo se passeront finalement à huis clos. Je m’en doutais fortement mais c’est bien dommage de manquer cette chance de voir une compétition olympique depuis l’intérieur du grand stade olympique. Près du grand stade et devant les studios d’enregistrement Victor, une petite maison couverte de verdure est installée. Elle est conçue par l’architecte Terunobu Fujimori. Il s’agit d’une maison de thé appelée Tea House Go-an (茶屋「五庵」), faisant partie des installations architecturales et artistiques temporaires de Pavillon Tokyo 2021. C’est la première fois que je vois une œuvre architecturale de cet architecte, reconnu pour ce type de maison de thé en suspension ou perchée dans les arbres. La base pyramidale de Go-an est recouverte d’herbe pour son fondre dans une végétation qui n’existe malheureusement pas devant le grand stade olympique. J’imagine que cette petite colline pyramidale verte serait bien à sa place dans un parc, entourée éventuellement de cerisiers. On accède dans la base par une petite entrée ronde. Des escaliers donnent accès à l’étage où on peut s’asseoir pour boire du thé en regardant le grand stade. Les parois de l’étage sont faites de bois de cèdre carbonisé selon la méthode traditionnelle dite « yakisugi » qui permet de préserver le bois en lui apportant une plus grande résistance au feu. Il y a une approche très poétique dans cette architecture atypique qui me plait beaucoup et qui attire les passants.
URBANO-VÉGÉTAL (27) and somehow distorted
Avec ces chaleurs estivales sur Tokyo, même les buildings partent en vacances vers les fraicheurs des montagnes et forêts. Je représente une nouvelle fois un de ces départs vers d’autres horizons, pour échapper à Tokyo pour quelques jours. Je me suis senti l’envie de reprendre ma série préférée urbano-végétale le temps de quelques épisodes. Avec 27 épisodes au compteur, je pourrais en faire un photobook dédié.
Tout en me demandant quelle peut bien être la source d’inspiration des ces structures architecturales vertes et flottantes, je tombe un peu par hasard sur des constructeurs de maisons dans les arbres. Je vois certaines similitudes entre ces maisons dans les arbres et mes constructions urbano-végétales, notamment ces deux concepts représentent une forme d’architecture détachée du sol et qui prend appuis sur le naturel, les arbres et les branches. Une forme de rêve également traverse ces deux concepts. Peut être qu’inconsciemment, je retranscris dans mes compositions un rêve d’enfant de maisons dans les arbres.
La maison dans les arbres ci-dessus est de l’atelier Nendo et se nomme Bird Apartment. Comme son nom l’indique, cette maison comporte des appartements pour oiseaux. Elle est composée de deux parties, 78 nids d’oiseaux de différentes tailles d’un côté et une zone accessible à l’homme par une échelle de l’autre. Cet espace est comme un observatoire, on peut y voir l’intérieur des nids à travers des petits trous conçus à cet effet. La maison est dans une forêt de la préfecture de Nagano.
Takashi Kobayashi et son agence Tree House People conçoivent aussi des maisons dans les arbres, bien que de format plus classique ou fidèle à ce que l’on peut imaginer. Cette agence construit des maisons dans les arbres depuis 1993. La maison en photo ci-dessus à gauche se trouve à Nasu. Un des principes de cette agence est de rapprocher l’homme de la nature tout en adoptant des techniques de construction préservant la croissance de l’arbre supportant la maison.
Terunobu Fujimori est une figure connu de l’architecture japonaise. J’ai pu découvrir très régulièrement ses oeuvres architecturales atypiques sur les pages de Japan Architect ou autres revues d’architecture qu’elles soient locales ou internationales (Mark par exemple), notamment la petite maison de thé Takasugi-an Tea House (2004) (deuxième rangée de photos) perchée à 5 mètres en haut de minces troncs d’arbres. Cette architecture semble fragile, comme une fleur de cerisier, éphémère. J’aime d’ailleurs cette association de sakura avec une autre maison de thé, Tea House Tetsu. Fujimori va même encore plus loin dans le surréalisme avec flying mud boat, une maison volante, flottant au dessus du sol.
Pour sortir du Japon, le designer Antony Gibbon a une approche beaucoup plus futuriste, je dirais même cinématographique pour le rapprochement avec des scènes du Seigneur des anneaux, de la maison dans les arbres. Les deux projets en images ci-dessus Embryo et Roost Treehouse sont superbes par leurs lignes géométriques et des formes qui se mélangent et se camouflent avec la nature. Je me demande s’il y a des projets de création pour faire vivre ces belles images.
Pour continuer sur le rêve, voici un joli projet de livre avec illustrations et textes que je découvre sur katatsumuri.fr. Ce livre intitulé « La Ville est un rêve » est une collaboration entre 2 artistes: la dessinatrice Ai Akiyama et l’écrivain Jean-Philippe Lheureux. On peut découvrir quelques pages, illustrations et textes, mais le livre reste à paraitre au mois d’octobre et surtout à financer à travers la plate-forme ulule.com. J’ai décidé de soutenir ce beau projet, qui permettra de recevoir le livre si le projet atteint son objectif de financement. Je vous conseille de faire un tour sur la page du projet sur fr.ulule.com/ville-reve pour le soutenir. Je ne connais pas beaucoup ce principe de « crowdfunding » mais c’est intéressant pour se lancer, et ça a l’air de bien fonctionner comme système, vu l’avancement des fonds du projet de katatsumuri.
Continuons en photographie avec une série de 6 photos prises à Kamakura il y a quelques semaines.
Le temple bouddhiste se trouve à Kamakura et il a été renouvelé assez récemment. On nous parle de la richesse de certaines des statues, pour leurs postures (à genoux) et instruments de musiques. Je suis assez surpris de voir à l’intérieur du temple des peintures qui ressembleraient presque à du manga. Ce n’est pas la première fois que je constate ce genre d’association atypique, comme à Kyoto au Chishaku-In.
Pour terminer ce long billet aux multiples facettes, je partage un nouveau morceau fait maison dans un style assez similaire au précédent, par l’emploi de sample vocaux répétitifs créant avec les sons électroniques le rythme du morceau. Ce morceau s’appelle Somehow distorted, pour la distorsion volontaire du son dans la dernière partie. J’affectionne cette idée de distorsion, que j’essaie aussi d’appliquer d’une certaine manière à mes compositions photographiques, pour les éloigner du réel.