HTTK

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Dans la liste des bouquins à lire religieusement, il y a celui de l’excellente exposition Le Corbusier se tenant en ce moment au Mori Art Museum: Le Corbusier, Art and Architecture – A life of creativity. L’exposition est très complète couvrant l’art (peinture de style puriste et quelques sculpture) et bien sûr l’architecture du fondateur du Modernisme. Ses principales oeuvres architecturales, ses machines à habiter, et projets de plannings urbains sont présentés en maquettes, photos et sketches. Il y a également beaucoup de videos (sur la Villa Savoye, la Tourette, Chapelle Notre-Dame-du-Haut de Ronchamp, l’unité d’habitation de Marseille, Chandigarh, par exemple), quelques compositions en images de synthèse animées (le film sur le projet du Palais des Soviets est impressionant), des éléments de mobiliers (la chaise longue LC4 …), des reconstructions taille réelle de l’atelier Le Corbusier à Paris, et du Petit Cabanon (Cap Saint Martin), reproduction assurée par Cassina (ils possèdent les droits de vente sur le mobilier dessiné par Le Corbusier. J’y ai passé plus de 3 heures tellement c’était intéressant…

En se promenant sur Internet, on fait parfois des découvertes musicales épatantes, hier soir c’était HTRK et le morceau « Ha » (écoutable à cette adresse), une chanson sombre et lente, entêtante par le rythme de batterie comme des battements de coeur en fond, survolé par une voie masculine frêle. HTRK est un trio d’australiens relocalisés à Berlin. Le nom étrange du groupe voudrait dire Hate Rock, j’imagine qu’ils se réfèrent au rock certifié conforme diffusé sur les ondes. Leur rock est plutôt expérimental, et c’est ce que je préfère. Le morceau dure 5 mins mais on se le repasse sans fin comme une bande sonore accompagnant ses déplacements dans la ville.

Dans la liste des bouquins à découvrir, il y a Vibrator de Mari Akasaka. Vibrator pour les vibrations d’une cabine de camion, moteur démarré, où Rei Hayakawa, une journaliste disjonctée, rencontrera Takatoshi Okabe, le conducteur, pour un voyage vers les contrées enneigées du nord japonais. (la photo ci-dessus est flou en raison des vibrations). Et après, je reprends Murakami avec Sputnik Sweetheart. Les histoires fantastiques d’Haruki Murakami me manquaient …

Météorite sur Jimbocho

Une météorite est tombée dans le voisinage de Jimbocho, le quartier des bouquins. Alerté par les news le jour d’avant et profitant d’un passage dans le coin à moto (des courses alimentaires entre Ningyocho et Asakusa), je viens vérifier par moi-même l’étendue des dégats. Je me renseigne sur sa provenance en inspectant des yeux les surfaces triangulaires inclinées et désordonnées de cet étrange batiment. A l’entrée, un panneau nous indique que ce lieu s’appelera désormais Jimbocho Kagetsu et Jimbocho Theater. Une affichette a proximité nous fait comprendre que ce petit complexe composé d’une salle de cinéma (sous-sol), de salles de spectacles (2-3F) et d’une école de comédie (4-6F) appartient à l’influente agence de comédiens humoristes (de style owarai) Yoshimoto Kogyo venant d’Osaka. Les comédiens de Yoshimoto sont presque omniprésents à la télévision, des vétérans sur-actifs Hamada et Matsumoto de Downtown aux plus récents mais tout aussi actifs Taka and Toshi

L’ancienne agence Yoshimoto, fondée en 1912, opérait avant la seconde guerre mondiale une salle de spectacle à Asakusa, quartier d’amusement populaire inévitable à l’époque. Takeshi Kitano et Kiyoshi Atsumi de la série à rallonge Tora San (Otoko wa tsurai yo, que j’adore d’ailleurs) sortent de ce quartier. Après s’être éloigné d’Asakusa, Yoshimoto y est depuis revenu avec des séries de spectacles le week end au Kaminari 5656 Kaikan (j’y ai vu des geisha récemment). Yoshimoto entend renforcer sa présence dans les quartiers à proximité d’Akasaka avec cette salle à Jimbocho. Les salles de ce complexe ouvriront bientôt à partir du 7 juillet 2007, et privilégierons les jeunes comédiens de l’agence.

Le design architectural par Nikken Sekkei (construction assurée par Kajima) est des plus surprenants pour une salle de spectacle comique. Les arêtes aiguisées et compliquées, la couleur sobre du bâtiment ne laissent pas penser à un endroit où l’on va s’amuser, ou alors pour un humour pince-sans-rire. Cette couleur grise-noire me rappelle un peu le magasin Casa Armani de Tadao Ando à Omotesando. Le bâtiment vient bouleverser l’éco-système urbain préservé de cette petite rue de Jimbocho, il est magnifique mais on aurait plutôt imaginé cet édifice à Aoyama comme magasin étendard d’une grande marque étrangère. L’adresse est la suivante: Chiyoda-Ku, Jimbocho 1-23.

Tokyo Fibercity 2050

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Je viens de terminer la lecture de Tokyo 2050 Fibercity, Numéro 63 du magazine trimestriel The Japan Architect. Il s’agit d’une étude initiée par Fumihiko Maki et developpée par Hidetoshi Ohno, également architecte et professeur, sur des propositions de design urbain pour un Japon en décroissance démographique. En 2005, le Japon a connu son pic de croissance demographique à environ 130 millions d’habitants. Avec un taux de natalité stable à environ 1.36~1.38, la population japonaise devrait passer en dessous de la barre des 100 millions d’habitants en 2050. Cette décroissance de la population a des conséquences sur l’organisation des villes, certaines zones urbaines subiront un dépeuplement.

En prenant cette hypothèse de décroissance, l’architecte Hidetoshi Ohno a réfléchi avec son groupe d’étude (Université de Tokyo) à 4 grandes stratégies de réorganisation urbaine, en prenant Tokyo comme cas d’étude. L’étude adopte le concept de « fibres », c’est à dire un modèle linéaire de la ville en suivant les grandes lignes de transport et de communication, en opposition avec le modèle atomique traditionnel des villes occidentales. Les 4 stratégies se concentrent sur une manipulation de ces fibres spatiales pour changer Tokyo, et sont nommées: Green finger, Green partition, Green web, Urban wrinkle. Elles sont tournées vers une intégration du vert, d’éléments naturels intégrés à l’intérieur de la ville dans un souci d’améliorer l’environnement général de vie.

Green finger (doigt vert)

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La première stratégie, nommée Green Finger, consiste à convertir les zones situées à plus de 800m des stations de trains en zones vertes (parcs, campus d’école ou d’université, fermes ou espaces agricoles, …). L’image ci-dessus en donne une représentation, des bandes urbaines le long des lignes ferrovières, réseau très développé à Tokyo.

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Avec le vieillissement et la décroissance de la population, il est estimé que cette population urbaine cherchera à se rapprocher des stations de trains, centres nerveux d’activité de la ville et de ses banlieues. Les zones éloignées des stations seront, petit à petit et de manière naturelle, abandonnées et pourront être reconverties en zone verte.

Green partition (partition verte)

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Une deuxième proposition de Hidetoshi Ohno s’intitule Green partition et consiste en une protection accrue contre les désastres naturels, en donnant de l’air aux zones résidentielles surpeuplées. Un tremblement de terre ou un incendie dans ce type de zone résidentielles, aux maisons très rapprochées et aux rues étroites, peuvent avoir des conséquences désastreuses (prenons comme exemple, les résidences en bois nombreuses dans le quartier de Yanaka, Ueno). Mettre en place des chemins verts permet cette protection, comme un pare-feu, tout en rendant les quartiers résidentiels plus agréables à vivre. Ces chemins peuvent servir de voies de secours et d’évacuation en cas d’incidents naturels.

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La structure de ces chemins verts dépendra des terrains libérés dans ces zones résidentielles (maisons détruites et non reconstruites dans un contexte de décroissance démographique). Ces chemins zigzagueront très probablement entre les maisons, comme on peut le voir en exemple sur les 2 images ci-dessus.

Green web (toile verte)

La troisième proposition, Green Web, vise à convertir les voies rapides internes à la ville (les shuto expressways) en parcs linéaires et en voie d’accès d’urgence utilisables pendant une crise. Cette stratégie prend toujours comme hypothèse une diminution de la population et par conséquence du traffic routier, mais je suis un peu dubitatif sur la résistance de ces routes suspendues Shuto Expressway en cas de tremblement de terre majeur…

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Hidetoshi Ohno et son groupe d’étude donnent quelques exemples de conversion de voies rapides. Ci-dessus, il s’agit de la voie rapide longeant les douves du Palais Impérial dans le centre de Tokyo. La voie rapide serait transformée en parc au bord des douves pour des promenades agréables en pleine nature (ou presque).

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A Roppongi-1Chome, aux croisements de 2 grandes voies rapides, Ohno propose un système d’escaliers et de centres commerciaux attachés à la voie express. La voie, elle-même, est la encore réservée à la végétation.

Urban wrinkle (ride urbaine)

Cette quatrième stratégie s’attache à la rénovation ou l’amélioration de quelques points remarquables dans la ville pour en faire sortir leur potentiel et les rendre attractifs. Typiquement, ce sont des lieux de structure linéaire comme de vieux canaux, des bords de rivières, des rues en pentes, … avec un potentiel d’attraction non exploité ou gaché par leur situation. Les lieux considérés ont, en général, une valeur historique et cette étude tente de les mettre en valeur, comme on pourrait chercher à embellir les rides d’un visage.

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Tout l’intérêt de cette étude, c’est de donner des exemples précis, facilement identifiables pour les habitants de Tokyo. Ci-dessus, il s’agit du réaménagement du canal entre les stations de Iidabashi et de Ichigaya. C’était autrefois un des canals du château d’Edo. Une bordure du canal serait réaménagée pour la promenade, avec à proximité quelques magasins.

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Cet autre exemple ci-dessus me parle beaucoup, car je traverse très souvent cette petite rivière bétonnée de Shibuya, entre Ebisu et Shibuya. Elle très sombre et sale, coincée entre des barrières d’immeubles donnant sur l’avenue Meiji. La proposition est assez ambitieuse, composée de passerelles passant par dessus le canal, d’une végétation touffue, de terrasses sur les immeubles environnants avec vue sur cette rivière désormais beaucoup plus ensoleillée et joyeuse.

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Une autre idée porte sur le grand parc Shinjuku-Gyoen. Ce parc près de shinjuku est superbe et très bien entretenu. L’idée est de dépasser les bornes actuelles du parc pour le faire rentrer dans la ville, dans les rues du quartier de Shinjuku. Plutôt qu’une entité fermée sur elle-même, le parc serait un lieu ouvert et acceuillant, intégré à la ville.

ja63Le magazine The Japan Architect Numéro 63 dédié à Tokyo 2050 Fibercity contient beaucoup d’autres exemples intéressants, parfois utopiques, ainsi qu’un grand nombre de sous-études sur des aspects de Tokyo (ex: organisation des arcades commerciales « shoutengai », lieux aimés par les Tokyoites, …). L’idée qui me plait beaucoup dans cette étude, c’est la tentative d’une meilleure intégration de la nature dans la ville. Je partage également cette idée pour l’intérieur des maisons, même si mon idéal est un peu éxagéré

Toutes les images proviennent des sites de The Japan Architect et de Tokyo 2050 Fibercity. Le magazine The Japan Architect et les anciens numéros sont disponibles à la vente sur Internet pour les pays hors-japon, et disponibles au Japon dans toutes les bonnes librairies.

Autour du Tunnel

Mari étant à l’école aujourd’hui samedi exceptionnellement, je me retrouve seul pour un après-midi à vélo à rechercher des photos à prendre. En fait, je m’étais fixé un but, aller à Aoyama à la recherche d’un panneau mystérieux. Ce panneau, c’est un point d’exclamation censé être à l’une des entrées du cimetière d’Aoyama pour alerter les conducteurs de la présence de fantômes dans ce quartier. On le sait, les japonais croient aux fantômes. J’ai quadrilé le cimetière du Nord au Sud, d’Est en Ouest sans rien trouver. Ca restera un mystère, ou alors ce fameux panneau ne se trouve pas à Aoyama contrairement à ce qu’on nous a indiqué.

Non loin de là, je retrouve le tunnel à surface facon métallique qui fait le lien entre Aoyama et Nogizaka. On peut marcher sur les bords de cet immense chenille, j’aime assez cet endroit, l’entrée débouche un peu sur nulle part du côté d’Akasaka.

Près de Nogizaka, le projet Tokyo Midtown bat son plein. Sur un espace de 68,900 m2, on y constuit un complexe énorme de tours (bureaux, hotel, centre commercial, résidences et musée) entourées de grands espaces de jardin. Apparemment, l’architecte Tadao Ando est encore et toujours de la partie pour une petite partie de l’espace (celui d’exposition). L’ouverture est prévue au printemps 2007. Ce Tokyo Midtown s’avère être un grand concurrent de Roppongi Hills se trouvant à deux pas…

Et juste en face de ces constructions, on voit quelques maisonnettes couvertes de lières, pour le contraste, toujours le contraste.