un été sur la péninsule de Kii (3)

Nous arrivons en fin d’après-midi près de notre hôtel situé dans les terres au niveau de Kumano. Depuis celui-ci, nous avons une belle vue sur la chaîne de montagnes de Kumano que l’on découvrira un peu plus le lendemain. Ce paysage devant notre hôtel dispersé en maisonnettes sur un flanc de colline me rappelle des vacances passées dans les Alpes lorsque j’étais beaucoup plus jeune. Je ne saurais identifier un endroit précis, mais c’est l’ambiance des lieux qui me remémore ces souvenirs lointains. Le lendemain, nous partons en direction du sanctuaire de Tamaki (玉置神社) perdu en haut de la montagne du même nom. D’une manière similaire au sanctuaire Mitsumine à Chichibu, on dit du sanctuaire de Tamaki que seuls ceux qui sont invités peuvent s’y rendre, et que certaines personnes peuvent être même prises de malaise et ne pas être en mesure de s’y rendre. Il s’agit certainement là d’une légende que l’on associe parfois au Power Spot, mais j’y pense forcément et le soir avant le départ, je ne me sentais pas très bien. C’est certainement dû à la fatigue accumulée de la conduite des deux premiers jours, mais je pense qu’il s’agissait également d’une certaine appréhension en pensant à la route qui nous attendait jusqu’au sanctuaire Tamaki. On dit que le sanctuaire est difficilement accessible car perdu dans les forêts de montagne et que la route pour s’y rendre est étroite. J’ai étudié le chemin avant de partir puis finis par suivre le conseil de Google maps proposant la Route 169. On se rendra vite compte que cette route est vraiment très étroite, ne permettant que rarement le passage de deux voitures en même temps. Cette route à flanc de montagne passe dans les forêts mais frôle parfois les corniches. On roule lentement en espérant qu’une voiture n’arrive pas en face à toute vitesse. Le pire est que cette route constituée uniquement de virage fait plus de 10 kms avant de finalement rejoindre le sanctuaire Tamaki. Mais une fois engagé, on ne peut de toute façon plus faire demi-tour et il faut donc se concentrer sur chaque virage. La route est bien heureusement praticable même si des blocs de pierre et des branchages sont parfois tombés sur la chaussée. On croise en tout deux voitures, certainement des locaux, qui ont la gentillesse de reculer pour trouver un espace de route plus large pour nous laisser passer. Cette route sinueuse de montagne est certainement la plus difficile que j’ai été amené à pratiquer en voiture. Cette difficulté pourtant prévue ne nous empêche pas d’arriver à bon port. Le parking du sanctuaire est plus grand que je l’imaginais, ce qui laisse penser qu’il doit certainement y avoir une autre route menant au sanctuaire de Tamaki. Il y a en fait une Route 168 qui est un peu plus longue. Peut-être que les deux gros 4WD garés sur le parking sont passés par cette route, car je ne les imagine pas vraiment emprunter la route que nous avons pris. Avec cette assurance qu’on ne sera à priori pas obligé de prendre la même route pour le chemin du retour, nous pouvons entrer sereinement dans l’enceinte du sanctuaire.

Depuis les hauteurs du Mont Tamaki, la vue est superbe. Les montagnes se dressent devant nous à perte de vue. On est ici complètement perdu dans les montagnes de Nara. Le village de Totsukawa (十津川村) où se trouve Tamaki fait en fait partie du district de Yoshino dans la préfecture de Nara. Le Mont Tamaki, l’une des montagnes sacrées de la chaîne de montagnes Omine (大峰山系), est une étape de l’une des principales routes de pèlerinage Ōmine Okugakemichi (大峯奥駈道) qui est classé au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 2004 sous le regroupement des « Sites sacrés et chemins de pèlerinage des chaînes de montagnes de la péninsule de Kii ». La longue route de pèlerinage Ōmine Okugakemichi parcoure la chaîne montagneuse d’Ōmine dans la préfecture de Nara et celle de Kumano dans la préfecture voisine de Wakayama. Cette route était un terrain d’entrainement spirituel pour les adeptes de la religion Shugendō, qui incorpore des aspects du Taoïsme, du Shintoïsme, du Bouddhisme et d’autres pratiques liées au chamanisme traditionnel japonais. Cette route, très isolée et parfois difficile, comporte 75 lieux spirituels appelés Nabiki (靡), dans des grottes, sur des rochers, près de cascades ou sur les hauteurs des montagnes, où les adeptes priaient et pratiquaient des exercices spirituels. Le Mont Tamaki est référencé comme le Nabiki numéro 66 de cette route. La pratique du Shugendō fit face à des hostilités lors la restoration Meiji, créant une séparation nette entre les pratiques shintoïstes et boudhistes, et le chemin de pèlerinage fut en partie perdu, enfoui à jamais dans les forêts montagneuses. Mais des historiens et des enthousiastes ont tout de même progressivement rétabli cette route, désignée comme site historique national en 2002, avant d’être classée deux années plus tard par l’UNESCO.

On s’empreigne de cette histoire et de cette spiritualité en marchant depuis le torii principal à l’entrée jusqu’aux bâtiments du sanctuaire. Il faut marcher pendant une vingtaine de minutes sur un chemin de forêt en pente pour atteindre le sanctuaire. Des drapeaux marqués des noms de donateurs sont plantés sur la majeure partie du parcours. Entourés par des cèdres géants dont certains sont classés comme monument naturel de la préfecture de Nara, on ressent une grande sérénité et on a même envie de marcher sans parler ou à voix basse. On est loin de tout ici, comme coupés du monde. Nous passerons une bonne heure dans le sanctuaire. La date de sa fondation n’est pas très claire mais on parle de l’an -37. Les bâtiments du sanctuaire sont en tout cas très anciens et on dit que le bâtiment principal date de 1794. Derrière le sanctuaire, on peut monter un peu plus en empruntant un chemin de terre couvert de racines. On atteint l’objet de culte important du sanctuaire, un pavé noir entouré de nombreuses pierres blanches. On dit que seule une toute petite partie de la roche noire est exposée et que la partie cachée sous terre est gigantesque, et qu’elle cacherait des joyaux. Sur le retour, on se procure bien entendu le sceau goshuin du sanctuaire et on en profite pour demander aux prêtres présents qu’elle est la meilleure route pour le retour. Lorsque je lui explique qu’on a pris la Route 169 à l’aller, je note un petit sourire comme pour nous indiquer qu’on ne s’est pas facilité la tâche. On nous conseille la Route 168 et on repart du sanctuaire Tamaki avec le cœur léger.

don’t wanna come down just let me fly

La construction du nouveau building Ginza Sony Park vient de s’achever le 15 Août 2024 au croisement de Sukiyabashi à Ginza. Je me suis empressé d’aller le voir mais il n’était malheureusement pas encore ouvert au public. Ce nouveau building de béton conçu par Takenaka Corporation est de taille volontairement basse par rapport au reste du quartier de Ginza et montre un style brutaliste particulièrement unique dans ce quartier. Ce nouveau Ginza Sony Park est en fait la dernière étape d’un processus de reconstruction suite à la démolition de l’immeuble initial, le Sony Building conçu par l’architecte Yoshinobu Ashihara ouvert en 1966. Suite à la destruction du Sony Building en 2017, un parc urbain minimaliste déjà appelé Ginza Sony Park avait vu le jour de 2018 à 2021. Cet espace contenait des zones en sous-sol utilisées pour des évènements notamment musicaux. J’avais par exemple mentionné sur ce blog l’exposition de King Gnu et Millennium Parade et des Live sessions de D.A.N. ou encore Tamanaramen (玉名ラメン). Je suis à vrai dire assez impatient de voir quelle utilisation sera faite de cet espace et j’espère que ça restera dans le même esprit que le parc urbain précédent, plutôt qu’une succession de magasins standardisés. Je lis que l’intention est toujours que cet espace soit avant tout un espace publique pour divers événements notamment artistiques.

Côté musique, la mauvaise nouvelle d’abord est que Millennium Parade a soudainement décidé d’annuler leur tournée mondiale incluant les deux dates à Tokyo. Les places sont bien entendu remboursées mais c’est quand même bien dommage. La raison est donnée par le groupe mais reste assez vague, car on se demande s’il s’agit d’un manque de temps pour la préparation ou de problèmes techniques avec les promoteurs de salles de spectacle à travers le monde. Il est mentionné que le groupe ne serait pas en mesure d’assurer le niveau de qualité souhaité et a pris la difficile décision de tout arrêter pour cette tournée. A vrai dire, j’étais déjà un peu inquiet car Millennium Parade n’a sorti que deux morceaux récemment sans perspective d’un nouvel album avant la série de concerts. Leur dernier single M4D LUV est certes plaisant mais je le trouvais quand même nettement moins intéressant et en deçà des morceaux du premier album du groupe. Je pense que je tenterais leur prochain concert en fonction de la qualité de leur prochain album. Ce n’est pas vraiment pour compenser mais je me suis finalement décidé à aller voir Haru Nemuri (春ねむり) en concert dans la salle Shibuya WWW X. Je suis assez partagé sur la musique d’Haru Nemuri qui suit son excellent album Haru to Shura, mais en écoutant à nouveau quelques morceaux de ses albums et EPs suivants, je me dis qu’il me faut peut-être reconsidérer mon opinion. En fait, je suis surtout extrêmement curieux de la voir sur scène et l’émotion des premières fois où j’ai été pris par la force de sa musique reste très bien ancré dans ma mémoire. Il y aura également deux premières parties: un jeune artiste d’influence hip-hop nommé Yatsui Ichijiku (奴居イチヂク) que je ne connais pas et qui jouera à priori pendant une trentaine de minutes, puis le groupe rock alternatif Mass of the Fermenting Dregs (Masudore) que je connais assez bien et qui devrait jouer pendant environ une heure avant le set d’Haru Nemuri. Je suis en fait également très curieux de voir et écouter le set de Masudore car je les suis depuis un bon petit moment. Pour le concert d’Osaka d’Haru Nemuri le Vendredi 30 Août 2024, les invités étaient différents, car se produisaient le rappeur GOMESS et Minori Nagashima (長嶋水徳). Le rock alternatif assez brut de Minori Nagashima m’intéresse et le fait qu’elle participe à la tournée d’Haru Nemuri a certainement été le déclic même si elle ne jouera pas à priori à Tokyo. Minori Nagashima (alias Serval Dog) est également parfois la guitariste accompagnant Haru Nemuri. De Minori Nagashima, j’écoute en ce moment son nouveau single intitulé Sea of Dawn (夜明けの海) qui a une petite pointe de rock 90s qui me plait vraiment beaucoup. Elle est originaire de Shizuoka et j’imagine que la vidéo du morceau a été tournée sur une plage quelque part là bas. J’écoute également récemment le nouveau single d’AiNA The End intitulé Love Sick, qui est extrêmement dense et changeant. Je trouve ce morceau très fidèle au style qui n’a rien d’apaisé d’AiNA car elle pousse sans cesse sa voix à la limite de la rupture. Ce morceau est une nouvelle fois de TK de Ling Toshite Shigure (凛として時雨) et ça se ressent également beaucoup lors de certaines transitions où on croirait presque que la voix de TK se croise avec celle d’AiNA. Ils devraient vraiment faire un duo ensemble, ça pourrait ressembler à la catharsis de Ling Toshite Shigure quand les chants de TK et de 345 (Miyoko Nakamura) s’entrainent l’un et l’autre. AiNA a également cette même densité vocale et ça doit être la raison pour laquelle les compositions de TK fonctionnent bien pour elle. Et le titre du billet est titré des paroles du morceau Fly (feat. Cherish) du compositeur et producteur électronique anglais Mura Masa, que j’écoute également en boucle en ce moment.

un été sur la péninsule de Kii (2)

Le building principal de l’hôtel Shima Kanko (志摩観光ホテル) où nous avons passé une nuit a vu sa construction se terminer en 1969. Possédant 200 chambres, il s’agissait à l’époque du plus grand hôtel de villégiature du Japon. Les empereurs japonais, de Showa à l’actuel, y ont fait un séjour tout comme la princesse Grâce de Monaco. L’hôtel a d’abord ouvert ses portes en 1951. Je montrais sur mon précédent billet le premier bâtiment de l’hôtel principalement construit en bois, réutilisé d’un hall de l’Arsenal Naval de Suzuka également conçu par Togo Murano. Le parc de l’hôtel est très bien entretenu et se trouve en même temps dans une végétation environnante extrêmement dense. Depuis l’hôtel, un petit chemin en escaliers donne accès au bord d’une partie de la baie. Sur les marches de l’escalier, les crabes rouges sont nombreux et s’écartent rapidement à notre passage pour se cacher. Cette parade de crabes est très amusante à regarder et je prends à malin plaisir à les observer dans leurs cachettes sous les marches. Ils me regardent, je les regarde. Je ressens qu’ils se demandent quoi faire à cet instant précis mais je décide de ne pas les embêter plus longtemps.

Un des meilleurs moyens de découvrir le paysage accidenté de la baie d’Ago est de partir en promenade en bateau. Depuis la station de Kashikojima, des petites croisières d’une quarantaine de minutes nous donnent une bonne vue d’ensemble des lieux. En chemin, nous apercevons les établissements Mikimoto, spécialisés dans les perles pour bijoux. On trouve bien entendu de nombreux vendeurs de perles près du port, mais j’imagine qu’on doit trouver des bijouteries de perles dans tout Ise-Shima. A une dizaine de minutes en voiture de la station de Kashikojima, nous ne manquons pas la vue panoramique sur la baie d’Ago depuis les 203m de hauteur du point de vue Yokoyama. La baie se constitue d’environ 64 îles mais je n’ai pas essayé de les compter tant elles m’apparaissent comme un grand labyrinthe de chemins de mer zigzaguant entre les bras de terre biscornus. Avec ses images en tête, nous reprenons la route. Notre prochaine étape est Kumano, toujours dans la préfecture de Mie. Nous passerons une nuit au pied des montagnes de la chaine de Kumano avant de s’y enfoncer un peu plus pour l’étape suivante de notre voyage sur les terres sacrées de la péninsule de Kii.

un été sur la péninsule de Kii (1)

Contrairement à notre habitude, nous avions programmé notre trajet de vacances d’été et réservé les hôtels plusieurs semaines à l’avance, et j’avais même pris le temps de noter précisément les endroits par où nous devions passer. Mais toute notre planification fut soudainement remise en question par le tremblement de terre au large de Miyazaki le 8 Août 2024 et la notification du risque accru d’un possible grand tremblement de terre dans la semaine qui suit sur les plaques tectoniques de la fosse du Nankai (南海トラフ). Cette fosse démarre du Kyushu jusqu’à la préfecture de Shizuoka et notre destination, la péninsule de Kii, se trouve en plein milieu. Les prédictions de tremblement de terre sont bien sûr impossible et cette notification était uniquement basée sur des statistiques et sur un souci de rappeler à la population de se préparer à toute éventualité, incluant le risque de tsunami. Nous avons d’abord considéré tout annuler pour partir dans un autre endroit du Japon, puis considérer attendre une semaine pour décider de maintenir notre itinéraire si rien ne se passait pendant cette période là. Bref, on a beaucoup hésité, en se raisonnant tout de même car les tremblements de terre peuvent de toute façon arriver à tout moment en tout endroit au Japon. Nous avons finalement maintenu notre trajet initial qui nous a fait passer par les préfectures de Mie, Wakayama et Nara constituant une grande partie de la péninsule de Kii.

Nous partons en voiture tôt le matin car la route est longue (presque 6 heures) jusqu’à notre première destination, Ise Shima. Nous ne visitons pas le sanctuaire d’Ise Jingu car nous y sommes déjà allés en Novembre 2013, au moment de la construction du nouveau sanctuaire qui a lieu tous les 20 ans. Nous filons vers les rochers de Meoto (夫婦岩) que j’ai souvent vu en photo. La crainte qu’un tsunami soudain nous surprenne alors qu’on s’approche de l’océan me reste en tête, mais cette impression disparaît en fait rapidement alors que les deux rochers se dévoilent devant nous. Nous sommes surpris de voir un milan noir (トンビ) perché sur le petit torii du rocher. La curiosité me pousse à demander aux deux jeunes assistants du sanctuaire si cet oiseau a pris ses habitudes sur le torii du rocher, en insistant bien sûr sur la ressemblance des mots torii et oiseau en japonais (鳥居の鳥), ce qui les fait sourire une petite seconde. Le milan noir est en fait souvent perché sur ce torii, et il est resté tranquillement à cet endroit pendant toute la durée de notre visite. Nous continuons ensuite notre route jusqu’à Ise Shima. Notre hôtel se trouve au milieu du parc national d’Ise-Shima (伊勢志摩国立公園), qui se caractérise par une côte en ria constituée de nombreuses baies, comme des vallées noyées par la mer, et d’îles. Nous passerons une nuit dans l’hotel Shima Kanko situé près de la station de Kashikojima au terminus de la ligne Kintetsu Shima et au bord de la baie d’Ago. Un sommet du G7 avait eu lieu dans une partie de cet hôtel en 2016. L’hôtel est ancien, construit en 1960, sauf une dépendance construite en bois datant de 1951. Togo Murano en est l’architecte. L’hôtel situé sur les hauteurs d’une colline boisée de l’île Kashikojima donne une belle vue sur une petite partie de la baie. On y pratique la culture des perles. La météo n’était pas idéale pour cette première journée mais les nuages nombreux nous ont quand même bien protégé des grosses chaleurs estivales, ce qui était finalement bienvenue.

仏像の影に消えた

Nous sommes déjà dans la dernière partie de l’été et j’ai l’impression qu’il a passé très vite et que rien ne s’est vraiment passé. Il y a pourtant eu les Jeux Olympiques de Paris 2024 qui nous ont bien occupés avec des cérémonies d’ouverture et de fermeture mémorables et beaucoup de très beaux moments sportifs. On s’est bien entendu levé tôt pour regarder la cérémonie de fermeture. La présence de Tom Cruise, des groupes Phœnix et Air n’étaient pas vraiment une surprise car l’information avait fuité. La cérémonie a ressemblé par moments à un concert géant avec les prestations de Phœnix, Kavinsky et Air. Le morceau Nightcall de Kavinsky avec Angèle au chant a apparemment battu des records de recherche sur l’application Shazam, ce que je comprends très bien car ce passage était particulièrement marquant, tout comme le bain de foule de Thomas Mars de Phœnix. Je pense que c’était un imprévu tout comme le fait que la foule des sportifs ne descendent pas de la scène pour rester au plus près du groupe, alors qu’on leur a pourtant demandé plusieurs fois de descendre. Ces moments imprévus étaient particulièrement réussis et ces jeux dans leur ensemble ont été une bouffée de bonheur à regarder. C’est bon de se nourrir d’énergie positive. J’espère qu’elle restera en France pour un bon moment.

En photographies ci-dessus, je profite de quelques heures à Sakuragichō à Yokohama pour partir prendre quelques photos du Pacific Convention Plaza Yokohama également nommé Pacifico Yokohama (パシフィコ横浜). J’étais attiré par les motifs architecturaux en forme de voiles modernes posées sur le toit du centre d’exposition, mais je n’ai pas eu l’inspiration nécessaire pour en sortir des photos abstraites, ce qui était pourtant mon idée de départ. Je marche un peu plus pour aller voir les vagues immobiles du grand hôtel de luxe hawaïen The Kahala Hotel & Resort. Les vastes surfaces de verre viennent refléter le ciel nuageux. La courbure du bâtiment est impressionnante. Elle se découpe en trois volumes pour decomposer les mouvements d’une vague semblant idéale pour le surf de haut niveau. J’ai bien pris une bonne vingtaine de photographies du bâtiment et de ses nuages, qui auraient pu constituer un billet à part entière, mais je ne garde finalement qu’une seule photographie par pur souci de concision. En revenant ensuite vers la tour Landmark, je constate que le musée d’art de Yokohama est toujours fermé ce qui est bien dommage car j’aurais peut-être eu le temps de voir une exposition si elle était intéressante. La façade de ce musée m’intrigue toujours beaucoup, surtout la partie haute arrondie qui doit donner une très bonne vue sur la large allée desservant le musée. J’imagine toujours qu’une personne importante y a ses bureaux. Il y a quelque chose de l’ordre de la forteresse dans l’architecture très ordonnée et symétrique de ce musée. J’y ressens un certain mystère et ce sont peut-être les formes géométriques symboliques qui m’inspirent ce sentiment d’étrangeté. Le tigre à la crinière rouge feu devant le Department Store Markis est tout droit sorti de l’univers fantastique du jeu de rôle Dragon Quest V. Il s’appelle Borongo (ボロンゴ) en japonais et Saber en anglais. Je suis très peu familier de l’univers de Dragon Quest car je n’ai jamais eu l’occasion de jouer à un épisode et ce n’est pas maintenant que je vais m’y mettre, même si l’univers du jeu et de ses nombreux épisodes doivent être extrêmement riches. La popularité du jeu au Japon n’est plus à rappeler. D’autres personnages de l’univers de Dragon Quest étaient placés à l’intérieur du grand magasin. La photographie suivante nous fait revenir vers Tokyo, sur la grande avenue d’Aoyama. Je ne sais que très peu de choses sur la grande fresque murale temporaire que je montre sur cette cinquième photographie du billet. Sur cette grande illustration chaotique, comme un patchwork composé de multiples images assez difficilement lisibles, on devine tout de même certains visages de style manga.

Il fait en ce moment souvent trop chaud pour marcher alors je préfère le vélo. Une de mes promenades du week-end m’amène jusqu’à Shinjuku près du parc Shinjuku Gyoen. Je passe en fait volontairement devant le temple bouddhiste Taisōji (太宗寺) situé à Shinjuku 2 chōme pour revoir les formes blanches arrondies du bâtiment principal, mais je me rappelle soudainement de la statue de bronze d’un grand Jizo Bodhisattva assis (銅造地蔵菩薩坐像) placée à l’entrée. Ce lieu a été utilisé pour une scène du film de yakuza Sailor Suit and Machine Gun (セーラー服と機関銃) réalisé en 1981 par Shinji Sōmai (相米慎二), avec dans le rôle principal Hiroko Yakushimaru (薬師丸ひろ子) jouant Izumi Hoshi (星泉), héritière malgré elle du clan de yakuza de son père. J’ai déjà de nombreuses fois parlé de ce film, qui m’a, il faut croire, laissé une forte impression. Je me souviens en fait très bien de cette scène devant la grande statue du temple Taisōji. Cette scène m’avait marqué comme plusieurs autres dans le film, mais je ne me souviens plus exactement quelle occasion amène Izumi Hoshi à s’assoir sur les genoux de cette statue. J’y ai en tout cas vu un sentiment de liberté teinté d’une certaine insolence. Ce film ayant un statut de film culte, certains amateurs se sont bien entendu amusés à retrouver et noter tous les lieux où ont été tournées les scènes du film, ce qui m’a permis de facilement retrouver cette statue.

Mon chemin a déjà rencontré plusieurs fois les illustrations d’Aki Akane (秋赤音). La première fois était dans la librairie Komiyama Tokyo à Jimbocho, puis ensuite à l’espace d’exposition de la librairie Tsutaya de Daikanyama. J’avais vu le livre de l’illustratrice intitulé Nagori (余波-なごり-), mais j’avais hésité à me le procurer au Tsutaya de Daikanyama lors de mon premier passage. Je l’ai finalement acheté plusieurs mois plus tard en le feuilletant une nouvelle fois dans la même librairie Tsutaya. Le terme Nagori du titre fait référence à l’eau de mer et aux algues qui restent sur la plage et les rochers après le retrait des vagues. Le sens qu’Aki Akane veut y donner est un souhait que son univers graphique riche en couleurs reste imprimé dans le cœur et la mémoire des gens qui le regarde. Les illustrations ci-dessus sont extraites du livre. J’aime beaucoup son sens du détail notamment dans les vêtements très travaillés avec un brin de gothique, de mystique et à chaque fois un petit quelque chose de très japonais souvent lié aux traditions shintoïstes. Aki Akane dessine des portraits de jeunes garçons et filles, avec la plupart du temps une note fantastique. Les deux dernières illustrations ci-dessus font par exemple partie d’une série mélangeant des portraits avec des figures animales portées au rang de kami (le serpent blanc à gauche et le loup à droite). Il y a un grand nombre d’illustrations dans ce style, ce qui me plait vraiment beaucoup, au point d’utiliser une de ses illustrations comme écran de veille sur mon smartphone. Le livre grand format reprend également des illustrations utilisées à des fins commerciales ou pour des événements particuliers. Son style n’en est pas altéré pour autant. Je suis particulièrement surpris de voir une représentation en illustrations du duo électronique Justice, Gaspard Augé et Xavier de Rosnay. Je me demande bien quelle occasion a amené Aki Akane à collaborer avec le groupe français. En plus d’être illustratrice, Aki Akane est en fait également compositrice et interprète. Elle a même été invitée à la Japan Expo, il y a plus de dix ans. Je n’ai pas encore vraiment écouté sa musique, à part quelques morceaux piochés sur YouTube, mais je préfère à priori ses illustrations. J’ai tout de même sur mon iPod le morceau techno-pop Black Gänger sorti en 2014 sur son troisième album Square. Je ne pense pas qu’elle ait sorti d’autres albums depuis celui-ci.