sakura overload (un jardin universitaire)

Après avoir marché le long de l’avenue Meiji, je traverse le campus de l’Université Aoyama Gakuin sur lequel sont plantés quelques cerisiers en fleurs en manque certain d’admiration. Je me propose de les admirer quelques instants en parcourant les jardins universitaires et de les prendre en photo pour la postérité. Sakura et architecture vont de toute façon très bien ensemble que ça soit devant des bâtiments modernes ou d’autres beaucoup plus anciens. Le campus en en pleine phase de rénovation avec le remplacement d’un grand nombre des bâtiments les plus anciens, en maintenant tout de même ceux qui ont une valeur historique correspondant à l’installation de l’école il y a environ 150 ans. Je continue ensuite à marcher dans Aoyama en prenant finalement en photo la boutique Isabel Marrant Aoyama Store par l’architecte Yutaka Sone (曽根裕) et Isabel Marrant. Cette boutique appelée « YELLOW HOUSE » ouverte en 2023 se compose en fait d’une épaisse surface irrégulière jaune posée sur les murs extérieurs d’un bâtiment plus ancien. Ce type de rénovation extérieure me rappelle la boutique Bali Barret à Shibuya par l’atelier d’architecture Red Bunker de Franklin Azzi. D’une manière un peu similaire, les façades avaient été entièrement remodelées avec des ajouts protubérants. Cette boutique rouge aux airs de bunkers n’existe plus depuis longtemps mais l’immeuble de base doit toujours existé, mais normalisé. J’aime aussi prendre en photo le vieux cerisier à côté de la boutique agnès b. qui se trouve à proximité de la maison jaune.

J’ai n’ai regardé que d’un oeil et d’une oreille presque désintéressée quelques parties du festival Coachella version 2024 car j’ai peiné à trouver des musiques qui m’ont vraiment intéressé. C’était certes intéressant de voir Yoasobi jouer et chanter devant un public américain et en particulier assez savoureux d’entendre Ikura parler au public en anglais, plutôt bon d’ailleurs mais restant très poli. J’ai aussi aimé la puissance du son du groupe électronique français Jus†icE de Gaspard Augé et de Xavier de Rosnay (qu’on ne présente plus). Du groupe, je ne connais qu’un certain nombre de leurs succès passé, mais ça faisait plaisir de les re-découvrir. Je n’ai écouté que le début du set de Grimes qui m’a assez rapidement déçu et j’ai eu raison de m’arrêter là car sa prestation était apparemment un désastre complet en raison de problèmes techniques, et très certainement d’un manque de préparation. J’aime beaucoup Grimes mais elle se perd en ce moment dans certaines considérations d’intelligence artificielle et n’a pas sorti de nouveaux morceaux depuis très longtemps. Mais la surprise de Coachella était pour moi de découvrir le groupe français électronique L’Impératrice. Je n’ai en fait pu écouter que la toute fin de leur set mais l’énergie et l’ambiance m’ont tout de suite attiré. L’Impératrice est un groupe originaire de Paris composé de six musiciens: Charles Dugros de Boisseguin et Hagni Gwon aux claviers, David Gaugué à la guitare basse, Achille Trocellier à la guitare électrique, Tom Daveau à la batterie et Flore Benguigui au chant. J’écoute leur deuxième album Tako Tsubo sorti en 2021. Ce titre d’album est en fait un terme médical japonais (たこつぼ心筋症) faisant référence à une déformation du cœur dû à un stress émotionnel ou un trop-plein d’émotion, comme une intense tristesse ou une joie sidérante. On l’appelle également le « syndrome des cœurs brisés » et les morceaux de l’album reprennent différentes émotions et leurs symptômes que l’on viendrait associer à ce cœur brisé. L’ambiance musicale héritière de la French touch est élégante, minutieuse sans être pourtant dense. Il y a un certain minimalisme que me fait me demander où sont les cinq musiciens du groupe. Il n’empêche que le son de synthétiseurs vintage et l’atmosphère de pop spatiale qu’ils dégagent ensemble est magnifique. Flore Benguigui chante en français et en anglais. J’ai une tolérance très limitée pour le chant en français mais la légèreté délicate, la justesse et l’approche parfois ludique des paroles me plaisent vraiment beaucoup. Difficile de sélectionner un morceau préféré car l’album s’écoute comme un tout et gagne en ampleur à chaque écoute. Certains morceaux me rappellent l’ambiance musicale des années autour de 2010 où je découvrais beaucoup de belles choses grâce aux blogs musicaux francophones de l’époque. Une des trames musicales du morceau Off to the side me rappelle par exemple le morceau Deadbeat summer de Neon Indian que j’avais découvert en 2009. L’illustration de couverture de Tako Tsubo a un petit quelque chose de japonais mais elle a été dessinée par le réalisateur et dessinateur français Ugo Bienvenu. Sur la scène de Coachella 2024, L’Impératrice se produit par contre devant une grande illustration qui doit être d’Hajime Sorayama (ou très fortement inspirée). Cette même illustration sera la couverture de leur prochain album intitulé Pulsar qui sortira le 7 Juin 2024.

sakura overload (un fleuve urbain)

Les sakura étaient cette année comme une belle princesse qui se fait attendre à une réception (ou comme une rockeuse en kimono qui tarde à monter sur scène). Les cerisiers en fleurs se sont fait attendre en arrivant beaucoup plus tard que d’habitude, et en bouleversant par la même occasion l’organisation des diverses festivités ponctuelles accompagnant leur arrivée. La floraison est aussi imprévisible qu’éphémère et on nous avait assez répété à la télévision que ce week-end était le moment ou jamais pour apprécier les cerisiers en fleurs cette année. On sait que pluie et vent nous attendent la semaine prochaine, et il faudra être stratégique pour pouvoir profiter pleinement des paysages fleuris avant le point de non-retour. Cette présentation de la situation semble bien dramatique mais il n’en est rien. Cela fait 25 ans que je vois des cerisiers en fleurs tous les ans et l’effet de surprise s’est quelque peu estompé. Malgré cela, nous restons tout de même comme hébétés devant la beauté de ces cerisiers quand ils sont à leur pic de floraison. Je me demande bien quel effet addictif ces arbres parviennent à nous transmettre. On ne se lasse pas de les regarder et on éprouve à chaque fois le besoin renouvelé de partir à leur recherche, que ça soit dans l’environnement urbain proche de nous ou dans les campagnes aux alentours de la ville. Nous essayons en général de profiter des deux. Et les Sakura ne sont jamais aussi beaux que quand ils se réunissent pour former des toits ou des tunnels. L’avenue Meiji entre les carrefours de Tengenjibashi et de Shibuyabashi est trop large pour que les cerisiers de chaque coté se rejoignent pour former un tunnel mais l’endroit n’est en pas moins magnifique en cette période. Les cerisiers sont ensuite plus petits et moins fleuris entre Shibuyabashi, au niveau de la salle de concert Liquidroom que je montre en photo, et la station de Shibuya. L’avenue Meiji est souvent le premier endroit où je vais admirer les cerisiers en fleurs et naviguer cette rivière urbaine en voiture est à chaque fois une belle expérience.

Et pour accompagner la beauté parfois oppressante des cerisiers, je sélectionne quatre morceaux à tendance hip-hop plus ou moins marquée. Je n’avais jusqu’à maintenant jamais vraiment eu l’idée d’écouter la musique du groupe Kroi. Je pensais, pour je ne sais quelle raison, que leur style musical n’était pas pour moi. Je me rends compte que c’était une erreur en écoutant le single Hyper sur un EP du même nom sorti en Octobre 2023. Kroi est un groupe de Tokyo créant sa musique en fusionnant les genres, entre rock et hip-hop mais aussi Funk, Soul et R&B. L’idée du groupe est de créer une nouvelle musicalité en mélangeant tous ces styles musicaux et c’est en fait la signification de leur nom de groupe. Kroi vient du mot Kuroi (黒い), « noir » en japonais, qui est la couleur résultante lorsque toutes les couleurs sont mélangées. Kroi a été fondé en 2018 par Reo Uchida (内田怜央), au chant et guitare, et Yūki Hasebe (長谷部悠生), à la guitare, accompagnés de Masanori Seki (関将典) à la basse, Hidetomo Masuda (益田英知) à la batterie et Daiki Chiba (千葉大樹) aux claviers. Le morceau Hyper que j’écoute en ce moment correspond tout à fait à cet esprit de fusion musicale. Le tout début du morceau commence par une guitare très lourde et la voix sombre de Reo Uchida me rappellerait presque le grunge hardcore d’Alice in Chains, mais l’ambiance du morceau change très vite avec une voix rappée et un rythme extrêmement dynamique mélangeant même les cuivres. Ce melting-pot musical a une construction certes atypique mais montre une très grande maîtrise. Ce style aux apparences chaotiques n’est pas sans me rappeler l’approche stylistique du Millenium Parade de Daiki Tsuneta. Je ne soupçonnais pas que Kroi créait une musique aussi dense et maîtrisée. On reste ensuite dans les ambiances hip-hop avec le morceau Jibun no Kigen ha Jibun de Toru (自分の機嫌は自分で取る) d’ASOBOISM, sur son album YOLO sorti en Août 2023. ASOBOISM est compositrice, interprète et rappeuse originaire de Totsuka dans préfecture de Kanagawa. Je connaissais son nom depuis quelque temps car elle évolue dans les cercles du hip-hop féminin proche d’Akko Gorilla (あっこゴリラ) et de Valknee dont j’ai déjà parlé sur ce blog. Akko Gorilla participe d’ailleurs au morceau d’ASOBOISM que j’écoute en ce moment avec une autre rappeuse nommée CLR. J’aime beaucoup les nappes musicales enveloppantes et vaporeuses de ce morceau et la manière dont la voix rappée d’ASOBOISM et des deux invités viennent s’y intégrer d’une manière parfaitement fluide. C’est un superbe morceau qui a même un petit quelque chose de relaxant. Le morceau de Valknee, Not For Me, de son premier album Ordinary sorti le 10 Avril 2024, a en comparaison une trame musicale de synthétiseur beaucoup plus agressive. J’ai toujours aimé cette approche sans concession mélangée à la voix rap tout à fait atypique de Valknee, mais j’avais un peu perdu le fil ces dernières années. J’aime beaucoup ce morceau, même si je ne suis pas certain d’écouter tout l’album. De l’album, le morceau Loose est très particulier dans sa manière de forcer les fins de phrases, mais démontre qu’elle maîtrise extrêmement bien son flot. Elle n’intègre pas de coréen dans ses morceaux, ce qui est un peu dommage car j’adore quand elle le mélange avec le japonais, mais elle garde un certain accent de Kanagawa. DAOKO vient de sortir un nouveau single Tenshi ga Itayo (天使がいたよ) qui est assez génial, très rythmé et dense musicalement dans une ambiance de néons que j’adore. Ce morceau sera à priori sur son cinquième album Slash-&-Burn qu’elle vient d’annoncer et qui sortira le 22 Mai 2024, accompagné d’une petite tournée de deux dates à Osaka et Tokyo en Juin à laquelle j’aimerais bien assister, si le fan club (dont je ne fais pas partie) ne raffle pas toutes les places. Vue qu’elle n’a pas sorti de nouvel album depuis quatre ans, avec Anima, j’imagine qu’il n’y aura pas beaucoup de places disponibles. Ça fait en tout cas plaisir d’écouter ce genre de morceaux où DAOKO semble trouver parfaitement sa place, à mi-chemin entre la J-POP mainstream et une approche musicale beaucoup plus indépendante.

青い空をかえせ!⑥

La dernière étape de notre séjour passait par la ville d’Uji (宇治市) située au Sud de Kyoto. Uji est reconnue pour sa production et distribution de thé vert, depuis que le Shōgun Ashikaga Yoshimitsu (1358–1408) promut sa cultivation dans cette région. L’objectif de notre passage à Uji était la visite du temple bouddhiste Byōdō-in (平等院). Il s’agissait initialement d’une riche villa construite en 998 pendant la période Heian, reconvertie ensuite en temple en 1052 par Fujiwara no Yorimichi (藤原頼通), après l’avoir hérité de son père. Le pavillon du Phénix ou pavillon d’Amida, entouré d’un étang, a été construit en 1053. Il est célèbre car classé comme trésor national et représenté sur les pièces de 10 yens. Sur le toit de Byōdō-in, on trouve deux statues couvertes d’or de phénix ayant fière allure. On retrouve exactement la même figure de phénix représentée sur les billets de 10,000 yens. Un billet de 10,000 yens et une pièce de 10 yens étaient distribués à chaque visiteur pour pouvoir comparer et se faire une idée précise des ressemblances (je plaisante). Après avoir vu la représentation du Mont Fuji sur le billet de 1000 yens au lac Motosu (本栖湖) au tout début de cette année, j’ai l’impression qu’on essaie inconsciemment de faire le tour de tous les lieux représentés sur les billets japonais avant leur prochain renouvellement en Juillet 2024.

Le hall principal de Byōdō-in est prolongé par deux ailes latérales composées de galeries et couloirs ouverts sur l’extérieur et portés par de fins pilotis. Ces ailes viennent agrandir la salle centrale et donne au temple une impression de grande légèreté. On y ressent même quelque chose de céleste, dans le sens où cette impression de légèreté nous allège en quelque sorte l’esprit. On peut bien sûr faire le tour du temple, mais également entrer à l’intérieur en réservant sur place pour un créneau horaire, une fois toutes les heures. Il ne faut pas arriver trop tard pour espérer voir l’intérieur, qu’il faut bien entendu ne pas manquer. Après une petite heure d’attente, nous avons pu entrer à l’intérieur. Les photographies y sont strictement interdites et la visite de 15 minutes avec guide est très encadrée. Un grand musée de béton se trouve également dans le parc tout près du temple, pratiquement caché sous terre et derrière la végétation. On ne le voit pratiquement pas depuis le temple. Je suis tout de suite tombé en admiration devant la qualité du béton, les espaces aux plafonds hauts et l’arrangement de l’espace intérieur. Ce musée nommé Byōdō-in Takaramonokan Hōshōkan (平等院宝物館鳳翔館) a été conçu par l’architecte Akira Kuryu (栗生明) et a ouvert ses portes en 2001. Parmi les objets exposés, on retrouve les statues de phénix en bronze du toit et une série de statues en bois de représentations bouddhistes sur des nuages. Ces Bouddhas se déplaçant sur des petits nuages m’on tout de suite rappelé le jeune Sangoku de Dragon Ball créé par le regretté Akira Toriyama. Plusieurs originaux de ces statues de Bouddhas volants sont en exposition dans le musée tandis que d’autres originaux sont restées fixés à l’intérieur du hall du Phénix que l’on a pu voir lors de notre visite guidée.

Notre visite de Kyoto était décidément placée sous le signe du phénix, symbole de la renaissance. Je ne sais pas si cette coïncidence prendra pour moi un sens particulier, mais ne signifie à priori pas une renaissance de ce blog. Après avoir acheté du thé vert, des pâtes au thé vert et du curry au thé, l’horloge nous indique qu’il est l’heure de prendre la route pour rentrer vers Tokyo. On n’aura malheureusement pas assez de temps pour aller voir la station d’Uji (Keihan) aux formes brutalistes, par l’architecte Hiroyuki Wakabayashi (若林広幸). Il est déjà 16h30 et le système de navigation nous indique d’une manière très optimiste 5h30 de route. Le système aime nous narguer car on sait très bien qu’il nous faudra une ou deux heures de plus, surtout que des bouchons nous attendent rapidement à l’entrée de Nagoya sur l’autoroute Ise Wangan longeant l’océan. Nous ferons une première pause à l’aire de repos de Nagahama située à l’embouchure de trois rivières (Kiso, Ibi et Nagara). Nous y dînerons tôt en regardant les montagnes russes du parc d’attractions situé juste à côté. Le retour se fait ensuite plus fluide mais la nuit est déjà tombée lorsqu’on aborde la longue autoroute Shin-Tomei. Nous arriverons finalement avant minuit. C’est loin de me déplaire de conduire sur de longues distances (c’est de famille), quand je suis accompagné par une playlist musicale préparée à l’avance. Je suis par contre le seul à siffler et à chantonner dans la voiture, car tout le monde à part moi est déjà endormi.

あったかいね、半袖でいいかも

En photographies sur ce billet: les formes courbes de béton et de verre du building GUN-AN (軍庵) par Tadasu Ohe situé à Hiroo, celles plus angulaires d’un petit bâtiment de béton pour une agence publicitaire par Tadao Ando, un groupe de cyclistes dont un inhabituellement rétro passant en bas du grand cimetière d’Aoyama en direction du croisement de Nishi Azabu, la tôle angulaire aux airs de vaisseaux spatiaux du musée 21_21 Design Sight, toujours par Tadao Ando, posé dans le parc du complexe Tokyo Mid-Town, le tube métallique comme un grand vers survolant une partie de Nogizaka et des étranges visages derrière une vitrine d’Omotesando. Ces visages sont animés de mouvements robotiques et se trouvent à l’intérieur du vendeur de lunettes Gentle Monster dont je parlais avant son ouverture dans un billet récent. Il y a certains points de liaison entre les photographies de ce billet, que ça soit le béton brut, les surfaces métalliques ou les cyclistes qui traversent furtivement ces photographies. Plusieurs de ces photos évoquent une impression de futurisme qui se matérialise par la photographie finale de ces trois visages inquiétants.


AJICO a sorti le 13 Mars 2024 un nouvel EP de 6 titres intitulé Love no Genkei (ラヴの元型). C’est avec un plaisir non dissimulé qu’on accueille un nouvel épisode de leur aventure musicale. Le premier single reprenant le titre du EP frappe par sa coolitude maîtrisée entre les riffs merveilleusement accrocheurs de Kenichi Asai (浅井健一) à la guitare, l’omniprésente basse de TOKIE, la régularité impeccable de la batterie de Kyōichi Shiino (椎野恭一), et le chant particulièrement inspiré d’UA. Le morceau ne part pas dans les excès car le groupe semble très sûr de ce qu’ils veulent délivrer dans une maturité assumée. Par rapport à l’EP précédent Setsuzoku (接続) sorti en 2021 que j’évoquais à l’époque, il y a sur ce nouvel EP un meilleur équilibre entre les voix de UA et de Kenichi Asai. Le morceau d’ouverture Love No Genkei (ラヴの元型) est principalement chanté par UA mais Benji intervient dans les chœurs tandis que le deuxième morceau Attakaine (あったかいね) est principalement chanté par Benji avec UA dans les chœurs. Le cinquième morceau Kitty (キティ) est également interprété par Benji et sa décontraction cool y est remarquable. Ce morceau est un de mes préférés du EP. UA est beaucoup plus passionnée dans son chant, notamment sur le superbe Kotora ga Shuyaku ni Naranai (言葉が主役にならない), et sa voix est comme toujours très marquée. C’est le contraste entre les approches très différentes au chant de Kenichi Asai et de UA qui est un des grands intérêts du groupe. Et musicalement, c’est bien entendu très bien maîtrisé. C’est un EP que j’écoute très régulièrement ces dernières semaines, depuis sa sortie.

Je suis allé voir l’exposition MOMOPOLY (モモポリー), qui se déroulait du 17 au 24 Mars 2024 dans l’espace Spiral Garden à Aoyama, spécifiquement pour voir les photographies de Kotori Kawashima (川島小鳥) qu’on y montrait. J’avais déjà parlé de ce photographe dans mon billet au sujet de l’album Ne- Minna Daisuki Dayo (ねえみんな大好きだよ) de Ging Nang Boyz (銀杏BOYZ), car la photographie de couverture est de ce photographe. Il s’agit d’une exposition couvrant plusieurs artistes et l’espace consacré aux photos de Kotori Kawashima était donc limité. On pouvait cependant voir quelques unes de ses très belles photographies dont certaines très connues de la série consacrée à la petite Mirai chan (未来ちゃん). Certaines des photographies montrées dans cette exposition ont été utilisées pour d’autres couvertures d’albums ou EPs de Ging Nang Boyz. Ses photographies se concentrent sur les portraits mais ceux-ci sont placées dans un environnement qui vient influencer les impressions que l’on a de ces visages. Il ne s’agit pas de simples portraits car ils nous racontent une histoire qu’on parvient à deviner comme si ces photographies étaient des éléments d’une vidéo.

青い空をかえせ!⑤

Après la visite du Pavillon d’Or, nous partons vers le temple Ryōan-ji (竜安寺) qui se trouve à une vingtaine de minutes à pieds. Je l’avais déjà visité il y a 25 ans avec mes parents et ma sœur lors de leur première visite au Japon. Le temple zen a été fondé en 1450 par Katsumoto Hosokawa (細川勝元), qui était haut fonctionnaire politique du Japon féodal de l’époque de Muromachi. L’élément le plus remarquable du temple est son jardin de 15 rochers placés sur une surface plane d’environ 200m2 entourée de murets, sauf pour la partie visible depuis l’intérieur du temple. Autour des rochers représentant des montagnes, un tapis de graviers finement et harmonieusement ratissés donne l’image d’un océan dont les vagues viennent percuter les rochers. Une des particularités du jardin est qu’on ne peut voir en même temps la totalité des 15 rochers. Une des arêtes de la surface rectangulaire du jardin est ouverte sur le temple et permet aux visiteurs de s’asseoir pour observer immobile les mouvements des vagues de graviers d’argile blanche kaolin. Les visiteurs sont nombreux mais on peut tout de même visiter le temple et son jardin sans gêne et s’asseoir sur les marches de bois au bord du jardin de pierres sans attendre. On a par contre un peu de mal à trouver la sérénité nécessaire pour apprécier pleinement l’harmonie zen qui se dégage du jardin. Il faudrait se trouver seul, ou avec un nombre limité d’autres personnes, pour pouvoir prendre son temps et vraiment s’abandonner dans ces montagnes et cet océan. La visite du grand camphrier du sanctuaire Tōshōgū à Ueno m’avait par exemple donné des conditions plus adaptées. A l’intérieur du temple Ryōan-ji, on pouvait admirer une très belle série de plusieurs peintures Fusuma-e de dragons dans les nuages peintes sur des portes coulissantes. Ces longues fresques sont récentes et ont été peintes par Morihiro Hosokawa (細川護煕), ancien premier ministre du gouvernement japonais, reconverti dans les arts après sa retraite. Il a actuellement 86 ans. Il est en fait descendant du clan Hosokawa à l’origine de la fondation du temple et a fait donation de ces grandes peintures Fusuma-e visibles au public depuis Octobre 2023. Elles valent franchement le détour. Après un tour de l’étang dans les jardins du temple, nous reprenons le bus pour retourner à notre hôtel. En chemin, je remarque un musée aux formes blanches originales. Il s’agit du Kyoto Prefectural Insho-Domoto Museum of Fine Arts, ouvert en 1966 et consacré au peintre japonais Insho Domoto qui était actif pendant les périodes Taisho et Showa. Le musée lui-même a été conçu par le peintre. Nous arrivons dans le centre de Kyoto à midi. Il nous faut maintenant reprendre la voiture pour se mettre en route sur le chemin du retour. Mais nous nous arrêterons quand même à Uji pour une dernière visite.