美しく戦いましょう

Il faut se battre contre les chaleurs du mois de Septembre comme on le faisait au mois d’Août. Mon envie de marcher s’érode avec les degrés dépassant les normales saisonnières. Je prends donc moins de photos en ce moment et c’est une bonne chose car j’ai un peu de mal à tenir le rythme au niveau de l’écriture. Je manque parfois de courage pour me lancer dans l’écriture de certains billets, quand je sais à l’avance qu’ils vont être longs à écrire. Je suis loin de regretter de les avoir écrit une fois qu’ils sont terminés, mais c’est ce genre de longue écriture consommatrice en temps qui me font poser une fois de plus des questions sur l’utilité et la finalité de ce blog.

Je connaissais la jeune compositrice et interprète Toaka (十明) pour son chant remarquable sur le single Suzume (すずめ) de RADWIMPS pour le film d’animation Suzume (すずめの戸締まり) réalisé par Makoto Shinkai. Ce morceau avait eu beaucoup de succès et l’avait tout de suite fait connaître du grand public. Je n’avais pourtant pas suivi son actualité jusqu’à ce que son nom me revienne en tête récemment car la photographe Mana Hiraki (平木希奈) a réalisé la couverture de son dernier single intitulé Dancing on the Miror, sorti le 30 Juillet 2024. Ce n’est pas la première fois que je découvre une nouvelle ou un nouveau artiste par l’intermédiaire de cette photographe, qui est donc pour moi une très bonne source d’inspiration. Dans la foulée de ce dernier single, je me lance dans l’écoute de son excellent EP Boku Dake no Ai (僕だけの愛) composé de cinq titres. Sur le morceau Cinder ella (灰かぶり), j’adore sa voix, assez exceptionnelle il faut bien le dire, pleine de nuances qu’elle maîtrise à la perfection jusqu’aux soupirs entre certaines paroles. Elle a une voix puissante et expressive qui en impose, comme si elle prenait le dessus sur les mots qu’elle prononce. J’ai commencé l’écoute de cet EP par le dernier morceau intitulé Sanagi (蛹) qui a la composition la plus atypique. Ce genre de morceaux m’attirent particulièrement. J’aime aussi beaucoup la manière dont l’atmosphère musicale varie au fur et à mesure des morceaux. Le morceau titre Boku Dake no Ai (僕だけの愛) évolue par exemple sur un rythme folk à la guitare sèche pendant sa majeure partie, mais décolle tout d’un coup sur des hauteurs inattendues. La voix de Toaka lui permet tout à fait ce genre d’envolées et c’est un plaisir de se laisser guider par son chant. Ses morceaux ont pour la plupart une densité et une tension pop qui nous accrochent immédiatement et cette composition musicale clairement axée pop possède une inventivité certaine. Sur son dernier single New Area on dirait qu’elle chante comme elle mènerait une bataille, tant elle transmet de la force à chaque mot qu’elle prononce. Et cette bataille vocale est menée avec beaucoup d’élégance.

美しく戦いましょう。Let’s fight gracefully.

un été sur la péninsule de Kii (8 et fin)

Pendant toute notre visite du temple Hōryūji (法隆寺), nous recherchons les points d’ombre sous les porches car le soleil tape fort. Les chaleurs nous avaient relativement préservé pendant tout notre séjour sur la péninsule de Kii sauf pour cette dernière journée à Nara. Après les deux heures de visite avec notre guide, nous n’aurons malheureusement pas le courage de visiter la partie Est du complexe. Ce n’est qu’un petit regret car la partie la plus intéressante reste l’enceinte Ouest que nous venons de visiter. Pendant notre visite, il s’est produit un petit événement inhabituel. Une des branches du grand pin planté à proximité de la pagode à cinq étages s’est soudainement brisée. Aux dires de notre guide, il s’agit d’un fait relativement rare, qui semblait beaucoup étonné le personnel du temple. La branche a été vite débarrassée. Nous étions assez tranquille pendant notre visite, car il n’y avait pas foule dans l’enceinte Ouest. Ça m’a étonné vu l’importance historique d’Hōryūji, mais il est vrai que ce temple est excentré par rapport au grand parc de Nara qui reste l’attraction touristique principale de la ville. J’aurais voulu y aller, ne serait ce que pour vérifier que les daims ne sont pas malmenés par les touristes, mais le temps nous manquera. La chaleur ambiante nous pousse plutôt vers une petite pâtisserie japonaise proposant de la glace pilée Kakigōri (かき氷). Nous avons trouvé une très bonne adresse, Nara Shogaku (奈良祥樂 法隆寺本店), car la glace pilée à la pêche était un véritable bonheur. Il faut dire que la glace pilée est une spécialité de Nara. On y trouve même un sanctuaire en son honneur, le sanctuaire d’Himuro (氷室神社). Nous n’aurons malheureusement pas le temps d’y aller. Un autre grand regret est de ne pas avoir visité le Mont Koya. Il nous aurait facilement fallu une journée de plus, et ce sera donc pour une prochaine fois car l’heure du retour se fait proche. Nous passerons tout de même rapidement à l’emplacement de l’ancien grand palais impérial de Nara Heijokyu (平城宮跡). Le parc est immense et certains des bâtiments du palais ont été reconstruits récemment. Je ne sais pas si l’intention est de reconstituer le palais dans son intégralité mais on peut déjà compter trois bâtiments reconstruits dont la grande porte Suzakumon que je montre en photo ci-dessus. Avec ces magnifiques images de Nara et de la péninsule de Kii en tête, nous reprenons la route du retour vers Tokyo. Nous voyagerons pendant presque six heures sans encombres malgré quelques ralentissements attendus sur l’autoroute Ise-Wagan au niveau de Nagoya. Il fait déjà nuit alors que nous parcourons les montagnes sur l’autoroute Shin-Tomei, et nous arrivons à Tokyo vers 23h après plusieurs pauses. Notre périple nous aura fait traverser ou visiter 8 préfectures (Kanagawa, Shizuoka, Aichi, Mie, Wakayama, Nara, Osaka et Shiga), si je ne trompe pas, certaines d’entre elles étant relativement difficiles à visiter sans voiture. Malgré cela, j’espère que cette petite série photographique en huit épisodes à propos d’un été sur la péninsule de Kii aura donné quelques idées aux visiteurs de Made in Tokyo.

un été sur la péninsule de Kii (7)

Notre visite des temples de Hōryūji (法隆寺) à Nara démarre assez tôt le matin, car nous le visitons en groupe accompagné d’un guide attaché à l’hotel où nous avons passé la nuit. Le thème de la visite guidée change tous les deux mois, et notre visite se concentre sur les bases du temple bouddhiste que l’on peut apprendre grâce aux temples d’Hōryūji (法隆寺で学ぶお寺のイロハ). Le terme Iroha (イロハ) signifie le début ou la base des choses, mais il s’agit surtout des trois premiers kana du poème Iroha-uta (いろは歌) attribué au moine et savant bouddhiste Kūkai (空海). Ce poème a la particularité d’être un pangramme, c’est à dire une phrase comprenant toutes les lettres de l’alphabet. Dans le cas présent, Iroha-uta contient les 47 caractères kana et chaque caractère n’est utilisé qu’une seule fois. A travers ce thème, notre guide nous fait comprendre qu’il ne nous expliquera pas les temples d’Hōryūji dans leurs moindres détails mais nous fera part de nombreuses anecdotes parfois amusantes de la vie quotidienne Japonaise à partir d’une explication de certains lieux et statues des temples d’Hōryūji.

Sous une chaleur difficile à soutenir, il faut bien le dire, nous visitons donc ce haut lieu du bouddhisme japonais. Le temple Hōryūji a été fondé en l’an 607 par le Prince Shōtoku (聖徳太子), qui œuvra à la promotion du bouddhisme au Japon. Il contient les plus anciennes structures en bois du pays qui ont été inscrites au patrimoine mondial de l’UNESCO. Ces structures se trouve dans l’enceinte Ouest du temple que l’on appelle Saiin Garan (西院伽藍). A l’intérieur de l’enceinte couverte d’une arcade en bois, on découvre ces trois structures: la porte centrale (Chumon 中門), le hall principal (Kondo 金堂) et une superbe pagode de cinq étages. Ces structures ont été construites à l’épique Asuka (538-710) et n’ont subi aucune destruction, malgré quelques rénovations au fur et à mesure des années. Notre guide nous explique par exemple que des dragons ont été ajoutés sur certains piliers du hall central. Ces bâtiments sont à la fois impressionnants et fascinants. Ils sont connus de tous les japonais car le temple Hōryūji est présent dans les manuels scolaires pour son importance historique. Ce hall contient quelques unes des plus anciennes statues de Bouddha du Japon, ayant survécues depuis l’ère Asuka. On peut les voir en faisant le tour de l’intérieur du grand hall.

Eternally Returning・Paradigm Shift

Une fois n’est pas coutume, je me suis décidé un peu au dernier moment à aller voir Haru Nemuri (春ねむ) en concert. Il restait des places pour la date de Tokyo de sa tournée 2024 Flee from the Sanctuary (サンクチュアリを飛び出して), qui est d’abord passée par Nagoya puis Osaka. Le concert de Tokyo avait lieu dans la salle de Shibuya WWW X le Vendredi 6 Septembre 2024. Son album Haru to Shura (春と修羅) sorti en 2018, le EP Kick in the World sorti la même année et les morceaux sortis avant cela dont le sublime Tokyo (Ewig Wiederkehren), m’avaient tellement marqué, que j’avais trouvé le EP Lovetheism suivant moins inspiré, à part le très beau Fanfarre. Je n’avais du coup pas écouté avec attention son album suivant Shunka Ryougen (春火燎原) sorti en 2022 et j’avais été assez partagé sur le EP INSAINT qui suivait en 2023. Depuis quelques temps, je suis la progression de la jeune compositrice et interprète rock Minori Nagashima (長嶋水徳), qui a participé en première partie à la date d’Osaka de la tournée d’Haru Nemuri. Cela m’a en quelque sorte rappelé à mes premiers souvenirs du choc qu’avait provoqué en moi la musique d’Haru Nemuri, mélangeant poésie rappée et rock parfois des plus virulents. Acheter un billet pour son concert a en quelque sorte attisé une flamme qui n’était pas éteinte, et je me suis ensuite mis à écouter son album Shunka Ryougen pour me préparer au concert, tout en me disant que j’avais eu tord de ne pas m’y être plongé plus tôt tant il regorge de morceaux puissants. Son style sur cet album est immédiatement reconnaissable, mais est en fait assez différent de Haru to Shura car plus varié dans son approche. Je me souviens avoir été un peu dérangé par les cris de type « death voice » qu’elle pratique sur quelques morceaux de INSAINT, mais ceux-ci interpellent sur les morceaux de Shunka Ryougen, notamment sur Never Let You Go (あなたを離さないで) et Shunka Ryougen (春火燎原), au point où cette rage qu’elle transmet dans sa voix me donne des frissons à chaque écoute. C’est un détail, mais le fait qu’elle utilise en interlude musical sur Shunka Ryougen une version, certes modifiée, du morceau Arabesque de Claude Debussy a fini par me convaincre que j’avais été très mal inspiré de ne pas avoir écouté cet album jusqu’à maintenant. Le morceau Never Let You Go (あなたを離さないで), ainsi que plusieurs autres, compte même parmi les morceaux que je préfère d’Haru Nemuri.

La prestation d’Haru Nemuri sur la scène de la salle WWW X de Shibuya, que je finis par bien connaître, était précédée de deux groupes. La première partie était assurée par un jeune artiste de 18 ans nommé Yatsui Ichijiku (奴居イチヂク) accompagné pour ce concert par le groupe EiQkessha (永Q結社). Suivait ensuite le groupe rock alternatif Mass of the Fermenting Dregs (en diminutif MOTFD ou Masudore), que je connais mieux même si je ne m’étais pas encore penché sur leur dernier album Awakening:Sleeping sorti en Août 2022. Le fait que Masudore joue en première partie d’Haru Nemuri m’a aussi convaincu que ce concert était une occasion à ne pas laisser passer. En fait, j’étais aussi très curieux de voir Haru Nemuri, car j’avais l’image d’une présence extrêmement dynamique et physique sur scène, du moins lors de ses tournées à l’étranger, où elle pouvait se jeter dans la foule. Je me suis demandé si elle pouvait être aussi proche du public sur une scène japonaise à priori plus réservée. Il s’avère qu’Haru a un talent certain pour animer la foule. Le concert démarrait à 19h pour une demi-heure en compagnie de Yatsui Ichijiku et de son groupe, suivi de Mass of the Fermenting Dregs à partir de 19:40 pour environ une heure de set et finalement Haru Nemuri à partir de 21:00 pour plus d’une heure.

Je suis arrivé quelques minutes avant 18h qui était l’heure annoncée d’ouverture de la salle WWW X. L’appel des numéros avait commencé avant l’heure et il n’y avait que peu de personnes regroupées devant la salle à ce moment là. Ça n’a pas empêché le staff de la salle de procéder à l’appel méthodique des numéros de places, et rapidement arriver jusqu’au numéro 300 vers lequel je me situais. Avec un tel numéro de place, j’aurais dû être placé dans la deuxième partie de la salle depuis la scène, mais le fait d’arriver tôt m’a permis de rentrer en avance et me placer proche de la scène au deuxième rang. Je ne souhaitais pas vraiment être trop près de la scène, sachant qu’Haru Nemuri fait parfois des sauts en diving dans la foule et qu’il faudrait éviter de se prendre une pointure de ses chaussures renforcées en pleine figure. J’entre au final dans la salle une heure en avance ce qui me laisse un peu de temps pour envoyer les messages traditionnels à Nicolas, et mahl également cette fois-ci, pour leur faire part de mon enthousiasme avant le début du concert. La salle se remplit petit à petit derrière moi. La proportion d’étrangers est plus importante que pour les concerts auxquels j’ai pu assister jusqu’à maintenant. Il faut dire qu’Haru Nemuri et Masudore font régulièrement des tournées à l’étranger, et ils entameront même très prochainement une tournée américaine. Je pense même qu’Haru Memuri et Masudore sont plus reconnus à l’étranger qu’au Japon. Pendant ce moment d’attente avant le début du concert, je reste attentif à la musique de fond qui nous fait patienter. Je me suis toujours demandé si ces morceaux d’attente étaient décidés par le management de salle ou par les artistes. Il semblerait que les choix de morceaux soient plutôt fait par l’artiste car Haru Nemuri partageait après le concert la playlist sur Twitter.

Pour la première partie, Yatsui Ichijiku et EiQkessha ont interprété 6 morceaux avec une énergie et une assurance assez bluffante. Le premier morceau était en fait joué par d’autres musiciens que ceux de EiQkessha puis un changement s’est opéré à partir du deuxième morceau. Les morceaux que j’ai pu écouter sur le premier et unique EP Temee no Sōmatō de mata Aou (テメェの走馬灯でまた会おう。) de Yatsui Ichijiku se base principalement sur une instrumentalisation électronique tandis que la formation lors du concert était plutôt orientée rock avec guitares et batterie. Le beat électronique était bien entendu présent et même particulièrement puissant sur certains morceaux. Yatsui Ichijuku maîtrisait très bien son set mais on sentait qu’il n’était pas complètement à l’aise lorsqu’il s’adressait à la foule pendant les quelques passages de MC. Leur set a passé assez vite car les morceaux se sont enchaînés avec beaucoup d’énergie.

Les interludes entre les groupes étaient heureusement assez courts. Pour la préparation du set de Masudore, j’étais assez surpris de voir les membres du groupe faire leurs ajustements d’instruments eux-mêmes. Il faut dire que Mass of The Fermenting Dregs est complètement indépendant, même dans la production de leurs albums, ce qui suppose qu’ils faut qu’ils fassent tout par eux-mêmes. Quelques membres du Staff étaient tout de même présents, dont une personne portant un t-shirt du feu groupe Ms.Machine, ce qui m’a bien étonné mais fait sourire. J’écoute Masudore depuis de nombreuses années et j’étais content de voir monter sur scène Natsuko Miyamoto (宮本菜津子) qui assure le chant et la guitare basse, Naoya Ogura (小倉直也) à la guitare et au chant, et Isao Yoshino (吉野功) à la batterie. Leur set est un mélange de leur dernier album Awakening:Sleeping et de quelques morceaux plus anciens. Je les connaissais tous à part un inédit qui n’est pas encore sorti en single. J’ai découvert leur dernier album Awakening:Sleeping récemment et je l’ai beaucoup aimé, notamment le long morceau quasiment instrumental intitulé 1960 qui était au centre de leur setlist de concert. Quelle puissance de guitares et de batterie! Nos oreilles n’en sortent pas tout à fait intactes, mais c’est un véritable bonheur. J’adore le jeu de guitare de Naoya Ogura, et le fait de le voir jouer sur scène, le visage caché dans ses cheveux noirs. C’est pour sûr un esthète car on a le sentiment que sa manière de se positionner sur scène est réfléchie, notamment par rapport à Natsuko Miyamoto qui se laisse entraîner par le flot des guitares et par les sensations qu’elles procurent. Il y a une certaine complémentarité dans leur manière d’être sur scène. Le batteur à l’arrière est forcément plus discret mais ça ne l’empêche pas de taper très fort. Pendant les moments de MC, Natsuko nous a rappelé la premiere rencontre de Masudore avec Haru Nemuri. C’était il y a sept ans et Haru démarrait sa carrière. Elle avait apparemment fait la première partie de Masudore et le concert d’aujourd’hui était en quelque sorte un retour d’ascenseur. Là encore, les morceaux se sont enchaînés sans temps mort avec toujours la même puissance. C’est assez agréable de reconnaître certains morceaux des premiers EPs, comme l’excellent Delusionalism par lequel j’avais découvert le groupe et que je n’avais pas écouté depuis longtemps.

À la fin du set de Masudore, la scène prend une toute autre forme. La batterie est poussée à droite et des équipements électroniques sont mis en place. Après le DJ et le batteur, Haru Nemuri entre ensuite en scène sur le morceau Destruction Sisters du dernier EP INSAINT puis enchaîne rapidement sur deux morceaux de son premier album Haru to Shura, Narashite (鳴らして) puis Sekai wo Torikaeshite Okure (せかいをとりかえしておくれ), ce qui met tout de suite la foule dans de bonnes conditions. Haru bouge beaucoup sur scène, danse en se laissant entraîner par le flot et le rythme de ses morceaux. Elle encourage d’entrée de jeu le public à montrer sa présence et à faire corps avec elle. Elle arrive très bien à engager le public, d’une manière que je n’avais pas constater sur les concerts que j’ai pu voir ces dernières années à Tokyo. Je pense que son expérience des concerts à l’étranger se ressent sur scène au Japon. Et une fois que le public est chaud, la tension ne redescend pas de si tôt et l’accompagne jusqu’au bout. Haru dépense beaucoup d’énergie sur scène, ça se voit et elle est même obligée de prendre quelques moments de pause entre deux morceaux pour souffler. Elle en profite pour s’addresser au public. On ressent qu’elle s’investit pleinement dans sa musique, ce qui me rappelle que les émotions qu’elle transmet sont tout à fait authentiques et même touchantes. Je me souviens avoir été parfois un peu agacé par ses coups de gueule nombreux sur les réseaux sociaux, mais on ressent à travers ses mots qu’il s’agit d’angoisses véritables qui la prennent au cœur et qu’elle a besoin de transmettre. Elle nous en parle un peu pendant ses passages adressés au public. Alors qu’elle semble épuisée après un morceau au milieu du set, une personne dans la foule lui demande si elle va bien: « Daijōbu ? ». Elle répond par la négative en rigolant: « Daijōbu ja nai! ». Et elle nous indique que cette question est en fait fort à propos car son prochain single prendra justement ce titre et ses paroles. Elle nous annonce qu’il s’agit d’une collaboration sur un EP avec le groupe américain Frost Children composé de deux sœurs. Le morceau Daijoubu Desu est disponible au moment où j’écris ces lignes, mais ne l’était pas au moment du concert.

Le set d’Haru Nemuri se compose de 14 morceaux sans rappels. Il faut dire que, dans sa totalité, ce concert dépasse déjà les 2h et demi. J’adore quand Haru se rapproche au plus près du public. On sent qu’elle en a besoin. Il y a une balustrade entre la scène et le public et elle n’hésite pas à monter dessus en s’aidant des mains du public pour se placer au dessus de l’audience. Elle a même fait un saut dans la foule à la fin du morceau Sekai wo Torikaeshite Okure. Comme j’étais au deuxième rang, il est arrivé plusieurs fois qu’elle se tienne debout juste devant moi. Je n’aime pas beaucoup me distraire du concert en prenant des photos ou des bouts de films mais je n’ai pas pu m’empêcher à ces moments là. Pour le dernier morceau intitulé Ikiru (生きる), elle se tenait également juste devant moi. L’émotion était très grande à ce moment là car elle retenait ses larmes à la toute fin du concert. C’est un moment très particulier que j’ai pu filmer et que je regarde encore maintenant, un peu plus d’une semaine après le concert. Encore une fois, on se dit qu’elle ne triche pas et que son attitude correspond souvent à un excès émotionnel. Le morceau Shunka Ryougen (春火燎原) qui précédait Ikiru était particulièrement prenant car elle a fondu en larmes en plein milieu. J’ai pensé à ce moment là qu’elle avait craqué, mais en fait non, elle reprend le dessus et continue à chanter. Je ressens cette dualité entre fragilité et force dans son chant, et cela a toujours été un aspect que j’ai aimé dans la musique d’Haru Nemuri. Ce concert me rappelle à tout cela, ponctué de messages existentiels entre la vie et la mort. Sa voix peut être puissante et dure sur des morceaux comme I refuse (わたしは拒絶する) et Never Let You Go (あなたを離さないで). En live, cette voix ressemblant à un cri est réminiscente du death metal. Elle donne froid dans le dos lorsqu’on l’écoute.

Une des surprises du concert était de voir le rappeur GOMESS soudainement débouler sur scène sur le morceau Rock’n’roll never dies (ロックンロールは死なない). Les deux avaient déjà chanté en duo sur le morceau sore eyes sorti en 2016. GOMESS assurait également la première partie de cette tournée d’Haru Nemuri à Nagoya et Osaka. Je connaissais son nom depuis longtemps pour des morceaux de Yackle (烏の餌 et Judge) avec la compositrice et interprète Utae dont j’ai souvent parlé sur ce blog. Pendant toute une partie de ce morceau, Haru se trouvait une nouvelle fois debout en hauteur portée par la main d’une spectatrice, tandis que GOMESS faisait des aller-retours sur scène. Il avait l’air d’être impressionné par l’ambiance qui régnait dans la salle. Sa voix puissante contribuait à mon avis très bien à faire monter la température. Je trouve que le costume de scène d’Haru et sa coiffure étaient très travaillés et vraiment magnifiques. Le costume un brin futuriste a été conçu par Lisa Tsuchiya. Alors que le concert s’achève déjà, Haru Nemuri accompagnée de son groupe descendent de la scène pour une photographie avec le public. On peut d’ailleurs me voir sur la gauche de la photo. Tout le concert a été filmé par un amateur de Glasgow qui lui avait demandé la permission préalable et qui avait déjà filmé son concert à Glasgow. J’espère que cette vidéo sera présente sur YouTube prochainement. Les photographies du billet sont prises par moi-même, par le photographe attitré Ed Sōta et par un membre du public nommé Yuasa qui a fait un travail intéressant sur le rendu de ses photos ressemblant à un traitement HDR. Je me permets de mélanger ces photos avec les miennes pour illustrer convenablement ce rapport de concert. Il est 22:30 et c’est le moment de sortir de la salle. En entrant, je n’avais pas vu un beau bouquet de fleurs au nom de NHK Venue 101. Je ne pense pas qu’Haru Nemuri soit déjà passée dans cette émission musicale de la NHK. Elle passera peut-être dans un avenir proche, ce qui serait une bonne nouvelle pour Haru en terme de visibilité locale. Sur les tables près de la sortie, des flyers annoncent déjà le prochain concert d’Haru Nemuri qui se déroulera dans cette même salle WWW X de Shibuya. Il s’agira d’un concert à deux artistes car Haru partagera l’affiche avec les rappeurs expérimentaux japonais Dos Monos, pour un concert le 11 Novembre 2024. Je ne connais pas la musique de Dos Monos, mais je connais par contre Zo Zhit, un des trois rappeurs du groupe, pour un duo avec AAAMYYY sur le morceau Tengu de son album Annihilation. Zo Zhit était également présent lors du concert Option C d’AAAMYYY. Sa voix puissante m’intéresse depuis un moment, et il faut que je jette prochainement une oreille attentive à la musique de Dos Monos.

Pour reference ultérieure, je note ci-dessous les set lists des trois groupes et artistes participant à la tournée Haru Nemuri Tour 2024 | Flee from the Sanctuary (サンクチュアリを飛び出して) le 6 Septembre 2024 dans la salle WWW X de Shibuya. Pour Yatsui Ichijuku, je lui ai en fait demandé directement et il m’a gentiment et très rapidement donné sa playlist sur Twitter.

Yatsui Ichijiku (奴居イチヂク) with EiQkessha (永Q結社):

1. テメェの走馬灯でまた会おう。
2. 首都圏絆創膏
3. TECHNICS
4. 愛いびぃ愛らゔゆぅ
5. ヨミへ…。
6. 魂のlv./永Q結社

Mass of the Fermenting Dregs (マスドレ – MOTFD):

1. Dramatic, de l’album Awakening:Sleeping
2. Sugar, de l’album No New World
3. New Order, de l’album No New World
4. Aoi, Koi, Daidaiiro no Hi (青い、濃い、橙色の日), du EP World is Yours
5. 1960 de l’album Awakening:Sleeping
6. New song
7. Delusionalism, du EP Mass of the Fermenting Dregs
8. Slow-motion Replay (スローモーションリプレイ), de l’album No New World
9. ASAHINAGU (あさひなぐ), de l’album No New World
10. World is Yours (ワールドイズユアーズ), du EP World is Yours

Haru Nemuri (春ねむり):

1. Destruction Sisters (ディストラクション・シスターズ), du EP INSAINT
2. Narashite (鳴らして), de l’album 春と修羅 (Haru to Shura)
3. Sekai wo Torikaeshite Okure (せかいをとりかえしておくれ), de l’album 春と修羅 (Haru to Shura)
4. I refuse (わたしは拒絶する), du EP INSAINT
5. Never Let You Go (あなたを離さないで), de l’album Shunka Ryougen (春火燎原)
6. Souzou suru (そうぞうする), de l’album Shunka Ryougen (春火燎原)
7. Who the fuck is burning the trees (森が燃えているのは), de l’album Shunka Ryougen (春火燎原)
8. Pandora (パンドーラー), de l’album Shunka Ryougen (春火燎原)
9. Flee from the Sanctuary (サンクチュアリを飛び出して), du EP INSAINT
10. Kick in the World (déconstructed), de l’album Shunka Ryougen (春火燎原)
11. Rock’n’roll never dies (ロックンロールは死なない) feat.GOMESS, de l’album 春と修羅 (Haru to Shura)
12. Inferno (インフェルノ), du EP INSAINT
13. Shunka Ryougen (春火燎原), de l’album Shunka Ryougen (春火燎原)
14. Ikiru (生きる), de l’album Shunka Ryougen (春火燎原)

Et quelques videos pour conclure:
En complément du billet, je montre ci-dessous trois vidéos que j’ai pris pendant le concert et que j’ai publié sur Twitter, dont je donne déjà les liens dans le billet ci-dessus.


un été sur la péninsule de Kii (6)

Après avoir fait le tour de la péninsule de Kii pendant notre séjour, nous remontons vers Nara pour notre dernière étape. Nous passons une nuit près du grand temple Hōryūji (法隆寺) que nous visiterons le lendemain matin. Nous sommes ici un peu à l’écart du centre de Nara et nous ne visiterons pas le grand parc et le temple Tōdaiji que nous avons déjà vu en 2018. Le quartier autour de la grande enceinte du Hōryuji est résidentiel. Nous le parcourons jusqu’à la tombe, appelée Kofun, de Fujinoki qu’on estime dater de la deuxième partie du sixième siècle ou première partie du septième siècle. On ne peut bien sûr pas rentrer à l’intérieur et qui, de toute façon, voudrait s’y aventurer à une heure tardive. On trouve de nombreux Kofun à Nara, et ils sont très facilement repérables sur une carte Google Maps en raison de leur forme particulière rappelant celle d’une serrure. La forme du Kofun de Fujinoki est par contre différente car il s’agit d’un cercle de 40 à 48 mètres. La nuit tombe rapidement et il est déjà l’heure de dîner. Demain sera une longue journée car il faudra déjà penser au retour vers Tokyo après la visite des temples de Hōryuji.